Mise au point du pape Benoît XVI sur
le véritable œcuménisme |
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Cité du Vatican, le 20 avril 2008 -
(E.S.M.)
- Alors que les prières œcuméniques ponctuelles sont souvent
l’objet de déclarations d’intention banales, le discours du pape Benoît
XVI prononcé à l’église Saint-Joseph de New York vendredi soir, devant
250 représentants d’organisations œcuméniques et d’une douzaine de
confessions chrétiennes, n’était pas de ce type.
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Le pape
Benoît XVI entrant dans l’église Saint-Joseph- Pour
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Mise au point du pape Benoît XVI sur le véritable œcuménisme
Texte intégral du discours du Saint-Père
Chers frères et sœurs dans le Christ,
Mon cœur est comblé de gratitude envers Dieu - "Père de tous, qui est
au-dessus de tous, par tous et en tous" (Ep 4, 6) - pour cette heureuse
opportunité de me trouver ce soir en prière avec vous. Je remercie S.Exc.
Mgr Dennis Sullivan de son accueil cordial, et je salue avec affection
toutes les personnes présentes venues représenter les communautés
chrétiennes à travers les Etats-Unis. La paix de notre Seigneur et Sauveur
soit avec vous tous!
A travers vous, j'entends exprimer mon estime sincère pour l'œuvre
inestimable de tous ceux qui sont engagés au service de l'œcuménisme: le National
Council of Churches, le Christian Churches Together, le Catholic
Bishop's Secretariat for Ecumenical and Interreligious Affairs, et bien
d'autres. La contribution offerte au mouvement œcuménique par les chrétiens
des Etats-unis est perçue dans le monde entier. Je vous encourage tous à
persévérer, en ayant toujours confiance dans la grâce du Christ ressuscité
que nous nous efforçons de servir pour obtenir "l'obéissance de la foi... à
l'honneur de son nom" (cf. Rm 1, 5).
Nous venons d'entendre le passage de l'Ecriture où Paul - le "prisonnier à
cause du Seigneur" - formule son appel chaleureux aux membres de la
communauté chrétienne d'Ephèse. "Je vous exhorte - écrit-il - à mener une
vie digne de l'appel que vous avez reçu... appliquez-vous à conserver
l'unité de l'Esprit par ce lien qu'est la paix" (Ep 4,
1-3). Ainsi, au terme de son appel passionné à l'unité, Paul
rappelle à ses lecteurs que Jésus, une fois monté au ciel, a déversé sur les
hommes tous les dons nécessaires à l'édification du Corps du Christ
(cf. Ep 4, 11-13).
C'est avec tout autant de force que retentit aujourd'hui l'exhortation de
Paul. Ses paroles nous donnent la certitude que le Seigneur ne nous
abandonnera jamais dans notre recherche de l'unité. Elles nous invitent par
ailleurs à vivre de manière à rendre témoignage de cet unique "cœur" et
"âme" (Ac 4, 32), qui a toujours été le trait caractéristique de la koinonia
chrétienne (cf. Ac 2, 42), et la force qui
attire ceux qui sont au dehors à venir faire partie de la communauté des
croyants de manière à ce qu'ils puissent eux aussi partager l'"insondable
richesse du Christ" (Ep 3, 8).
La mondialisation a placé l'humanité entre deux extrémités. D'un côté le
sens croissant de l'interrelation et de l'interdépendance entre les peuples
eux-mêmes quand - si l'on parle en termes géographiques et culturels - ils
sont distants entre eux. Cette nouvelle situation offre la possibilité
d'améliorer le sens de la solidarité mondiale et du partage des
responsabilités pour le bien de l'humanité. D'autre part, on ne peut nier
que les changements rapides qui ont lieu dans le monde font aussi apparaître
des signes évidents de fragmentation et de repli dans l'individualisme. Le
recours toujours plus large à l'électronique dans le monde des
communications a paradoxalement provoqué une croissance de l'isolement.
Beaucoup - y compris des jeunes - cherchent pour cette raison des formes
plus authentiques de communauté. Une autre source de grave inquiétude est la
diffusion de l'idéologie séculariste qui mine voire rejette la vérité
transcendante. La possibilité même d'une révélation divine, et donc de la
foi chrétienne, est souvent mise en discussion par des modes de pensée
largement présentes dans les domaines universitaires, dans les mass médias
et dans l'opinion publique. C'est pourquoi un témoignage fidèle de
l'Evangile est plus que jamais nécessaire. Il est demandé aux chrétiens de
rendre raison avec clarté de l'espérance qui est en eux
(cf. 1 P 3, 15).
Trop souvent les non-chrétiens, qui observent la fragmentation des
communautés chrétiennes, se retrouvent à juste titre confus sur le message
même de l'Evangile. Des croyances et des comportements chrétiens
fondamentaux sont parfois modifiés au sein des communautés par ce que l'on
appelle des "actions prophétiques" fondées sur une herméneutique qui n'est
pas toujours en harmonie avec les données de l'Ecriture et de la Tradition.
Par conséquent, les communautés renoncent à agir comme un corps uni, et
préfèrent en revanche œuvrer selon le principe des "options locales". Au
cours de ce processus, s'égare le besoin de koinonia diachronique - la
communion avec l'Eglise de tous les temps - précisément au moment où le
monde a perdu son orientation et a besoin de témoignages communs et
convaincants sur le pouvoir salvifique de l'Evangile (cf.
Rm 1, 18-23).
Face à ces difficultés, nous devons en premier lieu nous rappeler que
l'unité de l'Eglise dérive de la parfaite unité de la Trinité. L'Evangile de
Jean nous dit que Jésus a prié pour que ses disciples ne soient qu'un,
"comme tu es en moi... et moi en toi" (cf. Jn 17, 21).
