Chirographe du Souverain Pontife
Jean-Paul II pour le centenaire du Motu Proprio "Parmi les sollicitudes"
sur la musique sacrée
CHIROGRAPHE
DU SOUVERAIN PONTIFE
JEAN-PAUL II
POUR LE CENTENAIRE
DU MOTU PROPRIO
"PARMI LES SOLLICITUDES"
SUR LA MUSIQUE
SACRÉE
1. Mû par le vif désir "de protéger et de
promouvoir la dignité de la maison de Dieu" , mon Prédécesseur saint
Pie X signait, il y a cent ans, le Motu proprio Parmi les
sollicitudes , qui avait pour objet le renouveau de la musique
sacrée dans les fonctions du culte. A travers celui-ci, il entendait
offrir à l'Eglise des orientations concrètes dans ce domaine vital de la
Liturgie, en les présentant comme "une sorte de code juridique de la
musique sacrée" (1). Cette intervention s'inscrivait elle aussi dans le
programme de son pontificat, qu'il avait synthétisé dans la devise "Instaurare
omnia in Cristo" .
La commémoration du centenaire de ce document m'offre
l'occasion de rappeler l'importante fonction de la musique sacrée, que
saint Pie X présente à la fois comme un moyen d'élévation de l'esprit
vers Dieu, et comme une aide précieuse dans "la participation active aux
sacro-saints mystères et à la prière publique et solennelle de l'Eglise"
(2).
L'attention particulière qui doit être portée à la
musique sacrée, rappelle le saint Pontife, découle du fait que celle-ci,
"en tant que partie intégrante de la Liturgie solennelle, participe à
son objectif général, qui est la gloire de Dieu ainsi que la
sanctification et l'édification des fidèles" (3). En interprétant et en
exprimant le sens profond du texte sacré auquel elle est intimement
liée, elle est capable de "renforcer l'efficacité du texte lui-même,
afin que les fidèles [...] soient mieux préparés à accueillir en
eux-mêmes les fruits de la grâce, qui sont le propre des célébrations
des sacro-saints mystères" (4).
2. Cette perspective a été reprise par le Concile
œcuménique Vatican II dans le chapitre VI de la Constitution Sacrosanctum Concilium sur la sainte Liturgie,
où est rappelée avec clarté la fonction ecclésiale de la musique sacrée:
"La tradition musicale de l'Eglise universelle a créé un trésor d'une
valeur inestimable qui l'emporte sur les autres arts, du fait surtout
que, chant sacré lié aux paroles, il fait partie nécessaire ou
intégrante de la liturgie solennelle" (5). Le Concile rappelle par
ailleurs que "le chant sacré a été exalté tant par la Sainte Ecriture,
que par les Pères, et par les Pontifes romains, ceux-ci à une époque
récente, à la suite de saint Pie X, ont mis en lumière de façon plus
précise la fonction ministérielle de la musique sacrée dans le service
divin" (6).
En effet, en poursuivant l'ancienne tradition
biblique, qu'ont observée le Seigneur lui-même ainsi que les Apôtres (cf.
Mt 26, 30; Ep 5, 19; Col 3, 16), l'Eglise a, tout
au long de son histoire, favorisé le chant dans les célébrations
liturgiques, en produisant selon la créativité de chaque culture, de
superbes exemples de commentaire mélodique des textes sacrés dans les
rites de l'Occident comme de l'Orient.
De plus, l'attention de mes Prédécesseurs a été
constante dans ce domaine délicat, dont ils ont rappelé les principes
fondamentaux, qui doivent présider à la composition de la musique
sacrée, en particulier si elle est destinée à la Liturgie. Outre le Pape
saint Pie X, il faut rappeler, entre autres, les Papes Benoît XIV, avec
l'Encyclique Annus qui (19 février 1749), Pie XII, avec les
Encycliques Mediator Dei (20 novembre 1947) et Musicae sacrae
disciplina (25 décembre 1955) et, enfin, Paul VI avec les
orientations éclairées qu'il a formulées dans de multiples
interventions.
