Homélie du pape Benoît XVI : Messe du
1er janvier 2010, Journée mondiale de la Paix |
 |
Le 05 janvier 2010 -
(E.S.M.)
- Vendredi 1 janvier 2010, solennité de la Mère de Dieu et
Journée mondiale
de la Paix, le
Pape Benoît XVI
a présidé une
Messe dans la
Basilique
Saint-Pierre. Au
cours de la
célébration
eucharistique,
il a prononcé
l'homélie
suivante:
|
Le pape Benoît XVI
-
Pour agrandir l'image
►
Cliquer
Homélie du pape Benoît XVI : Messe du
1er janvier 2010, Journée mondiale de la Paix
La paix se construit aussi
en respectant l'environnement
Le 05 janvier 2010 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
-
Vendredi 1 janvier 2010, solennité de la Mère de Dieu et Journée mondiale de
la Paix, le Pape Benoît XVI a présidé une Messe dans la Basilique
Saint-Pierre. Au cours de la célébration eucharistique, il a prononcé
l'homélie suivante:
Vénérés frères,
Mesdames et Messieurs,
Chers frères et sœurs!
En ce premier jour de l'année nous avons la joie et la grâce de célébrer la
Très Sainte Mère de Dieu et, dans le même temps, la Journée mondiale de la
Paix. Au cours de ces deux événements nous célébrons le Christ, Fils de
Dieu, né de la Vierge Marie et notre paix véritable! A vous tous, qui êtes
ici rassemblés: représentants des peuples du monde, de l'Eglise romaine et
universelle, prêtres et fidèles; et à ceux qui sont en liaison avec nous à
travers la radio et la télévision, je répète les paroles de l'antique
bénédiction: que le Seigneur vous découvre son visage et vous accorde la
paix (cf. Nb 6, 26). C'est précisément le thème
du Visage et des visages que je voudrais développer aujourd'hui, à la
lumière de la Parole de Dieu - Visage de Dieu et visages des hommes - un
thème qui nous offre également une clef de lecture au problème de la paix
dans le monde.
Nous avons écouté, que ce soit dans la première lecture - tirée du Livre des
Nombres - ou dans le Psaume responsorial, plusieurs expressions qui
contiennent la métaphore du visage se référant à Dieu: "Que Yahvé fasse pour
toi rayonner son visage / et te fasse grâce" (Nb 6, 25);
"Que Dieu nous prenne en grâce et nous bénisse, / faisant reluire sur
nous sa face! / Sur la terre on connaîtra tes voies, parmi toutes les
nations, ton salut" (Ps 66/67, 2-3). Le
visage est l'expression par excellence de la personne, ce qui la rend
reconnaissable et sur lequel transparaissent ses sentiments, ses pensées,
les intentions de son cœur. Dieu, par sa nature, est invisible, mais la
Bible lui applique cependant également cette image. Montrer son visage est
l'expression de sa bienveillance, alors que le cacher en indique la colère
et la réprobation. Le Livre de l'Exode dit que "Yahvé parlait à Moïse
face à face, comme un homme parle à son ami" (Ex 33,
11), et, toujours à Moïse, le Seigneur promet sa proximité par
une formule très singulière: "Ma Face ira, et je te procurerai le repos"
(cf. Ex 33, 14). Les Psaumes nous montrent les croyants comme
ceux qui cherchent le visage de Dieu (cf. Ps 26/27, 8;
104/105, 4) et qui aspirent à le voir dans le culte
(cf. Ps 42, 3), et ils nous disent que "les hommes droits"
le "contempleront" (Ps 10/11, 7).
On peut lire tout le récit biblique comme une révélation progressive du
visage de Dieu, jusqu'à parvenir à sa pleine manifestation en Jésus Christ.