Ce passage reflète la ferme conviction de la communauté chrétienne des
origines que son unité était le fruit et le reflet de l'unité du Père, du
Fils et du Saint-Esprit. Cela, à son tour, montre que la cohésion réciproque
des croyants était fondée sur la pleine intégrité de la confession de leur
credo (cf. 1 Tm 1, 3-11). Dans tout le Nouveau
Testament, nous lisons que les Apôtres furent de manière répétée appelés à
rendre raison de leur foi tant vis-à-vis des païens (cf.
Ac 17, 16-34) que des juifs (cf. Ac 4, 5-22; 5,
27-42). Le noyau central de leur argumentation fut toujours le
fait historique de la résurrection corporelle du Seigneur de la tombe
(Ac 2, 24, 32; 3, 15; 4, 10; 5, 30;10, 40; 13, 30). L'efficacité
dernière de leur prédication ne dépendait pas de "discours enseignés" ou de
l'"humaine sagesse" (1 Co 2, 13), mais plutôt
de l'action de l'Esprit (Ep 3, 5) qui confirmait le témoignage digne de foi
des Apôtres (cf. 1 Co 15, 1-11). Le cœur de la
prédication de Paul et de l'Eglise des origines n'était autre que Jésus
Christ, et "Jésus Christ crucifié" (1 Co 2, 2).
Et cette proclamation devait être garantie par la pureté de la doctrine
normative exprimée dans les formules de foi - les symboles - qui
articulaient l'essence de la foi chrétienne et constituaient le fondement de
l'unité des baptisés (cf. 1 Co 15, 3-5; Ga 1, 6-9;
Unitatis Redintegratio, n. 2).
Chers amis, la force du kerygma n'a rien perdu de son dynamisme intérieur.
Nous devons toutefois nous demander si toute sa vigueur n'est pas atténuée
par une approche relativiste de la doctrine chrétienne semblable à celle que
nous trouvons dans les idéologies sécularisées qui, en soutenant que seule
la science est "objective", relèguent complètement la religion dans le
domaine subjectif du sentiment de l'individu. Les découvertes scientifiques
et leurs réalisations à travers l'intelligence humaine offrent sans aucun
doute à l'humanité de nouvelles possibilités d'amélioration. Cela ne
signifie pas cependant, que le "connaissable" soit limité à ce qui est
empiriquement vérifiable, ni que la religion soit confinée dans le royaume
changeant de l'"expérience personnelle".
L'acceptation de cette ligne de pensée erronée conduirait les chrétiens à
conclure que dans la présentation de la foi chrétienne il n'est pas
nécessaire de souligner la vérité objective, parce qu'il faut uniquement
suivre sa propre conscience et choisir la communauté qui répond le mieux à
nos goût personnels. Le résultat peut se vérifier dans la prolifération
continuelle de communautés qui évitent souvent des structures
institutionnelles et minimisent l'importance pour la vie chrétienne du
contenu doctrinal.
Même au sein du mouvement œcuménique, les chrétiens peuvent se montrer
hésitants à affirmer le rôle de la doctrine, par crainte qu'il puisse
exacerber plutôt que soigner les blessures de la division. Malgré cela, un
témoignage clair et convaincant rendu au salut opéré pour nous en Jésus
Christ doit se fonder sur la notion d'un enseignement apostolique normatif -
un enseignement qui souligne véritablement la parole inspirée de Dieu et
soutient la vie sacramentelle des chrétiens d'aujourd'hui.
C'est uniquement en "gardant fermement" l'enseignement sûr
(cf. 2 Ts 2, 15) que nous réussirons à répondre
aux défis auxquels nous sommes appelés à nous confronter dans un monde qui
change. Ce n'est qu'ainsi que nous donnerons un témoignage ferme à la vérité
de l'Evangile et à son enseignement moral. Tel est le message que le monde
s'attend à entendre de nous. Tout comme les premiers chrétiens, nous avons
la responsabilité de rendre un témoignage transparent des "raisons de notre
espérance", afin que les yeux de tous les hommes de bonne volonté puissent
s'ouvrir et voir que Dieu a manifesté son visage (2 Co 3,
12-18) et nous a permis d'accéder à sa vie divine à travers Jésus
Christ. Lui seul est notre espérance! Dieu a révélé son amour pour tous les
peuples à travers le mystère de la passion et de la mort de son Fils, et il
nous a appelés à proclamer qu'il est vraiment ressuscité, il s'est assis à
la droite du Père et "il reviendra dans la gloire pour juger les vivants et
les morts" (Credo de Nicée).
Puisse la Parole de Dieu que nous venons d'entendre ce soir enflammer
d'espérance nos cœurs sur le chemin de l'unité (cf. Lc 24,
32). Puisse cette rencontre de prière être un exemple de la place
centrale de la prière dans le mouvement œcuménique (cf.
Unitatis Redintegratio, n. 8); car, sans prière, les
structures, les institutions et les programmes œcuméniques seraient privés
de leur cœur et de leur âme. Nous rendons grâce à Dieu pour les progrès
réalisés à travers l'action de l'Esprit, et nous prenons acte avec gratitude
des sacrifices spirituels accomplis par beaucoup de ceux ici présents et par
ceux qui nous ont précédés.
En marchant sur leurs traces et en plaçant notre confiance en Dieu
uniquement, je suis certain que - faisant miennes les paroles du Père Paul
Wattson - nous parviendrons à cette "unité d'espérance, de foi et d'amour"
qui seule peut convaincre le monde que Jésus Christ est l'envoyé du Père
pour le salut de tous.
Merci à tous.
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Sources : www.vatican.va -
E.S.M.
© Copyright 2008 - Libreria Editrice Vaticana
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 20.04.2008 -
T/USA |