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19 Avril 2005
 

Qui a peur de Vatican II ?

 

Rome, le 19 février 2009  - (E.S.M.) - De cette question, Giuseppe Ruggieri, théologien, et Alberto Melloni, historien du christianisme, ont fait le titre d’un petit livre écrit à plusieurs mains sous leur direction et publié ces jours-ci en Italie.

Qui a peur de Vatican II ? 

Revenir au Concile! Celui de Chalcédoine en 451

Le 19 février 2009 -  Eucharistie Sacrement de la Miséricorde - Un livre accuse l'Église d'avoir peur de Vatican II. Mais, selon certains, il y a un danger encore plus grave: celui d'obscurcir la doctrine des Conciles des premiers siècles sur le Christ. Dialogue imaginaire entre un théologien et un de ses élèves

Qui a peur de Vatican II ? De cette question, Giuseppe Ruggieri, théologien, et Alberto Melloni, historien du christianisme, ont fait le titre d’un petit livre écrit à plusieurs mains sous leur direction et publié ces jours-ci en Italie.

Ce n’est pas une nouveauté mais une réimpression du numéro 2 de 2007 de "Cristianesimo nella Storia", la revue de l'Institut des Sciences Religieuses de Bologne, c’est-à-dire du groupe de savants qui – avec des collaborateurs de divers pays – a publié l’"Histoire du Concile Vatican II" la plus lue dans le monde, cinq volumes achevés en 2001 et parus en sept langues. Une "Histoire" très orientée, qui interprète le Concile plus comme un "événement qui fait date" qu’en se basant sur ses documents, plus dans son "esprit" qu’à la lettre, plus comme "nouveau début" qu’en continuité avec l’Eglise précédente.

A côté de Ruggieri et Melloni – le seul à ajouter un nouveau chapitre aux textes déjà connus – les auteurs du livre sont le français Christoph Theobald, l'américain Joseph A. Komonchak et l’allemand Peter Hünermann.

Dans la préface, Ruggieri et Melloni nient que le livre soit une apologie de l’"Histoire" bolonaise du Concile Vatican II. Mais, en le lisant, on a l’impression qu’ils sont les sentinelles héroïques de l’interprétation correcte du Concile lui-même; qu’ils n’en ont pas "peur" et en préservent la vraie "nouveauté"; qu’ils font ce que même Benoît XVI ne fait plus parce qu’il a trop changé par rapport au jeune Ratzinger qui écrivait les discours explosifs lus au Concile par le cardinal Frings.

Pour une analyse détaillée des essais contenus dans le volume, il suffit de se reporter à l’article que leur a consacré www.chiesa après leur publication dans la revue "Cristianesimo nella Storia":

> Ils persistent et signent: le Concile Vatican II a été "un tournant historique". L'école de Bologne annexe le pape
(11.12.2007)

Tandis que l'interprétation du Concile Vatican II par Benoît XVI est celle qu’il a donnée dans son mémorable discours à la curie du 22 décembre 2005:

"Réveille-toi, homme..."

* * *

Le texte qui suit n’est pas un compte-rendu du livre "Qui a peur de Vatican II?". Mais il prend appui sur sa publication pour exposer – sous forme de dialogue – les questions que l’Eglise affronte aujourd’hui.

Comme on le verra, ce sont des questions d’une importance capitale, qui en viennent à concerner les bases du Credo chrétien. Des questions auxquelles ont répondu Vatican II mais aussi, avant lui, les Conciles christologiques des premiers siècles, ceux de Nicée, Ephèse, et Chalcédoine.

L'auteur, Francesco Arzillo, 49 ans, est romain, magistrat administratif et d’une compétence rare en philosophie et en théologie.

Court dialogue sur le Concile, entre un maître et son élève
par Francesco Arzillo

Le maître (M.) est professeur de théologie, il a 60 ans, il est modérément progressiste, prêt à dialoguer avec tout le monde; seuls l’énervent ceux qui paraissent peu enclins à donner toute sa valeur au Concile de sa jeunesse, qui lui rappelle, entre autres, ses tumultueuses années de séminaire.

