Jean-Paul II : la toxicomanie et
l'alcoolisme sont contre la vie |
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Le 11 Juin 2008 -
(E.S.M.) - La Conférence des évêques de Suisse à eu
l'intelligente et responsable initiative d'exhumer un texte du pape
Jean-Paul II, traitant des problèmes de la drogue et de l'alcoolisme.
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Le Bien-aimé pape Jean-Paul
II, quelle clairvoyance ! -
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Position du Vatican concernant la question des drogues : discours du Pape
Jean-Paul II, 21-23.11.1991
Ce document, d'une
indéniable actualité, n'ayant jamais été traduit officiellement en français,
nous vous en donnons connaissance.
Discours du Saint-Père Jean-Paul II aux participants à la Conférence
Internationale sur les problèmes de la drogue et de l'alcoolisme organisée
par le Conseil Pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé 21-23
novembre 1991.
1. Il m'est très agréable, commence le pape Jean-Paul II, de prendre
part à cette rencontre d'étude et de réflexion de la VIe Conférence
Internationale, organisée par le Conseil Pontifical pour la Pastorale des
Services de la Santé. Dès son institution, le Conseil Pontifical a tenu,
chaque année, à rappeler l'attention des chrétiens, et aussi l'attention de
tous les hommes de bonne volonté sur des questions vitales et toujours de
grande actualité, qui en appellent à la science médicale, l'éthique et la
pastorale sanitaire.
Je salue très cordialement, tout d'abord, M. le Cardinal Fiorenzo Angelini
et ses collaborateurs, à qui revient tout le mérite de cette rencontre. Mes
salutations s'adressent également aux illustres invités des différentes
Nations, aux scientifiques, aux chercheurs, aux médecins, aux sociologues,
aux théologiens, qui participent à ce notoire Symposium, consacré à un
problème spécifique, qui, de nos jours, s'impose avec une urgence extrême à
l'attention de la société tout entière.
Drogue et alcoolisme contre la vie
: voilà le thème de votre réflexion. Avec beaucoup d'à propos, son
énoncé est précédé, introduit en quelque sorte par ces paroles si prégnantes
de l'apôtre Paul : contra spem in spem
(Rm 4,18), comme une revendication - pour ceux
qui, après le patriarche Abraham, croient fidèlement aux promesses de Dieu -
du droit à ne jamais abandonner l'espérance, même si,
humainement parlant, elle apparaît vide et inconsistante. La
dépendance de la drogue et l'alcoolisme, en raison de leur gravité
intrinsèque, et de leur expansion dévastatrice, sont deux phénomènes qui
menacent le genre humain, et attaquent chez l'individu, au sein de la
famille et dans le tissu social, les fondements mêmes de l'espérance qui
n'est telle, que dans la mesure où elle est espérance
en la vie espérance
de vie.
2. En effet, tout bien considéré, il est facile de découvrir une
double relation entre ces phénomènes et le désespoir.
D'une part, à l'origine de l'abus d'alcool et des stupéfiants - en dépit de
la complexité dramatique des causes et des situations - existe,
habituellement, un vide existentiel, dû à l'absence de valeurs et au défaut
de confiance en soi, dans les autres et dans la vie en général. D'autre
part, les difficultés rencontrées pour sortir d'une situation semblable,
bien ancrée, aggravent et exaspèrent le sentiment de désespoir qui entraîne
les victimes, leurs familles et la communauté environnante, à la résignation
et à la reddition.
Avec le temps, le tableau "alcoolisme et drogue" a atteint des
proportions démesurées, et aujourd'hui, nous nous trouvons devant des
plaies sociales insidieuses et ramifiées dans le monde entier, favorisées
par de puissants intérêts économiques, parfois mêmes, politiques. Alors que
tant de vies sont ainsi gâchées, les seigneurs de la drogue s'abandonnent
effrontément au luxe et au gaspillage. Humainement parlant, les raisons de
désespérer (contra spem),
semblent prévaloir, surtout au niveau des familles, marquées et touchées
directement par ce phénomène dramatique, et qui ne se sentent pas
suffisamment aidées et protégées. Une fois encore, je voudrais leur redire
combien je partage leur souffrance et combien je leur suis proche ; je
voudrais les rencontrer, tous et chacun, afin de leur apporter la
consolation du Christ (cf 2. Cor l,5) et de les
encourager à réagir contre la tentation de découragement et d'abandon.
