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19 Avril 2005
 

Benoît XVI : La vérité de l'homme, c'est qu'il achoppera toujours contre la vérité

Le 15 mars  2023 - (E.S.M.) - La vérité de l'homme, c'est son manque de vérité. Quand le psaume 116 (v. 11) nous dit que tout homme n'est que mensonge, que toujours, sur un point ou sur un autre, il vit contre la vérité, nous trouvons déjà là, mis à nu, le visage réel de l'homme. La vérité de l'homme, c'est qu'il achoppera toujours contre la vérité.

Culte chrétien - Pour agrandir l'image ► Cliquer  

 

THEOLOGIE

II. «A souffert sous Ponce-Pilate, a été crucifié, a été enseveli»

c) L'essence du culte chrétien

    L'essence du culte chrétien ne consiste donc pas dans l'offrande de choses, ni dans une destruction quelconque, comme il est répété sans cesse dans les théories du sacrifice de la messe, depuis le XVIe siècle. D'après ces théories, la destruction serait la vraie façon de reconnaître la souveraineté de Dieu sur toutes choses. Toutes ces spéculations sont tout simplement dépassées par l'événement du Christ et par l'interprétation qu'en donne la Bible. Le culte chrétien consiste dans l'absolu de l'amour, tel que seul pouvait l'offrir celui en qui l'amour même de Dieu était devenu amour humain ; il consiste dans la forme nouvelle de représentation, incluse dans cet amour : à savoir que le Christ a aimé pour nous, et que nous nous laissons saisir par lui. Ce culte signifie donc que nous mettons de côté nos propres tentatives de justification ; celles-ci ne sont, au fond, que des excuses qui nous opposent les uns aux autres, comme Adam par exemple essaya de se justifier en se trouvant des excuses et en repoussant la faute sur l'autre, cherchant finalement à accuser Dieu lui-même : « C'est la femme que tu as mise auprès de moi qui m'a donné de l'arbre... » (Gn 3, 12).
Il exige qu'au lieu de nous détruire mutuellement, en cherchant à nous justifier nous-mêmes, nous acceptions le don de l'amour de Jésus-Christ qui s'est engagé pour nous, et que nous nous laissions réunir dans cet amour, pour devenir avec le Christ et en Lui de vrais adorateurs. A partir de là, il devrait être possible de répondre brièvement à quelques questions qui se posent encore.

    1) Se réclamant du message d'amour du Nouveau Testament, une tendance se fait jour de plus en plus,
qui voudrait réduire totalement le culte chrétien à l'amour fraternel, à la solidarité humaine (Mitmenschlichkeit), et qui ne veut plus admettre aucun amour ou culte direct de Dieu : l'on n'accepte plus que la ligne horizontale et l'on refuse la ligne verticale de la relation directe à Dieu. En partant de ce que nous avons dit, on n'aura sans doute pas de mal à voir pourquoi cette conception, qui paraît à première vue si sympathique, passe en fait à côté, non seulement de la réalité chrétienne, mais encore de la véritable réalité humaine. Un amour fraternel qui voudrait se suffire à lui-même serait en fin de compte de l'égoïsme, de l'affirmation de soi sous sa forme extrême. Il refuse ses possibilités ultimes d'ouverture, de détachement, de désintéressement, s'il n'accepte pas que cet amour a lui-même besoin d'être racheté par celui qui seul a réellement assez aimé. En dépit des meilleures intentions, il fait finalement du tort au prochain et à lui-même, car l'homme ne trouve pas son accomplissement dans les simples relations de la solidarité humaine ; il ne le trouve que dans la communion de l'amour désintéressé pour Dieu même. La gratuité de la simple adoration constitue la plus haute possibilité de l'homme, c'est là seulement qu'il atteint sa véritable et définitive libération.

    2) Une question toujours à nouveau soulevée, en particulier par les dévotions traditionnelles à la croix, est celle du rapport qui existe en fait entre le sacrifice (donc l'adoration) et la souffrance. D'après les réflexions qui viennent d'être faites, le sacrifice chrétien n'est pas autre chose que l'exode du « pour », consistant à sortir de soi, accompli fondamentalement dans l'homme qui est tout entier exode, dépassement de soi dans l'amour. Le principe constitutif du culte chrétien est donc ce mouvement d'exode, avec son orientation, double et unique à la fois, vers Dieu et vers le prochain. En introduisant l'être de l'homme auprès de Dieu, le Christ l'introduit à son salut. L'événement de la croix est pain de vie « pour la multitude » (Lc 22, 19), parce que le Crucifié a remodelé le corps de l'humanité pour lui donner la forme du « oui » de l'adoration. Il est pleinement « anthropocentrique », pleinement ordonné à l'homme, parce qu'il a été radicalement théocentrique, en livrant le Moi, et de ce fait l'être de l'homme, à Dieu. Or, dans la mesure où cet exode de l'amour est l' « ec-stase » de l'homme hors de lui-même, une extase où il se trouve tendu en avant infiniment au-delà de lui-même et comme écartelé, attiré bien au-delà de ses apparentes possibilités de développement, dans cette mesure-là l'adoration (le sacrifice) est en même temps croix, souffrance du déchirement, mort du grain de blé, qui ne peut porter du fruit qu'en passant par la mort. Mais l'on voit en même temps par là que cet élément de la souffrance est secondaire, et découle d'une réalité première qui seule lui donne un sens. Le principe constitutif du sacrifice n'est pas la destruction, mais l'amour. C'est seulement dans la mesure où cet amour brise, ouvre, crucifie, déchire, que la souffrance fait partie du sacrifice : comme forme de l'amour dans un monde marqué par la mort et l'égoïsme.

