« Dans la vérité, la paix »: Message de Benoît XVI pour la Journée mondiale de la Paix
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PRESENTATION DU MESSAGE DE LA PAIX 2006
Rome, 13 Décembre 2005. Ce matin près la Salle-de-Presse du Saint-Siège, le Cardinal Renato Martino, Président du Conseil pontifical Justice et Paix, a présenté le message de Benoît XVI pour la Journée mondiale de la paix 2006 (1er janvier 2006): "
Dans la vérité, la paix
".
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« Dans la vérité, la paix
», c’est le titre du message de Benoît XVI pour la Journée mondiale de la Paix, le 1er janvier 2006, publie ce mardi 13 décembre au Vatican.
Le Cardinal Renato Martino, Président du Conseil pontifical Justice et Paix, a présenté le message de Benoît XVI pour la Journée mondiale de la paix 2006 (1er janvier 2006)
Il était assisté de Mgr.Giampaolo Crepaldi, Secrétaire du dicastère, et de Mgr.Frank J.Dewane, Sous-secrétaire.
"Le Saint-Père - a dit le Cardinal - y propose une réflexion sur la vérité reliée aux diverses dimensions et questions relatives à la paix dans le monde", en s'inspirant des indications de la constitution pastorale conciliaire Gaudium et Spes.
"La question de la vérité est sans nul doute un thème cher à Benoît XVI, constamment repris dans son ministère au point d'en caractériser le ministère. Elle est un sujet de base à partir duquel sont structurés les autres thèmes traités et proposés selon l'art de la variation musicale".
"Le message 2006 se présente en quatre parties. Dans la première, le caractère théologique et spirituel met en évidence l'importance du rapport entre paix, vérité et mensonge. Dans la seconde, la vérité de la paix est envisagée dans le contexte de la réalité de la guerre. Dans la troisième la vérité et la paix sont traitées comme étroitement liées au terrorisme. La quatrième propose l'urgence qu'il y a à relancer le processus politique du désarmement".
Dans la première partie du message, a ajouté le Cardinal, "le Pape Benoît XVI souligne le fait que la vérité et le mensonge ne doivent pas être considérés comme de simples passe-temps intellectuels mais comme des faits historiques et des évènements décisifs dont dépendent le bonheur ou le malheur des gens".
Puis le Pape écrit que la paix "
est le fruit de l'ordre imprimé dans la société humaine par son divin Fondateur
", rappelant que "pour la croissance du front de la paix, l'humanité doit appliquer la loi morale universelle. Et il introduit sa réflexion sur le mensonge comme péché aux conséquences dévastatrices pour la vie des personnes comme des peuples". Au plan historique, le Pape porte un jugement très sévère sur ces thèmes, achevant la première partie en soulignant "la nécessité de la paix", intrinsèque à l'être humain et "bien commun de la famille humaine toute entière".
La seconde partie analyse "la vérité de la paix dans le cadre de la guerre en cours. Dans ce cas, c'est -écrit-il- le plein respect et l'observation stricte du droit international humanitaire qui doivent prévaloir en restant la référence pour la communauté internationale".
"Après avoir confirmé la condamnation du terrorisme Benoît XVI offre un paradigme nouveau et jusqu'ici inexploré pour interpréter le phénomène terroriste. Sa source d'inspiration réside dans le nihilisme et dans le fondamentalisme fanatique", qui s'opposent "à la vérité, et par conséquent à la paix, de façon totalement erronée".
Le Saint-Père n'oublie pas que s'il y a moins de guerres il y a de nombreux conflits larvés. Il en appelle aux autorités politiques qui "se servent de leur pouvoir pour diffuser dans les peuples le mépris à l'encontre des autres". Et il s'en prend aussi "aux programmes de certains pays tendant à potentialiser le nucléaire sous le faux prétexte de garantir la sécurité nationale".
Pour conclure, le Cardinal Martino a souligné les divers passages du texte qui "tracent un parcours de spiritualité de la paix" dans une dimension christologique, missionnaire et ecclésiale. "Il s'agit d'une invitation à prier pour la paix et à témoigner d'elle par l'exercice de la charité".