L'élève (E.), plus jeune, n’est pas un clerc; il est un peu irrespectueux, mais jamais envers le magistère de l’Eglise. Beaucoup de gens le jugent ultraconservateur mais les traditionalistes le critiquent parce qu’il consulte – même si c’est avec prudence – les ouvrages théologiques d’Henri de Lubac et qu’il défend toujours Jean XXIII et Paul VI.

M. – Bonjour! Toujours un livre en main. Voyons un peu ton dernier achat.

E. – C’est "Qui a peur du Concile Vatican II?", sous la direction d’Alberto Melloni et Giuseppe Ruggieri.

M. – Tu lis Melloni et les théologiens catholico-progressistes que tu as toujours critiqués? Etonnant. Mais j’ai compris: le titre du livre a agi sur ton sentiment de culpabilité et tu veux expier.

E. – Je vois que vous n’avez pas perdu l'habitude d’ajouter la psychanalyse à la théologie. Je n’ai pas de sentiment de culpabilité, au moins à ce sujet. Vous savez que j’ai toujours accepté Vatican II de tout cœur. Aujourd’hui, comment peut-on parler de l’Eglise sans "Lumen gentium"? De la Révélation divine sans "Dei Verbum"? Ou de la liturgie sans "Sacrosanctum Concilium"?

M. – Alors où est le problème?

E. – Le problème, c’est cette interminable querelle sur le Concile, ce conflit d’interprétations si compliqué. C’est vrai que les essais contenus dans ce livre sont très raffinés, qu’ils contiennent des idées intéressantes, qu’ils se confrontent avec les indications de Benoît XVI. Mais…

M. – Mais?

E. – Ils me rappellent – au moins en partie – des ambiances, climats et lieux communs de ce milieu catholico-progressiste qui tend à faire du Concile un mythe. Mais attention, je ne veux pas coller une étiquette aux auteurs, j’utilise une indication standard à titre d’orientation.

M. – En réalité, tu prétends accepter le Concile, mais c’est avec une restriction mentale, parce que tu critiques ceux qui se battent pour le Concile.

E. – Vous voyez que vous parlez d’une bataille? C’est cela, le problème, cette surexcitation de certains pendant et après le Concile, ce climat de lutte continue, cette "agitation croissante aux alentours du Concile": la formule n’est pas de moi mais du cardinal Henri de Lubac. Et puis cette façon d’en raconter l’histoire! La fameuse "semaine noire"... Qu’est-ce que cela veut dire? Quelle valeur heuristique a cette expression? Aucune! Si je lis les souvenirs de Waterloo d’un aide de camp de Napoléon, je peux comprendre qu’il parle de "journée noire"; mais d’un historien contemporain j’attends un ton plus calme, qui me fasse comprendre. C’est encore de Lubac, dans son livre "Entretien autour de Vatican II" publié en 1985, qui parle d’un "langage historico-manichéen qui, sous un mode mineur, s'est assez largement répandu". Ou alors est-ce que même de Lubac ne vous convient plus, lui dont vous m’avez toujours parlé avec une admiration sans bornes?

M. – Une histoire neutre, ça n’existe pas.

E. – Oui, mais il faut au moins être serein. Et en tout cas je parle d’une surexcitation qui n’est pas qu’autobiographique et historique, mais aussi philosophique, si j’ose dire.

M. – C’est-à-dire?

E. – Prenons par exemple le problème de l’"esprit" et de la "lettre".

M. – Ne me ressors pas l’histoire selon laquelle les documents conciliaires ne doivent être interprétés qu’à la lettre!

E. – Pourquoi voulez-vous banaliser le discours? C’est vrai que la lettre doit toujours être prise en compte, mais en tout cas elle ne suffit pas à une herméneutique complète. Le juriste romain Celse et saint Paul sont d’accord à ce sujet. Cela me suffit.

