Benoît XVI attendu en septembre à Lourdes |
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Lourdes, le 12 février 2008 -
Nous fêtons aujourd'hui le 150e anniversaire de la première apparition de la Vierge à
sainte Bernadette (du 11 février 1858),
anniversaire qui sera marqué pour cette année de jubilé, par la venue du pape Benoît XVI à Lourdes en
septembre. Entretien avec le Père Raymond Zambelli, recteur des Sanctuaires
Notre-Dame de Lourdes.
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Lourdes -
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Benoît XVI attendu en septembre à Lourdes
Le miracle de Lourdes
Nous fêtons cette année le 150e anniversaire des apparitions de la Vierge à
sainte Bernadette (du 11 février au 16 juillet 1858),
anniversaire qui sera marqué par la venue du pape Benoît XVI à Lourdes en
septembre. Entretien avec le Père Raymond Zambelli, recteur des Sanctuaires
Notre-Dame de Lourdes.
La Nef -
Quel est le message de Lourdes ?
Père Raymond Zambelli
- Le message de Lourdes est essentiellement un appel à la
conversion. En effet, au cours de ses apparitions à Bernadette, la Vierge
Marie a dit à plusieurs reprises: « Pénitence! Pénitence! Pénitence ». «
Priez pour les pécheurs! » Ce message est donc éminemment évangélique et ne
fait que reprendre en écho l'invitation de Jésus au début de sa prédication
apostolique : « Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ». C'est
d'ailleurs ce que nous rappelle l'Eglise chaque année au moment de notre
entrée en Carême.
Cet appel permanent à la conversion est en fait un appel permanent à mener
une vie cohérente avec notre conscience (tous les hommes ont une
conscience), avec notre baptême, avec notre foi, avec l'Évangile. À moins
d'estimer que nous ne sommes pas concernés par cet appel à la cohérence, nul
doute que le message de la Vierge est d'une étonnante actualité.
Y a-t-il
une spiritualité propre à Lourdes, et comment peut-on la définir ?
À proprement parler il n'y a pas de spiritualité propre à Lourdes dans la
mesure où tout ici a une résonance évangélique. C'est ce qui confère aux
Sanctuaires de Lourdes un caractère universel et donc authentiquement
catholique propre à toucher tant d'hommes et de femmes de toutes races, de
toutes langues et de toutes cultures plus que n'importe quel autre
sanctuaire au monde.
Fallait-il des apparitions pour délivrer un tel message
qui est, dites-vous, le cœur de l'Évangile ?
Dans la mesure où les hommes
sont
menacés d'amnésie profonde, c'est la mission maternelle de la Vierge Marie
de nous sortir de cette amnésie ou de notre torpeur en se manifestant
régulièrement aux disciples de son Fils qu'elle a reçu mission d'éduquer en
leur rappelant ce qu'elle avait dit déjà à Cana et qui constitue le
prototype de tous ses messages à venir: « Faites tout ce qu'il vous dira ».
On ne peut qu'admirer la patience infinie d'une telle mère face à
l'insouciance permanente de ses enfants...
Comment expliquer ces apparitions dans le plan divin : ne contribuent-elles
pas à discréditer l'Église auprès des non-croyants ou rationalistes de tous
poils ?
Dès lors qu'il s'agit de parler des réalités spirituelles, l'Église se
heurtera toujours au scepticisme et à l'incrédulité, qu'il s'agisse des
apparitions ou par exemple de la conception virginale de Jésus. Et que dire
du mystère de l'Eucharistie ou de la Résurrection? Il n'y a pas lieu de s'en
étonner. Ces réalités sont d'un « autre ordre » pour reprendre l'expression
célèbre de Pascal. Mais ce même auteur nous a prévenus. Ne lit-on pas dans
les Pensées: « La dernière démarche de la raison est de reconnaître qu'il y
a une infinité de choses qui la surpassent. Elle n'est que faible si elle ne
va jusqu'à connaître cela. Que si les choses naturelles la surpassent, que
dira-t-on des surnaturelles? » Et il me revient à l'esprit cette autre
Pensée: « Que je hais ces sottises de ne pas croire l'Eucharistie. Si
l'Évangile est vrai, si Jésus Christ est vrai, quelle difficulté y a-t-il là?
