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Benoît XVI : c'est Jésus qui juge
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Le 20 mars 2023 -
E.S.M.
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Nous découvrons ici la véritable portée de notre texte : celui qui
juge, ce n'est pas simplement, comme on devrait s'y attendre, Dieu,
l'Infini, l'Inconnu, l'Éternel. Non, Dieu a remis le jugement à
quelqu'un qui, en tant qu'homme, est notre frère. Ce n'est pas un
étranger qui nous juge, mais celui que nous connaissons dans la foi.
Le juge ne se présentera pas à nous comme le Tout autre, mais comme
l'un des nôtres, qui connaît la condition humaine du dedans et qui
l'a vécue.
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Fra Angelico 1431 (explications
en fin de page) -
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THEOLOGIE
Benoît XVI : c'est Jésus qui juge
Rudolf Bultmann,
comme il l'a déjà fait pour la descente aux enfers et l'ascension du
Seigneur, range également la foi en la « fin du monde », au retour du
Seigneur comme Juge, parmi les conceptions qui
pour l'homme
moderne sont périmées : tout homme raisonnable, selon lui, est convaincu que
le monde continuera comme il a continué depuis près de deux mille ans après
l'annonce eschatologique du Nouveau Testament. Une purification de la
pensée semble d'autant plus s'imposer ici que le message biblique contient
indiscutablement sur ce point des éléments fortement cosmologiques, et
aborde ainsi un domaine que nous connaissons comme champ d'exploration des
sciences de la nature. Sans doute, dans l'expression « la fin du monde
», le
mot « monde » ne désigne pas l'architecture physique du cosmos,
mais le
monde humain, l'histoire humaine ; l'expression signifie donc directement que
cette sorte de monde, le monde de l'homme, aboutira à une fin que Dieu
dispose et réalise. Mais l'on ne saurait nier que la Bible représente cet
événement essentiellement anthropologique par des images cosmologiques (en
partie aussi politiques). Dans quelle mesure s'agit-il seulement d'images,
et dans quelle mesure ces images touchent-elles à la réalité elle-même ? Il
est difficile de le déterminer. La seule voie pour arriver ici à quelque
certitude, c'est de partir du contexte plus large de la conception du monde
dans la bible. Or pour celle-ci, le cosmos et l'homme ne sont nullement deux
réalités séparables, de telle manière que le cosmos constituerait le théâtre
fortuit de l'existence humaine, dont celle-ci pourrait de soi se séparer
pour trouver sa réalisation en dehors du monde. En fait, le monde et
l'existence humaine vont nécessairement ensemble,
de sorte que l'on ne peut
imaginer une existence humaine sans le monde ni un monde sans l'homme. Le
premier point ne fait plus de difficulté aujourd'hui ; et le deuxième non
plus, après ce que nous avons appris de Teilhard par exemple, ne devrait
plus nous apparaître totalement incompréhensible. Nous serions ainsi plutôt
tentés d'admettre que le message biblique de la fin du monde et du retour du
Seigneur n'est pas une simple anthropologie exprimée en images cosmiques, et
qu'il ne présente pas non plus simplement un aspect cosmologique à côté d'un
aspect anthropologique ; nous dirions plutôt que,
suivant la logique interne de la conception biblique globale, ce message
nous présente la coïncidence de l'anthropologie et de la cosmologie dans la
christologie définitive, et voit dans
cette coïncidence la fin du « monde » ; celui-ci par sa structure à
la fois une et double de cosmos et d'homme renvoie depuis toujours à cette
unité comme à son but. Le cosmos et l'homme qui sont ordonnés l'un à l'autre
depuis toujours, même s'ils s'opposent bien souvent, seront un par leur «
complexification » en une réalité plus grande, celle
de l'amour qui dépasse et englobe le bios, comme nous l'avons
dit plus haut : il apparaît encore une fois par là combien
la fin eschatologique et la victoire remportée à la résurrection de Jésus
sont réellement une seule et même chose ; on voit encore une fois que le
Nouveau Testament a eu raison de considérer cette résurrection comme
l'événement eschatologique.
Pour aller plus loin, il nous faut expliciter encore
davantage notre pensée. Nous venons de dire que le cosmos n'est pas un
simple cadre extérieur de l'histoire humaine, un édifice statique, une sorte
de récipient où se trouvent toutes sortes d'êtres vivants, que l'on pourrait
transvaser tout aussi bien dans d'autres récipients. Cela signifie
positivement que le cosmos est mouvement ;
qu'il n'a pas seulement une histoire en lui, mais qu'il est lui-même
histoire : il n'est pas seulement le théâtre de l'histoire humaine,
il est « histoire
» bien avant l'homme, et ensuite avec lui.
