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Cardinal Sarah : Catéchisme de la vie
spirituelle
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Le 26 juillet 2022 -
(E.S.M.)
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Le cardinal Robert Sarah, préfet de la Congrégation pour le Culte
divin (2014-2021), vient de publier un remarquable Catéchisme de la
vie spirituelle (1) qui, en nos temps de déchristianisation avancée
et d’anémie spirituelle, mérite assurément d’être lu. Entretien de
La Nef
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Benoît XVI et le
cardinal Sarah
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Cardinal Sarah : Catéchisme de la vie spirituelle
« Guider les brebis vers le Ciel »
La Nef – Quel dessein visez-vous en
proposant aux lecteurs un Catéchisme de la vie
spirituelle ?
Cardinal Robert Sarah – La foi chrétienne n’est
complète que lorsqu’elle est vivante. Sans cette vie de l’âme avec
Dieu, nous ne sommes que des chrétiens morts ou agonisants ! La vie
spirituelle est le déploiement vital de notre union à Dieu par la
prière et les sacrements. J’ai voulu rappeler aux chrétiens les
fondamentaux de cette vie avec Dieu à laquelle ils sont appelés.
Sans cette amitié avec Dieu que nous donne la grâce, cette intimité
de l’âme avec son Créateur dans l’amour, nous risquons de devenir
secs et désincarnés ou mous et tièdes. Seule la vie avec Dieu peut
nous préserver de ces excès et nous faire vivre selon la vérité dans
la charité et la douceur. Dans ce livre, j’expose avec simplicité
les lois incontournables de cette vie de l’âme. J’ai voulu l’appeler
« catéchisme » car je ne cherche pas à y faire de grandes
démonstrations, j’ai voulu que cet ouvrage soit accessible à tous.
Avez-vous le sentiment que les
chrétiens aujourd’hui manquent de formation, tout particulièrement
pour le fondement de leur vie spirituelle ?
Oui, la formation est d’une importance capitale. Comment
avancer sur ce chemin si on ne nous a pas enseigné les moyens du
progrès ? Ce serait comme partir en voyage sans carte ni équipement.
À la moindre difficulté, on risque de se laisser décourager, de
perdre l’espérance et de renoncer.
Qui sait aujourd’hui ce qu’est l’état de grâce ? La grâce
sanctifiante ? Pourtant il s’agit de notre être même de chrétien !
Je crois qu’il est nécessaire que les prêtres n’aient pas peur
d’enseigner la vie spirituelle dans les homélies et le catéchisme.
Après tout, n’est-ce pas la seule matière où ils sont irremplaçables
? On saura bien trouver des laïcs compétents pour parler de
politique ou d’écologie mais qui guidera les brebis vers le Ciel
sinon les pasteurs du troupeau ? D’ailleurs Jésus pendant ces années
de vie publique n’a fait qu’enseigner cette vie spirituelle. Le
sermon sur la montagne rapporté aux chapitres 5, 6 et 7 de
l’Évangile de saint Matthieu est le premier « catéchisme de la vie
spirituelle ». Mais cela est vrai de tout l’Évangile. Quand Jésus
reçoit, de nuit, Nicodème (Jn 3,
1-21), il se fait là encore catéchiste de la vie de
l’âme, il explique ce qu’est la vie de la grâce donnée par les
sacrements.
Vous revenez sur la pandémie et jugez
sévèrement les limitations au culte qui ont alors prévalu, notamment
en France : pourquoi une telle limitation du culte est-elle
illégitime quand il s’agit, non pas de persécuter les chrétiens,
mais de protéger la population ?
Une chose m’a frappé : on avait grand soin de la santé des
corps, de l’équilibre financier des entreprises mais personne ne
semblait se soucier du salut des âmes.
Certains prêtres ont été admirables, visitant les malades, assistant
les mourants, portant la communion et prêchant par tous les moyens.
On ne peut pas – on ne peut jamais ! – empêcher un mourant de
recevoir l’assistance d’un prêtre. Il revient aux autorités
politiques de prendre les mesures nécessaires pour empêcher la
propagation des épidémies. Mais cela ne peut se faire au prix du
salut des âmes. À quoi sert-il de sauver les corps si l’on vient à
perdre son âme ? J’ai été très touché de voir de jeunes Français se
mobiliser pour réclamer la messe. Elle est un bien essentiel. On ne
peut en être privé durablement.