Les Pères du Concile Vatican II n'ont pas manqué de
rappeler ces principes, en vue de leur application aux nouvelles
situations de l'époque. Ils y ont consacré un chapitre spécifique, le
sixième chapitre de la Constitution Sacrosanctum Concilium . Le Pape Paul VI se
chargea ensuite de traduire en normes concrètes ces principes, notamment
à travers l'approbation de l'Instruction Musicam sacram , de la
Sainte Congrégation des Rites, le 5 mars 1967. Il faut constamment
revenir à ces principes d'inspiration conciliaire pour promouvoir, en
conformité avec les exigences de la réforme liturgique, un développement
qui soit, dans ce domaine également, à la hauteur de la tradition
musicale liturgique de l'Eglise. Le texte de la Constitution Sacrosanctum Concilium dans lequel il est
affirmé que l'Eglise "approuve toutes les formes d'art véritable, si
elles sont dotées des qualités requises" (7), trouve ses justes critères
d'application aux nn. 50-53 de l'Instruction Musicam sacram
mentionnée ci-dessus (8).
3. En diverses occasions, j'ai moi-même rappelé la
fonction précieuse et la grande importance de la musique et du chant
pour une participation plus active et intense aux célébrations
liturgiques (9), et j'ai souligné la nécessité de "purifier le culte
d'erreurs de style, de formes d'expression médiocres, de musiques et de
textes plats, peu adaptés à la grandeur de l'acte que l'on célèbre"
(10), pour assurer la dignité et la beauté des formes de la musique
liturgique.
Dans cette perspective, à la lumière du magistère de
saint Pie X et de mes autres Prédécesseurs, et en tenant compte en
particulier des orientations du Concile Vatican II, je souhaite
reproposer certains principes fondamentaux dans ce domaine si important
de la vie de l'Eglise, afin que la musique liturgique réponde toujours
davantage à sa fonction spécifique.
4. Dans le sillage des enseignements de saint Pie X
et du Concile Vatican II, il faut tout d'abord souligner que la musique
destinée aux rites sacrés doit avoir comme point de référence la
sainteté: de fait, celle-ci "sera d'autant plus sainte qu'elle sera en
connexion plus étroite avec l'action liturgique" (11). C'est précisément
pour cette raison que "non sans indistinction, tout ce qui est hors du
temple (pro-fanum) est capable d'en dépasser le seuil" affirmait avec
sagesse mon vénéré Prédécesseur Paul VI, en commentant un décret du
Concile de Trente (12) et il précisait que "si elle ne possède pas à la
fois le sens de la prière, de la dignité et de la beauté, la musique
instrumentale et vocale se barre elle-même l'accès dans la sphère du
sacré et du religieux" (13). D'autre part, la catégorie même de "musique
sacrée" connaît aujourd'hui un élargissement de sa signification allant
jusqu'à inclure des répertoires qui ne peuvent pas entrer dans la
célébration sans violer l'esprit et les normes de la Liturgie elle-même.
La réforme opérée par saint Pie X visait
spécifiquement à purifier la musique d'Eglise de toute contamination de
la musique profane destinée à la scène, qui, dans de nombreux pays,
avait entaché le répertoire et la pratique musicale liturgique. A notre
époque également, il faut considérer avec attention, comme je l'ai mis
en évidence dans l'Encyclique Ecclesia de Eucharistia, que toutes les expressions
des arts figuratifs et de la musique ne sont pas en mesure "d'exprimer
de manière adéquate le Mystère accueilli dans la plénitude de la foi de
l'Eglise" (14). Par conséquent, toutes les formes musicales ne peuvent
pas être considérées comme adaptées pour les célébrations liturgiques.
5. Un autre principe énoncé par saint Pie X dans le
Motu proprio Parmi les sollicitudes , un principe qui est
d'ailleurs intimement lié au précédent, est celui de la beauté formelle.
