Messe de la nuit de Noël :
Homélie du pape Benoît XVI |
 |
Le 25 décembre 2010
-
(E.S.M.)
- À 22 heures hier soir, le Saint-Père Benoît XVI a présidé, dans la Basilique Vaticane, la Sainte Messe de la Nuit pour la Solennité du Noël du Seigneur 2010.
|
Le pape Benoît XVI -
Pour agrandir l'image
►
Cliquer
Messe de la nuit de Noël :
Homélie du pape Benoît XVI
Le 25 décembre 2010 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
- À 22 heures hier soir, le Saint-Père Benoît XVI a présidé, dans la
Basilique Vaticane, la Sainte Messe de la Nuit pour la Solennité du Noël du
Seigneur 2010.
Au cours de la célébration eucharistique, après la proclamation du Saint
Évangile, le Pape a prononcé tient l'homélie suivante :
Homélie du Saint-Père
Chers Frères et Sœurs !
« Tu es mon Fils, moi, aujourd’hui, je t’ai engendré » – par ces
paroles du Psaume deuxième, l’Église commence la liturgie de la Nuit Sainte.
Elle sait qu’à à l’origine ces paroles appartenaient au rituel du
couronnement des rois d’Israël. Le roi, qui en soi est un être humain comme
les autres hommes, devient "fils de Dieu" par l’appel et l’installation
dans sa charge : c’est une espèce d’adoption de la part de Dieu, un acte de
décision, par lequel il donne à cet homme une nouvelle existence, l’attire
dans son propre être. De façon encore plus claire, la lecture tirée du
prophète Isaïe, que nous venons d’entendre, présente le même procédé dans
une situation de tourment et de menace pour Israël : "Un enfant nous est né,
un fils nous a été donné ; l’insigne du pouvoir est sur son épaule"
(9, 5).
L’installation dans la charge du roi est comme une nouvelle naissance.
Justement comme nouveau né de la décision personnelle de Dieu, comme un
petit enfant venant de Dieu, le roi constitue une espérance. Sur ses épaules
repose l’avenir. Il est le détenteur de la promesse de paix. Dans la nuit de
Bethléem, cette parole prophétique est devenue réalité d’une manière qui au
temps d’Isaïe aurait encore été inimaginable. Oui, aujourd’hui c’est
vraiment un petit enfant celui sur les épaules duquel est le pouvoir. En lui
apparaît la nouvelle royauté que Dieu établit dans le monde. Ce petit enfant
est vraiment né de Dieu. Il est la Parole éternelle de Dieu, qui unit l’une
à l’autre humanité et divinité. Pour ce petit enfant valent les titres de
dignité que le cantique de couronnement d’Isaïe lui attribue : Merveilleux
Conseiller – Dieu-Fort – Père-à-jamais – Prince de la Paix
(9, 5). Oui, ce roi n’a pas besoin de conseillers appartenant aux
sages du monde. Il porte en lui-même la sagesse et le conseil de Dieu.
Justement dans la faiblesse du fait d’être un petit enfant il est le Dieu
fort et il nous montre ainsi, devant les pouvoirs prétentieux du monde, la
force propre de Dieu.
Les paroles du rituel du couronnement en Israël, en vérité, étaient toujours
seulement des rituels d’espérance, qui prévoyaient de loin un avenir qui
aurait été donné par Dieu. Aucun des rois salués de cette façon ne
correspondait à la sublimité de ces paroles. En eux, toutes les paroles sur
la filiation de Dieu, sur l’installation dans l’héritage des nations, sur la
domination des terres lointaines (Ps 2, 8)
restaient seulement un renvoi à un avenir – presque des panneaux
signalétiques de l’espérance, des indications qui conduisaient vers un
avenir qui en ce moment là était encore inconcevable. Ainsi
l’accomplissement des paroles qui commence dans la nuit de Bethléem est en
même temps immensément plus grand et – du point de vue du monde – plus
humble que ce que les paroles prophétiques laissaient entrevoir. Il est plus
grand, parce que ce petit enfant est vraiment Fils de Dieu, vraiment "
Dieu né de Dieu, lumière née de la lumière, engendré, non pas créé, de même
nature que le Père". L’infinie distance entre Dieu et l’homme est
dépassée. Dieu ne s’est pas seulement penché vers en bas, comme disent les
Psaumes ; il est vraiment "descendu", entré dans le monde, devenu l’un de
nous pour nous attirer tous à lui. Ce petit enfant est vraiment l’Emmanuel,
"le Dieu-avec-nous". Son royaume s’étend vraiment jusqu’aux confins
de la terre. Dans l’étendue universelle de la sainte Eucharistie, il a
vraiment érigé des îlots de paix. Partout où elle est célébrée, on a un îlot
de paix, de cette paix qui est propre à Dieu. Ce petit enfant a allumé parmi
les hommes la lumière de la bonté et leur a donné la force de résister à la
tyrannie du pouvoir. En chaque génération il construit son royaume de
l’intérieur, à partir du cœur. Mais il est vrai aussi que "le bâton du
tortionnaire" n’a pas été brisé. Aujourd’hui aussi marchent, bruyantes,
les chaussures des soldats et toujours encore et toujours de nouveau il y a
le "manteau couvert de sang" (Is 9, 3s).
