Motu proprio de Benoît XVI, réaction de l'Abbaye
du Barroux |
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Le 17 août 2007 -
(E.S.M.)
- C’est en fils aimants que nous recevons les décisions du
Saint-Siège. Il est difficilement supportable d’entendre les uns et les
autres donner de bonnes ou mauvaises notes aux documents émanant du Pape
Benoît XVI.
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L'Abbaye
du Barroux -
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Motu proprio de Benoît XVI, réaction de l'Abbaye du Barroux
La réaction de Dom Louis-Marie, Père abbé de l’abbaye
Sainte-Madeleine
— Comment avez-vous reçu le Motu proprio « Summorum Pontificum » du pape
Benoît XVI ?
— Avec une grande joie, bien sûr. Nous attendions ce document avec une
certaine fébrilité depuis presque un an, désespérant parfois de sa
promulgation. Pour nos anciens, c’est une sorte de reconnaissance du
bien-fondé de leur attachement à la messe traditionnelle et à l’esprit promu
par cette forme extraordinaire du rite romain. Mais il faut ajouter que
notre attitude doit être avant tout filiale. C’est en fils aimants que nous
recevons les décisions du Saint-Siège. Il est difficilement supportable
d’entendre les uns et les autres donner de bonnes ou mauvaises notes aux
documents émanant du Pape Benoît XVI. Au sujet des réformes liturgiques, Dom
Prou, abbé de Solesmes, avait rappelé à sa communauté que les désirs du
Saint-Père étaient des ordres. C’est en fils que nous recevons ce Motu
proprio et que nous regrettons l’attitude réservée ou hautaine adoptée par
certains évêques et de nombreux fidèles de Mgr Lefebvre, lesquels ont salué
ce document par un : « Peut mieux faire ».
— Comment voyez-vous maintenant l’évolution : dans une sorte de parallélisme
entre les deux formes du rite romain ou dans une unité à laquelle il
faudrait aboutir ?
— Quand on regarde l’histoire de l’Église, on constate deux tendances. La
première est celle de l’unité du rite. Le Saint Père y fait une allusion en
saluant le rôle des bénédictins dans l’unification du rite selon le désir du
pape saint Grégoire le Grand. Il semble que ce soit aussi le désir de Benoît
XVI selon la lettre écrite par lui, alors qu’il était encore cardinal, au Dr
Barth (cf. la lettre Aletheia d’Yves Chiron). Pour cela, il faudra du temps
et du travail dans les esprits et dans les livres. Un premier chantier
serait de réduire les abus de part et d’autre, que l’on peut résumer selon
le mot du philosophe Gustave Thibon : « Ne pas absolutiser ce qui est
relatif et ne pas relativiser ce qui est absolu. »
La deuxième serait, d’une part, certaines retouches dans la « forme
extraordinaire » comme, par exemple, l’adoption de nouvelles préfaces et des
nouveaux saints, la possibilité des lectures en vernaculaire et
l’application de quelques modifications de 1964 et 1965, comme Dom Gérard
l’a fait pour nous et comme cela se faisait à Ecône jusqu’en 1982. D’autre
part, dans la forme ordinaire du rite, une réforme de la réforme doit être
promue, comprenant un plus large usage du latin, une plus grande sacralité
dans les gestes, une plus grande précision, un plus grand respect des règles
et surtout une manifestation plus nette de la foi en la présence réelle.
Il reste néanmoins un espace entre les deux formes du rite qui me semble
difficile de réduire totalement. Pour résumer, je reprends l’expression du
Père Cassingena-Trévedy qui présente le missel de 1962 comme celui du Ciel
sur la terre, le Ciel qui s’impose à la terre, et celui de 1969 comme du
Ciel pour la terre, avec un souci fondamental d’adaptation. De plus, l’un
est très hiérarchisé (une « pièce montée ») et l’autre plus œcuménique (au
sens catholique du terme). Si l’on veut retrouver une unité, il faudrait
donc tout remanier, mais progressivement pour ne pas recommencer une
révolution cérébrale et légaliste. Cela me semble néanmoins difficile. En
revanche, je crois que l’unité du rite n’est pas une exigence pour l’Église.