Il ne peut y avoir de musique destinée à la célébration des rites sacrés
qui ne soit d'abord de l'"art véritable", capable de posséder cette
efficacité "que l'Eglise souhaite obtenir en réservant une place dans sa
liturgie à l'art musical" (15).
Mais cette qualité, toutefois, ne suffit pas en
elle-même. La musique liturgique doit en effet répondre à certaines
conditions spécifiques: l'adhésion totale aux textes qu'elle présente,
l'harmonie avec le temps et le moment liturgique auquel elle est
destinée, la juste correspondance avec les gestes proposés par le rite.
Les divers moments liturgiques exigent en effet une expression musicale
qui leur soit propre, visant à chaque fois à faire apparaître la nature
propre d'un rite déterminé, soit qu'il proclame les merveilles de Dieu,
soit qu'il manifeste des sentiments de louange, de supplication voire de
tristesse pour l'expérience de la douleur humaine, une expérience que la
foi ouvre toutefois à la perspective de l'espérance chrétienne.
6. Le chant et la musique requis par la réforme
liturgique - il est bon de le souligner - doivent également répondre aux
exigences légitimes de l'adaptation et de l'inculturation. Il est
toutefois clair que toute innovation dans cette matière délicate doit
respecter des critères précis, tels que la recherche d'expressions
musicales qui répondent au besoin d'impliquer l'assemblée tout entière
dans la célébration et qui évitent, dans le même temps, de céder à la
légèreté et à la superficialité. Il faut également éviter, en principe,
les formes d'"inculturation" de type élitiste, qui introduisent dans la
Liturgie des compositions anciennes ou contemporaines qui ont sans doute
une valeur artistique, mais s'autorisent un langage qui est
incompréhensible au plus grand nombre.
En ce sens, saint Pie X indiquait - en recourant au
terme universalité - une exigence supplémentaire pour la musique
destinée au culte: "...même s'il est permis à chaque nation - notait-il
- d'admettre dans les compositions d'Eglise certaines formes
caractéristiques qui constituent en un certain sens le caractère
spécifique de la musique qui leur est propre, celles-ci doivent
toutefois être soumises aux caractères généraux de la musique sacrée de
manière à ce qu'une personne d'une autre nation qui les entende ne
puisse pas éprouver de mauvais sentiments" (16). En d'autres termes, le
cadre sacré de la célébration liturgique ne doit jamais devenir un
laboratoire d'expérimentations et de pratiques de composition et
d'exécution introduites sans avoir été attentivement étudiées.
7. Parmi les expressions musicales qui répondent le
mieux aux qualités requises par la notion de musique sacrée, en
particulier la musique liturgique, le chant grégorien occupe une place
particulière. Le Concile Vatican II le reconnaît comme le "chant propre
à la liturgie romaine" (17) auquel doit être réservée, à condition
égale, la première place dans les actions liturgiques chantées qui sont
célébrées en langue latine (18). Saint Pie X soulignait que l'Eglise l'a
"hérité des pères antiques", l'a "jalousement conservé au cours des
siècles dans ses codes liturgiques" et encore aujourd'hui le "propose
aux fidèles" comme une forme qui lui est propre, en le considérant
"comme le modèle suprême de la musique sacrée" (19). Le chant grégorien
continue donc d'être aujourd'hui encore un élément d'unité de la
liturgie romaine.
Comme saint Pie X en son temps, le Concile Vatican II
reconnaît que "les autres genres de musique sacrée, mais surtout la
polyphonie, ne sont nullement exclus des offices divins" (20). Il faut
par conséquent veiller avec beaucoup de soin aux nouveaux langages
musicaux, pour tenter de les amener à exprimer eux aussi les richesses
inépuisables du Mystère présenté dans la Liturgie et favoriser ainsi la
participation active des fidèles aux célébrations (21).
