Audience Générale : Jean Scot Érigène |
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Le 10 juin 2009 -
(E.S.M.)
- Comme tous les mercredis, c'est par une lecture qu'a commencé
l'Audience Générale du pape Benoît XVI et aujourd'hui, c'est le
psaume 98 qui a été lu.
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Le pape Benoît XVI -
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Audience Générale :
Jean Scot Érigène
Le 10 juin 2009 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
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Comme tous les mercredis, c'est par une lecture qu'a commencé l'Audience
Générale du pape Benoît XVI et aujourd'hui, c'est le psaume 98 qui a été lu.
Psaume 98, 5-9
Exaltez le Seigneur notre Dieu, prosternez-vous au pied de son trône, car il
est saint !
Moïse et le prêtre Aaron, Samuel, le Suppliant, tous, ils suppliaient le
Seigneur, et lui leur répondait.
Dans la colonne de nuée, il parlait avec eux ; ils ont gardé ses volontés,
les lois qu'il leur donna.
Seigneur notre Dieu, tu leur as répondu : avec eux, tu restais un Dieu
patient, mais tu les punissais pour leurs fautes.
Exaltez le Seigneur notre Dieu, prosternez-vous devant sa sainte montagne,
car il est saint, le Seigneur notre Dieu.
Catéchèse du Saint-Père
Chers frères et sœurs,
Je voudrais parler aujourd'hui d'un penseur important de l'Occident chrétien
: Jean Scot Erigène, dont les origines restent toutefois obscures. Il venait
certainement d'Irlande, où il était né au début du IXe siècle, mais nous ne
savons pas quand il a quitté son île pour traverser la Manche et prendre
ainsi pleinement part au monde culturel qui renaissait autour des
carolingiens, et en particulier autour de Charles le Chauve, dans la France
du IXe siècle. De même qu'on ignore la date exacte de sa naissance, on
ignore également l'année de sa mort qui, selon les experts, devrait
toutefois se situer aux alentours de l'an 870.
Jean Scot Erigène possédait une culture patristique, tant grecque que
latine, remarquable : il connaissait en effet directement les écrits des
Pères latins et grecs. Il connaissait bien, entre autres, les œuvres
d'Augustin, d'Ambroise, de Grégoire le grand, grands Pères de l'Occident
chrétien, mais il connaissait tout aussi bien la pensée d'Origène, de
Grégoire de Nysse, de Jean Chrysostome, et d'autres Pères chrétiens d'Orient
non moins importants. C'était un homme exceptionnel, qui maîtrisait à cette
époque également la langue grecque. Il révéla une attention toute
particulière pour saint Maxime le Confesseur et surtout pour Denys
l'aréopage. Sous ce pseudonyme se cache un écrivain ecclésiastique du Ve
siècle, de Syrie, mais tout le Moyen Age, et avec lui Jean Scot Erigène,
était convaincu que cet auteur était le même qu'un disciple direct de saint
Paul, dont on parlait dans les Actes des Apôtres (17, 34).
Scot Erigène, convaincu de cette apostolicité des écrits de Denys, le
qualifiait d'« Auteur divin » par excellence ; ses écrits furent donc
une source éminente de sa pensée. Jean Scot traduisit ses œuvres en latin.
Les grands théologiens médiévaux, comme saint Bonaventure, ont connu les
œuvres de Denys à travers cette traduction. Il se consacra toute sa vie à
approfondir et développer sa pensée, en puisant à ces écrits, au point
qu'aujourd'hui encore, il peut parfois être difficile de distinguer lorsque
nous sommes en présence de la pensée de Scot Erigène ou lorsqu'au contraire,
il ne fait que reproposer la pensée du Pseudo-Denys.
En vérité, le travail théologique de Jean Scot ne connut pas beaucoup de
succès. Non seulement la fin de l'ère carolingienne relégua ses œuvres dans
l'oubli, mais une censure de la part des autorités ecclésiastiques jeta
également une ombre sur sa figure. En réalité, Jean Scot représente un
platonisme radical, qui semble parfois s'approcher d'une vision panthéiste,
même si ses intentions personnelles et subjectives furent toujours
orthodoxes. Certaines œuvres de Jean Scot Erigène, parmi lesquelles méritent
d'être rappelés, en particulier, le traité « sur la division de la nature
» et les « Expositions sur la hiérarchie céleste de saint Denys
», sont parvenues jusqu'à nous. Il y développe des réflexions théologiques
et spirituelles stimulantes, qui pourraient suggérer d'intéressants
approfondissements également aux théologiens contemporains. Je me réfère,
par exemple, à ce qu'il écrit sur le devoir d'exercer un discernement
approprié sur ce qui est présenté comme auctoritas vera, ou sur
l'engagement à continuer de rechercher la vérité jusqu'à ce que l'on
parvienne à en faire une quelque expérience dans l'adoration silencieuse de
Dieu.