M. – Et alors?

E. – Cela dépend de ce que l’on entend par "esprit". C’est là que la surexcitation entre en jeu. Prenez Hegel à Iéna, par exemple, il était indiscutablement surexcité: il voyait en Napoléon l’Histoire passant à cheval… Vous vous souvenez de ce passage des "Leçons d’Iéna", cité - pas par hasard - par le "négativiste" Kojève en exergue de son "Introduction à la lecture de Hegel"? Vous vous en rappelez le ton? "Messieurs! Nous vivons une époque importante, une effervescence où l’Esprit a fait un pas en avant. Il a dépassé sa précédente forme concrète et en a pris une nouvelle…". Et bien, quand je lis certains théologiens, certains historiens actuels, je ne peux pas m’empêcher de penser à ce ton-là.

M. – Tu procèdes par insinuations, par allusions, sans conclure. Ce n’est pas une question de ton!

E. – Ce n’est pas à moi de dire jusqu’à quel point ce n’est qu’une affaire de ton, ou de légitime acceptation d’idées théoriques, ou de soumission aux logiques immanentes. Chaque auteur est différent des autres.

M. – Revenons au Concile. Tu cites le juriste romain Celse, tu insistes sur le texte, et tu négliges l'événement.

E. – Encore un mot-clé: l'événement. Hegel? Heidegger? Pareyson?

M. – Laisse tomber les philosophes!

E. – Je ne laisse rien tomber! Vous, les théologiens actuels, connaissez peu la philosophie. Vous voulez faire de la théo-logie sans "logos", a-philosophique ou trans-philosophique, mais ce n’est souvent que de la rhétorique. Le pire, c’est d’être influencé par Hegel sans même en avoir conscience. Si Hegel était parmi nous, il s’étonnerait de sa vaste descendance intellectuelle, fils et beaux-fils… D’ailleurs vous ne savez même pas écrire des manuels. On a du mal à en trouver un qui ne saute pas de Saint Thomas à Rahner, en omettant tout ce qui est entre les deux! Aujourd’hui on peut être diplômé en théologie en ne sachant presque rien de Duns Scot, Suarez, Melchior Cano, Cajetan. Demandez à dix nouveaux diplômés s’ils ont déjà entendu parler de Scheeben et on verra si vous en trouvez plus de deux pour répondre oui.

M. – Maintenant tu exagères.

E. – Vous avez raison. Je me calme.

M. – L'événement! Pense à la théologie, à "Dei Verbum": Dieu se révèle à travers des événements et des mots intimement liés entre eux...

E. – Bien sûr que je pense à la théologie! Je pense que la Révélation divine culmine dans le Christ, en qui Dieu nous a tout dit. Elle est accomplie, même si elle n’est pas encore complètement expliquée, comme le rappelle le Catéchisme au paragraphe 66. Et puis au paragraphe 83: la tradition "vient des Apôtres et transmet ce qu’ils ont reçu par l'enseignement et par l'exemple et ce qu’ils ont appris du Saint-Esprit". Penser à un évolutionnisme de l’historisme serait une erreur. Ce n’est pas la réalité révélée par Dieu qui change ou évolue; c’est l'intelligence croyante qui grandit en s’approfondissant. Si c’est vrai, le seul Evénement est le Christ, il n’existe pas un âge de l’Esprit qui dépasse celui du Christ.

M. – Epargne-moi l’histoire de Joachim de Flore, s’il te plaît…

E. – Pourquoi pas? Si nous voulons vraiment chercher un événement qui fasse date, pensons à saint François! Qui a plus fait date que lui, pendant tout le deuxième millénaire? Là-dessus on pourrait tous être d’accord, conservateurs, progressistes et même beaucoup d’incroyants. Mais l'interprétation qui voyait en François l'inauguration de l'âge de l’Esprit a été repoussée à juste titre. François lui-même en aurait été stupéfait, lui qui en tout ne voyait que le Christ et la Trinité.