8. L'importance de conserver et d'enrichir le
patrimoine séculaire de l'Eglise conduit à porter une attention
particulière à une exhortation spécifique de la Constitution Sacrosanctum Concilium : "Les Scholae
cantorum seront assidûment développées" (22). L'Instruction
Musicam sacram précise à son tour la tâche ministérielle de la
schola: "En raison du rôle liturgique qu'elle remplit, la chorale - ou
la Chapelle musicale ou la Schola cantorum - mérite une attention
particulière. Sa fonction a pris encore plus d'importance et de poids
par suite des dispositions du Concile concernant le renouveau
liturgique. Il lui revient en effet d'assurer la juste exécution des
parties qui lui sont propres, selon les divers genres de chant, et
d'aider la participation active des fidèles dans le chant. En
conséquence: [...] On aura une chorale, ou des chapelles, ou des
Scolae cantorum et on les développera sérieusement, surtout dans les
cathédrales et les autres églises majeures, dans les séminaires et les
maisons d'études de religieux" (23). La tâche de la schola n'a pas été
réduite: elle remplit dans l'assemblée le rôle de guide et de soutien
et, à certains moments de la Liturgie, possède son rôle spécifique.
De la bonne coordination de tous - le prêtre
célébrant et le diacre, les servants de Messe, les officiants, les
lecteurs, le psalmiste, la schola cantorum , les musiciens, le
maître de chant, l'assemblée - naît ce juste climat spirituel qui rend
la célébration liturgique véritablement intense, vécue et fructueuse.
L'aspect musical des célébrations liturgiques ne peut donc être laissé
ni à l'improvisation, ni à l'arbitraire des individus, mais doit être
confié à une direction bien concertée dans le respect des normes et des
compétences, fruit significatif d'une bonne formation liturgique.
9. Dans ce domaine également se fait donc jour
l'urgence de promouvoir une solide formation à la fois des pasteurs et
des fidèles laïcs. Saint Pie X insistait particulièrement sur la
formation musicale des clercs. Un rappel dans ce sens a également été
fait par le Concile Vatican II: "On accordera une grande importance à
l'enseignement et à la pratique de la musique dans les séminaires, les
noviciats de religieux des deux sexes et leurs maisons d'études, et
aussi dans les autres institutions et écoles catholiques" (24). Cette
orientation doit être pleinement mise en œuvre. Il me semble donc
opportun de la rappeler, afin que les futurs pasteurs puissent acquérir
une sensibilité nécessaire également dans ce domaine.
Dans ce travail de formation, un rôle particulier est
joué par les écoles de musique sacrée, que saint Pie X exhortait à
soutenir et à promouvoir (25), et que le Concile Vatican II recommande
de fonder partout où cela est possible (26). Un fruit concret de la
réforme de saint Pie X fut l'érection à Rome, en 1911, huit ans après le
Motu proprio, de l'"Ecole supérieure pontificale de Musique sacrée",
devenue ensuite l'"Institut pontifical de Musique sacrée". A côté de
cette institution académique bientôt centenaire, qui a rendu et continue
de rendre un service de grande qualité à l'Eglise, il existe désormais
beaucoup d'autres écoles instituées par les Eglises particulières, qui
méritent d'être soutenues et développées au service d'une connaissance
et d'une exécution toujours plus élevée de la véritable musique
liturgique.
10. L'Eglise ayant toujours reconnu et favorisé le
progrès des arts, il ne faut pas s'étonner que, outre le chant grégorien
et la polyphonie, elle admette également de la musique plus moderne dans
les célébrations, à condition qu'elle respecte l'esprit des valeurs
véritables de l'art. Il est donc consenti aux Eglises présentes dans les
différentes nations de valoriser, dans les compositions destinées au
culte, "ces formes particulières qui constituent d'une certaine manière
le caractère spécifique de la musique qui leur est propre" (27). Dans la
lignée de mon saint prédécesseur et de ce qu'a établi, plus récemment,
la Constitution
Sacrosanctum Concilium (28), moi aussi, dans
l'Encyclique Ecclesia de Eucharistia , j'ai souhaité offrir
une place aux nouvelles contributions musicales en mentionnant, à côté
des mélodies grégoriennes inspirées, les "nombreux auteurs, et bien
souvent grands auteurs, qui se sont mesurés aux textes liturgiques de la
Messe" (29).