OP/PRESENTATION MESSAGE PAIX/MARTINO VIS 051213 (580)
MESSAGE DE SA
SAINTETÉ
BENOÎT XVI
POUR LA CÉLÉBRATION DE LA
JOURNÉE MONDIALE DE LA PAIX
1er JANVIER 2006
DANS LA VÉRITÉ, LA PAIX
1. Au commencement de la nouvelle année, par le traditionnel Message pour la
Journée mondiale de la Paix, je désire adresser des vœux affectueux à tous les
hommes et à toutes les femmes du monde, particulièrement aux personnes qui
souffrent en raison de la violence et des conflits armés. Ce sont des vœux
pleins d'espérance pour un monde plus serein, où augmentera le nombre des
personnes qui, individuellement ou collectivement, s'engageront à parcourir les
chemins de la justice et de la paix.
2. Je voudrais d'abord rendre un sincère hommage de gratitude à mes
Prédécesseurs, les grands Papes Paul VI et Jean-Paul II, artisans de paix
éclairés. Animés de l'esprit des Béatitudes, ils ont su lire dans les nombreux
événements de l'histoire qui ont marqué leurs Pontificats respectifs
l'intervention providentielle de Dieu, qui n'oublie jamais les destinées du
genre humain. À plusieurs reprises, en infatigables messagers de l'Évangile, ils
ont invité chaque personne à repartir de Dieu afin de pouvoir promouvoir une
cohabitation pacifique dans toutes les régions de la terre. Mon premier Message
pour la Journée mondiale de la Paix se situe dans le sillage de ce très noble
enseignement: par ce message, je désire encore une fois confirmer la ferme
volonté du Saint-Siège de continuer à servir la cause de la paix. Le nom même de
Benoît, que j'ai choisi le jour de mon élection au Siège de Pierre, indique mon
engagement déterminé en faveur de la paix. J'ai ainsi voulu me référer à la fois
au Saint Patron de l'Europe, inspirateur d'une civilisation pacificatrice dans
le continent tout entier, et au Pape Benoît XV, qui condamna la Première Guerre
mondiale comme « un massacre inutile » (1) et qui a tout mis en œuvre pour que
les raisons supérieures de la paix soient reconnues par tous.
3. Le thème de réflexion de cette année — « Dans la vérité, la paix » — exprime
la conviction que, là où l'homme se laisse éclairer par la splendeur de la
vérité et quand il le fait, il entreprend presque naturellement le chemin de la
paix. La Constitution pastorale Gaudium et spes du Concile œcuménique Vatican
II, qui s'est achevé il y a 40 ans, affirme que l'humanité ne réussira à «
édifier un monde réellement plus humain pour tous les hommes et partout sur
terre que si tous se renouvellent intérieurement et se tournent vers la vérité
de la paix ».(2) Mais quelle signification doit-on donner à l'expression «
vérité de la paix »? Pour répondre de façon juste à cette question, il faut bien
avoir en mémoire que la paix ne peut être réduite à une simple absence de
conflits armés, mais il faut la comprendre comme « le fruit d'un ordre qui a été
implanté dans la société humaine par son divin Fondateur », un ordre « qui doit
être mené à la réalisation par des hommes aspirant sans cesse à une justice plus
parfaite ».(3) En tant que résultat d'un ordre fixé et voulu par l'amour de
Dieu, la paix possède sa vérité intrinsèque et invincible, et elle correspond «
à une aspiration profonde et à une espérance qui vivent en nous de manière
indestructible ».(4)
4. Définie de cette façon, la paix apparaît comme un don céleste et une grâce
divine; à tous les niveaux, elle demande l'exercice de la plus grande
responsabilité, à savoir de conformer dans la vérité, dans la justice, dans la
liberté et dans l'amour, l'histoire humaine à l'ordre divin. Quand n'existe plus
l'adhésion à l'ordre transcendant des choses, ni le respect de la « grammaire »
du dialogue qu'est la loi morale universelle, écrite dans le cœur de l'homme,(5)
quand sont entravés et empêchés le développement intégral de la personne et la
sauvegarde de ses droits fondamentaux, quand de nombreux peuples sont contraints
à subir des injustices et des inégalités intolérables, comment peut-on espérer
en la réalisation du bien de la paix? En effet, manquent alors les éléments
essentiels qui donnent forme à la vérité de ce bien. Saint Augustin a décrit la
paix comme « tranquillitas ordinis »,(6) la tranquillité de l'ordre,
c'est-à-dire la situation qui permet, en définitive, de respecter et de réaliser
pleinement la vérité de l'homme.