La deuxième tendance que l’on constate dans l’histoire est celle de la
pluralité des rites. Il suffit de penser à la vingtaine de rites orientaux
et aux divers rites latins (de Braga, mozarabe, ambrosien, romano-lyonnais,
dominicain). La forme extraordinaire du rite romain peut tout à fait
coexister avec la forme ordinaire, avec cette mission propre et
indispensable d’exprimer que, par la forme ordinaire, on ne veut rejeter ni
le passé ni le sacré. Le Motu proprio interdit en quelque sorte de célébrer
le nouveau rite dans un esprit de rupture avec l’ancien.
— Comment faut-il comprendre les mots « ordinaire » et « extraordinaire »
qui qualifient les deux formes du rite romain ?
— On peut se référer à la notion de confesseur ordinaire et extraordinaire :
dans la paroisse, le confesseur ordinaire est le curé, mais il est courant
de faire appel à un confesseur extérieur, qu’on appelle « extraordinaire ».
Cela ne veut pas dire que les « ordinaires » soient mauvais !
Le mot « extraordinaire », on peut quand même le comprendre au sens où le
rite ancien est supérieur, plus exigeant aussi sur le plan pratique,
spécialement pour ceux qui ne comprennent pas le latin. Dans aucun séminaire
on n’apprend à célébrer selon le rite de Paul VI ; ici, au contraire, on met
six mois à enseigner le rite traditionnel, six mois où nos ordinands disent
des « messes blanches », tant il exige de respect et de précision dans les
paroles et les gestes.
— Cette avancée sur la question liturgique ne semble pas suffisante à
certains, qui mettent en avant la nécessité de poursuivre la réflexion
critique sur Vatican II parfois jusqu’à prôner la méfiance sur le Motu
proprio. Qu’en pensez-vous ?
— Le refus du fond de la doctrine de Vatican II et des principes de ses
décisions disciplinaires est une prémisse fausse, incompatible avec la
doctrine catholique concernant l’assistance du Saint-Esprit à son Église. Du
faux, il peut suivre n’importe quoi, même si on raisonne rigoureusement. Si,
du côté « progressiste », le coup de maître de Satan a souvent été de faire
avaler à beaucoup de fidèles sous le prétexte d’obéir, et d’accepter le
concile, des abus que le concile n’avait nullement cautionnés, il a aussi
été, du côté « traditionaliste », sous le prétexte de fidélité à la
Tradition, de faire avaler à certains des discours, des prises de position
et des actes absolument contraires à toute la Tradition divine et
apostolique.
— Le Pape Benoît XVI suggère et souhaite que les nouveaux saints puissent
être intégrés dans le calendrier traditionnel. Que cela vous inspire-t-il ?
Et pour ce qui est du « dimanche de la Miséricorde », comment pourrait-il
trouver sa place dans l’ordonnancement du temporal ?
— Il est normal d’intégrer les nouvelles fêtes de saints dans le calendrier
: cela s’est toujours fait dans l’Église. Entre saint Pie V et Pie IX, cent
nouveaux saints sont entrés au calendrier, et entre Pie IX et Jean XXIII,
encore cent autres environ. Pour ne rien dire des changements de degrés et
parfois de dates de leurs fêtes.
Quant au dimanche de la Miséricorde, il a lieu le dimanche in albis.
Il ne semble pas (sauf erreur de ma part) que sa célébration liturgique
oblige le remplacement des textes de la liturgie dominicale du jour. Cela
fait quelques années que nous célébrons ce dimanche de la Miséricorde au
monastère avec les textes du dimanche in albis qui conviennent très
bien.
Nous avons déjà mené un travail sur le sanctoral à la suite des rencontres
de Fontgombault, y compris sur le bréviaire. Pour l’heure c’est un travail
sans autorité, pas encore utilisé. A Campos, Mgr Rifan a déjà intégré de
nouveaux saints et bienheureux.