11. Le siècle dernier, avec le renouveau opéré par le
Concile Vatican II, a connu un important développement du chant
religieux populaire, dont Sacrosanctum Concilium dit: "Le chant
religieux populaire sera intelligemment favorisé, pour que dans les
exercices pieux et sacrés, et dans les actions liturgiques elles-mêmes,
[...] les voix des fidèles puissent se faire entendre" (30). Ce chant se
révèle particulièrement adapté à la participation des fidèles non
seulement aux pratiques de dévotion, "conformément aux normes et aux
prescriptions des rubriques" (31), mais également à la Liturgie
elle-même. En effet, le chant populaire constitue "un lien d'unité et
d'expression joyeuse de la communauté en prière, [...] favorise la
proclamation de la même foi et confère aux grands rassemblements
liturgiques une incomparable solennité empreinte d'intériorité" (32).
12. Concernant les compositions musicales
liturgiques, je fais mienne la "loi générale", que saint Pie X formulait
en ces termes: "Une composition pour église est d'autant plus sacrée et
liturgique qu'elle s'approche de la mélodie grégorienne du point de vue
du rythme, de l'inspiration et du goût; mais plus on perçoit qu'elle est
éloignée des formes de ce modèle suprême, moins elle est digne du
temple" (33). Il ne s'agit pas, bien évidemment, de copier le chant
grégorien, mais plutôt de faire en sorte que les nouvelles compositions
soient imprégnées du même esprit qui suscita et, au fur à mesure, modela
ce chant. Seul un artiste profondément pénétré du sensus ecclesiae
peut tenter de percevoir et de traduire en mélodie la vérité du
Mystère qui est célébré dans la Liturgie (34). Dans cette perspective,
j'écrivais dans la Lettre aux artistes: "Combien de compositions sacrées
ont été élaborées, au cours des siècles, par des personnes profondément
imprégnées du sens du mystère! D'innombrables croyants ont alimenté leur
foi grâce aux mélodies qui ont jailli du coeur d'autres croyants et sont
devenues partie intégrante de la liturgie, ou du moins concourent de
manière remarquable à sa digne célébration. Par le chant, la foi est
expérimentée comme un cri éclatant de joie et d'amour, une attente
confiante de l'intervention salvifique de Dieu" (35).
Une considération renouvelée et plus approfondie des
principes qui doivent être à la base de l'élaboration et de la diffusion
d'un répertoire de qualité est donc nécessaire. Ce n'est que de cette
manière que l'on permettra à l'expression musicale de servir de façon
appropriée son but ultime qui est "la gloire de Dieu et la
sanctification des fidèles" (36).
Je sais bien qu'encore aujourd'hui ne manquent pas
les compositeurs capables d'offrir, dans cet esprit, leur contribution
indispensable et leur collaboration compétente pour enrichir le
patrimoine de la musique au service d'une Liturgie qui soit toujours
plus intensément vécue. Je leur exprime toute ma confiance, unie à
l'exhortation la plus cordiale à consacrer toute leur énergie pour
enrichir le répertoire de compositions qui soient dignes de l'élévation
des mystères célébrés et, dans le même temps, adaptées à la sensibilité
actuelle.
13. Pour finir, je voudrais encore rappeler ce que
saint Pie X avait établi sur le plan concret, afin de favoriser
l'application effective des orientations données dans le Motu proprio.
En s'adressant aux évêques, il leur prescrivait d'instituer dans leurs
diocèses "une commission spéciale de personnes réellement compétentes en
matière de musique sacrée" (37). Là où la disposition pontificale fut
mise en pratique, les fruits n'ont pas manqué. A l'heure actuelle,
nombreuses sont les Commissions nationales, diocésaines et
interdiocésaines offrant leur précieuse contribution dans la préparation
de répertoires locaux, en essayant de faire un choix qui tienne compte
de la qualité des textes et des musiques. Je souhaite que les évêques
continuent de soutenir l'engagement de ces Commissions, en favorisant
leur travail dans le cadre pastoral (38).
