Parler du cœur de Jésus, pour une recherche
renouvelée |
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Le 23 août 2008 -
(E.S.M.) -
Le pape Jean-Paul II commence sa lettre apostolique Novo Millennio
ineunte par une méditation qui prend pour titre : « Un visage à
contempler ». « Les hommes de notre temps demandent aux croyants non
seulement de leur 'parler' du Christ, mais en un sens de le leur faire
'voir' » note le Pape, qui appelle à repartir du Christ.
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Le coeur
de Jésus, foyer brûlant d'amour -
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Parler du cœur de Jésus, pour une recherche renouvelée
Père Gérard LE STANG,
PGJ - Diocèse de Quimper
Le pape Jean-Paul II commence sa lettre apostolique
Novo
Millennio ineunte
par une méditation qui prend pour titre : « Un visage à contempler ». « Les
hommes de notre temps demandent aux croyants non seulement de leur 'parler'
du Christ, mais en un sens de le leur faire 'voir' » note le Pape, qui
appelle à repartir du Christ.
Lorsque qu'on veut aller au cœur de la foi et repartir du mystère
christologique, est-ce du Cœur de Jésus ou de son visage dont il doit
d'abord être question ? Opposer l'un à l'autre serait ridicule, bien sûr. Au
contraire, n'y a-t-il pas intérêt à croiser ces deux anthropologies, l'une,
celle du cœur étant d'avantage portée sur l'intériorité, l'intimité et le
sentiment, l'autre, celle du visage étant davantage ouverte à la
vulnérabilité, l'exposition de soi-même aux autres, à une extériorité par
laquelle on doit rien retenir à soi, deux voies pour revenir au Christ et en
repartir.
Être tourné vers le Cœur de Jésus, c'est équivalemment se tourner vers son
visage. Aller au cœur de la foi, ce n'est pas que se retirer au désert pour
aller à l'intime du cœur ; c'est aussi se porter à la rencontre d'autrui qui
se donne dans la radicale altérité de son visage. Il se pourrait bien que
l'intime se livre dans ce qu'il y a de plus immédiatement livré et donné
dans la vie, à savoir le visage de l'autre.
Le visage, c'est l'apparaître pur de la vie. Parler d'un visage, c'est
parler d'une personne, non pas de manière abstraite ou conceptuelle, mais en
tant que cette personne se donne à voir comme elle est. Parler de quelqu'un
à partir de son visage, c'est une manière d'exprimer à la fois son mystère
personnel unique, et sa présence inaliénable, parce que visible, au milieu
de la communauté humaine. Visibilité et mystère intime s'expriment dans le
visage. Tout visage humain interdit de conclure : 'tel n'est qu'un homme',
comme
on dirait 'ce n'est qu'une plante'. Tout visage d'homme révèle une
transcendance qui plonge au cœur de Dieu. Le visage de référence, pour la
foi, est celui d'un homme, Jésus de Nazareth. En son visage crucifié, nous
contemplons les traits de Dieu. Sur le visage du Christ (en particulier du
crucifié), est donné le visage même de Dieu. Qui le voit, voit le Père. Ce
visage est auto communication, l'Être même de Dieu, exposé au
monde.
Pour une spiritualité de l'Incarnation, le visage, par sa vulnérabilité
même, par le fait qu'il se risque à se donner à voir, expose le fond du Cœur
de Dieu, sa transcendance et ce qu'il faut entendre par « toute-puissance de
l'amour ». Après conflits et débats serrés, le second Concile de Nicée (787)
a pu conclure que le visage du Christ pouvait être représenté, l'Icône
renvoyant au prototype. Grandeur et fragilité de la foi chrétienne : le cœur
de sa foi, la puissance infinie de l'amour divin, se livre et s'expose dans
la visibilité et la vulnérabilité d'un visage. Quelle conséquence pour une
spiritualité du Cœur du Christ ?
Sans le visage, le cœur pourrait être objectivé d'une manière qui n'évoque
plus grand chose, à la manière de ces Sacré-Cœur, qui servent davantage
d'étendard que de source pour la vie chrétienne. Le visage exposé de Jésus
et l'ouverture de son cœur, son côté transpercé, manifestent ensemble que
c'est tout son être personnel qui est donné. Dans une approche symbolique,
cœur et visage, expriment ainsi l'unité personnelle de l'âme, du corps et de
l'esprit, invisible et indivisible. Le visage est épiphanie du Cœur de Dieu,
manifestation qui appelle réponse de foi. Le cœur est lieu de communication
de l'Esprit de Dieu, Don et Union qui fait jaillir d'amour. Le visage
exprime la distinction engendrée par la foi : « Tu es là, je crois en Toi ».
Par le lien du cœur prend corps l'amour qui unit : « Je t'aime. Nous sommes
Un ». L'amour unit, la foi distingue. Ce sont deux versants complémentaires
d'une même expérience.
Le cœur ouvert communique l'Amour, il signifie le Don de l'intime de l'être.
