Le pape, un père pour chacun |
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Rome, le 20 septembre 2007 -
(E.S.M.) - Reprenons la liste des Papes qui
font partie de notre mémoire concrète à tous: Grégoire XVI, le Bienheureux Pie
IX, Léon XIII, saint Pie X, Benoît XV, Pie XI, Pie XII, le Bienheureux
Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul Ier, Jean-Paul II, sans oublier Benoît
XVI. Quelle série impressionnante ! Un saint, deux bienheureux et quatre
candidats à la béatification !
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La place Saint Pierre
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Le pape, un père pour chacun
Reconnaissons-le d’emblée : l’histoire a connu deux ou trois dizaines de
papes qui furent des hommes indignes, adonnés à divers vices, et parvenus
sur le siège de Pierre grâce à l’argent ou aux intrigues. Heureusement que
les médias n’existaient pas à l’époque ! Je note cependant que, malgré tant
de bassesses, ces papes élus contre la volonté immédiate de l’Esprit Saint
n’ont pas porté atteinte à la pureté de la foi ni même toujours desservi les
intérêts temporels de l’Église. Même le sinistre Alexandre VI, un
psychopathe débauché, n’a posé aucun acte contraire à l’orthodoxie
catholique et a cherché à servir l’Église sur le plan de ses relations
politiques et de son expansion missionnaire. Malgré tout, l’Esprit Saint,
mis devant le fait accompli, si j’ose dire, veillait au grain…
Nous mesurons d’autant mieux notre bonheur d’avoir, depuis près de deux
siècles, non seulement des papes saints et édifiants, mais également dotés
d’une stature humaine généralement très remarquable. Je ne suis pas
historien et ma mémoire concrète des Papes récents ne remonte pas au-delà de
Grégoire XVI, à la moitié du 19ème siècle, le prédécesseur du Bienheureux
Pie IX. Bien sûr, en remontant plus haut, j’entrevois les grandes lignes des
pontificats de Pie VIII, Léon XII, Pie VII, Pie VI, Clément XIV, Clément
XIII et surtout du remarquable Benoît XIV. Au-delà, cela devient plus
brumeux, avec, de temps en temps, une éclaircie liée, dans mes connaissances
historiques limitées, à quelque pontificat exceptionnel.
Mais reprenons la liste des Papes qui font partie de notre mémoire concrète
à tous, que nous avons connus ou dont nous avons entendu parler par nos
parents, grands-parents, voire arrière-grands-parents : Grégoire XVI, le
Bienheureux Pie IX, Léon XIII, saint Pie X, Benoît XV, Pie XI, Pie XII, le
Bienheureux Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul Ier, Jean-Paul II, sans oublier
Benoît XVI. Quelle série impressionnante ! Un saint, deux bienheureux et
quatre candidats à la béatification ! Et les quatre autres (pour ne point
parler encore du Pape actuel) furent aussi des papes remarquables,
spécialement Léon XIII, Benoît XV (dont on redécouvre la vraie grandeur
aujourd’hui) et Pie XI.
« Pape » signifie « Père » et est apparenté à « Abba » (« papa » en araméen
et en hébreu) ainsi qu’à « abbé ». Quand nous parlons de « notre Saint-Père
le Pape », nous pratiquons donc une redondance. Certes, nous nous souvenons
des mots sévères de Jésus : « Ne donnez à personne ici-bas le nom de ‘père’,
car vous n’avez qu’un seul père, celui qui est au cieux. » ( ) Mais on voit
bien que le souci de Jésus est d’abord de souligner que Dieu seul est,
absolument parlant, Père, et non pas d’interdire aux enfants d’appeler leur
père « papa » ni à un fils spirituel de considérer comme son « père » celui
qui l’engendre à la vie intellectuelle, morale ou spirituelle. L’essentiel
est de ne jamais oublier, pour reprendre les mots de Paul, que notre Père
des cieux, celui que seul nous adorons, est aussi celui « de qui toute
paternité, au ciel et sur la terre, tire son nom. »
(Ep 3, 15) Il est donc
permis d’appeler une créature humaine « père », à la condition de ne jamais
perdre de vue qu’il s’agit d’une paternité dérivée de celle qui appartient
pleinement à Dieu seul. Va donc pour notre Saint-Père le Pape !
Il est difficile de se faire une idée précise de la manière dont les Papes
d’avant la photographie, le cinéma et la télévision exprimaient concrètement
leur paternité spirituelle. On a seulement des échos de leurs attitudes
objectives d’encouragement ou d’accueil. Par contre, nous avons pu sentir,
très concrètement, la paternité des papes de l’ère médiatique. Je me permets
quelques souvenirs personnels.