"Mais lorsque les temps furent accomplis - nous a rappelé également
aujourd'hui l'apôtre Paul -, Dieu a envoyé son Fils" (Ga 4, 4). Et il ajoute
immédiatement: "Il est né d'une femme, il a été sous la domination de la
Loi". Le visage de Dieu a pris un visage humain, se laissant voir et
reconnaître dans le Fils de la Vierge Marie, que nous vénérons pour cette
raison sous le très haut titre de "Mère de Dieu". Elle, qui a conservé dans
son cœur le secret de la maternité divine, a été la première à voir le
visage de Dieu fait homme dans le petit fruit de son sein. La mère a une
relation très particulière, unique et d'une certaine manière exclusive avec
son fils à peine né. Le premier visage que l'enfant voit est celui de sa
mère, et ce regard est décisif pour son rapport avec la vie, avec lui-même,
avec les autres, avec Dieu; il est également décisif pour qu'il puisse
devenir un "fils de la paix" (Lc 10, 6). Parmi les nombreuses typologies
d'icônes de la Vierge Marie, il en existe une dans la tradition byzantine
intitulée "de la tendresse", qui représente Jésus enfant avec le visage
appuyé - joue contre joue - sur celui de sa Mère. L'Enfant regarde la Mère,
et celle-ci nous regarde, comme pour refléter vers celui qui observe, et qui
prie, la tendresse de Dieu, descendue du Ciel en Elle et incarnée dans ce
Fils d'homme qu'elle porte dans ses bras. Dans cette icône mariale, nous
pouvons contempler quelque chose de Dieu lui-même: un signe de l'amour
ineffable qui l'a poussé à "donner son fils unique" (Jn 3, 16). Mais cette
même icône nous montre également, en Marie, le visage de l'Eglise, qui
reflète sur nous et sur le monde entier la lumière du Christ, l'Eglise à
travers laquelle parvient à chaque homme la bonne nouvelle: "Tu n'es plus
esclave mais fils" (Ga 4, 7) - comme nous le lisons encore chez saint Paul.
Frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce, Messieurs les ambassadeurs,
chers amis! Méditer sur le mystère du visage de Dieu et de l'homme est une
voie privilégiée qui conduit à la paix. En effet, celle-ci commence par un
regard respectueux, qui reconnaît dans le visage de l'autre une personne,
quelle que soit la couleur de sa peau, sa nationalité, sa langue, sa
religion. Mais qui, sinon Dieu, peut garantir, pour ainsi dire, la
"profondeur" du visage de l'homme? En réalité, ce n'est que si nous
possédons Dieu dans notre cœur, que nous sommes en mesure de saisir dans le
visage de l'autre un frère en humanité, non pas un moyen mais une fin, non
pas un rival ou un ennemi, mais un autre moi-même, une facette du mystère
infini de l'être humain. Notre perception du monde et, en particulier, de
nos semblables, dépend essentiellement de la présence en nous de l'Esprit de
Dieu. C'est une sorte de "résonance": celui qui a le cœur vide, ne perçoit
que des images plates, privées d'épaisseur. En revanche, plus nous sommes
habités par Dieu, et plus nous sommes également sensibles à sa présence dans
ce qui nous entoure: chez toutes les créatures, et en particulier chez les
autres hommes, bien que parfois le visage humain lui-même, marqué par la
dureté de la vie et du mal, puisse être difficile à apprécier et à
accueillir comme épiphanie de Dieu. C'est donc à plus forte raison que, pour
nous reconnaître et nous respecter tels que nous sommes réellement,
c'est-à-dire des frères, nous avons besoin de nous référer au visage d'un
Père commun, qui nous aime tous, malgré nos limites et nos erreurs.
Dès l'enfance, il est important d'être éduqués au respect de l'autre, même
lorsqu'il est différent de nous. L'expérience est désormais toujours plus
fréquente de classes scolaires composées d'enfants de plusieurs
nationalités, mais même lorsque ce n'est pas la cas, leurs visages sont une
prophétie de l'humanité que nous sommes appelés à former: une famille de
familles et de peuples. Plus ces enfants sont petits et plus ils suscitent
en nous la tendresse et la joie en raison d'une innocence et d'une
fraternité qui nous apparaissent évidentes: malgré leurs différences, ils
pleurent et rient de la même façon, ils ont les mêmes besoins, ils
communiquent spontanément, ils jouent ensemble... Les visage des enfants
sont comme un reflet de la vision de Dieu sur le monde. Pourquoi alors faire
disparaître leurs sourires? Pourquoi empoisonner leurs cœurs?
Malheureusement, l'icône de la Mère de Dieu de la tendresse trouve une
réciproque tragique dans les images douloureuses de tant d'enfants et de
leurs mères en proie à la guerre et aux violences: personnes déplacées,
réfugiés, migrants forcés. Des visages creusés par la faim et les maladies,
des visages défigurés par la douleur et par le désespoir. Les visages des
petits innocents sont un appel silencieux à notre responsabilité: face à
leur condition sans défense, toutes les fausses justifications de la guerre
et de la violence s'effondrent. Nous devons simplement nous convertir à des
projets de paix, déposer les armes en tous genres et nous engager tous
ensemble à construire un monde plus digne de l'homme.