Dans la Tradition chrétienne, le Don par excellence, celui qui est aussi
nommé Amour, c'est l'Esprit Saint. C'est l'Esprit Saint qui est communiqué
par le Cœur ouvert. C'est lui qui permet dès lors de confesser le Christ
dans la foi et de reconnaître en son visage l'absolu de la
révélation de l'Amour de Dieu : Vraiment cet homme était le Fils de Dieu.
L'ouverture du cœur provoque un cœur à cœur qui est communion immédiate avec
le Christ qui, par son Esprit, unit à Lui. Le visage, par contre, fait
naître un face-à-face, la rencontre d'une altérité qui éveille celui qui se
convertit à sa vocation propre, dans la singularité de son histoire. Cœur à
Cœur et face-à-face, communion et différence, se nourrissent l'un de
l'autre, tout en révélant au disciple et à sa communauté, la seule voie qui
s'ouvre à eux : édifier une communauté dans laquelle l'union fondamentale
dans la charité permet à chacun de trouver sa place propre, une communauté
dans laquelle le cœur à cœur fondamental dans la fraternité et l'amitié
permet la fécondité des face-à-face, dans la confrontation et l'accueil de
la différence de l'autre.
En quoi les réflexions apportées ci-dessus, peuvent-elles nous aider à « Repartir du Christ », c'est-à-dire à revenir au Cœur de
Dieu pour trouver en lui notre raison d'être en ce monde, les témoins et
acteurs d'une parole exigeante. Nul ne peut se dispenser du face-à-face avec
le Christ. Que cette rencontre ait lieu par l'écoute de la Parole ou la
célébration ecclésiale des sacrements, par le service du pauvre ou
l'hospitalité fraternelle, par la prière dans le secret ou la résonance de
l'ascèse, elle est expérience de grâce sans laquelle aucun témoignage n'est
possible.
Or le croisement qui vient d'être fait entre cœur et visage nous invite à
faire une expérience du Christ de manière beaucoup plus perceptible qu'on ne
le pense. Vivre en ce monde, le cœur consacré au Seigneur, qui est là
'dans le secret',
c'est travailler sans cesse, à reconnaître, dans la plus immédiate et proche
des présences humaines, en tout visage, en particulier les plus humbles ou
les plus humiliées, le don exposé du mystère le plus profond de l'homme, son
cœur, mais aussi en lui, l'apparition même du mystère la vie dans son
essence même, dont le Christ est l'incarnation même. Le Cœur de Dieu est
livré sur la croix et continue d'être exposé, à nu, là où l'homme se révèle
comme le plus authentiquement humain, dans la brisure du cœur, la blessure du corps, ou la défiguration des visages. C'est là que son cœur est
livré, transpercé... de manière tout à la fois enfouie et complètement
visible. Le propre de la consécration séculière au sein de la Famille, c'est
de vivre d'un côté l'amour de Dieu dans le secret de la prière et l'amitié
de la vie de Famille, dans le cœur à cœur avec le Christ et l'expérience
d'une intense communion. C'est d'autre part, vivre les retrouvailles avec le
Christ dans la chair du monde, en ce qu'il a de plus profane et parfois,
dans ce qu'il a de plus éloigné, à vues humaines, du mystère de la foi. Or
l'un ne s'oppose pas à l'autre, mais appelle l'autre. Le cœur à cœur
invisible, la contemplation silencieuse et aimante du cœur livré de Jésus,
de son visage offert, nous conduit à voir Jésus en tout visage offert et
ouvert. Le Christ est à la fois complètement caché, et ne livre le secret de
son cœur qu'à celui qui descend en lui-même, dans la nuit de la foi et la
pureté de l'amour. Il est en même temps totalement livré et visible, comme
mystère même de Vie, dans la vulnérabilité de la chair humaine et du visage
de tout homme, cœur transpercé vulnérable et infiniment puissant à la fois.
Dans l'Incarnation et le mystère pascal de Jésus, se livre la Vérité du
monde : Christ est au cœur du monde, il est le cœur du monde. La chair du
monde, que nous avons tant de mal à accueillir dans sa réalité, cette chair
du monde devient chair de Dieu, en Jésus. C'est dans l'Esprit Saint qu'une
telle reconnaissance est possible. Elle suscite des croyants qui se
reconnaissent entre eux. Elle ouvre sur une parole qui va au cœur de la foi.
Elle forme des cœurs capables de se donner par amour dans les plus profanes
et parfois les plus obscures des réalités humaines. Secret du cœur, visage
offert. Dieu caché et visible tout à la fois, comme le Bien-Aimé du
Cantique, tel est le Christ livré en ce monde. Nous croyons sa rencontre
possible, à l'intime du cœur à cœur, autant que dans les face-à-face de la
vie, fussent-ils rudes ou décapants.
Liens : La communication du Recteur de l’Université
pontificale du Latran à la dixième édition du Congrès international sur le
Visage du Christ "Pardon et communion chez Jean Paul II, à lire sur le site
de 30Jours
Sources : Cor Unum
-
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 23.08.2008 -
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