J’étais présent sur la Place Saint-Pierre, le soir du 11 octobre, lors de la
procession aux flambeaux qui marquait, de manière populaire, l’ouverture du
Concile Vatican II célébrée en grande pompe le matin. J’étais séminariste à
Rome à l’époque. À la fin de la « fiaccolata » comme disent les Italiens,
Jean XXIII prit la parole depuis l’appartement pontifical. Je me souviens de
deux détails de son petit discours improvisé. Le ciel était clair et l’astre
de la nuit brillait dans une phase que j’aime beaucoup, entre le premier
quartier et la pleine lune. Le Saint-Père l’avait juste devant lui. Tout à
coup, il nous fait remarquer la présence de la lune derrière nous dans le
ciel. Il la compare à Marie qui, elle aussi, reçoit sa lumière du Soleil
qu’est le Christ, et se met à broder sur le Concile d’Éphèse qui, en 431,
proclama Marie, Mère de Dieu. Cela tombait à pic puisque, à l’époque, avant
la réforme liturgique, le 11 octobre était la fête de la Maternité divine de
Marie, célébrée désormais le 1er janvier. La foule buvait ses paroles comme
des enfants écoutant leur père ou leur instituteur. Puis, voyant qu’il se
faisait tard et devinant que, dans la foule, il y avait beaucoup de parents,
y compris des jeunes couples, il fit allusion au fait qu’en rentrant à la
maison (pas trop tard !), ils allaient y retrouver leurs enfants. Et il
ajouta : « En rentrant, donnez une caresse de ma part à vos enfants et
dites-leur que c’est la caresse du Pape ! » Je me souviens du frémissement
de joie, de l’onde d’émotion qui traversa à ce moment la Place Saint-Pierre.
La foule comprenait d’instinct, avec ravissement, que chacun et chacune
avait un père à Rome, et que ce père était…le Pape. C’était sublime. Et
pourtant, ce n’est qu’un souvenir parmi tant d’autres.
Lorsque Jean XXIII entra en agonie à la fin de mai 1963, quelques jours
avant la Pentecôte, les foules romaines lui rendirent amour pour amour.
Partout fleurissaient des affiches avec des bulletins de santé et des
invitations à la prière. La Place Saint-Pierre était devenue une assemblée
permanente où des fils et des filles priaient, à genoux, parfois dans les
larmes, pour leur père bien-aimé. Absolument unique ! On ne trouve cela
nulle part ailleurs…
Paul VI avait une sensibilité moins chaleureuse, moins cordiale. Me revient
en mémoire le reportage télévisé de sa première visite à la grande prison de
Rome, près du Vatican. Pour s’adresser, avec beaucoup d’amour paternel, aux
détenus, il avait adopté un ton de voix angoissé, crispé, voire tragique, là
où, quelques années auparavant, dans les mêmes circonstances, Jean XXIII
leur avait parlé sur un ton enjoué, comme en une conversation intime,
faisant même allusion avec humour à un membre de sa famille qui avait passé
quelque temps en prison. Mais comment oublier la majestueuse apparition de
Paul VI, à la fin de sa vie, alors qu’il souffrait atrocement de son
arthrose, lors de la célébration des funérailles d’Aldo Moro à la Basilique
de Saint-Jean de Latran ? Droit comme un i, en dépit de la souffrance, drapé
de dignité, il était apparu comme le père de tout un peuple, délivrant, en
un superbe italien, le message d’espérance que, face à cet assassinat
sordide, seul le Ressuscité pouvait offrir à tant d’esprits désemparés. Un «
Père » au milieu des tempêtes…
Jean-Paul Ier n’a fait que passer, tel un sourire sur le visage de l’Église.
Un sourire paternel. Trente-trois jours seulement de paternité universelle.
Assez pour ouvrir la route à celui qui serait bientôt adopté par les foules,
et spécialement par les jeunes, comme leur père bien-aimé,
Jean-Paul II. Sa
vie est trop proche de nous pour qu’il faille s’y étendre. Souvenons-nous
seulement de la manière dont le monde entier a vécu son agonie et sa mort.
Comme celle d’un père qui s’en va. Les télévisions de la planète étaient
devenues un lieu de prière, parfois même de catéchèse et, en tout cas, de
fraternité dans la gratitude à l’égard d’un tel père. Le ton des
commentaires était affectueux, en tout cas respectueux, à la seule exception
peut-être de la télévision belge. Le père était allé à la rencontre de ses
enfants partout à travers le monde. Et le monde venait, filialement, à la
rencontre du père disparu.
Ayant eu le bonheur d’assister à l’intronisation de Benoît XVI, puis aux
Journées Mondiales de la Jeunesse à Cologne, et, tout récemment, à la
rencontre des jeunes Italiens à Loreto avec le Pape, je puis attester que
les foules italiennes, puis les foules cosmopolites des jeunes, l’ont
rapidement adopté comme un authentique père, écouté avec respect, un père
plein de délicate et discrète tendresse dont elles apprécient – et elles le
lui montrent – la douceur souriante et la clarté professorale.
Nous avons la chance d’avoir depuis longtemps des Papes qui portent bien
leur nom de Père. Ne boudons pas notre bonheur ! C’est une joie
exceptionnelle sur le globe terrestre ! Personne ne doit nous la ravir !
Mgr A.-M. LEONARD
(extrait du livre "Catholique... Que du bonheur", publié avec Henry Haas,
aux Editions du Sarment (Jubilé) à Paris (p. 27-32).
Sources: diocèse de Namur
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E.S.M.
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Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 20.09.2007 - BENOÎT XVI -
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