5. Et alors, qui peut empêcher la réalisation de la paix et quelle chose peut
l'empêcher? À ce propos, dans son premier livre, la Genèse, la Sainte Écriture
met en évidence le mensonge, prononcé au commencement de l'histoire par l'être à
la langue fourchue, qualifié par l'Évangéliste Jean de « père du mensonge » (Jn
8,44). Le mensonge est aussi un des péchés qu'évoque la Bible dans le dernier
chapitre de son dernier Livre, l'Apocalypse, pour parler de l'exclusion des
menteurs hors de la Jérusalem céleste: « Dehors ... tous ceux qui aiment et
pratiquent le mensonge » (22,15). Au mensonge est lié le drame du péché avec ses
conséquences perverses, qui ont causé et qui continuent à causer des effets
dévastateurs dans la vie des individus et des nations. Il suffit de penser à ce
qui s'est passé au siècle dernier, quand des systèmes idéologiques et politiques
aberrants ont mystifié la vérité de façon programmée et ont conduit à
l'exploitation et à la suppression d'un nombre impressionnant d'hommes et de
femmes, exterminant même des familles et des communautés entières. Comment ne
pas rester sérieusement préoccupés, après ces expériences, face aux mensonges de
notre temps, qui sont comme le cadre de menaçants scénarios de mort dans de
nombreuses régions du monde? La recherche authentique de la paix a son point de
départ dans la conscience que le problème de la vérité et du mensonge concerne
tout homme et toute femme, et qu'il se révèle décisif pour un avenir pacifique
de notre planète.
6. La paix est une aspiration profonde et irrépressible, présente dans le cœur
de toute personne, au-delà des identités culturelles spécifiques. C'est
précisément pourquoi chacun doit se sentir engagé au service d'un bien si
précieux, en travaillant pour qu'aucune forme de fausseté ne s'insinue et ne
vienne perturber les relations. Tous les hommes appartiennent à une unique et
même famille. La mise en avant exagérée de leurs différences contraste avec
cette vérité fondamentale. Il faut retrouver la conscience d'avoir en commun une
même destinée, en dernier ressort transcendante, pour pouvoir mettre en valeur
au mieux les différences historiques et culturelles, sans s'opposer, mais en se
concertant avec les personnes qui appartiennent aux autres cultures. Telles sont
les simples vérités qui rendent la paix possible; elles deviennent facilement
compréhensibles lorsqu'on écoute son cœur, avec une pureté d'intention. La paix
apparaît alors sous un jour nouveau: non comme une simple absence de guerre,
mais comme la convivialité des citoyens dans une société gouvernée par la
justice, société dans laquelle se réalise aussi le bien pour chacun d'entre eux,
autant que faire se peut. La vérité de la paix appelle tous les hommes à
entretenir des relations fécondes et sincères; elle les encourage à rechercher
et à parcourir les voies du pardon et de la réconciliation, à être transparents
dans les discussions et fidèles à la parole donnée. En particulier, le disciple
du Christ qui se sent assailli par le mal et qui de ce fait a besoin de
l'intervention libératrice du divin Maître se tourne vers Lui avec confiance,
sachant bien que ce dernier « n'a pas commis le péché; que dans sa bouche on n'a
pu trouver de mensonge » (1 P 2,22; cf. Is 53, 9). En effet, Jésus s'est défini
comme la Vérité en personne et, parlant dans une vision au voyant de
l'Apocalypse, il a déclaré sa totale aversion pour « tous ceux qui aiment et
pratiquent le mensonge » (Ap 22, 15). C'est Lui qui révèle la pleine vérité de
l'homme et de l'histoire. C'est par la force de sa grâce qu'il est possible
d'être dans la vérité et de vivre de la vérité, parce que Lui seul est
totalement sincère et fidèle. Jésus est la vérité qui nous donne la paix.