Ainsi la joie pour la proximité de Dieu fait partie de cette nuit. Nous
rendons grâce parce que Dieu, comme un petit enfant, se donne entre nos
mains, il mendie, pour ainsi dire, notre amour, il répand sa paix dans notre
cœur. Cette joie, toutefois, est aussi une prière : Seigneur, réalise
totalement ta promesse. Brise les bâtons des tortionnaires. Brûle les
chaussures bruyantes. Fais que finissent le temps des manteaux couverts de
sang. Réalise la promesse : "La paix sera sans fin"
(Is 9, 6). Nous te rendons grâce pour ta bonté, mais nous te
prions encore : montre ta puissance. Établis dans le monde la domination de
ta vérité, de ton amour – le « royaume de la justice, de l’amour et de la
paix ».
"Marie mit au monde son fils premier-né" (Lc 2, 7).
Avec cette phrase, saint Luc raconte, de manière absolument privée de
pathos, le grand événement que les paroles prophétiques dans l’histoire
d’Israël avaient entrevu par avance. Luc qualifie le petit enfant de
"premier-né". Dans le langage qui s’est formé dans la Sainte Écriture de
l’Ancienne Alliance, "premier-né" ne signifie pas le premier d’une série
d’autres enfants. La parole "premier-né" est un titre d’honneur,
indépendamment de la question de savoir si ensuite suivent d’autres frères
et sœurs ou non. Ainsi dans le Livre de l’Exode (4, 22),
Israël est appelé par Dieu "mon fils premier-né", et ainsi s’exprime son
élection, sa dignité unique, l’amour particulier de Dieu Père. L’Église
naissante savait qu’en Jésus cette parole avait reçu une nouvelle profondeur
; qu’en lui sont résumées les promesses faites à Israël. Ainsi la Lettre aux
Hébreux appelle Jésus "le premier-né", simplement pour le qualifier,
après les préparations de l’Ancien Testament, comme le Fils que Dieu envoie
dans le monde (cf. He 1, 5-7). Le premier-né
appartient de façon particulière à Dieu, et pour cela – comme dans de
nombreuses religions – il devait être de façon particulière remis à Dieu et
être racheté par un sacrifice substitutif, comme saint Luc le raconte dans
l’épisode de la présentation de Jésus au temple. Le premier-né appartient à
Dieu de façon particulière, il est, pour ainsi dire, destiné au sacrifice.
Dans le sacrifice de Jésus sur la croix, la destination du premier-né
s’accomplit de façon unique. En lui-même, il offre l’humanité à Dieu et unit
homme et Dieu de manière telle que Dieu soit tout en tous. Saint Paul, dans
les Lettres aux Colossiens et aux Éphésiens, a développé et approfondi
l’idée de Jésus comme premier-né : Jésus, nous disent ces Lettres, est le
Premier-né de la création – le véritable archétype de l’homme selon lequel
Dieu a formé la créature homme. L’homme peut être image de Dieu parce que
Jésus est Dieu et Homme, la véritable image de Dieu et de l’homme. Il est le
premier-né d’entre les morts, nous disent en outre ces Lettres. Dans la
Résurrection, il a abattu le mur de la mort pour nous tous. Il a ouvert à
l’homme la dimension de la vie éternelle dans la communion avec Dieu. Enfin,
il nous est dit : il est le premier-né de nombreux frères. Oui, aujourd’hui
il est cependant le premier d’une série de frères, le premier, c’est-à-dire,
qui inaugure pour nous l’être en communion avec Dieu. Il crée la véritable
fraternité – non la fraternité, défigurée par le péché, de Caïn et Abel, de
Romulus et Remus, mais la fraternité nouvelle dans laquelle nous sommes la
famille même de Dieu. Cette nouvelle famille de Dieu commence au moment où
Marie enveloppe le "premier-né" dans les langes et le dépose dans la
mangeoire. Prions-le : Seigneur Jésus, toi qui as voulu naître comme premier
de nombreux frères, donne-nous la vraie fraternité. Aide-nous à devenir
semblables à toi. Aide-nous à reconnaître dans l’autre qui a besoin de moi,
en ceux qui souffrent ou qui sont abandonnés, en tous les hommes, ton
visage, et à vivre avec toi comme des frères et des sœurs pour devenir une
famille, ta famille.