»
Ces apparitions privées ne relèvent pas de la foi : peut-on ne pas croire à
la réalité des apparitions de Lourdes et se dire catholique ?
Bien évidemment. Encore que l'intérêt constant des papes pour les
apparitions de Lourdes depuis 1858, et après la proclamation du dogme de
l'Immaculée Conception de la Vierge Marie en 1854, soit à prendre en
considération comme il convient de prendre en considération les innombrables
saints venus prier la Vierge en ce lieu et le flot de grâces qui ne cesse de
couler ici depuis les apparitions. Tout ceci devrait donner à réfléchir...
Comment expliquer un tel engouement pour Lourdes ?
Il faudrait poser la
question aux six millions de pèlerins qui viennent chaque année du monde
entier pour prier en ce lieu. À l'évidence Lourdes est un lieu « phare » et
un lieu « source ».
Chacun sait qu'il existe des lieux phares et des lieux sources qui, de ce
fait, nous attirent quand nous avons besoin d'un
surcroît de lumière pour orienter notre conduite et qui se présentent comme
un repère sur notre route pour continuer à avancer ou pour refaire nos
forces, faire le plein d'énergie, nous ressourcer et repartir
courageusement. Lourdes est un de ces lieux providentiels comme chacun peut
en faire l'expérience.
Les guérisons miraculeuses, somme toute assez rares, n'entretiennent-elles
pas un faux espoir qui pousse à refuser la loi de Dieu ?
Concrètement,
sait-on si les grands miraculés de Lourdes ont été guéris par leur foi
exceptionnelle ou si c'est plutôt la guérison qui a été le moteur de la
conversion ?
C'est un fait dûment constaté et établi que plus de six mille guérisons
inexpliquées se sont produites à Lourdes depuis le début des apparitions, et
si les évêques des diocèses où demeuraient ces malades guéris n'ont retenu à
ce jour que 67 de ces guérisons en leur donnant le label de « miracles »,
ceci ne constitue pas une invalidation des autres guérisons tout autant
authentiques.
Certains malades avaient à l'évidence une très grande foi comme celle que
l'on trouve souvent dans l'Évangile et qui faisait l'admiration de Jésus.
Pour d'autres la guérison a été le point de départ d'un réel renouveau sur
le plan spirituel qui a profondément transformé l'existence de ces malades
guéris. Mais il faut aller plus loin
et approfondir notre réflexion sur la présence des malades à Lourdes et leur
signification profonde.
Quand on rend visite aux siens à l'hôpital, il nous arrive de croiser
d'autres malades qui, la plupart du temps, restent dans l'anonymat. Chacun
de nous a été, est ou sera malade. C'est la réalité de notre finitude. Quand
on est en bonne santé, on n'aime pas trop être confronté au contact des
malades, mais à Lourdes, on accepte de côtoyer les malades. Le regard change
alors que dans d'autres situations, on aurait tendance à fuir la réalité,
car elle nous déstabilise ou nous fait peur. À Lourdes on parvient à
l'apprivoiser. On a moins peur de s'en approcher, on vit avec les malades.
Ce n'est pas la présence des malades qui est étonnante à Lourdes mais le
changement qui s'opère dans notre regard et notre cœur, et cela vaut tous
les sermons.
À Lourdes, on apprend le respect de la vie. Et ce qui s'y vit nous éduque.