Un recul aussi généralisé et rapide de
la foi en Occident est impressionnant : certes, on peut y voir la
conséquence d’un antichristianisme ancien et virulent, mais est-ce
suffisant comme analyse quand on observe que nos sociétés
occidentales ne sont plus chrétiennes bien plus par indifférence des
citoyens aux choses de Dieu que par antichristianisme des
gouvernements ? Finalement, la responsabilité première n’en
revient-elle pas aux chrétiens eux-mêmes ?
La tiédeur des chrétiens est certainement la racine la plus
profonde de l’apostasie que nous vivons. Quand on vit comme si en
pratique Dieu n’existait pas, on finit par ne plus croire du tout en
lui. Bien entendu, la persécution latente par la culture
contemporaine agit comme un accélérateur de ce mouvement. Les âmes
les plus faibles se laissent toucher par ce poison de l’athéisme
pratique véhiculé partout dans la culture ambiante.
Je crois que plus le monde est hostile à Dieu, plus les chrétiens
doivent veiller à leur vie spirituelle. C’est l’unique résistance
possible à l’athéisme liquide qui nous environne et nous asphyxie.
Un chrétien fervent est un vrai résistant à la culture de mort qui
imprègne la société. La vie de l’âme nous préserve de ce poison
diffus.
Dans votre livre, vous citez
fréquemment le concile Vatican II et tout particulièrement
Gaudium et Spes
, constitution conciliaire qui est la « bête noire » de
certains traditionalistes qui y voient la rupture avec le Magistère
antérieur par la manifestation du « culte de l’homme » qui se serait
substitué au « culte de Dieu » : que leur répondez-vous et comment
analysez-vous les passages du pape François qui, dans sa lettre aux
évêques accompagnant Traditionis custodes, blâmait ces
traditionalistes qui, avec la messe de Paul VI, rejettent également
le concile Vatican II vu comme rupture du Magistère ?
Je n’ai à juger personne, ni à donner de leçons à personne !
Mais je sais par ma foi catholique avec certitude et fermeté que
l’Église ne se contredit pas. En conséquence, ceux qui font du
concile Vatican II un point de rupture, soit pour s’en réjouir, soit
pour s’en lamenter, ceux-là se trompent. Ils regardent l’Église
comme une société soumise aux vents des partis et des opinions
(conservateurs, progressistes, traditionalistes…). Tout cela n’est
que la surface des choses. L’Église est la barque du Christ. Elle
nous conduit au Ciel. Elle ne se contredira jamais sur les choses de
la foi. Aussi le concile doit-il être lu à la lumière de tout
l’enseignement traditionnel de l’Église. Il ne fait que mettre en
lumière, sous un jour nouveau, ce que l’Église a toujours cru et
enseigné pour la croissance de la vie de la grâce en nos âmes. Toute
autre lecture du concile, dans un sens ou dans l’autre, serait
dictée par l’idéologie et non par la foi.
Vous déplorez la perte du sens du
péché – y compris chez les catholiques qui se confessent fort peu,
relevez-vous –, au point que des pratiques comme l’avortement ou
l’union de personnes de même sexe ne sont plus perçus comme des
péchés : comment expliquez-vous une telle situation et comment
parler à nos contemporains qui ne comprennent pas la position de
l’Église sur ces questions ?
On croit que l’Église condamne les personnes alors
qu’elle veut les éclairer et les conduire sur la voie du salut. La
vie de l’âme, c’est la vie que Dieu nous donne par la grâce
sanctifiante reçue au baptême. La grâce est cette amitié avec Dieu
qui lui permet de venir résider en nous comme en sa demeure. Il y a
des actes qui, objectivement, ne sont pas compatibles avec cette
amitié divine, ce sont nos péchés graves, nos péchés mortels. Ils
tuent en nous la vie divine, la vie spirituelle. Un péché, pour être
mortel, doit être pleinement délibéré, commis en toute conscience de
la gravité de l’acte et dans une matière grave. Tout cela concerne
le secret des consciences. Mais l’Église, pour éclairer les
consciences, doit rappeler que certains comportements contredisent
objectivement l’alliance d’amitié avec le Créateur. Il revient
ensuite aux prêtres d’accueillir chaque âme avec bonté et
miséricorde dans le sacrement de la confession. Chaque histoire est
unique et le Christ ne nous réduit pas à nos fautes.
La pratique du sacrement de pénitence est une nécessité absolue pour
renouveler en nous la vie de la grâce que le péché obscurcit. Une
âme vivante se confesse avec reconnaissance, une âme tiède délaisse
la confession, elle est alors en danger de mort.