L’Évangile de Noël nous raconte, à la fin, qu’une multitude d’anges de la
troupe céleste louait Dieu et disait : "Gloire à Dieu au plus haut des
cieux, et paix sur la terre aux hommes qu’il aime" (Lc
2, 14). Dans le chant du Gloria, l’Église a amplifié cette
louange, que les anges ont entonnée devant l’événement de la Nuit Sainte, en
en faisant une hymne de joie sur la gloire de Dieu. "Nous te rendons grâce
pour ton immense gloire". Nous te rendons grâce pour la beauté, pour la
grandeur, pour ta bonté, qui en cette nuit nous deviennent visibles.
L’apparition de la beauté, du beau, nous rend joyeux sans que nous devions
nous interroger sur son utilité. La gloire de Dieu, d’où provient toute
beauté, fait exploser en nous l’étonnement et la joie. Celui qui entrevoit
Dieu éprouve de la joie, et en cette nuit nous voyons quelque chose de sa
lumière. Mais le message des anges dans la Nuit sainte parle aussi des
hommes : "Paix aux hommes qu’il aime". La traduction latine de cette
parole, que nous utilisons dans la liturgie et qui remonte à Jérôme, résonne
autrement : "Paix aux hommes de bonne volonté". L’expression "les
hommes de bonne volonté" dans les dernières décennies est entrée de
façon particulière dans le vocabulaire de l’Église. Mais quelle traduction
est juste ? Nous devons lire les deux textes ensemble ; nous comprenons
seulement ainsi la parole des anges de façon juste. Serait erronée une
interprétation qui reconnaîtrait seulement l’œuvre exclusive de Dieu, comme
s’il n’avait pas appelé l’homme à une réponse d’amour qui soit libre. Serait
aussi erronée, cependant, une interprétation moralisante, selon laquelle
l’homme avec sa bonne volonté pourrait, pour ainsi dire, se racheter
lui-même. Les deux choses vont ensemble : grâce et liberté ; l’amour de
Dieu, qui nous précède et sans lequel nous ne pourrions pas l’aimer, et
notre réponse, qu’il attend et pour laquelle, dans la naissance de son Fils,
il nous prie même. L’enchevêtrement de grâce et de liberté, l’enchevêtrement
d’appel et de réponse, nous ne pouvons pas le scinder en parties séparées
l’une de l’autre. Les deux sont indissolublement tressés entre eux. Ainsi
cette parole est en même temps promesse et appel. Dieu nous a précédés par
le don de son Fils. Toujours de nouveau Dieu nous précède de façon
inattendue. Il ne cesse pas de nous chercher, de nous relever chaque fois
que nous en avons besoin. Il n’abandonne pas la brebis égarée dans le désert
où elle s’est perdue. Dieu ne se laisse pas troubler par notre péché. Il
recommence toujours à nouveau avec nous. Toutefois il attend en retour notre
amour. Il nous aime pour que nous puissions devenir des personnes qui aiment
avec lui et ainsi il peut y avoir la paix sur la terre.
Luc n’a pas dit que les anges ont chanté. Il écrit très sobrement : la
troupe céleste louait Dieu et disait : "Gloire à Dieu au plus haut des
cieux…" (Lc 2, 13s). Mais depuis toujours
les hommes savaient que le parler des anges est différent de celui des
hommes ; que justement en cette nuit du joyeux message, il a été un chant
dans lequel la gloire sublime de Dieu a brillé. Ainsi ce chant des anges a
été perçu depuis le commencement comme une musique provenant de Dieu, et
bien plus, comme une invitation à s’unir dans le chant, dans la joie du cœur
pour le fait d’être aimés de Dieu. Cantare amantis est, dit Saint Augustin :
chanter est le propre de celui qui aime. Ainsi, au long des siècles, le
chant des anges est devenu toujours de nouveau un chant d’amour et de joie,
un chant de ceux qui aiment. En ce moment, nous nous associons pleins de
gratitude à ce chant de tous les siècles, qui unit ciel et terre, anges et
hommes. Oui, nous te rendons grâce pour ton immense gloire. Nous te
remercions pour ton amour. Fais que nous devenions toujours plus des
personnes qui aiment avec toi et donc des personnes de paix. Amen.
Texte original du
discours du Saint Père
►
Italien
Regarder
la vidéo
Messe de la nuit de Noël

Sources : www.vatican.va
-
E.S.M.
© Copyright 2010 - Libreria Editrice Vaticana
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 25.12.2010 -
T/Benoît XVI
|