Le Mal avilit toujours, mais Dieu n'a pas échoué.
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Si nous vivons contre la loi d'amour et contre Dieu,
alors nous nous détruisons mutuellement et nous détruisons le monde.
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Benoît XVI a soulevé les applaudissements des cardinaux, évêques et fidèles présents dans une basilique comble, quand il s'est écrié :
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Le Mal avilit toujours, mais Dieu n'a pas échoué. (...) Si nous vivons contre la loi d'amour et contre Dieu, alors nous nous détruisons mutuellement et nous détruisons le monde
.
"
Nul doute que Benoît XVI ait voulu, ici, roder les thèmes de sa première encyclique au monde.
Nous reproduisons ci dessous l'analyse d'Henri Tincq, journaliste au journal Le Monde, de l'homélie prononcée en la fête de l'Immaculée conception par Benoît XVI.
Sous le titre:
Le pape, Vatican II et le Mal.
A sa manière discrète, Benoît XVI a célébré à la basilique Saint-Pierre, jeudi 8 décembre à Rome, le quarantième anniversaire de la fin du concile Vatican II (1962-1965). Il ne s'est livré à aucune confidence sur la façon dont, jeune théologien progressiste de l'épiscopat allemand, il avait vécu cet événement qu'il a qualifié de
"
plus important du siècle
". Il n'a pas non plus saisi cette occasion pour tracer un bilan et esquisser les lignes de son pontificat. Dès son élection, il avait dit qu'il suivrait les traces des deux papes qui avaient lancé (Jean XXIII), puis clos (Paul VI) ce concile d'ouverture au monde. Ce jeudi, il a jugé inutile d'y revenir.
Ce pape n'aime pas les effets de manche, ni d'annonce. De plusieurs sources, on sait qu'il a achevé la rédaction et signé ce 8 décembre, fête de l'Immaculée Conception, sa première encyclique. Celle-ci sera rendue publique — le temps des traductions — pendant la période de Noël, au plus tard début janvier. Mais aucune confirmation n'a pu être obtenue des services de communication du Vatican.
Tout se passe comme si Benoît XVI, précisément dans l'esprit de Vatican II, voulait remettre la fonction du pape à sa juste place. Celle-ci fut hypertrophiée sous Jean Paul II par ses voyages à grand spectacle et ses astuces de communication. Son successeur semble vouloir limiter son rôle à l'essentiel. Au cours de la cérémonie de jeudi, il n'a fait qu'une brève allusion à la nécessité d'une
"fidèle interprétation"
du concile, désavouant à la fois les progressistes, qui réclament toujours plus de réformes, et les traditionalistes qui ont rompu depuis quarante ans avec cette Eglise jugée trop moderniste.
Benoît XVI n'est jamais aussi à l'aise que dans son rôle de professeur. Il s'en est tenu, dans son homélie de jeudi, à un enseignement sur la crise de la foi, expliquant que le Mal est toujours à l'oeuvre dans le monde et que, loin d'être une atteinte à l'autonomie de l'homme, la croyance en Dieu est une condition de sa liberté. "
L'homme qui s'abandonne entre les mains de Dieu ne devient pas une marionnette"
. Au contraire,
"seul l'homme qui se livre totalement à Dieu est libre".
Et il a soulevé les applaudissements des cardinaux, évêques et fidèles présents dans une basilique comble, quand il s'est écrié :
"
Le Mal avilit toujours, mais Dieu n'a pas échoué. (...) Si nous vivons contre la loi d'amour et contre Dieu, alors nous nous détruisons mutuellement et nous détruisons le monde.
"
Nul doute que Benoît XVI ait voulu, ici, roder les thèmes de sa première encyclique au monde.
Henri Tincq
Article paru dans l'édition du 10.12.05 - Le Monde.fr
NDLR: Nous n'avons pu résister à la tentation d'inclure un commentaire de Robert Pousseur d'ACF, écrit au
moment de la sortie du livre:
Dieu en France
- Mort et résurrection du catholicisme
- d' Henri Tincq.
Henri Tincq, journaliste au journal Le Monde, pose une question qui travaille tous ceux et celles qui se préoccupent de l'avenir: vu le fossé culturel qui existe actuellement entre le monde et l'Église, ne sommes-nous pas témoins de la mort du catholicisme en France?
Dans une première partie, l'auteur étudie les étapes et les raisons qui font que le '
fait
' catholique soit devenu étrange en France. La deuxième partie aborde une réalité complexe :
Si les infirmités du catholicisme en France sont signe que la société est malade, le déclin du catholicisme en France ne peut laisser personne indifférent.
La troisième partie aborde la question de la façon dont les médias reçoivent le discours de l'Église.
Henri Tincq est bien placé pour souligner combien le discours de l'Église catholique est toujours perçu comme une intervention allant à contre-courant du progrès alors que ses interventions sont riches de réflexions et respectueuse de la vie de tout homme. Dans la dernière partie l'auteur relève les signes d'une renaissance et s'étonne du décalage qui persiste entre la réalité de ce que pensent et vivent les catholiques et l'image qui en est renvoyée.
L'Église possède, dans les matières de la bioéthique, de la justice sociale, de la paix, du respect des diversités…
"
une longueur d'avance, une vraie tradition sociale, un patrimoine de valeurs, une expérience militante à défendre et à restaurer. Comment sortir de l'actuelle 'culture de mépris', dénoncée par René Rémond, et retrouver une crédibilité intellectuelle, renouer le dialogue avec le monde politique, artistique, médiatique, scientifique ?
" (p. 15).
Henri Tincq n'est ni philosophe, ni sociologue, ni théologien. Il est un fin observateur de la scène religieuse. Mon livre, écrit-il,
"
veut dépasser les myopies et les indifférences, montrer que la crise du catholicisme français est aussi une crise de la société dans son ensemble. Que l'histoire récente de ses replis et de ses déplacements est le reflet d'autres impasses, d'autres errances: la tentation d'un humanisme sans Dieu; la religion renvoyée dans la seule sphère des choix privés; la crise du lien social, de l'engagement civique et éthique, de la laïcité elle-même, de la famille, de l'éducation; le doute profond sur les idéaux et les valeurs de référence qui fondent l'homogénéité d'une nation et sa marche en avant
.
" (p. 284)
.
C'est dire combien ce livre est intéressant car il met en perspective un certain nombre de morts et de résurrections de la société et des Églises.
Certains regretteront sans doute que des aspects de la vie de l'Église catholique ne sont pas assez mis en lumière : nous pensons à ceux et celles qui se réunissent régulièrement pour relire ensemble leur vie à la lumière de l'évangile et s'entraider pour que toute leur vie, privée et publique, soit un lieu d'accueil de Jésus-Christ et de ses frères.
Nous pensons aussi à tous ceux et celles qui créent des relations discrètes et humbles avec les personnes d'autres cultures, d'autres religions. Cette vie relue, cherchant à être ouverte aux autres, retournée par l'Esprit, ne fait pas de bruit, pas plus que la graine qui est en train de pourrir dans la terre avant d'éclore.
Robert Pousseur
Eucharistie, Sacrement de la Miséricorde. 09.12.2005
- L'EGLISE
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