La compassion est un sentiment très humain, proche de l'amour. On pourrait
dire: « Lourdes, c'est triste car on y voit beaucoup de malades », mais ce
n'est pas le cas. À Lourdes, c'est la vie qui parle. Or, la vie est faite
d'enfants, d'adultes, de bien-portants et de malades. Il faut tout prendre
dans la vie : les succès, les échecs, les maladies, les épreuves et la mort.
À cet égard, Lourdes est un lieu unique dans le monde pour faire
l'expérience de toutes les composantes de la vie humaine.
Les apparitions
semblent plus nombreuses dans les périodes difficiles : cet engouement pour
les lieux d'apparitions en général ne manifeste-t-il pas une certaine crise
de la Foi ?
S'il en était ainsi la Vierge devrait apparaître en permanence
car toutes les époques sont difficiles si on n'idéalise pas le passé. Ses
apparitions reconnues par l'Église sont suffisamment nombreuses pour nourrir
ou réveiller notre foi.
Un tel phénomène est-il nouveau ou a-t-il toujours
plus ou moins existé ?
L'Histoire nous révèle que les apparitions de la
Vierge Marie ont toujours eu lieu et dans de très nombreux pays. Si la
France a été particulièrement gratifiée au XIXe siècle de telles
manifestations mariales (la Rue du Bac, La Salette, Lourdes, Pontmain), il
convient de ne pas oublier les autres.
Venons-en à la personnalité de Bernadette : qu'est-ce qui vous marque le
plus chez elle ? Qu'est-ce qui caractérise sa sainteté ?
Je me suis souvent
demandé pourquoi
la Vierge Marie avait choisi Bernadette comme confidente et messagère. Ce
n'était pas en raison de son rang social puisqu'elle vivait dans une grande
précarité. Il me semble que Marie l'a choisie en raison de la richesse de
son être et de la profondeur de son âme. Bernadette était une jeune personne
transparente, très droite, qui ne pactisait jamais avec le mensonge. De
plus, elle était ouverte sur le monde surnaturel de par son éducation
familiale profondément religieuse. Ces qualités ont dû attirer l'attention
de la Vierge Marie.
En ce qui concerne sa vie au cachot, il faut noter que la misère est un état
difficile à vivre et extrêmement dangereux car il peut engendrer très vite
le ressentiment, la révolte contre la société ou contre Dieu et aigrir les
êtres. Or ce qui est étonnant dans le cas de Bernadette et de sa famille,
c'est de voir que l'état d'extrême misère où tous se trouvaient au cachot
n'a pas fait naître en eux de sentiments négatifs. Au contraire, dans un
sursaut de foi et de confiance en Dieu, ils ont placé toute leur existence
sous son regard, ne comptant que sur Lui. C'est une très belle leçon qui
nous enseigne que, face aux plus grandes épreuves, il n'y a pas de nécessité
à se révolter.
Cette confiance inébranlable en Dieu au cœur de l'épreuve a dû toucher la
Vierge Marie qui, elle-même, avait connu des heures angoissantes et
terribles au moment de la mort de Jésus. Son espérance aurait pu sombrer
mais elle n'a pas douté. En la personne de Bernadette, elle a donc trouvé
une jeune fille dont la foi était extrêmement solide. Elle pouvait s'appuyer
sur elle pour lui confier son message, sachant que rien ne l'ébranlerait,
qu'elle tiendrait bon. Comme Marie, au sein de l'épreuve qui peut faire
chavirer, Bernadette a tenu bon.
Elle n'a pas été canonisée comme voyante et messagère de la Vierge mais
parce qu'elle a été la première à prendre au sérieux les paroles de Marie en
y conformant sa vie de chaque jour à Lourdes et à Nevers.
Comment expliquer qu'un voyant ou une voyante qui a reçu la grâce d'une
apparition ne soit pas systématiquement canonisé ?
Mélanie et Maximin, les voyants de la Salette, ne sont pas canonisés pas
plus que ne le sont d'autres voyants, ce qui n'infirme pas leur témoignage.