— Le Motu proprio ne constitue-t-il pas un appel à faire développer l’étude
du latin, du grégorien, de la liturgie… pour faire mieux comprendre les
splendeurs de la liturgie traditionnelle ?
— Selon le nouveau Code de droit canonique
(can. 928), la messe peut être
célébrée en latin, ou dans une traduction approuvée. Chaque prêtre a donc le
droit de célébrer en latin même le nouveau rite. Cela, beaucoup l’ignorent,
même parmi les évêques. Le vernaculaire a été imposé comme norme universelle
par un abus de pouvoir, non conforme aux décisions du Saint-Siège concernant
le nouvel Ordo. Malheureusement, Paul VI a fermé les yeux et parlé, et agi
comme si le vernaculaire était devenu la règle en dehors des monastères.
N’était-ce pas transformer un fait accompli en apparence de droit ? Ainsi,
lorsqu’on parle de messe en latin, de nos jours, presque plus personne ne
songe à la messe de Paul VI. Ce qui tend à conforter l’idée – erronée – que
le latin est l’apanage de la messe de saint Pie V.
De toute façon, l’étude du latin est une nécessité pour rester en contact
avec notre passé, et donc avec tous les textes (chrétiens ou païens) écrits
dans cette langue admirable, et il faut donc l’encourager pour des raisons
beaucoup plus vastes. Il est inacceptable qu’il existe en France des
séminaires où, contrairement au droit (can. 249), le latin n’est plus
enseigné.
Quant au grégorien, de soi, il n’est pas non plus réservé à la messe de
saint Pie V, et l’exhortation apostolique Sacramentum caritatis, qui
concerne de soi le nouveau rite, rappelle l’importance du grégorien. D’autre
part, la messe de saint Pie V n’avait pas toujours été célébrée en grégorien
: c’était saint Pie X qui avait redonné son droit de cité à cette monodie
sobre et contemplative, au sein des polyphonies baroques plus ou moins
exubérantes, pour ne rien dire des musiques dépourvues du sens du sacré qui
pullulaient (et pullulent de nouveau, sous une forme encore pire), sans
d’ailleurs interdire la polyphonie sacrée.
L’étude de la liturgie a son importance, mais je voudrais déclarer à
certains « traditionalistes » que la liturgie ne se limite pas à une
spiritualité des rubriques jusqu’au baiser des burettes, et à certains
liturgistes promoteurs du nouveau rite, que la liturgie ne comprend pas
seulement l’étude de l’histoire de la liturgie et la réduction de celle-ci à
des reconstructions professorales en chambre à partir de quelques données
écrites de l’Antiquité chrétienne et du Moyen Age. De plus, la liturgie
n’est pas principalement objet d’étude (bien que l’étude des rubriques et
celle de l’histoire de la liturgie soient toutes deux indispensables), la
liturgie est action du Christ et de toute l’Église. C’est donc un drame dans
lequel on se coule, et auquel on conforme sa manière de penser. La Règle de
saint Benoît ne nous dit-elle pas de son côté : « Psalmodions de telle sorte
que notre esprit concorde avec notre voix. » Les textes lus, et les gestes
accomplis doivent modeler, sculpter notre vie intérieure, par le biais des
vérités qu’elles véhiculent souvent sous forme symbolique ou poétique. Ne
desséchons pas notre étude de la liturgie par des attitudes trop cérébrales,
mais imprégnons-nous des textes et des attitudes pour élever notre esprit
jusqu’à Dieu et nous disposer à recevoir sa charité dans ses sacrements.
Propos recueillis par Jeanne Smits et Olivier Figueras
Le Motu Proprio
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Texte intégral du Motu
Proprio:
Publication du "Motu Proprio Summorum Pontificum"
Motu Proprio Summorum Pontificum
(doc word)
Lettre explicative:
Lettre du pape Benoît XVI aux évêques
Lettre du pape Benoit XVI accompagnant le motu
proprio (doc word)
Sources:
Présent
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 17.08.2007 - BENOÎT XVI - Motu Proprio |