Benoît XVI et les évêques de Terre
Sainte: rappel à l’ordre du Chemin |
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CITE DU VATICAN, le 5 Mars 2007 -
(E.S.M.) - En l'espace de trois jours, au début du Carême, le Chemin Néocatéchuménal a reçu deux rappels à l'ordre de poids: le premier de la
part du pape Benoît XVI, le second de la part des évêques de Terre
Sainte.
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Le pape Benoît XVI recevant
les membres du Chemin Néocatéchuménal le 12 janvier 2006
Le carême du Chemin: double pénitence à Rome et à Jérusalem
Le pape Benoît XVI d’abord, les évêques de Terre Sainte ensuite, adressent
au Chemin Néocatéchuménal un sévère rappel à l’ordre. Voici comment et
pourquoi.
par Sandro Magister
Le Chemin Néocatéchuménal, fondé en Espagne dans les années 60 et dirigé par
les laïcs Kiko Argüello (dans la photo) et Carmen Hernández et par le prêtre
Mario Pezzi, est l’un des mouvements catholiques les plus vigoureux. Il
compte 20.000 communautés dans 6.000 paroisses de 900 diocèses sur les cinq
continents, avec 3.000 prêtres et 5.000 religieuses. Il possède un réseau
international de 63 séminaires "Redemptoris Mater". Son expansion est
l’œuvre de nombreuses familles qui partent en mission vers des terres
lointaines.
Avec de tels résultats, il est naturel que le Chemin gagne le soutien de
nombreux évêques et cardinaux. Mais il a aussi fait et fait encore l’objet
de nombreuses critiques de même poids, rapportées par dans des précédents
articles.
En décembre 2005, la congrégation pour le culte divin et la discipline des
sacrements a donné l’ordre au Chemin Néocatéchuménal de modifier la façon
dont ses communautés célèbrent la messe. Le 12 janvier 2006, Benoît XVI a
exigé du Chemin qu’il "respecte attentivement" les règles établies. Ces deux
rappels à l’ordre ont rencontré une obéissance toute relative, tant sur le
moment que par la suite.
La catéchèse prêchée par le Chemin dans ses communautés donne aussi lieu à
controverse. Encore aujourd’hui, une bonne partie des textes est encore
secrète et certains d’entre eux ont rencontré des objections de la part de
diverses congrégations au Vatican, y compris celle pour la doctrine de la
foi.
Enfin, l’approbation définitive des statuts du Chemin est incertaine. Ils
avaient été approuvés "ad experimentum" par le Saint-Siège le 29 juin 2002
pour un quinquennat qui va prendre fin dans quelques mois.
C’est Benoît XVI lui-même qui a parlé de l’incertitude concernant
l’approbation définitive des statuts:
"On se demande si, après cinq années d’expérience, il faut confirmer de
manière définitive les statuts du Chemin Néocatéchuménal, ou s’il faut
prolonger la période d’essai ou encore s’il est peut-être nécessaire de
réviser certains éléments de cette structure".
C’était
le 22 février, premier jeudi de carême, le pape
Benoît XVI s’adressait au clergé de Rome. La perche lui a été tendue par un
prêtre appartenant à la communauté de Schönstatt, Gerardo Raul Carcar, qui a
interrogé le pape sur le rapport entre l’Eglise et les mouvements.
C’est justement sur le rapport non pacifique entre les communautés
néocatéchuménales et les paroisses et diocèses où elles agissent que le
patriarche latin de Jérusalem, Michel Sabbah, et les autres évêques
catholiques de Terre Sainte sont intervenus le 25 du même mois.
Leur intervention a pris la forme d’une lettre collective adressée aux
membres du Chemin, courtoise dans la forme mais sévère dans le fond.
Les évêques de Terre Sainte reprochent aux néocatéchumènes de faire bande à
part, de célébrer la messe en dehors des paroisses, de ne pas observer les
rites liturgiques, de rester éloignés de la langue et de la culture des
habitants locaux.