En définitive, il n'existe qu'une seule et universelle
histoire du monde qui à travers les hauts et les bas, les progrès et
les reculs qu'elle présente, a pourtant une direction d'ensemble et va de
l'avant. Il est vrai que pour celui qui n'en perçoit qu'une fraction, même
si celle-ci est relativement grande, il semble que ce soit toujours le même
mouvement cyclique, indéfiniment recommencé. On ne peut y reconnaître une
direction. Il faut arriver à voir l'ensemble pour la percevoir.
Or dans ce mouvement cosmique, comme nous l'avons déjà
vu, l'esprit n'est pas un quelconque produit secondaire et fortuit de
l'évolution, sans signification pour l'ensemble ; nous avons pu constater au
contraire que dans cette évolution, la matière et son développement
constituent la préhistoire de l'esprit.
La foi au retour du Christ et à
l'achèvement du monde grâce à lui, pourrait ainsi se définir comme la
conviction que notre histoire avance vers un point Oméga, dans lequel il
deviendra définitivement clair et manifeste que l'élément stable, ce fond de
réalité qui porte toutes choses, n'est pas la simple matière inconsciente,
que c'est au contraire le sens qui constitue le
véritable sol ferme : c'est le sens qui donne cohésion
à l'être, qui lui donne réalité, il est la réalité ; l'être ne reçoit pas sa
consistance d'en-bas, mais d'en-haut. Que ce processus de «
complexification » de l'être matériel par l'esprit existe, que l'être
matériel soit reconstitué par l'esprit en une nouvelle forme d'unité, nous
en faisons déjà aujourd'hui, en un certain sens, l'expérience dans la
transformation du monde réalisée par la technique. Dans cette possibilité de
manipulation du réel, les frontières entre nature et technique commencent à
s'effacer, les deux ne peuvent plus être nettement séparées. Sans doute
cette analogie est-elle à bien des égards sujette à caution. Cependant à
travers de tels processus, se fait jour une forme du monde où l'esprit et la
nature ne sont plus simplement juxtaposés, mais où dans une «
complexification » nouvelle, l'esprit intègre en lui ce qui apparemment est
purement naturel, et crée ainsi un monde nouveau, qui représente en même
temps nécessairement la fin de l'ancien. Bien sûr, la
fin du monde à laquelle croit le chrétien, est tout autre chose que la
victoire définitive de la technique. Mais la fusion entre la nature et
l'esprit opérée par la technique nous permet de comprendre de façon nouvelle
dans quel sens il faut penser la réalité de la foi au retour du Christ :
comme foi en l'unification définitive du réel à partir de l'esprit.
Cela nous permet de faire un pas de plus.
Nous avons dit que la nature et l'esprit forment une
unique histoire, qui progresse de telle manière
que l'esprit se révèle toujours plus comme le principe qui englobe tout, si
bien que concrètement l'anthropologie et la cosmologie finissent par
confluer. Or, cette affirmation de la « complexification » croissante
du monde par l'esprit, signifie nécessairement son unification autour d'un
centre personnel, car l'esprit n'est pas une chose indéterminée ; là où il
existe dans son authenticité, il existe comme individualité, comme personne.
Il y a sans doute quelque chose comme un « esprit objectif », un esprit
investi dans les machines, dans des ouvrages de toutes sortes ; mais dans
tous ces cas, l'esprit ne subsiste pas dans sa forme originelle : l' «
esprit objectif » provient toujours de l'esprit subjectif,
il renvoie à la personne, qui est le seul mode d'existence authentique de
l'esprit. Affirmer que le monde progresse vers une « complexification
» par l'esprit, c'est donc affirmer que le cosmos progresse vers
l'unification dans une sphère personnelle.