7. La vérité de la paix doit avoir valeur en soi et faire valoir son reflet de
lumière bénéfique même quand on se trouve dans la tragique situation de la
guerre. Dans la Constitution pastorale Gaudium et spes, les Pères du Concile
œcuménique Vatican II soulignent que « ce n'est pas parce qu'une guerre a
malheureusement éclaté que du fait même tout devient licite entre parties
adverses ».(7) La Communauté internationale s'est dotée d'un droit humanitaire
international pour limiter au maximum, surtout pour les populations civiles, les
conséquences dévastatrices de la guerre. En de multiples circonstances et de
différentes manières, le Saint-Siège a exprimé son soutien à ce droit
humanitaire, encourageant son respect et sa prompte mise en œuvre, convaincu que
la vérité de la paix existe aussi dans la guerre. Le droit humanitaire
international est à mettre au compte des expressions les plus heureuses et les
plus efficaces des exigences qui émanent de la vérité de la paix. C'est
justement pourquoi le respect de ce droit s'impose comme un devoir pour tous les
peuples. Sa valeur doit être appréciée et il faut en garantir l'application
correcte, en le renouvelant par des normes ponctuelles, capables de faire face
aux scénarios changeants des conflits armés d'aujourd'hui, ainsi qu'à
l'utilisation d'armements toujours nouveaux et plus sophistiqués.
8. Ma pensée reconnaissante va aux Organisations internationales et à toutes les
personnes qui, par un effort permanent, travaillent à l'application du droit
humanitaire international. Comment pourrais-je oublier ici les nombreux soldats
engagés dans de délicates opérations de règlement des conflits et de
rétablissement des conditions nécessaires à la réalisation de la paix? À eux
aussi je désire rappeler les paroles du Concile Vatican II: « Ceux qui se vouent
au service de la patrie et qui sont incorporés dans l'armée se considéreront eux
aussi comme serviteurs de la sécurité et de la liberté des peuples, et, en
s'acquittant correctement de cette tâche, ils contribuent vraiment à la
consolidation de la paix ».(8) C'est dans ce domaine exigeant que se situe
l'action pastorale des Ordinaires militaires de l'Église catholique: mes
encouragements à demeurer, en toutes situations et en tous milieux, de fidèles
évangélisateurs de la vérité de la paix vont aux Ordinaires militaires ainsi
qu'aux aumôniers militaires.
9. Au jour d'aujourd'hui, la vérité de la paix continue d'être compromise et
niée de façon dramatique par le terrorisme qui, par ses menaces et ses actes
criminels, est en mesure de tenir le monde dans un état d'angoisse et
d'insécurité. Mes Prédécesseurs Paul VI et Jean-Paul II sont intervenus à
plusieurs reprises pour dénoncer la terrible responsabilité des terroristes et
pour condamner l'absurdité de leurs desseins de mort. Ces desseins, en effet, se
révèlent être inspirés d'un nihilisme tragique et bouleversant que le Pape Jean-
Paul II décrivait ainsi: « Celui qui tue par des actes terroristes nourrit des
sentiments de mépris envers l'humanité, faisant preuve de désespérance face à la
vie et à l'avenir: dans cette perspective, tout peut être haï et détruit ».(9)
Non seulement le nihilisme, mais aussi le fanatisme religieux, souvent appelé
aujourd'hui fondamentalisme, peuvent inspirer et alimenter des propos et des
gestes terroristes. Pressentant depuis le commencement le danger explosif que le
fondamentalisme fanatique représente, le Pape Jean-Paul II l'a durement
stigmatisé, mettant en garde contre la prétention d'imposer par la violence,
plutôt que de proposer à la libre décision d'autrui, ses convictions concernant
la vérité. Il écrivait: « Prétendre imposer à d'autres par la violence ce que
l'on considère comme la vérité signifie violer la dignité de l'être humain et,
en définitive, outrager Dieu dont il est l'image ».(10)
10. À tout bien considérer, le nihilisme et le fondamentalisme ont un rapport
erroné à la vérité: les nihilistes nient l'existence de toute vérité, les
fondamentalistes ont la prétention de pouvoir l'imposer par la force. Tout en
ayant des origines différentes et tout en étant des manifestations qui
s'inscrivent dans des contextes culturels divers, le nihilisme et le
fondamentalisme ont en commun un dangereux mépris pour l'homme et pour sa vie,
et, en dernière analyse, pour Dieu lui-même. En effet, à la base de cette
tragique issue commune il y a, en définitive, l'altération de la pleine vérité
de Dieu: le nihilisme en nie l'existence et la présence providentielle dans
l'histoire; le fondamentalisme fanatique en défigure le visage aimant et
miséricordieux, Lui substituant des idoles faites à son image. Dans l'analyse
des causes du phénomène contemporain du terrorisme, il est souhaitable que, en
plus des raisons à caractère politique et social, on ait aussi présent à
l'esprit ses plus profondes motivations culturelles, religieuses et
idéologiques.
