Benoît XVI consacre sa catéchèse à
Romain le Mélode |
 |
Cité du Vatican, le 22 mai 2008 -
(E.S.M.)
- Devant plus de
15.000 fidèles, répartis entre la Basilique Saint Pierre et la Salle Paul
VI, le Pape Benoît XVI a expliqué que les 89 hymnes liturgiques de Romain
parvenus jusqu’à nous, nous permettent d’apprécier la richesse des
contenus théologiques, liturgiques et dévotionnels de la culture
chrétienne de cette époque.
|
Le pape Benoît XVI
Benoît XVI consacre sa catéchèse à Romain le Mélode
La foi est amour, elle est source de poésie et de musique
Si la foi est vivante, la culture chrétienne vieille de tant de siècles
reste vivante
La foi est amour, c’est pourquoi elle est source de poésie et de musique…la
foi est joie, c’est pourquoi elle est source de beauté. C’est au théologien,
poète et compositeur de l’Eglise d’Orient du 7ème siècle, Romain le Mélode,
que Benoît XVI a consacré sa catéchèse à l’audience générale.
Devant plus de
15.000 fidèles, répartis entre la Basilique Saint Pierre et la Salle Paul
VI, le Pape Benoît XVI a expliqué que les 89 hymnes liturgiques de Romain parvenus
jusqu’à nous, nous permettent d’apprécier la richesse des contenus
théologiques, liturgiques et dévotionnels de la culture chrétienne de cette
époque. Dans un langage simple et accessible à ceux qui l’écoutaient, Romain
le Mélode, originaire de Syrie, mais prédicateur à Constantinople, voulait
avant tout faire comprendre le dessein de salut de Dieu par le Christ.
L’humanité palpitante, la foi ardente, l’humilité profonde qui imprègnent
ses chants, nous rappellent la richesse de la culture chrétienne née du
contact entre le cœur et la vérité. Si la foi est vivante, a conclu Benoît
XVI, cette culture vieille de tant de siècles reste vivante. Et la foi
n’exclut pas la créativité, l’innovation, le chant nouveau et la vitalité
culturelle. (www.h2onews.org)
Texte intégral de la catéchèse du Saint-Père
Chers frères et sœurs,
Dans la série des catéchèses sur les Pères de l'Eglise, je voudrais
aujourd'hui parler d'une figure peu connue : Romanos le Mélode, né vers 490
à Emesa (aujourd'hui Homs) en Syrie.
Théologien, poète et compositeur, il appartient au grand groupe des
théologiens qui ont transformé la théologie en poésie. Nous pensons à son
compatriote saint Ephrem de Syrie, qui vécut deux cents ans avant lui. Mais
nous pensons également à des théologiens de l'Occident, comme saint
Ambroise, dont les hymnes font encore aujourd'hui partie de notre liturgie
et touchent également notre cœur ; ou à un théologien, à un penseur d'une
grande vigueur, comme saint Thomas, qui nous a donné les hymnes de la fête
du Corpus Domini de demain ; nous pensons à saint Jean de la Croix et à tant
d'autres. La foi est amour et c'est pourquoi elle crée de la poésie et elle
crée de la musique. La foi est joie, c'est pourquoi elle crée de la beauté.
Ainsi, Romanos le Mélode est l'un de ceux-ci, un poète et compositeur
théologien. Ayant appris les premiers éléments de la culture grecque et
syriaque dans sa ville natale, il se transféra à Berito (Beyrouth), où il
perfectionna son instruction classique et ses connaissances rhétoriques.
Ordonné diacre permanent (v. 515), il y fut
prédicateur pendant trois ans. Puis il se transféra à Constantinople vers la
fin du règne d'Anasthase Ier (v. 518), et
s'établit dans le monastère près de l'église de la Théotókos, Mère de Dieu.
C'est là qu'eut lieu l'épisode clef de sa vie : le Synaxaire nous informe de
l'apparition en rêve de la Mère de Dieu et du don du charisme poétique. En
effet, Marie lui intima d'avaler une feuille roulée. Le lendemain matin -
c'était la fête de la Nativité du Seigneur - Romanos alla déclamer à l'ambon
: « Aujourd'hui la Vierge fait naître le Transcendant »
(Hymne « Sur la Nativité » I. Préambule). Il devint ainsi
prédicateur et chantre jusqu'à sa mort (après 555).
