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Le pape Benoît XVI et la foi biblique
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ROME, 18 SEPTEMBRE 2006. (E.S.M.)
Une réflexion sur le rapport entre foi et raison a caractérisé la
rencontre du Saint-Père Benoît XVI avec les représentants du monde
de la science, qui s’est tenue dans l’après-midi du 12 septembre à
l’Université de Ratisbonne.
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Le Pape Benoît XVI à l’Université de Ratisbonne.
Le pape Benoît
XVI et la foi biblique
« Le courage de s’ouvrir à l’ampleur de la raison, et non le refus de sa
grandeur: tel est le programme par lequel une théologie engagée dans la
réflexion sur la foi biblique, entre dans le débat du temps présent ».
Une réflexion sur le rapport entre foi et raison a caractérisé la
rencontre du Saint-Père Benoît XVI avec les représentants du monde de la
science, qui s’est tenue dans l’après-midi du 12 septembre à l’Université de
Ratisbonne. Dans cet Institut, qui compte aujourd’hui 12 facultés
fréquentées par 25.000 étudiants, Joseph Ratzinger a été titulaire de la
Chaire de Dogmatique et d’Histoire du dogme de 1969 à 1971, et a occupé la
charge de vice-recteur. Après avoir exprimé son émotion de se trouver dans
l’Université de Ratisbonne, le Pape Benoît XVI a rappelé les débuts de son
activité de professeur académique à l’Université de Bonn, et a souligné
l’importance des facultés théologiques, puisqu’il est toujours « nécessaire
et raisonnable de s’interroger sur Dieu par l’intermédiaire de la raison, ce
qui doit être fait dans le contexte de la tradition de la foi chrétienne ».
Dans son cours approfondi, le Saint-Père est parti d’un «
dilemme qui aujourd’hui nous défie d’une façon très directe. La conviction
qu’agir contre la raison est en contradiction avec la nature de Dieu,
est-elle seulement une pensée grecque ou vaut-elle toujours et en elle-même
? ». « Je pense - poursuit le Saint-Père - que dans ce point se manifeste la
profonde concordance entre ce qui est grec au meilleur sens du terme et ce
qui est foi en Dieu sur le fondement de la Bible ». La rencontre entre le
message biblique et la pensée grecque n’arrive pas par hasard. Le Pape a
ensuite cité la traduction de l’Ancien Testament, effectuée à Alexandrie -
la « Septante », comme « plus qu’une simple traduction du texte hébreux » :
c’est en effet « une preuve textuelle en tant que telle et un pas spécifique
important dans l’histoire de la Révélation, où cette rencontre est réalisée
d’une façon, qui pour la naissance du Christianisme et sa divulgation, a eu
une signification décisive. Au fond, il s’agit d’une rencontre entre foi et
raison, entre un authentique illuminisme et la religion ».
Le
Saint-Père a rappelé comment à la fin du Moyen-Age se sont développées dans
la théologie « des tendances qui rompent cette synthèse entre l’esprit grec
et l’esprit chrétien » et qui ont conduit à des positions selon lesquelles «
la transcendance et la diversité de Dieu sont accentuées de façon exagérée,
de sorte que même notre raison, notre sens du vrai et du bien ne sont plus
un vrai miroir de Dieu. Au contraire, la foi de l’Eglise s’en est toujours
tenue à la conviction qu’entre Dieu et nous, entre son éternel Esprit
créateur et notre raison créée il existe une véritable analogie, dans
laquelle certes les dissemblances sont infiniment plus grandes que les
similitudes, mais non pas jusqu’au point d’abolir l’analogie et son langage.
Dieu ne devient! pas plus divin par le fait que nous le repoussons loin de
nous dans un volontarisme pur et impénétrable ».
Le rapprochement
entre la foi biblique et l’interrogation sur le plan philosophique de la
pensée grecque, « est une donnée d’une importance décisive non seulement du
point de vue de l’histoire des religions, mais aussi du point de vue de
l’histoire universelle » a souligné le Pape Benoît XVI. Par cette rencontre
en effet le christianisme, « malgré son origine et ses développements
importants en Orient, a enfin trouvé sa marque décisive en Europe. Cette
rencontre, à laquelle s’ajoute successivement le patrimoine de Rome, a créé
l’Europe, et reste le fondement de ce qui, avec raison, peut s’appeler
Europe ».
Depuis le début de l’époque moderne la recherche
théologique est dominée de façon croissante par la recherche de «
déhellénisation » du christianisme : on peut distinguer dans ce programme
trois vagues liées entre elles, et en même temps clairement distinctes l’une
de l’autre. « La déhellénisation surgit d’abord avec les principaux
postulats de la Réforme du XVIè siècle » a rappelé le Pape. Puis la
théologie libérale des XIXè et XXè siècles a eu pour but de « mettre le
Christianisme en harmonie avec la raison moderne, le libérant d’éléments
d’apparence philosophique et théologique, comme par exemple la foi en la
divinité du Christ et dans la trinité de Dieu ». Actuellement il existe une
troisième vague de déhellénisation, selon laquelle « la synthèse avec
l’hellénisme, accomplie dans l’Eglise antique, aurait été une première
inculturation, qui ne devrait pas lier les autres cultures. Cette thèse
n’est pas simplement erronée ; elle est grossière et imprécise. Le Nouveau
Testament, en effet, a été écrit en langue grecque et porte en lui-même le
contact avec l’esprit grec, un contact qui a mûri dans le développement
précédent de l’Ancien Testament ».
Concluant ses réflexions, le
Saint-Père Benoît XVI a exclu que la critique de la raison moderne conduise
à revenir en arrière, à avant les Lumières : « Ce qui est valable dans le
développement moderne de l’esprit est reconnu sans réserve : nous sommes
tous reconnaissants pour les grandioses possibilités qu’il a ouvert à
l’homme, et pour les progrès qu’il nous a été donné d’accomplir dans le
champ humain». Il s’agit au contraire d’un « élargissement de notre concept
de raison et de son usage. Parce qu’avec toute la joie face aux possibilités
de l’homme, nous voyons aussi les menaces qui surgissent de ces
possibilités, et nous devons nous demander comment nous pouvons les dominer
». Nous réussissons seulement « si la raison et la foi se trouvent unies de
faç! ;on nouvelle ; si nous dépassons la limitation auto décrétée de la
raison à ce qui est vérifiable par l’expérimentation, et nous entrouvrons de
nouveau toute son ampleur ».
Tels sont les présupposés pour que
la théologie, comprise « comme une interrogation sur la raison de la foi »,
ait sa place à l’université et dans le dialogue des sciences, nous rendant
capables d’ « un vrai dialogue des cultures et des religions, un dialogue
dont nous avons un besoin urgent ». En effet « les cultures du monde
profondément religieuses voient justement dans cette exclusion du divin par
l’universalité de la raison une attaque à leurs convictions les plus
intimes. Une raison, qui devant le divin est sourde et repousse la religion
dans le rang des sous cultures, est incapable de s’insérer dans le dialogue
des cultures ».
Le pape Benoît XVI a conclut son discours par
cette exhortation : « L’occident, depuis longtemps, est menacé par cette
aversion contre les interrogations fondamentales de sa raison, et ne peut
subir ainsi qu’un grand dommage. Le courage de s’ouvrir à l’ampleur de la
raison, non le refus de sa grandeur : c’est le programme par lequel une
théologie engagée dans la réflexion sur la foi biblique, entre dans le débat
du temps présent ».
Sources: Vatican: (S.L.)
Eucharistie sacrement de la miséricorde 18.09.2006 - BENOÎT XVI |