Voilà confirmée à nouveau la prééminence infinie du
particulier sur le général. Ce principe, développé plus haut, apparaît à
nouveau ici avec tout son poids. Le monde avance vers l'unité dans la
personne. Le tout reçoit son sens du particulier et non inversement. Cette
constatation justifie une nouvelle fois le positivisme apparent de la
christologie, la conviction si scandaleuse pour les hommes de tous les
temps, qui veut faire d'un être particulier le centre de l'histoire et du
tout. Ce « positivisme » révèle une fois de plus sa nécessité intrinsèque :
s'il est vrai qu'au terme il y a le triomphe de l'esprit, c'est-à-dire le
triomphe de la vérité, de la liberté, de l'amour, alors ce n'est pas une
force quelconque qui remportera finalement la victoire, c'est un visage qui
alors se trouve au terme. Alors l'Oméga du monde est un «
Tu », une personne, un
être particulier. Alors la complexification intégrant toutes choses,
l'unification englobant tout le réel, est en même temps la négation
définitive de tout collectivisme, la négation de tout fanatisme de la simple
idée, y compris de ce que l'on appelle l'idée du christianisme. Toujours
l'homme, la personne, a la priorité sur la simple idée.
Il en découle une autre conséquence, très importante. Si le
passage à « l'ultra-complexité » de la réalité dernière est fondé sur
l'esprit et la liberté, alors il ne saurait en aucun cas être une dérive
neutre, cosmique, il inclut alors la responsabilité. Il ne se fait pas de lui-même comme un processus physique, il repose sur des
décisions. C'est pourquoi le retour du Seigneur n'est pas seulement
salut, il n'est pas seulement l'Oméga qui met tout au point, il est aussi
jugement. Nous pouvons même à partir de là définir ce que l'on
entend par le jugement. Parler de jugement, c'est dire
que le stade final du monde n'est pas le résultat d'une évolution naturelle,
mais le fruit de la responsabilité, fondée elle-même sur la liberté. On
comprendra aussi par là pourquoi le Nouveau Testament, malgré son message de
grâce, maintient qu'à la fin tous les hommes seront jugés «
selon leurs œuvres », et
que personne ne sera dispensé de rendre compte de la conduite de sa vie. Il
existe une liberté que la grâce elle-même ne supprime pas, à laquelle elle
donne au contraire d'être pleinement elle-même : la destinée définitive de
l'homme ne lui est pas imposée sans égard à l'option de sa vie. Cette
affirmation s'impose du reste comme barrière à un faux dogmatisme et à
une fausse sécurité chrétienne. Elle seule maintient l'égalité entre les
hommes, en maintenant l'identité de leur responsabilité. Depuis les Pères
de l'Église, cela a toujours été et c'est encore une tâche décisive de la
prédication chrétienne que de faire prendre conscience de cette identité de
la responsabilité, et de l'opposer à la fausse confiance en l'invocation
: « Seigneur, Seigneur
».
Il ne sera sans doute pas inutile de rappeler ici les
réflexions du grand théologien juif Léo Baeck, auxquelles le chrétien ne
pourra souscrire, mais dont la gravité ne le laissera
pas indifférent. Baeck montre que l'existence privilégiée d'Israël
est devenue conscience d'un service à assurer pour l'avenir de l'humanité. «
La singularité de la vocation
est
revendiquée, mais aucune exclusivité de salut
n'est proclamée. Le judaïsme fut préservé de s'engager dans l'étroitesse
religieuse du concept d'une Église apportant seule le salut. Là où ce n'est
pas la foi, mais l'action qui conduit à Dieu, là où la communauté présente à
ses enfants, comme signe spirituel d'appartenance, l'idéal et le devoir, là
le salut de l'âme ne saurait encore être garanti par la place occupée dans
l'Alliance de la foi. » Baeck montre ensuite comment cet universalisme du
salut fondé sur l'action, s'est cristallisé toujours plus dans la tradition
juive, pour apparaître enfin clairement dans le mot « classique » : « les
justes qui ne sont pas Israélites, eux aussi, auront part au bonheur éternel
». Et qui ne se sentirait touché, lorsque Baeck affirme ensuite qu'il suffit
« d'opposer cette phrase à la description faite par Dante du lieu de
damnation, du lieu où aboutissent inexorablement même les meilleurs parmi
les païens, avec l'accumulation des images d'épouvante correspondant aux
représentations chrétiennes des siècles antérieurs et postérieurs, pour
ressentir le contraste dans toute son acuité
56
».