Notre auteur dit : « Salus nostra ex fide inchoat : notre salut commence
avec la foi ». Nous ne pouvons donc pas parler de Dieu en partant de nos
inventions, mais de ce que Dieu dit de lui-même dans les Ecritures Saintes.
Mais, étant donné que Dieu ne dit que la vérité, Scot Erigène est convaincu
que l'autorité et la raison ne peuvent jamais être en opposition l'une avec
l'autre ; il est convaincu que la véritable religion et la véritable
philosophie coïncident. Dans cette perspective, il écrit : « Tout type
d'autorité qui n'est pas confirmée par une véritable raison devrait être
considérée comme faible... Il n'est, en effet, de véritable autorité que
celle qui coïncide avec la vérité découverte en vertu de la raison, même
s'il devait s'agir d'une autorité recommandée et transmise par les saints
Pères pour la postérité » (1, PL122, col 513BC).
Par conséquent, il avertit : « Qu'aucune autorité ne t'intimide ni ne te
distraie de ce que te fait comprendre la persuasion obtenue grâce à un
comportement droit et rationnel. En effet, l'autorité authentique ne
contredit jamais la juste raison, pas plus que cette dernière ne peut jamais
contredire une véritable autorité. L'une et l'autre proviennent sans aucun
doute de la même source, qui est la sagesse divine »
(I, PL 122, col 511B). Nous voyons ici une courageuse affirmation
des valeurs de la raison, fondée sur la certitude selon laquelle l'autorité
véritable est raisonnable, car Dieu est la raison créatrice.
L'Ecriture elle-même n'échappe pas, selon Erigène, à la nécessité d'être
étudiée en utilisant le même principe de discernement. En effet, l'Ecriture
- soutient le théologien irlandais en reproposant une réflexion déjà
présente chez saint Jean Chrysostome - bien que provenant de Dieu, ne serait
pas nécessaire si l'homme n'avait pas péché. Il faut donc en déduire que
l'Ecriture fut donnée par Dieu dans une intention pédagogique et par
miséricorde afin que l'homme puisse se rappeler de tout ce qui avait été
gravé dans son cœur dès le moment de sa création « à l'image et ressemblance
de Dieu » (cf. Gn 1, 26) et que le péché
originel lui avait fait oublier. Erigène écrit dans les Expositiones : «
Ce n'est pas l'homme qui a été créé pour l'Ecriture, dont il n'aurait pas eu
besoin s'il n'avait pas péché, mais c'est plutôt l'Ecriture - tissée de
doctrine et de symboles - qui a été donnée pour l'homme. En effet, grâce à
elle, notre nature rationnelle peut être introduite dans les secrets de
l'authentique et pure contemplation de Dieu » (II, PL
122, col 146C). La parole de l'Ecriture Sainte purifie notre
raison quelque peu aveugle et nous aide à revenir au souvenir de ce que nous
portons, en tant qu'image de Dieu, dans notre cœur, rendu hélas vulnérable
par le péché.
De là découlent certaines conséquences herméneutiques, en ce qui concerne la
façon d'interpréter l'Ecriture qui peuvent indiquer aujourd'hui encore la
juste voie pour une lecture correcte de l'Ecriture Sainte. Il s'agit en
effet de découvrir le sens caché dans le texte sacré et cela présuppose un
exercice intérieur particulier, grâce auquel la raison s'ouvre au chemin
certain vers la vérité. Cet exercice consiste à cultiver une disponibilité
constante à la conversion. Pour parvenir, en effet, à la vision profonde du
texte, il est nécessaire de progresser simultanément dans la conversion du
cœur et dans l'analyse conceptuelle de la page biblique, qu'elle soit à
caractère universel, historique ou doctrinal. C'est en effet uniquement
grâce à la purification constante tant de l'œil du cœur que de l'œil de
l'esprit, que l'on peut en acquérir une compréhension exacte.