    Il existe, à ce sujet, un texte important de Jean Daniélou, qui répond il est vrai à une autre problématique, mais qui devrait pouvoir éclairer davantage l'idée que nous essayons de faire ressortir : « Entre le monde païen et la Trinité bienheureuse, il n'y a qu'un passage qui est la croix du Christ. Comment nous étonner alors, dès que nous voulons nous établir dans cet intervalle et tisser à nouveau entre le monde païen et la Trinité les fils mystérieux qui les rejoindront, de ne pouvoir le faire que par la croix. Il faut nous configurer à cette croix, la porter en nous et, comme le dit saint Paul du missionnaire, « porter toujours avec nous dans notre corps la mort de Jésus » (2Co 4, 10). Cette division qui nous crucifie, cette incompatibilité dans notre cœur de porter à la fois l'amour de la Trinité très sainte et l'amour d'un monde étranger à la Trinité très sainte, c'est la Passion même du Fils unique qu'il nous appelle à partager, Lui qui a voulu porter en Lui cette séparation, pour la détruire en Lui, mais qui ne l'a détruite que parce qu'il l'a d'abord portée : il va d'une extrémité à l'autre. Sans quitter le sein de la Trinité, il s'étend jusqu'aux extrêmes frontières de la misère humaine et il remplit tout l'intervalle. Cette extension du Christ, dont les quatre dimensions de la croix sont le signe, est l'expression mystérieuse de notre distension et nous configure à elle
6l. » La souffrance est en fin de compte le résultat et l'expression de cette extension de Jésus-Christ, depuis l'intimité de Dieu jusqu'à l'enfer du « Mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ? ». Celui qui a distendu son existence au point d'être à la fois plongé en Dieu et plongé dans l'abîme de la créature abandonnée de Dieu, se trouve nécessairement écartelé, il est réellement « crucifié ». Mais cet écartèlement  est identique à l'amour : il en est la réalisation « jusqu'au bout » (Jn 13, 1), il est l'expression concrète de l'ouverture immense créée par l'amour. On pourrait dégager à partir de là le vrai fondement d'une dévotion authentique envers la Passion, et montrer aussi comment dévotion à la croix et spiritualité apostolique se rejoignent. L'on pourrait faire voir que l'activité apostolique, service des hommes dans le monde, est intimement liée au cœur même de la mystique chrétienne et de la dévotion à la croix. Les deux visées ne s'opposent pas; au contraire, dans leur vraie profondeur, elles vivent l'une de l'autre. Il devrait enfin être clair par là que ce qui compte dans la croix, ce n'est pas une accumulation de souffrances physiques, comme si la valeur rédemptrice de la croix consistait dans la plus grande somme possible de tourments. Comment Dieu pourrait-il prendre plaisir aux tourments de sa créature, voire de son Fils, et les considérer même comme la valeur à fournir pour acheter la réconciliation ? La Bible et la foi chrétienne authentique sont loin de telles idées. Ce n'est pas la souffrance, comme telle, qui compte, mais l'ouverture créée par l'amour, élargissant l'existence au point d'unir ce qui est loin et ce qui est proche, de mettre l'homme abandonné de Dieu en rapport avec Dieu. L'amour seul donne un sens à la souffrance. S'il en était autrement, ce sont les bourreaux qui auraient été à la croix les véritables prêtres, ce sont eux qui, en provoquant la souffrance, auraient offert le sacrifice. Parce que cela ne dépendait pas de la souffrance, mais de ce centre intime qui la supporte et l'anime, à cause de cela, ce ne furent pas eux, ce fut Jésus le prêtre, qui réunit à nouveau en son corps les deux extrémités séparées du monde (Ep 2, 13 s).