Cette grâce n'est pas un label suffisant pour garantir la sainteté d'une
vie, il y faut répondre à d'autres critères.
Y a-t-il un lien entre Lourdes, le contexte de cette époque et les
principales grandes apparitions suivantes, Fatima notamment?
Cette question
appellerait à elle seule une longue réponse qu'on ne peut donner ici. Il
reste que toutes les apparitions de la Vierge obéissent au même principe
énoncé plus haut sur son rôle maternel d'éducatrice. Fatima contient à
l'évidence un appel réitéré de la Vierge à la conversion mais développe
d'autres harmoniques telles que la consécration au Cœur Immaculé de Marie et
le rappel des fins dernières.
Que signifie pour vous la venue de Benoît XVI à Lourdes en septembre pour le 150e anniversaire des apparitions ?
C'est la confirmation réitérée de l'intérêt constant des successeurs de
Pierre pour Lourdes depuis les apparitions et la prise en compte de
l'importance des Sanctuaires et notamment des Sanctuaires de Lourdes dans la
nouvelle évangélisation que les récents papes appellent de leurs vœux.
Quels seront les principaux moments de cette année anniversaire ?
À n'en
point douter le principal moment coïncidera avec la venue du Saint-Père
Benoît XVI.
Mais nous avons voulu privilégier « Le Chemin du Jubilé » que chaque pèlerin
sera invité à parcourir seul, en famille ou en groupe. C'est dans cette
démarche que pourra être obtenue l'Indulgence accordée par le pape à cette
occasion jusqu'au 8 Décembre 2008. Ce chemin englobe l'église paroissiale
avec les fonts baptismaux de Bernadette, le cachot qui était son lieu de vie
familiale au moment des apparitions, l'hospice où elle a fait sa première
Communion le 3 juin 1858 comme elle le désirait tant, et la grotte des
apparitions. Ce faisant les Sanctuaires de Lourdes invitent chaque pèlerin à
renouveler la grâce de leur baptême et à redécouvrir la grandeur et le
bonheur d'une famille unie où règne l'amour. Le chemin du jubilé offre
également la grâce de redécouvrir l'importance de recevoir le Corps du
Christ et de mener une vie en cohérence avec cette grâce eucharistique.
Quant à la Grotte, véritable épicentre des Sanctuaires de Lourdes, c'est le
lieu de la rencontre, de l'écoute et de l'accueil du message. Devant la
Grotte nous sommes invités à renouveler notre réponse à la vocation que nous
avons reçue, quelle qu'elle soit, et à nous interroger sur notre fidélité à
répondre à cet appel à l'exemple de Bernadette. Devant la Grotte chacun est
amené à s'interroger sur sa propre vie et sur le vrai sens des choses, et à
se demander sur quoi repose son existence. Roc ou sable? En présence de la
Grotte notre cœur est mis à nu. Instant de vérité qui permet l'émergence de
l'âme, prélude à une possible renaissance.
Je souhaiterais enfin que l'on redécouvre la beauté, la richesse et
l'actualité du message de Lourdes. Quand on vient dans cette cité mariale
régulièrement, on court le risque de s'habituer aux lieux, aux célébrations,
à l'atmosphère. On peut perdre ainsi cet émerveillement que l'on a pu avoir
la première fois que l'on est venu. L'intérêt du 150e anniversaire, c'est
que cet événement ecclésial soit vécu comme une grâce que Dieu nous offre
par les mains de sa Mère.
Quant aux douze missions définies par Mgr Jacques Perrier, évêque de Tarbes
et de Lourdes, elles sont autant de portes d'entrée pour recevoir cette
grâce du Jubilé.
propos recueillis par Christophe
Geffroy
Table
:
150è anniversaire des Apparitions à Lourdes
Sources:
LA NEF • N°190 • FÉVRIER 2008
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 12.02.2008 - BENOÎT XVI
- T/Jubilé de Lourdes |