Mon Message pour la xliii Journée mondiale de la Paix d'aujourd'hui: "Si tu
veux construire la paix, protège la création", se situe à l'intérieur de la
perspective du visage de Dieu et des visages humains. En effet, nous pouvons
affirmer que l'homme est capable de respecter les créatures dans la mesure
où il possède dans son esprit le sens plénier de la vie, autrement il sera
amené à se mépriser lui-même ainsi que ce qui l'entoure, à ne pas avoir de
respect pour l'environnement dans lequel il vit, la création. Celui qui sait
reconnaître dans l'univers les reflets du visage invisible du Créateur, est
amené à avoir un plus grand amour pour les créatures, une plus grande
sensibilité pour leur valeur symbolique. Le Livre des Psaumes est en
particulier riche de témoignages de cette manière particulièrement humaine
de se mettre en relation avec la nature: avec le ciel, la mer, les
montagnes, les collines, les fleuves, les animaux... "Que tes œuvres sont
nombreuses, Yahvé! - s'exclame le Psalmiste - / toutes avec sagesse tu les
fis, / la terre est emplie de ta richesse" (Ps 104/103, 24).
En particulier, la perspective du "visage" invite à s'arrêter sur ce que,
également dans ce Message, j'ai appelé l'"écologie humaine". Il existe en
effet un lien très étroit entre le respect de l'homme et la sauvegarde de la
création. "Les devoirs vis-à-vis de l'environnement découlent des devoirs
vis-à-vis de la personne considérée en elle-même, et en relation avec les
autres" (ibid., 12). Si l'homme se dégrade, s'il dégrade le milieu dans
lequel il vit; si la culture tend vers un nihilisme, sinon théorique, du
moins pratique, la nature ne pourra qu'en payer les conséquences. En effet,
on peut constater une influence réciproque entre le visage de l'homme et le
"visage" de l'environnement: "Quand l'écologie humaine est respectée dans la
société, l'écologie proprement dite en tire aussi avantage" (ibid.; cf. Enc.
Caritas in Veritate, n. 51). Je renouvelle donc mon appel à investir dans
l'éducation, en se proposant pour objectif, outre une transmission
nécessaire de notions techniques et scientifiques, une "responsabilité
écologique" plus vaste et approfondie, fondée sur le respect de l'homme et
de ses droits et devoirs fondamentaux. Ce n'est qu'ainsi que l'engagement
pour l'environnement peut devenir vraiment éducation à la paix et
construction de la paix.
Chers frères et sœurs, pendant le Temps de Noël revient un Psaume qui
contient, entre autres, également un exemple merveilleux de la façon dans la
venue de Dieu transfigure la création et provoque une sorte de fête
universelle. Cet hymne commence par une invitation universelle à la louange:
"Chantez à Yahvé un chant nouveau! / Chantez à Yahvé, toute la terre! /
Chantez à Yahvé, bénissez son nom!" (Ps 95/96, 1). Mais à un certain moment,
cet appel à la joie s'étend à toute la création: "Joie au ciel! Exulte la
terre! / Que gronde la mer, et sa plénitude! / Que jubile la campagne, et
tout son fruit, / que tous les arbres et les forêts crient de joie" (vv.
11-12). La fête de la foi devient fête de l'homme et de la création: cette
fête qui, à Noël, s'exprime également à travers les décorations sur les
arbres, dans les rues, dans les maisons. Tout refleurit, car Dieu est apparu
parmi nous. La Vierge Marie montre l'Enfant Jésus aux pasteurs de Bethléem,
qui se réjouissent et louent le Seigneur (cf. Lc 2, 20); l'Eglise renouvelle
le mystère pour les hommes de chaque génération, elle leur montre le visage
de Dieu, pour que, avec sa bénédiction, ils puissent marcher sur la voie de
la paix.
Texte original du
discours du Saint Père
►
Italien
Regarder
la vidéo en
Italien ou en
Français
►
Angelus de Benoît XVI, Solennité de Marie Très sainte Mère de Dieu
Sources : www.vatican.va
-
E.S.M.
(©L'Osservatore Romano - 5 janvier 2010)
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 05.01.2010 -
T/Benoît XVI
|