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Benoît XVI a présidé l’office du Vendredi Saint dans la basilique
Saint-Pierre
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Le 22 avril 2011 -
(E.S.M.)
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Entouré des cardinaux Sandri et Burke, Benoît XVI a présidé
l’office du Vendredi Saint dans la basilique Saint-Pierre,
l’adoration de la Croix et les gestes traditionnels de pénitence.
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Le Père Raniero
Cantalamessa, prédicateur de la Maison pontificale
Benoît XVI a présidé l’office du Vendredi Saint dans la basilique
Saint-Pierre
Le 22 avril 2011 - E.
S. M. - Entouré des cardinaux Sandri et Burke, Benoît XVI a
présidé l’office du Vendredi Saint dans la basilique Saint-Pierre,
l’adoration de la Croix et les gestes traditionnels de pénitence. Une
célébration marquée par un profond recueillement et des temps de silence.
Comme chaque année, c’est le prédicateur de la Maison pontificale, qui a
tenu l’homélie de cette célébration de la parole. Le Père Raniero
Cantalamessa a cité de nombreux exemples de souffrance humaine, le récent
séisme au Japon, les persécutions contre les chrétiens, et il a rappelé les
réponses qu’apporte la foi chrétienne. Les séismes, les cyclones et autres
catastrophes qui frappent les coupables comme les innocents, ne sont jamais
un châtiment de Dieu – a-t-il souligné - mais ils peuvent constituer un
avertissement : à ne pas nous bercer d’illusions en pensant que la science
et la technique suffiront à nous sauver.
Nous publions ci-dessous le texte intégral de l'homélie que le P. Raniero
Cantalamessa, OFMCap., a prononcée durant l'Office de la Passion présidé par
le pape Benoît XVI ce vendredi saint, en fin d'après-midi, en la basilique
Saint-Pierre.
P. Raniero Cantalamessa, ofmcap.
« VRAIMENT, CELUI-CI ETAIT FILS DE DIEU ! »
Prédication du Vendredi Saint 2011 en la basilique Saint-Pierre
Dans sa Passion - écrit saint Paul à Timothée - le Christ Jésus « a rendu
son beau témoignage » (1 Tm 6, 13). On se demande : témoignage de quoi ? Pas
de la vérité de sa vie et de sa cause. Beaucoup sont morts, et meurent
encore aujourd'hui, pour une mauvaise cause, pensant qu'elle est juste. La
résurrection elle, oui, rend témoignage de la vérité du Christ : « Dieu a
offert à tous une garantie sur Jésus, en le ressuscitant des morts », dira
l'apôtre à l'Aréopage d'Athènes (Ac 17, 31).
La mort ne témoigne pas de la vérité, mais de l'amour du Christ. Ou plutôt,
elle constitue la preuve suprême de cet amour : « Nul n'a plus grand
amour que celui-ci : donner sa vie pour ses amis » (Jn 15, 13). On
pourrait objecter qu'il existe un amour plus grand que donner sa vie pour
ses amis, et c'est donner sa vie pour ses ennemis. C'est justement ce que
Jésus a fait : « Le Christ est mort pour des impies, écrit l'apôtre dans
l'Epître aux Romains. A peine, en effet, voudrait-on mourir pour un homme
juste ; pour un homme de bien, oui, peut-être osera-t-on mourir ; mais la
preuve que Dieu nous aime, c'est que le Christ, alors que nous étions encore
pécheurs, est mort pour nous » (Rm 5, 6-8). « Il nous a aimés alors
que nous étions ses ennemis, pour faire de nous ses amis »1.