Romanos demeure dans l'histoire comme l'un des auteurs les plus
représentatifs d'hymnes liturgiques. L'homélie était alors, pour les
fidèles, l'occasion pratiquement unique d'instruction catéchétique. Romanos
apparaît ainsi comme le témoin éminent du sentiment religieux de son époque,
mais également d'un style vivace et original de catéchèse. A travers ses
compositions, nous pouvons nous rendre compte de la créativité de cette
forme de catéchèse, de la créativité de la pensée théologique, de
l'esthétique et de l'hymnographie sainte de ce temps. Le lieu où Romanos
prêchait était un sanctuaire de la périphérie de Constantinople : il montait
à l'ambon placé au centre de l'église et s'adressait à la communauté en
ayant recours à une mise en scène demandant de grands moyens : il utilisait
des représentations murales ou des icônes disposées sur l'ambon et il avait
aussi recours au dialogue. Ses homélies étaient des homélies métriques
chantées, appelées « contacio » (kontakia). Le
terme « kontákion », « petite verge », paraît renvoyer au bâtonnet
autour duquel on enroulait le rouleau d'un manuscrit liturgique ou d'un
autre type. Les kontákia qui nous sont parvenus sous le nom de Romanos sont
au nombre de quatre-vingt neuf, mais la tradition lui en attribue mille.
Chez Romanos, chaque kontákion est composé de strophes, généralement
de dix-huit à vingt-quatre, avec un nombre de syllabes égales, structurées
sur le modèle de la première strophe (irmo) ;
les accents rythmiques des versets de toutes les strophes se modèlent sur
ceux de l'irmo. Chaque strophe se conclut par un refrain (efimnio)
généralement identique, pour créer l'unité poétique. En outre, les initiales
de chaque strophe indiquent le nom de l'auteur (acrostico),
souvent précédé par l'adjectif « humble ». Une prière se référant aux faits
célébrés ou évoqués conclut l'hymne. Une fois terminée la lecture biblique,
Romanos chantait le Préambule, généralement sous forme de prière ou de
supplique. Il annonçait ainsi le thème de l'homélie et expliquait le refrain
à répéter en chœur à la fin de chaque strophe, qu'il déclamait de manière
cadencée à haute voix.
Un exemple significatif nous est offert par le kontakion pour le
Vendredi de la Passion : c'est un dialogue dramatique entre Marie et son
Fils, qui se déroule sur le chemin de croix. Marie dit : « Où vas-tu, mon
fils ? Pourquoi accomplis-tu si vite le cours de ta vie ? / Jamais je
n'aurais cru, mon fils, te voir dans cet état, / et je n'aurais jamais
imaginé que les impies seraient arrivés à ce point de fureur / levant les
mains sur toi contre toute justice ». Jésus répond : « Pourquoi pleures-tu,
ma mère ? [...]. Je ne devrais pas souffrir ? Je ne devrais pas mourir ? /
Comment pourrais-je donc sauver Adam ? ». Le fils de Marie console sa mère,
mais il la rappelle à son rôle dans l'histoire du salut : « Dépose, donc,
mère, dépose ta douleur : / les gémissements ne te conviennent pas, car tu
fus appelée "pleine de grâce" » (Marie au pied de la
croix, 1-2 ; 4-5). Ensuite, dans l'hymne sur le sacrifice
d'Abraham, Sara se réserve la décision sur la vie d'Isaac. Abraham dit : «
Quand Sara écoutera, mon Seigneur, toutes tes paroles, / ayant connu ta
volonté elle me dira : / - Si celui qui nous l'a donné le reprend, pourquoi
nous l'a-t-il donné ? [...] - Toi, ô vieillard, mon fils, laisse-le moi, /
et quand celui qui t'a appelé le voudra, il devra me le dire »
(Le sacrifice d'Abraham, 7).
Romanos adopte non pas le grec byzantin solennel de la cour, mais un grec
simple proche du langage du peuple. Je voudrais ici citer un exemple de sa
manière vivace et très personnelle de parler du Seigneur Jésus : il
l'appelle « source qui ne brûle pas et lumière contre les ténèbres » et dit
: « Je brûle de te tenir dans la main comme une lampe ; / en effet, celui
qui porte une lampe parmi les hommes est illuminé sans brûler. /
Illumine-moi donc, Toi qui es la Lampe inextinguible » (La Présentation ou
Fête de la rencontre, 8). La force de conviction de ses prédications était
fondée sur la grande cohérence entre ses paroles et sa vie. Dans une prière,
il dit : « Rends claire ma langue, mon Sauveur, ouvre ma bouche / et, après
l'avoir remplie, transperce mon cœur, pour que mon action / soit cohérente
avec mes paroles » (Mission des Apôtres, n. 2).
Examinons à présent certains de ses thèmes principaux. Un thème fondamental
de sa prédication est l'unité de l'action de Dieu dans l'histoire, l'unité
entre création et histoire du salut, l'unité entre Ancien et Nouveau
Testament. Un autre thème important est la pneumatologie, c'est-à-dire la
doctrine sur l'Esprit Saint. En la fête de la Pentecôte, il souligne la
continuité entre le Christ monté au ciel et les apôtres, c'est-à-dire
l'Eglise, et il en exalte l'action missionnaire dans le monde : « [...] avec
la vertu divine ils ont conquis tous les hommes ; / ils ont pris la croix du
Christ comme une plume, / ils ont utilisé les paroles comme des filets et
avec ceux-ci ils ont pêché le monde, / ils ont eu le Verbe pour hameçon
pointu, / un appât est devenu pour eux / la chair du Souverain de l'univers
» (La Pentecôte 2 ; 18).