Les critiques des évêques ont été nourries par leur propre expérience. En
Terre Sainte, les néocatéchumènes sont présents en masse. Un vaste édifice
situé sur les flancs du Mont des Béatitudes, à l’ouest du lac de Tibériade,
leur tient lieu de citadelle. Baptisée "Domus Galilaeae", elle a été
inaugurée le 24 mars 2000 par Jean-Paul II en personne, en présence de 50
000 néocatéchumènes venus du monde entier.
L’architecture et la décoration de la "Domus", qui mélangent bizarrement
allégories chrétiennes et hébraïques, sont l’œuvre du fondateur du Chemin,
Kiko Argüello.
Un flux incessant de pèlerins néocatéchuménaux, soigneusement séparés des
autres visiteurs, s’ajoute aux nombreuses communautés établies en Terre
Sainte. Les messes aussi sont célébrées séparément et le déroulement de
leurs rites est le même dans le monde entier, tout comme les chants composés
par leur fondateur et chef suprême, Kiko.
Par ailleurs, en matière politique, les communautés néocatéchuménales ne
cachent pas leur nette préférence pour Israël ; à l’opposé des chrétiens qui
habitent sur ces terres et qui sont presque tous arabes et pro-palestiniens.
Vous trouverez les propos du pape Benoît XVI concernant les néocatéchumènes
sur le lien:
La première règle, précise, Benoît XVI, est de ne pas étouffer les charismes
et ci-dessous la lettre que leur ont adressée les évêques de Terre Sainte,
les premiers datant du 22 février et la deuxième du 25 février:
La lettre des évêques de Terre Sainte
Jérusalem, le 25 février 2007
Frères et Sœurs du Chemin Néocatéchuménal,
1. La paix et l’amour de Notre Seigneur Jésus-Christ soient toujours avec
vous. Nous, Ordinaires catholiques de Terre Sainte, vous adressons cette
lettre au début du Carême, dans le cadre du plan pastoral commun pour cette
année, qui a comme thème la catéchèse et l’éducation religieuse dans les
paroisses.
Frères et Sœurs du Chemin, vous êtes les bienvenus dans nos diocèses. Nous
remercions Dieu de la grâce que le Seigneur vous a donnée et du charisme que
le Saint-Esprit a répandu dans l’Eglise à travers votre ministère de la
formation post-baptismale. Nous vous sommes reconnaissants de votre présence
dans certaines de nos paroisses, de votre prédication de la parole de Dieu,
de l’aide que vous offrez à nos fidèles dans l’approfondissement de leur foi
et dans leur enracinement dans leurs églises locales, en "une synthèse de
prédication kérygmatique, de changement de vie et de liturgie" (Statuts,
Art.8).
A la suite de la lettre que le pape Benoît XVI vous a adressée le 12 janvier
2006 et de celle de la congrégation pour le culte divin du 1er décembre
2005, nous vous demandons de prendre place au cœur de la paroisse dans
laquelle vous annoncez la parole de Dieu, en évitant de constituer un groupe
à part. Nous voudrions que vous puissiez dire avec Saint Paul: "Je me suis
fait l’esclave de tous afin d’en gagner le plus grand nombre" (1
Corinthiens, 9, 19).
Le principe auquel nous devons rester fidèles tous ensemble et conformer
notre action pastorale devrait être "une paroisse et une eucharistie". Votre
premier devoir est donc, si vous voulez aider les fidèles à grandir dans la
foi, de les enraciner au coeur des paroisses et des traditions liturgiques
dans lesquelles ils ont été élevés depuis des générations.
En Orient, nous tenons beaucoup à notre liturgie et à nos traditions. La
liturgie a grandement contribué à conserver la foi chrétienne dans nos pays
tout au long de l’histoire. Le rite est une sorte de carte d’identité et pas
seulement une manière de prier parmi d’autres. Nous vous prions d’avoir la
charité de comprendre et de respecter l’attachement de nos fidèles à leurs
liturgies propres.