Certes beaucoup de choses sont inexactes dans ce texte et
incitent à la contestation ; cependant, il contient
une affirmation grave. II peut à sa façon nous faire voir en quoi
consiste l'importance décisive de l'article de foi sur le jugement général
de tous les hommes « selon leurs œuvres ». Ce
n'est pas notre tâche d'examiner en détail comment cette affirmation peut
être conciliée avec tout le poids de la doctrine sur la grâce. Peut-être
d'ailleurs ne pourra-t-on éviter en fin de compte un paradoxe, dont la
logique ne se laissera découvrir pleinement que dans l'expérience d'une vie
de foi. Celui qui accepte ce paradoxe, découvre qu'il y a les deux :
la radicalité de la grâce qui délivre l'homme
impuissant, mais tout autant le sérieux de la responsabilité, exigence
quotidienne pour l'homme. Les deux ensemble signifient que d'une part
le chrétien possède l'assurance libératrice et sereine de celui qui vit de
la surabondance de la justice divine qui s'appelle Jésus-Christ. Cette
assurance sait : je suis incapable finalement de détruire ce que Lui a
construit. De soi l'homme vit avec cette terrible conscience que son pouvoir
de destruction est plus grand que son pouvoir de construire. Mais ce même
homme sait que dans le Christ le pouvoir de construire s'est avéré
infiniment plus fort. De là naît une liberté profonde, une confiance assurée
en l'amour indéfectible de Dieu qui nous reste favorable malgré tous nos
égarements. Nous pouvons accomplir sans crainte notre œuvre d'hommes ;
celle-ci a perdu son aspect inquiétant, parce qu'elle a perdu son pouvoir de
détruire : le sort du monde ne dépend pas de nous, il
est entre les mains de Dieu. Mais en même
temps, le chrétien sait qu'il ne peut pas pour autant agir n'importe
comment, que son agir n'est pas un jeu que Dieu le laisserait jouer, sans le
prendre au sérieux. Il sait qu'il devra répondre, qu'il aura à rendre compte
de ce qui lui a été confié, comme un intendant. Il n'y a de
responsabilité que là où il y a quelqu'un pour interpeller et questionner.
Cette interpellation, cette mise en question de notre vie nous est rappelée
sans équivoque par l'article de foi sur le jugement.
Rien ni personne ne nous autorise à minimiser le sérieux extrême que
comporte une telle affirmation; notre vie apparaît ainsi comme une affaire
grave, et c'est de là précisément que vient sa dignité.
« Pour juger les vivants et les morts », cela signifie
également que le jugement appartient à Lui seul
en définitive.
C'est dire que l'injustice du monde
n'aura pas le dernier mot et qu'elle ne sera pas non plus effacée tout
simplement par une absolution générale ; il y a au contraire une dernière
instance d'appel qui sauvegarde la justice pour pouvoir ainsi donner à
l'amour son accomplissement. Un amour qui abolirait la justice créerait
une injustice et ne serait plus qu'une caricature de l'amour. L'amour
véritable, c'est la surabondance de la justice, surabondance débordant la
stricte justice, mais sans jamais la détruire, car la justice doit être et
demeurer la forme fondamentale de l'amour.
Il est vrai qu'il faut se garder aussi de l'extrême opposé.
On ne peut nier que l'article du jugement a pris parfois dans la conscience
chrétienne une forme qui l'amenait pratiquement à ruiner la foi plénière en
la rédemption et la promesse de la grâce. On rappelle toujours à ce propos
le profond contraste entre Maran atha et dies irae. Dans
l'invocation : « Notre Seigneur, viens ! » (Maran atha), la
chrétienté primitive a interprété le retour du Christ comme un événement
chargé d'espérance et de joie ; elle y a exprimé son attente fervente d'un
retour qui était pour elle le moment de l'accomplissement définitif. Le
chrétien du Moyen Age, par contre, voit dans cet événement le terrible «
jour de colère » (dies irae), devant lequel l'homme défaille de
douleur et de frayeur, et qu'il envisage avec crainte et tremblement. Le
retour du Christ n'est plus que le jugement, le jour de la reddition des
comptes, qui menace un chacun. Dans une telle perspective, on oublie quelque
chose d'essentiel ; le christianisme apparaît
pratiquement réduit à un moralisme et se trouve privé de ce souffle
d'espérance et de joie, qui est l'expression la plus authentique de sa vie.