Un autre thème central est naturellement la christologie. Il n'entre pas
dans le problème des concepts difficiles de la théologie, tant débattu à
cette époque et qui ont aussi tant déchiré l'unité non seulement entre les
théologiens, mais également entre les chrétiens dans l'Eglise. Il prêche une
christologie simple mais fondamentale, la christologie des grands Conciles.
Mais surtout il est proche de la piété populaire - du reste les concepts des
Conciles sont nés de la piété populaire et de la connaissance du cœur
chrétien - et ainsi Romanos souligne que le Christ est vrai homme et vrai
Dieu, et en étant vrai Homme-Dieu il est une seule personne, la synthèse
entre création et Créateur : dans ses paroles humaines nous entendons parler
le Verbe de Dieu lui-même. « Il était homme - dit-il - le Christ, / mais il
n'est cependant pas divisé en deux : il est Un, fils d'un Père qui est Un
seulement » (La Passion 19). Quant à la
mariologie, reconnaissant à la Vierge pour le don du charisme poétique,
Romanos la rappelle à la fin de presque tous les hymnes et lui consacre ses
kontáki les plus beaux : Nativité, Annonciation, Maternité divine, Nouvelle
Eve.
Enfin, les enseignements moraux se rapportent au jugement final (Les dix
vierges [II]). Il nous conduit vers ce moment de la vérité de notre vie, de
la confrontation avec le Juge juste et par conséquent il exhorte à la
conversion dans la pénitence et dans le jeûne. De manière concrète, le
chrétien doit pratiquer la charité, l'aumône. Il accentue le primat de la
charité sur la continence dans deux hymnes, les Noces de Cana et les Dix
vierges. La charité est la plus grande des vertus : « [...] dix vierges
possédaient la vertu de la virginité intacte, / mais pour cinq d'entre elles
le dur exercice fut sans fruit. / Les autres brillèrent par les lampes de
l'amour pour l'humanité, / c'est pourquoi l'époux les invita »
(Les dix Vierges, 1).
Une humanité palpitante, l'ardeur de foi, une profonde humilité imprègnent
les chants de Romanos le Mélode. Ce grand poète et compositeur nous rappelle
tout le trésor de la culture chrétienne, née de la foi, née du cœur qui a
rencontré le Christ, le Fils de Dieu. De ce contact du cœur avec la Vérité
qui est Amour naît la culture, est née toute la grande culture chrétienne.
Et si la foi reste vivante, cet héritage culturel aussi ne devient pas chose
morte, mais reste vivant et présent. Les icônes parlent encore aujourd'hui
au cœur des croyants, ce ne sont pas des choses du passé. Les cathédrales ne
sont pas des monuments médiévaux, mais des maisons de vie, où nous nous
sentons « à la maison » : nous rencontrons Dieu et nous nous rencontrons les
uns les autres. La grande musique non plus - le chant grégorien ou Bach ou
Mozart - n'est pas une chose du passé, mais elle vit de la vitalité de la
liturgie et de notre foi. Si la foi est vivante, la culture chrétienne ne
devient pas « passé », mais reste vivante et présente. Et si la foi est
vivante, aujourd'hui aussi nous pouvons répondre à l'impératif qui se répète
toujours à nouveau dans les Psaumes : « Chantez au Seigneur un chant
nouveau ». Créativité, innovation, chant nouveau, culture nouvelle et
présence de tout l'héritage culturel dans la vitalité de la foi ne
s'excluent pas, mais sont une unique réalité ; ils sont la présence de la
beauté de Dieu et de la joie d'être ses fils.
Parmi les pèlerins qui assistaient à l'Audience générale du 21 mai 2008 dans
la salle Paul VI, se trouvaient les groupes suivants auxquels le Saint-Père
s'est adressé en français:
De divers pays: Délégations d'officiers supérieurs réunis à
l'Institut supérieur d'état major interforces, de Rome; entrepreneurs du
secteur zootechnique participant à un congrès international; religieuses
participant au cours organisé par la Faculté pontificale des sciences de
l'éducation Auxilium, de Rome; sœurs missionnaires de la "Consolata";
membres du Commandement des forces alliées, de Naples, avec leurs familles;
sœurs de la charité dominicaine de la présentation.
De France: Ecole internationale d'évangélisation "Jeunesse Lumière";
Ecole de la foi, de Coutances; Lycée de filles du foyer de charité, de
Châteauneuf de Galaure; groupe de pèlerins de Nice.
Texte original du
discours du Saint Père
►UDIENZA
GENERALE
►
Le pape Benoît XVI s'adresse aux pèlerins francophones
Regarder
la vidéo en
Italien ou en
Français
Sources : www.vatican.va -
E.S.M.
(©L'Osservatore Romano - 27 mai 2008)
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 22.05.2008 -
T/Catéchèse |