Audience générale de Benoît XVI :
sainte Hildegarde de Bingen (2) |
Chers frères et sœurs,
Je voudrais aujourd'hui reprendre et poursuivre la réflexion sur sainte
Hildegarde de Bingen, figure importante de femme au Moyen âge, qui se
distingua par sa sagesse spirituelle et la sainteté de sa vie. Les visions
mystiques d'Hildegarde ressemblent à celles des prophètes de l'Ancien
Testament : s'exprimant à travers les expressions culturelles et religieuses
de son époque, elle interprétait les Saintes Ecritures à la lumière de Dieu,
les appliquant aux diverses circonstances de la vie. Ainsi, tous ceux qui
l'écoutaient se sentaient exhortés à pratiquer un style d'existence
chrétienne cohérent et engagé. Dans une lettre à saint Bernard, la mystique
de Rhénanie confesse : « La vision envahit tout mon être : je ne vois
plus avec les yeux du corps, mais elle m'apparaît dans l'esprit des
mystères... Je connais la signification profonde de ce qui est exposé dans
le psautier, dans l'Evangile, et d'autres livres, qui m'apparaissent en
vision. Celle-ci brûle comme une flamme dans ma poitrine et dans mon âme, et
m'enseigne à comprendre en profondeur le texte » (Espitolarium
pars prima I-XC : CCCM 91).
Les visions mystiques d'Hildegarde sont riches de contenus théologiques.
Elles font référence aux événements principaux de l'histoire du salut, et
adoptent un langage principalement poétique et symbolique. Par exemple, dans
son œuvre la plus célèbre, intitulée Scivias, c'est-à-dire « Connais les
voies », elle résume en trente-cinq visions les événements de l'histoire
du salut, de la création du monde à la fin des temps. Avec les traits
caractéristiques de la sensibilité féminine, Hildegarde développe,
précisément dans la partie centrale de son œuvre, le thème du mariage
mystique entre Dieu et l'humanité réalisé dans l'Incarnation. Sur l'arbre de
la Croix s'accomplissent les noces du Fils de Dieu avec l'Eglise, son
épouse, emplie de grâce et rendue capable de donner à Dieu de nouveaux fils,
dans l'amour de l'Esprit Saint (cf. Visio tertia : PL 197,
453c).
A partir de ces brèves évocations, nous voyons déjà que la théologie peut
également recevoir une contribution particulière des femmes, car elles sont
capables de parler de Dieu et des mystères de la foi à travers leur
intelligence et leur sensibilité particulières. J'encourage donc toutes
celles qui accomplissent ce service à l'accomplir avec un profond esprit
ecclésial, en nourrissant leur réflexion à la prière et en puisant à la
grande richesse, encore en partie inexplorée, de la tradition mystique
médiévale, surtout celle représentée par des modèles lumineux, comme le fut
précisément Hildegarde de Bingen.
La mystique rhénane est aussi l'auteur d'autres écrits, dont deux
particulièrement importants parce qu'ils témoignent, comme le Scivias, de
ses visions mystiques : ce sont le Liber vitae meritorum (Livre des mérites
de la vie) et le Liber divinorum operum (Livre des œuvres divines), appelé
aussi De operatione Dei. Dans le premier est décrite une unique et
vigoureuse vision de Dieu qui vivifie l'univers par sa force et sa lumière.
Hildegarde souligne la profonde relation entre l'homme et Dieu et nous
rappelle que toute la création, dont l'homme est le sommet, reçoit la vie de
la Trinité. Cet écrit est centré sur la relation entre les vertus et les
vices, qui fait que l'être humain doit affronter chaque jour le défi des
vices, qui l'éloignent dans son cheminement vers Dieu et les vertus, qui le
favorisent. L'invitation est de s'éloigner du mal pour glorifier Dieu et
pour entrer, après une existence vertueuse, dans la vie « toute de joie ».
Dans la seconde œuvre, considérée par beaucoup comme son chef-d'œuvre, elle
décrit encore la création dans son rapport avec Dieu et la place centrale de
l'homme, en manifestant un fort christocentrisme au ton biblique et
patristique. La sainte, qui présente cinq visions inspirées par le Prologue
de l'Evangile de saint Jean, rapporte les paroles que le Fils adresse au
Père : « Toute l'œuvre que tu as voulue et tu m'as confiée, je l'ai menée
à bien, et voici que je suis en toi, et toi en moi, et que nous sommes un
» (Pars III, Visio X : PL 197, 1025a).
Dans d'autres écrits, enfin, Hildegarde manifeste la versatilité des
intérêts et la vivacité culturelle des monastères féminins du Moyen âge, à
contre-courant des préjugés qui pèsent encore sur l'époque. Hildegarde
s'occupa de médecine et de sciences naturelles, ainsi que de musique, étant
dotée de talent artistique. Elle composa aussi des hymnes, des antiennes et
des chants, réunis sous le titre de Symphonia Harmoniae Caelestium
Revelationum (Symphonie de l'harmonie des révélations célestes), qui étaient
joyeusement interprétés dans ses monastères, diffusant un climat de
sérénité, et qui sont également parvenus jusqu'à nous. Pour elle, la
création tout entière est une symphonie de l'Esprit Saint, qui est en soi
joie et jubilation.