Si souvent, en pensant aux victimes de la drogue et de l'alcool - aux plus
jeunes, surtout, même si cet état de fait est plus répandu et plus
préoccupant chez les adultes - je suis porté à évoquer la
parabole évangélique de l'homme assailli par les
brigands, qui après l'avoir dépouillé, roué de coups, le
laissèrent à demi-mort sur la route de Jéricho (cf Lc
10,29-37). Elles m'apparaissent, en effet, comme des personnes
"en voyage", qui partent à la recherche de raisons de croire pour vivre, et
qui, au contraire, tombent entre les mains des trafiquants de mort, qui les
assaillent par des mirages de libertés illusoires et de fausses perspectives
de bonheur. Ces victimes sont des hommes et des femmes qui se retrouvent,
malheureusement spoliées de leurs valeurs les plus précieuses, blessées dans
leur corps et leur esprit, violées dans l'intime de leur conscience et
offensées dans leur dignité d'être humain. C'est vrai, les raisons
d'abandonner toute espérance (contra spem),
apparaissent impérieuses dans de telles situations.
3. Tout en étant bien conscients de cet état de fait, toutefois, vous
et moi, voulons témoigner que les raisons pour continuer à espérer existent
et sont bien plus fortes que leurs antagonistes (contra
spem in spem). Aujourd'hui, encore, en effet, comme dans la
parabole évangélique, ne font pas défaut les bons Samaritains, qui par leur
sacrifice personnel, et parfois, à leurs propres risques et périls, " se
font proches" de qui est en difficulté. C'est pourquoi, nous disons avec
insistance aux familles touchées par l'épreuve " Gardez espoir !".
Priez, plutôt avec moi, pour que se multiplient ces bons Samaritains qui
oeuvrent dans les structures publiques, dans le bénévolat, à titre privé, et
parmi les responsables des peuples, et que s'organise un front compact qui
s'engage, toujours davantage, non seulement au service de la prévention et
de la réhabilitation des toxicomanes, mais aussi dans la dénonciation et la
poursuite légale des trafiquants de mort et dans la destruction des réseaux
de la désagrégation morale et sociale.
Nous sommes désormais face à un phénomène de vaste
envergure aux proportions terrifiantes non seulement par le nombre élevé de
vies brisées, mais aussi par l'expansion préoccupante de la contagion
morale, qui depuis un certain temps est en train de gagner les jeunes
générations, comme dans le cas - trop fréquent, malheureusement - des jeunes
enfants contraints à distribuer la drogue et à devenir avec leurs camarades
eux-mêmes des consommateurs de stupéfiants. C'est pourquoi, je
renouvelle, l'appel insistant que j'ai adressé, il y a quelques années, aux
diverses instances publiques, nationales et internationales, afin que "soit
mis un frein à l'extension, du marché des stupéfiants. Pour ceci, il faut
avant tout, que soient mis en lumière les intérêts de ceux qui spéculent sur
ce marché ; que soient identifiés, ensuite, les mécanismes et les
instruments utilisés ; que l'on procède enfin à leur démantèlement de
manière coordonnée et efficace. Il convient, par ailleurs, d'œuvrer en
faveur du développement intégral de ces populations, qui pour assurer leur
subsistance s'adonnent à la production de ces substances. En même temps, on
favorisera la création de réseaux de services tournés vers une prévention
effective de ce fléau qui œuvreront en faveur de la récupération et de la
réinsertion des jeunes qui y sont impliqués" (Discours du
23 septembre 1989).
4. Il existe, c'est vrai, une nette différence
entre le recours à la drogue et le recours à l'alcool : tandis qu'un
usage modéré de ce dernier comme boisson ne heurte pas les principes moraux,
seul un usage abusif est condamnable, par contre l'usage de la drogue " est
toujours illicite, car il implique un renoncement, injustifié et
irrationnel, à penser, à vouloir et agir au titre de personne libre. Du
reste, un recours sur indication médicale, à des substances psychotropes, en
vue d'adoucir des souffrances physiques ou psychiques, dans des cas bien
précis, doit s'en tenir à des critères très prudents, afin d'éviter des
dangers d'accoutumance et de dépendance. Il revient aux autorités
sanitaires, aux médecins, aux responsables des centres de recherche, de
mettre tout en œuvre pour réduire ces risques au minimum, au moyen de
mesures adéquates dans le domaine de la prévention et de l'information.
La toxicomanie et l'alcoolisme sont contre la vie.
On ne peut parler de "la liberté de se droguer" ni "du droit à la drogue",
car l'être humain n'a pas le droit de se nuire, et ne peut, ni ne doit
jamais abdiquer sa dignité personnelle qui est un don de Dieu. Ces
phénomènes - il faut toujours le rappeler - non seulement entravent le
bien-être physique et psychique, mais frustrent la personne elle-même dans
sa capacité de communion et de don.. Tout ceci est particulièrement grave
dans le cas des jeunes. Leur âge est celui de l'ouverture à la vie, c'est
l'âge des grands idéaux, c'est le temps de l'amour sincère et oblatif.