11. Devant les risques que l'humanité vit à notre époque, il est du devoir de
tous les catholiques d'intensifier, dans toutes les parties du monde, l'annonce
et le témoignage de « l'Évangile de la paix », proclamant que la reconnaissance
de la pleine vérité de Dieu est la condition préalable et indispensable pour la
consolidation de la vérité de la paix. Dieu est Amour qui sauve, Père aimant qui
désire voir ses enfants se reconnaître entre eux comme des frères cherchant de
manière responsable à mettre leurs différents talents au service du bien commun
de la famille humaine. Dieu est source inépuisable de l'espérance qui donne sens
à la vie personnelle et collective. Dieu, Dieu seul, rend efficace toute œuvre
de bien et de paix. L'histoire a amplement démontré que faire la guerre à Dieu
pour l'extirper du cœur des hommes conduit l'humanité, effrayée et appauvrie,
vers des choix qui n'ont pas d'avenir. Cela doit encourager les croyants à se
faire les témoins convaincus de Dieu, qui est inséparablement vérité et amour,
en se mettant au service de la paix, dans une large collaboration œcuménique,
ainsi qu'avec les autres religions et avec tous les hommes de bonne volonté.
12. Regardant le contexte mondial actuel, nous pouvons enregistrer avec plaisir
quelques signes prometteurs sur le chemin de la construction de la paix. Je
pense, par exemple, à la diminution numérique des conflits armés. Il s'agit
certainement de pas encore très timides sur le sentier de la paix, mais déjà en
mesure d'annoncer un avenir de plus grande sérénité, en particulier pour les
populations martyrisées de la Palestine, la Terre de Jésus, et pour les
habitants de certaines régions d'Afrique et d'Asie qui attendent depuis des
années la conclusion positive des processus de pacification et de réconciliation
en cours. Ce sont des signes réconfortants qui demandent à être confirmés et
consolidés par une action unanime et infatigable, surtout de la part de la
Communauté internationale et de ses Organismes, qui ont pour mission de prévenir
les conflits et d'apporter une solution pacifique à ceux qui sont en cours.
13. Tout cela ne doit cependant pas inciter à un optimisme naïf. On ne peut, en
effet, oublier que, malheureusement, se poursuivent encore de sanglants conflits
fratricides et des guerres dévastatrices, qui sèment larmes et mort en de larges
zones de la terre. Il y a des situations dans lesquelles le conflit, qui couve
comme un feu sous la cendre, peut de nouveau éclater, causant des destructions
d'une ampleur imprévisible. Les autorités qui, au lieu de mettre à exécution ce
qui est en leur pouvoir pour promouvoir efficacement la paix, fomentent chez les
citoyens des sentiments d'hostilité envers les autres nations se chargent d'une
très grave responsabilité: elles mettent en danger, dans des régions
particulièrement à risque, les équilibres délicats atteints au prix de
difficiles négociations, contribuant ainsi à rendre l'avenir de l'humanité plus
dépourvu de sécurité et plus confus. Que dire ensuite des gouvernements qui
comptent sur les armes nucléaires pour garantir la sécurité de leurs pays? Avec
d'innombrables personnes de bonne volonté, on peut affirmer que cette
perspective, hormis le fait qu'elle est funeste, est tout à fait fallacieuse. En
effet, dans une guerre nucléaire il n'y aurait pas des vainqueurs, mais
seulement des victimes. La vérité de la paix demande que tous — aussi bien les
gouvernements qui, de manière déclarée ou occulte, possèdent des armes
nucléaires depuis longtemps, que ceux qui entendent se les procurer — changent
conjointement de cap par des choix clairs et fermes, s'orientant vers un
désarmement nucléaire progressif et concordé. Les ressources ainsi épargnées
pourront être employées en projets de développement au profit de tous les
habitants et, en premier lieu, des plus pauvres.
14. À ce sujet, on ne peut pas ne pas enregistrer avec regret les données
concernant une augmentation préoccupante des dépenses militaires et du commerce
des armes toujours prospère, tandis que stagne dans le marécage d'une
indifférence quasi générale le processus politique et juridique mis en œuvre par
la Communauté internationale pour renforcer le chemin du désarmement. Quel
avenir de paix sera un jour possible si on continue à investir dans la
production des armes et dans la recherche employée à en développer de nouvelles?