A la lumière de l'expérience accumulée tout au long
de ces années, afin de mieux assurer que soit accompli l'important
devoir de réglementer et de promouvoir la sainte Liturgie, je demande à
la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements,
d'intensifier l'attention, dans le cadre de ses finalités
institutionnelles, accordée au domaine de la musique sacrée liturgique,
en s'appuyant sur les compétences des différentes Commissions et
Institutions spécialisées dans ce domaine, ainsi que sur la contribution
de l'Institut pontifical de Musique sacrée. En effet, il est important
que les compositions musicales utilisées dans les célébrations
liturgiques répondent aux critères énoncés de manière opportune par
saint Pie X et sagement développés à la fois par le Concile Vatican II
et par le Magistère de l'Eglise qui l'a suivi. Dans cette perspective,
j'ai bon espoir que les Conférences épiscopales accomplissent elles
aussi un examen soigné des textes destinés au chant liturgique (40), et
accordent une attention particulière à l'évaluation et à la promotion de
mélodies qui soient véritablement adaptées à l'usage sacré (41).
14. Toujours sur le plan pratique, le Motu proprio
dont on commémore le centième anniversaire aborde également la question
des instruments de musique à utiliser dans la Liturgie latine. Parmi
ceux-ci, il reconnaît sans hésitation la priorité de l'orgue, sur
l'usage duquel il établit des normes nécessaires (42). Le Concile
Vatican II a pleinement suivi l'orientation de mon saint Prédécesseur,
en établissant que: "On estimera hautement, dans l'Eglise latine,
l'orgue à tuyaux comme l'instrument traditionnel, dont le son peut
ajouter un éclat admirable aux cérémonies de l'Eglise et élever
puissamment les âmes vers Dieu et le ciel" (43).
Il faut toutefois noter que les compositions
actuelles utilisent souvent des instruments musicaux différents qui ne
manquent pas non plus de dignité. Dans la mesure où ils apportent un
soutien à la prière de l'Eglise, ils peuvent se révéler un
enrichissement précieux. Il faut toutefois être vigilant à ce que les
instruments soient adaptés à l'usage sacré, qu'ils conviennent à la
dignité du temple, qu'ils soient en mesure de soutenir le chant des
fidèles et qu'ils en favorisent l'édification.
15. Je souhaite que la commémoration du centenaire du
Motu proprio Parmi les sollicitudes , par l'intercession de son
saint auteur, unie à celle de sainte Cécile, patronne de la musique
sacrée, encourage et stimule tous ceux qui s'occupent de cet aspect
important des célébrations liturgiques. Les amateurs de musique sacrée,
en se consacrant avec un nouvel élan à un domaine d'une importance tout
à fait vitale, contribueront à la maturation de la vie spirituelle du
Peuple de Dieu. Les fidèles, quant à eux, en exprimant de manière
harmonieuse et solennelle leur foi à travers le chant, en
expérimenteront la richesse avec toujours plus de profondeur et se
conformeront à l'engagement de traduire ses élans dans les comportements
de la vie quotidienne. On pourra ainsi parvenir, grâce à l'engagement
convergent des pasteurs des âmes, des musiciens et des fidèles, à ce que
la Constitution Sacrosanctum Concilium qualifiait de véritable
"but de la musique sacrée", c'est-à-dire "la gloire de Dieu et la
sanctification des fidèles" (44).
Qu'en cela, la Vierge Marie soit également un exemple
et un modèle, elle qui sut chanter de manière unique, dans le
Magnificat , les merveilles que Dieu opère dans l'histoire de
l'homme. Avec ce souhait, j'accorde à tous avec affection ma
Bénédiction.