M. – Mais l’histoire franciscaine est complexe. Il faut tenir compte de la politique de saint Bonaventure dans le récit de l’histoire du fondateur…

E. – Ne me parlez pas de politique! Déjà cet emploi du mot, dans un contexte qu’un homme du Moyen Age n’aurait jamais appelé "politique", m’agace parce qu’il est le fruit d’une mauvaise herméneutique. On lit les événements théologiques, philosophiques, juridiques de ce temps à travers les lunettes du "tout est politique" moderne, on considère tout domaine du réel comme "politique". Belle façon de se projeter dans une autre époque, pour quelqu’un qui parle sans cesse d’histoire et d’historicité!

M. – Mais enfin, où veux-tu en venir?

E. – Je veux seulement dire que nous devons en finir avec cette histoire d’événement qui fait date. Il n’y a pas d’événements qui font date, en stricte rigueur logique et théologique. Cette rhétorique de l’événement qui fait date risque de n’être bonne que pour la "mobilisation", d’être une forme de crypto-idéologie.

M. – Mais qu’est-ce que tu souhaites, l'éternel retour de l'identique?

E. – Non. Augustin a démontré que la cyclicité païenne était dépassée pour toujours. Il s’agit plutôt de savoir voir l'Eternel dans le temps, qui croise un point du temps, "ce" point du temps, en s’incarnant.

M. – Tu reviens en arrière...

E. – C’est un retour aux sources. Et à la Source.

M. – Mais l'Evénement unique revit-il aujourd’hui ou non?

E. – Il est accompli. Le temps est accompli, voir Marc 1, 15. Même si nous en attendons la pleine manifestation.

M. – Et le Concile Vatican II? Il t’aide en chemin, ou non?

E. – Il m’aide, bien sûr! Mais il présuppose l'Evénement unique et sa définition dogmatique irréversiblement réalisée par les sept premiers Conciles œcuméniques. Vous comprenez que je ne peux pas penser à un événement qui "déchalcédoinise" le Christ – c’est-à-dire lui enlève ce qui a été dit de lui à Chalcédoine – pour l’inculturer dans la modernité.

M. – Mais personne ne veut cela!

E. – En apparence, presque personne. Sûrement pas Vatican II, qui n’a pas voulu innover dans la foi comme les extrémistes du traditionalisme et du progressisme le disent parallèlement, avec des buts opposés. Mais je me demande s’il y a beaucoup d’arianisme tendanciel et virtuel dans le monde actuel, à quel point on nous pousse trop à humaniser Jésus. Je pense par exemple aux gens qui critiquent "Dominus Jesus" qui a dû rappeler l'abc de la christologie en 2000. Je me demande qui a peur des Conciles de Nicée, d’Ephèse, de Chalcédoine.

M. – Tu utilises une astuce rhétorique suggestive. Tu hiérarchises les Conciles pour tuer sournoisement Vatican II.

E. – Non. Mais je crois qu’aujourd’hui les bases de la foi sont en jeu. J’aimerais donc qu’on donne l’importance appropriée aux colloques sur Nicée et sur Chalcédoine, au lieu de les abandonner à quelques spécialistes érudits.

M. – J’arrête, je suis fatigué. Je rentre chez moi et je vais lire un peu mon livre préféré, le "Journal de l’âme" d’Angelo Giuseppe Roncalli.

E. – Curieuse coïncidence, je suis aussi en train de le lire…

Le livre: "Chi ha paura del Vaticano II?", a cura di Giuseppe Ruggieri e Alberto Melloni, Carocci, Roma, 2009, pp. 152, euro 16,50.


 Traduction française par Charles de Pechpeyrou, Paris, France.


 

Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 18.02.2009 - T/B

 

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