Peut-être faudra-t-il dire qu'une première amorce d'une telle
déviation, qui voit uniquement les risques de la responsabilité et non plus
la liberté de l'amour, se trouve déjà dans notre article de foi ; l'idée du
retour du Christ y apparaît entièrement réduite, du moins d'après les
termes, à l'idée de jugement : « d'où il viendra juger les vivants et les
morts ». Il est vrai que dans le milieu où le Symbole a pris naissance,
l'héritage chrétien primitif était encore très vivant ; le mot de jugement
était encore compris tout naturellement dans son unité avec le message de la
grâce : dire que c'est Jésus
qui juge,
c'était revêtir le jugement de l'aspect de l'espérance. Je voudrais
simplement mentionner ici un passage d'un document ancien connu sous le nom
de deuxième lettre de
Clément d'Alexandrie, où cela apparaît très clairement : «
Frères, nous devons considérer Jésus-Christ comme
Dieu, comme le juge des vivants et des morts. Nous ne devons pas minimiser
notre rédemption, car si nous n'avons de Jésus-Christ qu'une pauvre idée,
nous nous faisons une pauvre idée aussi de notre espérance
57
»
Nous découvrons ici la véritable portée
de notre texte : celui qui juge, ce n'est pas simplement, comme on devrait
s'y attendre, Dieu, l'Infini, l'Inconnu, l'Éternel. Non,
Dieu a remis le jugement à quelqu'un qui, en tant
qu'homme, est notre frère. Ce n'est pas un
étranger qui nous juge, mais celui que nous connaissons dans la foi. Le juge
ne se présentera pas à nous comme le Tout autre, mais comme l'un des nôtres,
qui connaît la condition humaine du dedans et qui l'a vécue.
Ainsi, au-dessus du jugement se lève naturellement l'aurore
de l'espérance ; ce n'est pas seulement le jour de colère, mais le retour du
Seigneur. On pense à la grandiose vision du Christ au début de l'Apocalypse
(1, 9-19) : le voyant tombe comme mort devant cet être à la puissance
redoutable. Mais le Seigneur le touche de sa main et lui dit, comme aux
jours où ils traversèrent, au milieu de la tempête, le lac de Génésareth : «
Ne crains rien, c'est moi » (1,17). Le Seigneur tout-puissant
est ce Jésus dont le voyant était devenu jadis, dans la foi, le compagnon de
route. L'article du Jugement, dans le Symbole, reprend cette idée pour
l'appliquer à notre rencontre avec le Juge de l'univers. Le chrétien, en ce
jour d'angoisse, pourra constater avec un étonnement ravi que celui « à qui
tout pouvoir a été donné au ciel et sur terre » (Mt 28, 18), était
dans la foi le compagnon de route de ses jours terrestres ; et c'est comme
si maintenant déjà, grâce aux paroles du Symbole, Jésus le touchait de sa
main en lui disant : ne crains rien, c'est Moi. Peut-être ne saurait-on trouver une plus belle réponse au problème du
rapport de la grâce et du jugement, que cette pensée qui est à
l'arrière-plan de notre Credo.
Notes :
56. L. BAECK, Das Wesen des Judentums, Köln, I960. p. 69. 57. 2
Clem, I. ls: - cf. KATTENBUSCH, II, 660.
Le tableau de Fra Angélico (1431) - Le Jugement
dernier (Museo di San Marco, Florence)
Trônant dans un ciel azur profond et entouré
par des anneaux concentriques de chérubins et d'anges, le Christ, assis sur
un banc de nuages lumineux, juge le monde.
Deux rangées de saints et de prophètes aux expressions variées, identifiés
par leurs attributs distinctifs, et revêtus de manteaux aux couleurs
éclatantes sont assis sur les nuages. Ils demandent d'intercéder pour les
humains auprès du Christ par l'intermédiaire de saint Jean Baptiste et de la
Vierge.
Une longue rangée de tombes conduit à l'horizon lointain, coupant la vallée
en dessous. À la droite du Christ, les bienheureux s'agenouillent en
adoration, leurs visages radieux tournés vers l'amour de Dieu. Les anges
dansent en cercle dans la végétation verdoyante du Paradis. Les rayons d'or
du flux lumineux à travers les portes ouvertes de la Cité de Dieu illuminent
les robes blanches.
À la gauche du Christ, les démons avec des fourches entraînent les damnés à
l'agonie vers la bouche d'un enfer montagneux. Les horribles tourments qui
les attendent sont dépeints par des cercles de flammes où les pécheurs, nus,
certains étranglés avec des serpents souffrent pour leurs fautes passées.
L'abondance de personnages (270 en tout), l'évocation nuancée de leurs
émotions, la perspective de la rangée de tombes révèlent une grande maîtrise
de la narration et de l'espace jusqu'à la sans précédent chez Fra Angelico.
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Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 20.03.2023
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