Je voudrais, une fois encore, redire aux jeunes, en
toute sollicitude : Gardez-vous de la tentation de certaines expériences
illusoires et dramatiques ! N'y cédez pas ! Pourquoi vous aventurer sur une
Voie sans issue ? Pourquoi renoncer à la pleine croissance de vos jeunes
années, par l'acceptation d'un vieillissement précoce ? Pourquoi gaspiller
votre vie et vos énergies, susceptibles de trouver une affirmation heureuse
dans des idéaux d'honnêteté, de travail, de sacrifice, de pureté, d'amour
vrai ?
Nous y voici : l'amour ! A ceux qui s'adonnent à la drogue, aux victimes de
l'alcoolisme, aux familles et à la société, qui souffrent de cette infirmité
de leurs membres, l'Église, au nom du Christ, propose une réponse et une
alternative : la thérapie de l'amour, car Dieu
est amour, et celui gui vit dans l'amour actualise la communion avec les
autres et avec Dieu. "Celui qui n'aime pas demeure dans la mort"
(1 Jn 3,14). Mais celui qui aime, jouit de la vie et y demeure !
Vous le savez, on ne peut combattre les phénomènes de la drogue et de
l'alcoolisme, on ne peut mener une action efficace en faveur de la guérison
et de la réhabilitation de ceux qui en sont les victimes, si l'on ne
récupère par anticipation, les valeurs humaines
d'amour et de vie, seules valeurs capables de donner un sens plénier
à notre existence, surtout si elles sont envisagées à la lumière de la foi.
A cette sensation d'étrangeté, à laquelle sont
en proie, bien souvent, les toxicomanes, la société ne peut et ne doit
opposer une réaction d'indifférence, ni se
considérer en règle parce qu'elle encourage l'action du bénévolat qui, s'il
est irremplaçable, à lui seul ne peut suffire. Il faut des lois, il faut des
structures ! Il faut des décisions courageuses !
5. Puisqu'il appartient à l'Église d'œuvrer au plan moral et
pédagogique, par une action très délicate dans ce secteur spécifique, ainsi
il incombe aux Institutions publiques de mettre en œuvre des politiques
sérieuses, destinées à assainir des situations de malaise au niveau des
individus et de la société, parmi lesquelles se détachent la crise de la
famille, principe et fondement de la société humaine, le chômage des jeunes,
l'habitat, les services socio-sanitaires, le système scolaire. Dans cette
campagne de prévention, en faveur du traitement et de la réadaptation, la
recherche interdisciplinaire joue un rôle déterminant, recherche à ,laquelle
cette Conférence a offert une contribution de valeur.
Je me félicité de l'œuvre et des résultats de ce colloque scientifique si
bénéfique, et je désire adresser également une pensée affectueuse à
l'immense foule de jeunes et de moins jeunes qui participent à des œuvres
de réhabilitation et à d'autres initiatives ayant pour fin ce noble but.
Tout en vous assurant de ma prière fervente et de ma solidarité profonde, je
vous invite de nouveau à regarder la vie avec confiance , à croire en la
grandeur inestimable de la destinée de la personne humaine, laquelle - selon
une expression qui m'est chère - est le reflet de l'image même de Dieu.
En un mot, je vous renouvelle l'invitation à espérer
contre toute espérance : contro spem in spem, et je m'adresse
en particulier à tous ceux qui, avec une admirable générosité et en esprit
chrétien, se font les prochains de leurs frères en demande d'aide, entraînés
et emportés par cette double situation dramatique.
L'Église veut œuvrer - c'est la tâche qui lui revient dans la société comme
un levain évangélique ; elle se tient, et continuera à se tenir auprès de
ceux qui, dans un entier dévouement, sont aux prises avec les plaies
sociales de la drogue et de l'alcoolisme, pour les encourager et les
soutenir par la parole et la grâce du Christ. C'est Lui qui est la lumière
qui éclaire l'homme et le conduit jusqu'au port d'une existence digne et
adulte.
Que la Vierge très Sainte accompagne les efforts généreux de tous ceux qui
mettent toute leur énergie au service de cette tâche ardue et courageuse !
En leur souhaitant le secours de la grâce, je leur accorde de tout cœur ma
Bénédiction.
Sources :
www.vatican.va -
E.S.M.
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Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 11.06.08 -
T/Jeunes |