Donné à Rome, à Saint-Pierre, le 22 novembre, mémoire
de sainte Cécile, en l'an 2003, vingt-sixième année de mon Pontificat.
IOANNES PAULUS II
1) ii X Pontificis Maximi Acta
, vol. I, p. 77.
2) Ibid.
3) Ibid., n. 1, p.78.
4) Ibid.
5) n. 112.
6) Ibid.
7) Ibid.
8) Cf. AAS 59 (1967), 314-316.
9) Cf. par exemple, Discours à l'Institut pontifical
de Musique sacrée pour le 90 anniversaire de sa fondation (19 janvier
2001), n. 1: Insegnamenti XXIV/1 (2001),
194.
10) Audience générale du 26 février 2003, n. 3:
ORLF n. 9 du 4 mars 2003.
11) Concile œcuménique Vatican II, Constitution sur
la sainte Liturgie Sacrosanctum Concilium ,
n. 112.
12) Discours aux participants à l'Assemblée générale
de l'Association italienne Sainte-Cécile (18 septembre 1968):
Insegnamenti VI (1968), 479; cf. ORLF n.
39 du 27 septembre 1968.
13) Ibid.
14) n. 50: AAS 95 (2003), 467.
15) n. 2, p. 78.
16) Ibid., pp. 78-79.
17) Constitution sur la sainte Liturgie Sacrosanctum
Concilium , n. 116.
18) Cf. Sainte Congrégation des Rites, Instruction sur
la musique dans la sainte Liturgie Musicam sacram (5 mars 1967),
50: AAS 59 (1967), 314.
19) Motu proprio Parmi les sollicitudes
, n. 3, p. 79.
20) Constitution sur la sainte Liturgie
Sacrosanctum Concilium , n. 116.
21) Cf. Ibid. , n. 30.
22) Ibid. , n. 114.
23) n. 19: AAS 59 (1967), 306; cf. ORLF n. 10 du 10 mars 1967.
24) Constitution sur la sainte Liturgie
Sacrosanctum Concilium , n. 115.
25) Motu proprio Parmi les sollicitudes
, n. 28, p. 86.
26) Cf. Constitution sur la sainte Liturgie
Sacrosanctum Concilium , n. 115.
27) Pie X, Motu proprio Parmi les sollicitudes , n. 2, p. 79.
28) Cf. n. 119.
29) n. 49: AAS 95 (2003),
466.
30) n. 118.
31) Ibid.
32) Jean-Paul II, Discours au Congrès international de
musique sacrée (27 janvier 2001), n. 4: Insegnamenti XXIV/1
(2001), 239-240; cf. ORLF n. 6 du 6 février
2001.
33) Motu proprio Parmi les sollicitudes
, n. 3, p. 79.
34) Constitution sur la sainte Liturgie
Sacrosanctum Concilium, n. 112.
35) n. 12: InsegnamentiXXII/1 (1999), 718.
36) Constitution sur la sainte Liturgie
Sacrosanctum Concilium , n. 112.
37) Motu proprio Parmi les sollicitudes
, n. 24, p. 85.
38) Cf. Jean-Paul II, Lettre apostolique Vicesimus
quintus annus (4 décembre 1987), n. 20: AAS
81 (1989), 916.
39) Cf. Jean-Paul II, Constitution apostolique
Pastor Bonus (28 juin 1988), n. 65: AAS 80
(1988), 877.
40) Cf. Jean-Paul II, Lettre encyclique Dies
Domini (31 mai 1998), n. 50: AAS 90 (1998), 745; Congrégation pour le
Culte divin et la Discipline des Sacrements, Instruction Liturgicam
authenticam (28 mars 2001), 108: AAS 93
(2001), 719.
41) Cf. Institutio generalis Missalis Romani , editio typica III, 393.
42) Cf. Motu proprio Parmi les sollicitudes , n. 15-18, p. 84.
43) Constitution sur la sainte Liturgie
Sacrosanctum Concilium , n. 120.
44) Ibid. , n. 112.
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