Une certaine « théologie de la croix » unilatérale peut nous faire oublier
l'essentiel. La croix n'est pas seulement jugement de Dieu sur le monde,
réfutation de sa sagesse et révélation de son péché. Elle n'est pas le NON
de Dieu au monde, mais son ‘OUI' d'amour : « L'injustice, le mal comme
réalité - écrit le Saint-Père dans son dernier livre sur Jésus -, ne
peut pas être simplement ignoré, ne peut être laissé là. Il doit être
éliminé, vaincu. C'est là seulement la vraie miséricorde. Et puisque les
hommes n'en sont pas capables, Dieu lui-même s'en charge maintenant - c'est
là la bonté 'inconditionnelle' de Dieu »2.
* * *
Mais comment avoir le courage de parler de l'amour de Dieu, alors que se
déroulent sous nos yeux tant de tragédies humaines, comme la catastrophe qui
s'est abattue sur le Japon, ou les hécatombes en mer des dernières semaines?
Ne pas en parler du tout ? Mais garder totalement le silence serait trahir
la foi et ignorer le sens du mystère que nous célébrons.
Il y a une vérité qui doit être proclamée haut et fort le Vendredi Saint.
Celui que nous contemplons sur la croix est Dieu « en personne ». Il est
aussi l'homme Jésus de Nazareth, oui, mais celui-ci et le Fils du Père
éternel ne sont qu'une seule et même personne. Tant qu'on ne reconnaîtra pas
et qu'on ne prendra pas au sérieux le dogme de foi fondamental des chrétiens
- la première définition dogmatique formulée à Nicée - à savoir que
Jésus-Christ est le Fils de Dieu, Dieu lui-même, de même nature que le Père,
la souffrance humaine restera sans réponse.
On ne peut pas dire que « la demande de Job est restée sans réponse », ni
que la foi chrétienne ne donne pas de réponse par rapport à la souffrance
humaine, si au départ on refuse la réponse que celle-ci dit avoir. Que faire
pour garantir à quelqu'un qu'une certaine boisson ne contient pas de poison
? La boire avant lui, devant lui ! C'est ce que Dieu a fait avec les hommes.
Il a bu la coupe amère de la passion. La souffrance humaine ne peut donc pas
être empoisonnée, ne peut être seulement négativité, perte, absurdité, si
Dieu lui-même a choisi de la goûter. Au fond de la coupe, il doit y avoir
une perle.
Le nom de la perle, nous le connaissons : résurrection ! « J'estime en
effet que les souffrances du temps présent ne sont pas à comparer à la
gloire qui doit se révéler en nous » (Rm 8, 18), et encore « Il
essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n'y en aura plus ; de
pleur, de cri et de peine, il n'y en aura plus, car l'ancien monde s'en est
allé » (Ap 21, 4).
Si la course pour la vie devait finir ici-bas, il y aurait vraiment de quoi
désespérer à la pensée des millions et peut-être des milliards d'êtres
humains qui partent avec un tel désavantage, cloués au point de départ par
la pauvreté et le sous-développement, sans pouvoir même participer à la
compétition. Mais il n'en est pas ainsi. La mort non seulement annule les
différences, mais les renverse. « Or il advint que le pauvre mourut et
fut emporté par les anges dans le sein d'Abraham. Le riche aussi mourut et
on l'ensevelit, dans l'Hadès » (cf. Lc 16, 22-23). On ne peut pas
appliquer de façon simpliste ce schéma à la réalité sociale, mais il est là
pour nous avertir que la foi en la résurrection ne laisse personne dans la
tranquillité de sa vie. Il nous rappelle que la formule « vivre et laisser
vivre » ne doit jamais se transformer en « vivre et laisser mourir ».
La réponse de la Croix n'est pas seulement pour nous chrétiens, elle est
pour tous, car le Fils de Dieu est mort pour tous. Il y a dans le mystère de
la rédemption un aspect objectif et un aspect subjectif ; il y a le fait en
soi et la prise de conscience, la réponse de foi à celui-ci. Le premier
aspect s'étend au-delà du second. « L'Esprit Saint - dit un texte de
Vatican II - offre à tous, d'une façon que Dieu connaît, la possibilité
d'être associé au mystère pascal. »3.