2. L’Eucharistie est le sacrement de l’unité dans la paroisse, pas celui de
la division. C’est pourquoi nous demandons que les célébrations
eucharistiques dans tous les rites orientaux, ainsi que dans le rite latin,
soient toujours présidées par le curé ou, dans le cas du rite latin, en
plein accord avec lui. Célébrez l’Eucharistie avec la paroisse et selon le
rite de l’Eglise locale. "Là où est l’évêque, là est l’Eglise", a écrit
Saint Ignace d’Antioche. Enseignez aux fidèles l’amour de leurs traditions
liturgiques et mettez votre charisme au service de l’unité.
3. Nous vous demandons aussi de vous mettre sérieusement à l’étude de la
langue et de la culture de la population. Ce sera une marque de respect
envers elle et un moyen de comprendre son esprit et son histoire, dans le
contexte de la Terre Sainte: pluralisme religieux, culturel et national. De
plus, dans nos pays, Palestine, Israël, Jordanie, tout le monde est à la
recherche de la paix et de la justice, une recherche qui fait partie
intégrante de notre vie de chrétiens. Chaque prédication devrait guider nos
fidèles quant aux attitudes concrètes qu’ils doivent prendre dans les
différentes situations de la vie, notamment dans la situation de conflit qui
perdure en Palestine: d’une part, une attitude de pardon et d’amour envers
l’ennemi, et d’autre part une exigence de respect des droits de chacun,
particulièrement la dignité, la liberté et la justice.
Nous vous demandons de prêcher un Evangile inscrit dans la vie, un Evangile
qui éclaire tous les aspects de la vie et qui enracine les fidèles en
Jésus-Christ Ressuscité et dans tout leur contexte humain, culturel et
ecclésial.
Nous demandons à Dieu de remplir vos cœurs de sa force et de son amour et de
vous donner sa grâce pour que vous puissiez remplir les cœurs des fidèles de
son amour et de sa force.
+ Michel Sabbah, patriarche latin de Jérusalem;
+ Elias Shakour, archevêque grec melkite catholique d’Acre, de Haïfa, de
Nazareth et de toute la Galilée;
+ Georges El Murr, archevêque grec melkite catholique de Philadelphie, de
Petra et de Jordanie;
+ Paul Sayyah, archevêque maronite de Haïfa et de Terre Sainte, exarque
patriarcal maronite de Jérusalem, des Territoires Palestiniens et de
Jordanie;
+ Fouad Twal, évêque coadjuteur latin, Jérusalem;
+ Kamal Bathish, évêque auxiliaire latin, Jérusalem;
+ Selim Sayegh, vicaire patriarcal latin pour la Jordanie;
+ Giacinto-Boulos Marcuzzo, vicaire patriarcal latin pour Israël;
+ Pierre Melki, exarque patriarcal syro-catholique de Jérusalem, de Terre
Sainte et de Jordanie;
+ Georges Bakar, exarque patriarcal grec melkite catholique de Jérusalem;
+ Raphaël Minassian, exarque patriarcal arméno-catholique de Jérusalem, de
Terre Sainte et de Jordanie.
Traduction
française par Charles de Pechpeyrou, Paris, France
Le discours adressé par Benoît XVI, le 12 janvier
2006, aux communautés du Chemin Néocatéchuménal, avec le rappel à
l'observance des normes liturgiques (discours improprement cité comme
"lettre" dans le texte des évêques de Terre Sainte):►
Néocatéchuménal
Le site officiel, en plusieurs langues, du
mouvement fondé par Kiko Argüello:►
Chemin Néocatéchuménal
Et sa citadelle en Terre Sainte:►
Domus Galilaeae
Sources: www.chiesa-
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 05.03.2007 - BENOÎT XVI - Eglise -
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