Ce chemin d'un accès difficile, exigeant et enthousiasmant, fait de
conquêtes constantes et de relativisations du savoir humain, conduit la
créature intelligente jusqu'au seuil du Mystère divin, là où toutes les
notions révèlent leur faiblesse et leur incapacité et imposent donc, avec la
simple force libre et douce de la vérité, d'aller toujours au-delà de tout
ce qui est continuellement acquis. La reconnaissance adorante et silencieuse
du Mystère, qui débouche sur la communion unificatrice, se révèle donc comme
l'unique voie d'une relation avec la vérité qui est à la fois la plus intime
possible et la plus scrupuleusement respectueuse de l'autre. Jean Scot -
utilisant également dans ce contexte un vocabulaire cher à la tradition
chrétienne de langue grecque - a appelé cette expérience à laquelle nous
tendons « theosis » ou divinisation, à travers des affirmations
hardies au point qu'il fut possible de le soupçonner de panthéisme
hétérodoxe. Quoi qu'il en soit, l'émotion demeure profonde face à des textes
comme celui-ci, où, ayant recours à l'antique métaphore de la fusion du fer,
il écrit : « Ainsi, de même que tout le fer devenu brûlant se liquéfie au
point qu'il ne semble plus y avoir que le feu, et toutefois les substances
de l'un et de l'autre demeurent distinctes, ainsi, il faut accepter qu'après
la fin de ce monde, toute la nature, tant corporelle qu'incorporelle,
manifeste uniquement Dieu et demeure toutefois intègre de façon telle que
Dieu puisse être d'une certaine façon compris tout en reste incompréhensible
et la créature elle-même soit transformée, avec une merveille ineffable, en
Dieu » (V, PL 12, col 451B).
En réalité, la pensée théologique de Jean Scot est la démonstration la plus
évidente de la tentative d'exprimer le dicible de l'indicible Dieu, en se
fondant uniquement sur le mystère du Verbe incarné en Jésus de Nazareth. Les
nombreuses métaphores qu'il utilise pour indiquer cette réalité ineffable
démontrent combien il est conscient de l'insuffisance absolue des termes
avec lesquels nous parlons de ces choses. Il demeure toutefois
l'enchantement et cette atmosphère d'authentique expérience mystique que
l'on peut de temps à autre toucher du doigt dans ses textes. Il suffit de
citer, pour le démontrer, une page du De divisione naturae qui touche
en profondeur également notre âme de croyants du XXIe siècle : « Il ne
faut rien désirer d'autre - écrit-il - que la joie de la vérité qui est le
Christ, ni rien éviter que Son absence. Celle-ci, en effet, devrait être
considérée comme l'unique cause de tristesse totale et éternelle. Ote-moi le
Christ, et il ne me restera aucun bien, et rien ne m'affligera plus que son
absence. Le plus grand tourment d'une créature rationnelle est la privation
et l'absence de Lui » (V, PL 122, col 989a).
Ce sont des paroles que nous pouvons faire nôtres, en les traduisant en
prière à Celui qui constitue également le désir ardent de notre cœur.
(ZF09061005)
Le pape Benoît XVI s'adresse aux pèlerins
francophones
Chers Frères et Sœurs,
J’évoque aujourd’hui pour vous un penseur important de l’Occident chrétien :
Jean Scot Érigène. Probablement né en Irlande au tout début du neuvième
siècle, il rejoint le continent où il va prendre part, dans la France de
Charles le Chauve, au mouvement de la renaissance carolingienne.
Jean Scot Érigène se distinguait par une grande connaissance des Pères de
l’Église aussi bien latins que grecs, avec une prédilection particulière
pour le Pseudo-Denys dont il cherchera à prolonger les intuitions. Sa
théologie est tout entière tendue vers un au-delà d’elle-même où l’effort
conceptuel trouve sa récompense et ses limites : la contemplation et
l’adoration silencieuse de Dieu.
Si sa pensée n’a pas fait école, elle offre néanmoins encore aujourd’hui
d’intéressantes perspectives en particulier pour la lecture de l’Écriture
sainte. Celle-ci, rappelle-t-il, a été donnée par miséricorde à l’homme
consécutivement au péché afin que l’homme puisse retrouver tout ce qui était
inscrit en son cœur au moment de sa création « à l’image et à la
ressemblance de Dieu ». Cela signifie qu’il ne peut y avoir de compréhension
de la Parole de Dieu sans, à la fois, une analyse rigoureuse du texte
biblique et une disponibilité permanente à la conversion. La clairvoyance de
l’intelligence ne peut pas jamais séparée de la purification du cœur.
Je suis heureux de souhaiter la bienvenue aux pèlerins francophones.
J’adresse un cordial salut aux nombreux membres du Variété Club de France et
aux évêques qui les accompagnent, ainsi qu’aux pèlerins canadiens, suisses
et français. Que l’Esprit Saint donne à chacun le désir de toujours chercher
le Christ et la grâce de le découvrir présent dans la création et dans vos
frères ! Bon pèlerinage à tous !
Synthèse de la
catéchèse du Saint-Père ►
Benoît XVI nous présente Jean Scot Érigène - 10.06.09
Texte original du
discours du Saint Père
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UDIENZA GENERALE
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Sources : www.vatican.va
-
E.S.M.
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 10.06.09 -
T/Benoît XVI |