    Par là nous avons, au fond, déjà répondu à la question dont nous sommes partis, à savoir si ce n'était pas une idée indigne que de se représenter un Dieu exigeant l'immolation de son Fils pour apaiser sa colère. A cette question, on ne peut que répondre : De fait, Dieu ne saurait être conçu de cette manière. Mais une telle notion de Dieu n'a rien à voir avec l'idée de Dieu du Nouveau Testament. Car, celui-ci nous présente au contraire
un Dieu qui, de sa propre initiative, a voulu devenir dans le Christ l'oméga - la dernière lettre - dans l'alphabet de la création. Il nous parle d'un Dieu qui est lui-même l'acte d'amour, qui est tout entier « pour », et qui par suite revêt nécessairement l'incognito du dernier ver de terre (Ps 22 [21], 7). Il nous montre un Dieu qui s'identifie à sa créature et qui dans ce contlnerl a minimo - en se laissant contenir et dominer par le moindre des êtres - déploie cette « surabondance » qui le révèle comme Dieu.

La croix est révélation. Elle ne révèle pas quelque chose, elle révèle Dieu et l'homme. Elle révèle qui est Dieu et comment est l'homme. Dans la philosophie grecque, il y a un singulier pressentiment de cet ordre de choses : l'image du juste crucifié, selon Platon. Le grand philosophe s'est demandé, dans son traité de la République, quelle devait être dans ce monde la condition d'un homme pleinement juste. Il arrive à la conclusion suivante : la justice d'un homme n'est parfaite et avérée que s'il prend sur lui l'apparence de l'injustice, car alors seulement l'on peut voir qu'il n'est pas l'esclave de l'opinion des autres, mais tient à la justice uniquement pour elle-même. Aussi, d'après Platon, le vrai juste doit-il être méconnu et persécuté en ce monde. Platon va même jusqu'à dire : « Ils vont nous dire qu'en réalité le juste, tel que je l'ai représenté, sera fouetté, torturé, emprisonné, qu'on lui brûlera les yeux, qu'enfin, après avoir souffert des maux de toute sorte, il sera empalé »
52. Ce texte, écrit quatre cents ans avant Jésus-Christ, fera toujours une impression profonde sur un chrétien. La pensée philosophique approfondie entrevoit ici que le juste parfait doit être dans ce monde le juste crucifié. Il y a là un pressentiment de cette révélation de l'homme qui a lieu sur la croix.

Que le juste parfait, lorsqu'il parut, soit devenu le Crucifié, livré à la mort par la justice, ce drame nous découvre sans ménagement qui est l'homme : Homme, voilà comme tu es, tu ne peux supporter le juste ; celui qui est pur amour, tu en fais un fou, tu le bats, tu le répudies; tu es ainsi parce que toi-même tu es injuste et que tu as besoin de l'injustice de l'autre pour te sentir excusé; alors le juste, qui semble te priver de cette excuse, tu n'en as que faire. Voilà ce que tu es. Jean a résumé tout cela dans le mot de Pilate : « Ecce homo ! (« Voici l'homme ! »), ce qui signifie profondément : Voilà ce qu'il en est de l'homme.
L'homme, c'est cela. La vérité de l'homme, c'est son manque de vérité. Quand le psaume 116 (v. 11) nous dit que tout homme n'est que mensonge, que toujours, sur un point ou sur un autre, il vit contre la vérité, nous trouvons déjà là, mis à nu, le visage réel de l'homme. La vérité de l'homme, c'est qu'il achoppera toujours contre la vérité ; le juste crucifié est ainsi le miroir présenté à l'homme, où celui-ci voit son propre visage sans fard. Mais la croix n'est pas seulement révélation de l'homme, elle est également révélation de Dieu : ce qui caractérise Dieu, c'est qu'il vient jusque dans cet abîme s'identifier avec l'homme, c'est qu'il juge en sauvant. Dans l'abîme de la faillite humaine, se révèle l'abîme encore bien plus insondable de l'amour divin. Ainsi la croix est vraiment le centre de la révélation, d'une révélation qui ne nous fait pas connaître quelques propositions inconnues jusqu'à présent, mais nous dévoile nous-mêmes, en nous révélant devant Dieu et en révélant Dieu au milieu de nous.

A suivre : « EST DESCENDU AUX ENFERS »


Notes :
51. J. Daniélou, Essai sur le Mystère de l'Histoire, Éd. du Seuil, 1953, p. 329.
52. Politeia, II, 361-362 (trad. française d'après Platon, Œuvres complètes, VI, Paris, 1959); - cf. à ce sujet H. U. von balthasar, Herrlichkeit, III/1, Einsiedeln, 1965. pp. 156-161 ; - E. Benz, Der gekreuzigte Cerechte bei Plato, im NT und in der alten Kirche, Abhandlungen der Mainzer Akademie, Heft, 12




  

 

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Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -  E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde - (E.S.M.) 15.03.2023

 

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