Une façon d'être associé au mystère pascal est justement la souffrance : «
Souffrir - écrivait Jean-Paul II au lendemain de son attentat et de
la longue période d'alitement qui s'ensuivit - signifie devenir
particulièrement réceptif, particulièrement ouvert à l'action des forces
salvifiques de Dieu offertes à l'humanité dans le Christ »4. La
souffrance, toute souffrance, mais particulièrement celle des innocents, met
en contact de façon mystérieuse, « connue seulement de Dieu », avec
la croix du Christ.
* * *
Après Jésus, ceux qui ont « rendu leur beau témoignage » et qui «
ont bu la coupe » sont les martyrs ! Les récits de leur mort
s'intitulaient au début « passio », passion, comme celui des
souffrances de Jésus, que nous venons tout juste d'entendre. Le monde
chrétien est revisité par l'épreuve du martyre que l'on pensait révolue avec
la chute des régimes totalitaires athées. On ne peut passer sous silence
leur témoignage. Les premiers chrétiens honoraient leurs martyrs. Les
actions de leur martyre étaient lues et diffusées dans l'Eglise avec un
immense respect. Aujourd'hui précisément, en ce Vendredi Saint 2011, dans un
grand pays d'Asie, les chrétiens ont prié et marché en silence dans les rues
de quelques villes pour conjurer la menace qui plane sur eux.
Il y a une chose qui distingue les actes authentiques des martyrs de ceux
légendaires, forgés sur le papier après la fin des persécutions. Dans les
premiers, il n'y a pour ainsi dire pas trace de polémique contre les
persécuteurs ; l'attention tout entière est concentrée sur l'héroïsme des
martyrs, non sur la perversité des juges et des bourreaux. Saint Cyprien ira
jusqu'à ordonner aux siens de donner vingt-cinq monnaies d'or au bourreau
qui lui tranchera la tête. Ils sont les disciples de celui qui est mort en
disant : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font ». « Le
sang de Jésus - nous rappelle le Saint-Père dans son dernier livre - parle
un autre langage que celui d'Abel (cf. He 12, 24) : il n'exige ni vengeance
ni punition, mais il est réconciliation »5.
De même, le monde s'incline devant les témoins modernes de la foi. Ainsi
s'explique le succès inattendu en France du film « Des hommes et des dieux
», qui relate l'histoire des sept moines cisterciens massacrés à Tibhirine
en mars 1996. Et comment ne pas être admiratifs des paroles écrites dans son
testament par Shahbaz Bhatti, homme politique catholique tué pour sa foi, le
mois dernier ? Son testament nous est laissé à nous aussi, ses frères dans
la foi, et ce serait de l'ingratitude de le laisser vite tomber dans
l'oubli.
« De hautes responsabilités au gouvernement - écrivait-il - m'ont été
proposées et on m'a demandé d'abandonner ma bataille, mais j'ai toujours
refusé, même si je sais que je risque ma vie. Je ne cherche pas la
popularité, je ne veux pas de positions de pouvoir. Je veux seulement une
place aux pieds de Jésus. Je veux que ma vie, mon caractère, mes actions
parlent pour moi et disent que je suis en train de suivre Jésus-Christ. Ce
désir est si fort en moi que je me considérerai comme un privilégié si -
dans mon effort et dans cette bataille qui est la mienne pour aider les
nécessiteux, les pauvres, les chrétiens persécutés du Pakistan - Jésus
voulait accepter le sacrifice de ma vie. Je veux vivre pour le Christ et
pour Lui je veux mourir ».
On a l'impression de réentendre le martyr Ignace d'Antioche, lorsqu'il
venait à Rome pour subir le martyre. Mais le silence des victimes ne
justifie pas l'indifférence coupable du monde face à leur sort. « Le
juste périt, et personne ne s'en inquiète, les hommes pieux sont moissonnés,
et nul n'y prend garde » (Is 57,1) !