Le souhait qui monte du plus profond du cœur est que la Communauté
internationale sache retrouver le courage et la sagesse de relancer résolument
et collectivement le désarmement, donnant une application concrète au droit à la
paix, qui est pour tout homme et pour tout peuple. En s'engageant à sauvegarder
le bien de la paix, les divers Organismes de la Communauté internationale
pourront retrouver l'autorité qui est indispensable pour rendre leurs
initiatives crédibles et incisives.
15. Les premiers à tirer profit d'un choix résolu pour le désarmement seront les
pays pauvres, qui réclament non sans raison, après bien des promesses, la
réalisation concrète du droit au développement. Un tel droit a aussi été
solennellement réaffirmé dans la récente Assemblée générale de l'Organisation
des Nations unies, qui a célébré cette année le soixantième anniversaire de sa
fondation. Confirmant sa confiance dans cette Organisation internationale,
l'Église catholique en souhaite le renouvellement institutionnel et
opérationnel, afin qu'elle soit en mesure de répondre aux nouvelles exigences de
l'époque actuelle, marquée par le vaste phénomène de la mondialisation.
L'Organisation des Nations unies doit devenir un instrument toujours plus
efficace pour promouvoir dans le monde les valeurs de justice, de solidarité et
de paix. Pour sa part, l'Église, fidèle à la mission reçue de son Fondateur, ne
se lasse pas de proclamer partout « l'Évangile de la paix ». Animée comme elle
l'est par la ferme conviction de rendre un service indispensable à tous ceux qui
se consacrent à promouvoir la paix, elle rappelle à tous que, pour être
authentique et durable, la paix doit être construite sur le roc de la vérité de
Dieu et de la vérité de l'homme. Seule cette vérité peut sensibiliser les
esprits à la justice, les ouvrir à l'amour et à la solidarité, encourager tous
les hommes à travailler pour une humanité réellement libre et solidaire. Oui, le
fondement d'une paix authentique s'appuie seulement sur la vérité de Dieu et de
l'homme.
16. En conclusion de ce message, je voudrais maintenant m'adresser
particulièrement à ceux qui croient au Christ, pour leur renouveler l'invitation
à se faire des disciples du Seigneur attentifs et disponibles. En écoutant
l'Évangile, chers frères et sœurs, nous apprenons à fonder la paix sur la vérité
d'une existence quotidienne inspirée par le commandement de l'amour. Il est
nécessaire que chaque communauté s'engage dans une action intense et capillaire
d'éducation et de témoignage qui fasse grandir en chacun la conscience de
l'urgence de découvrir toujours plus profondément la vérité de la paix. Je
demande en même temps que l'on intensifie la prière, parce que la paix est
d'abord un don de Dieu à implorer sans cesse. Grâce à l'aide divine, l'annonce
et le témoignage de la vérité de la paix en sortiront certainement plus
convaincants et plus éclairants. Avec confiance et abandon filial, tournons
notre regard vers Marie, la Mère du Prince de la Paix. Au commencement de cette
nouvelle année, demandons- lui d'aider l'ensemble du Peuple de Dieu à être, en
toute circonstance, artisan de paix, se laissant éclairer par la Vérité qui rend
libre (cf. Jn 8,32). Par son intercession, puisse l'humanité apprécier de
manière croissante ce bien fondamental et s'engager à en consolider la réalité
dans le monde, pour remettre aux générations qui viendront un avenir plus serein
et plus sûr!
Du Vatican, le 8 décembre 2005.
BENEDICTUS PP. XVI
(1) Appel aux Chefs des peuples belligérants (1er août 1917): AAS 9 (1917), p.
423.
(2) N. 77.
(3) Ibid, n. 78.
(4) Jean-Paul II, Message pour la Journée mondiale de la Paix 2004, n. 9: La
Documentation catholique 101 (2004), p. 7.
(5) Cf. Jean-Paul II, Discours à la cinquantième Assemblée générale des Nations
unies, 5 octobre 1995, n. 3: La Documentation catholique 92 (1995), p. 918.
(6) La cité de Dieu, 19, 13: La Pléiade, Paris (2000), p. 869.
(7) N. 79.
(8) Ibid.
(9) Message pour la Journée mondiale de la Paix 2002, n. 6: La Documentation
catholique 99 (2002), p. 5.
(10) Ibid.: l.c., p. 6.
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MESS/JOURNEE PAIX 2006/ VIS 051213 (1690)
Eucharistie, Sacrement de la Miséricorde. 13.12.2005
/BENOIT
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