La popularité dont Hildegarde était entourée poussait de nombreuses
personnes à l'interpeller. C'est pour cette raison que nous disposons d'un
grand nombre de ses lettres. Des communautés monastiques masculines et
féminines, des évêques et des abbés s'adressaient à elle. De nombreuses
réponses restent valables également pour nous. Par exemple, Hildegarde
écrivit ce qui suit à une communauté religieuse féminine : « La vie
spirituelle doit faire l'objet de beaucoup de dévouement. Au début, la
fatigue est amère. Car elle exige le renoncement aux manifestations
extérieures, au plaisir de la chair et à d'autres choses semblables. Mais si
elle se laisse fasciner par la sainteté, une âme sainte trouvera le mépris
même du monde, doux et agréable. Il suffit seulement, avec intelligence, de
veiller à ce que l'âme ne se fane pas » (E. Gronau,
Hildegard. Vita di una donna profetica alle origini dell'età moderna, Milan
1996, p. 402). Et lorsque l'empereur Frédéric Barberousse fut à
l'origine d'un schisme ecclésial opposant trois antipapes au Pape légitime
Alexandre III, Hildgarde, inspirée par ses visions, n'hésita pas à lui
rappeler qu'il était lui aussi sujet au jugement de Dieu. Avec l'audace qui
caractérise chaque prophète, elle écrivit à l'empereur ces mots de la part
de Dieu : « Attention, attention à cette mauvaise conduite des impies qui
me méprisent ! Prête-moi attention, ô roi, si tu veux vivre ! Autrement mon
épée te transpercera ! » (ibid., p. 142).
Avec l'autorité spirituelle dont elle était dotée, au cours des dernières
années de sa vie, Hildegarde se mit en voyage, malgré son âge avancé et les
conditions difficiles des déplacements, pour parler de Dieu aux populations.
Tous l'écoutaient volontiers, même lorsqu'elle prenait un ton sévère : ils
la considéraient comme une messagère envoyée par Dieu. Elle rappelait
surtout les communautés monastiques et le clergé à une vie conforme à leur
vocation. De manière particulière, Hildegarde s'opposa au mouvement des
cathares allemands. Ces derniers - à la lettre cathares signifie « purs
» - prônaient une réforme radicale de l'Eglise, en particulier pour
combattre les abus du clergé. Elle leur reprocha sévèrement de vouloir
renverser la nature même de l'Eglise, en leur rappelant qu'un véritable
renouvellement de la communauté ecclésiale ne s'obtient pas tant avec le
changement des structures, qu'avec un esprit de pénitence sincère et un
chemin actif de conversion. Il s'agit là d'un message que nous ne devrions
jamais oublier. Invoquons toujours l'Esprit Saint afin qu'il suscite dans
l'Eglise des femmes saintes et courageuses, comme sainte Hildegarde de
Bingen, qui, en valorisant les dons reçus par Dieu, apportent leur
contribution précieuse et spécifique à la croissance spirituelle de nos
communautés !
Benoît XVI enregistre un message vidéo pour le
Royaume uni
J'attends avec beaucoup de plaisir ma visite au Royaume-Uni dans une
semaine, et j'adresse des salutations sincères à tout le peuple de
Grande-Bretagne. Je suis conscient qu'un immense travail a été accompli en
vue de la préparation de ma visite, non seulement par la communauté
catholique, mais par le gouvernement, les autorités locales en Ecosse, à
Londres et à Birmingham, les moyens de communications et les services de
sécurité, et je voudrais dire combien j'apprécie les efforts qui ont été
accomplis afin de garantir que les divers événements au programme soient des
célébrations véritablement joyeuses. Je remercie avant tout les innombrables
personnes qui ont prié pour le succès de cette visite et pour une abondante
effusion de la grâce de Dieu sur l'Eglise et sur les habitants de votre
nation.
Ce sera en particulier une joie pour moi de béatifier le vénérable John
Henry Newman à Birmingham, le dimanche 19 septembre. Cet Anglais remarquable
a vécu une vie sacerdotale exemplaire et, à travers ses écrits, a apporté
une contribution durable à l'Eglise et à la société dans son pays natal et
dans de nombreuses autres parties du monde. Je forme le vœu et la prière que
toujours plus de personnes bénéficient de sa sagesse et soient inspirées par
son exemple d'intégrité et de sainteté de vie.
J'attends avec plaisir de rencontrer les représentants des nombreuses et
diverses traditions religieuses et culturelles, qui composent la population
britannique, ainsi que les responsables civils et politiques. Je suis
profondément reconnaissant à Sa Majesté la reine et à Sa Grâce l'archevêque
de Canterbury de me recevoir, et j'attends avec plaisir de les rencontrer.
Tandis que je regrette de ne pouvoir visiter de nombreux lieux et rencontrer
de nombreuses personnes je vous assure tous de mes prières. Dieu bénisse le
peuple du Royaume-Uni !
Texte original du
discours du Saint Père
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UDIENZA GENERALE
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Italien
Sources : ZF10090804
© Copyright 2010 du texte original - Libreria Editrice Vaticana
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 08.09.2010 -
T/Benoît XVI
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