* * *
Les martyrs chrétiens ne sont pas les seuls, nous l'avons vu, à souffrir et
mourir autour de nous. Que pouvons-nous offrir à celui qui ne croit pas, en
dehors de notre certitude de foi qu'il y a un rachat pour la souffrance ?
Nous pouvons souffrir avec qui souffre, pleurer avec qui pleure (Rm 12,15).
Avant d'annoncer la résurrection et la vie, devant le deuil des sœurs de
Lazare, Jésus « pleura » (Jn 11, 35). En ce moment, souffrir et
pleurer, en particulier, avec le peuple japonais, qui vient de sortir d'une
des plus effroyables catastrophes naturelles de l'histoire. Nous pouvons
aussi dire à ces frères en humanité que nous admirons leur dignité et
l'exemple de tenue et de solidarité mutuelle qu'ils ont donné au monde.
La mondialisation produit au moins cet effet positif : la souffrance d'un
peuple devient la souffrance de tous, suscite la solidarité de tous. Elle
nous offre l'occasion de découvrir que nous formons une seule famille
humaine, liée dans le bien comme dans le mal. Elle nous aide à dépasser les
barrières de race, de couleur et de religion. Comme dit le verset d'un de
nos poètes italiens, « Hommes, paix ! Sur la terre penchée il y a trop de
mystère »6.
Mais nous devons aussi tirer la leçon d'évènements comme celui que nous
venons d'évoquer. Séismes, cyclones et autres catastrophes qui frappent en
même temps coupables et innocents ne sont jamais un châtiment de Dieu.
Affirmer le contraire, signifie offenser Dieu et les hommes. Mais ils
constituent un avertissement : dans ce cas, l'avertissement à ne pas nous
bercer d'illusions en pensant que la science et la technique suffiront à
nous sauver. Si nous ne savons pas nous imposer des limites, celles-ci
justement peuvent devenir, nous le voyons, la menace la plus grave de
toutes.
Il y eut un tremblement de terre au moment de la mort du Christ : « Quant
au centurion et aux hommes qui gardaient Jésus, à la vue du séisme et de ce
qui se passait, ils furent saisis d'une grande frayeur et dirent :
‘Vraiment, celui-ci était Fils de Dieu » (Mt 27, 54). Mais un autre
séisme encore « plus grand » se produisit au moment de sa résurrection. «
Et voilà que se fit un grand tremblement de terre : l'Ange du Seigneur
descendit du ciel et vint rouler la pierre, sur laquelle il s'assit »
(Mt 28,2). Il en sera toujours ainsi. A chaque tremblement de terre de mort
succèdera un tremblement de terre de vie. Quelqu'un a dit : « Désormais seul
un dieu peut nous sauver », « Nur noch ein Gott kann uns retten »7.
Nous sommes assurés qu'il le fera car « Dieu a tant aimé le monde qu'il a
donné son Fils unique » (Jn 3, 16).
Nous nous apprêtons à chanter avec une conviction renouvelée et une
gratitude émue les paroles de la liturgie : « Ecce lignum crucis, in quo
salus mundi pependit : Voici le bois de la croix, auquel a été suspendu le
salut du monde. Venite, adoremus : venez, adorons-Le ».
1 S. Agostino, Commento alla Prima Lettera di Giovanni 9,9
(PL 35, 2051).
2 Cf. J. Ratzinger - Benoît XVI, Jésus de Nazareth, Editions du Rocher 2011,
p. 157
3 Gaudium et spes, 22.
4 Salvifici doloris, 23.
5 J. Ratzinger - Benoît XVI, Jésus de Nazareth, Editions du Rocher 2011,
p.215.
6 G. Pascoli, I due fanciulli (Les deux enfants).
7 Antwort. Martin Heidegger im Gespräch, Pfullingen 1988.
Sources : ZF11042211
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E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 22.04.2011 - T/Méditations
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