Aujourd’hui, on insiste à juste titre
sur la miséricorde de Dieu contre une vision parfois quelque peu
janséniste de la religion qui sévissait jadis ; mais n’a-t-on pas
été trop loin en sens inverse, en donnant l’impression que le Salut
n’était plus un enjeu majeur – qui prêche encore les fins dernières
dans l’Église aujourd’hui ? –, que le péché ne devait plus être
dénoncé, comme si tout le monde était automatiquement sauvé et
finalement l’enfer vide ? Où se trouve le juste équilibre ?
L’équilibre n’est pas dans la demi-mesure entre le jansénisme
et le laxisme ! Non ! La vie chrétienne est tout entière pénétrée de
miséricorde parce qu’elle a conscience de la tragédie du péché !
La miséricorde, c’est le Cœur de Dieu qui veut me sauver de ma
misère. Ma misère, c’est mon péché qui me coupe de Dieu. Dieu ne
m’offre le salut éternel que par pure miséricorde. Il est temps que
les homélies rappellent l’urgence du salut. Notre vie spirituelle
n’est rien d’autre que le salut éternel commencé et anticipé.
Avons-nous un seul autre but, une seule autre préoccupation sur
terre qui en vaille la peine ? Non, nous sommes-là pour nous laisser
sauver par Dieu, pour recevoir de lui notre éternel salut. On a bien
raison de parler de l’enfer. Car Dieu nous laisse libre de refuser
ce salut. L’enfer, c’est le salut refusé. Le Ciel, c’est le salut
accepté et reçu. Ces réalités devraient être au cœur de toutes nos
prédications. C’est cela que les hommes et les femmes de notre temps
attendent de l’Église. Tout le reste est secondaire. C’est le cœur
de la prédication de Jésus dans l’Évangile.
L’institution du mariage est en péril,
écrivez-vous : comment en est-on arrivé à une situation qui aurait
été jugée impossible il y a encore peu (comme nier la différence
homme-femme) et que peut-on faire pour lutter contre une tendance
qui, au nom de la liberté de chacun, semble aujourd’hui impossible à
renverser ?
Les chrétiens ont par charité l’obligation de témoigner de la
vérité. Comment le plus grand nombre croirait-il si la bonne
nouvelle révélée par Dieu sur le mariage n’est pas proclamée ? Les
chrétiens doivent donc annoncer ce que le Christ nous a enseigné sur
le mariage. Mais ils doivent surtout le vivre ! En voyant un couple
de chrétiens mariés, on doit pouvoir dire non pas : ils sont
parfaits ! Mais plutôt, malgré leurs péchés et leurs limites, ils
s’aiment comme Dieu nous aime. Les couples chrétiens doivent être
des évangélisateurs par l’exemple et le témoignage.
Leur joie doit montrer à tous que la fidélité jusqu’à la mort, loin
d’être un carcan insupportable, est source de liberté. La communion
eucharistique des époux est la source de leur vie spirituelle. Ils
reçoivent ce qu’ils sont appelés à former : le corps du Christ. Nous
avons besoin de familles chrétiennes qui nous prouvent que cette
voie est possible et heureuse. Les lois de l’Église à propos du
divorce, de l’impossibilité de recevoir la communion pour les
divorcés-remariés ne sont pas des lois inventées par la rigidité des
clercs. Elles expriment et protègent la cohérence intime de la vie
spirituelle.
À vue humaine, dans nos pays d’Europe,
l’avenir est peu encourageant pour l’Église et les chrétiens qui
deviennent une petite minorité, pourtant cela ne semble pas être la
préoccupation majeure de nos pasteurs : nous chrétiens, ne
sommes-nous pas trop timides, trop timorés au regard des enjeux
cruciaux qui sont devant nous ?
Nous sommes face à un enjeu immense et décisif. Sommes-nous
capables d’offrir le salut de l’âme à toutes ces populations qui
l’ignorent ? Je rends grâce à Dieu parce que des missionnaires
français sont venus jusqu’à moi, jusqu’en Afrique pour m’offrir ce
bienfait. À mon tour, j’invite tous les chrétiens à se faire
missionnaire.
Les âmes meurent de soif, nous ne pouvons garder les trésors de la
vie spirituelle pour nous.
Propos recueillis par Christophe Geffroy
(1) Cardinal Robert Sarah,
Catéchisme de la vie spirituelle, Fayard, 2022, 336 pages,
22,90 €.
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Vers le conclave. Le manifeste du
cardinal Sarah
Sources : ©
LA NEF n°349 Juillet-Août 2022
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 26.07.2022
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