Benoît XVI inaugure un nouveau cycle
de catéchèses consacrées à Saint Paul |
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Cité du Vatican, le 02 juillet 2008 -
(E.S.M.)
- A l'occasion de l'audience générale Salle Paul VI, à laquelle
ont pris part 8.000 pèlerins, le Saint-Père Benoît XVI a revenu sur la
figure de l'Apôtre des gentils, auquel est consacrée l'année paulinienne
inaugurée samedi dernier.
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Benoît XVI inaugure un nouveau cycle de catéchèses consacrées à Saint Paul
Synthèse de la catéchèse du Saint-Père - Texte intégral en 2e partie
(Ici)
A l'occasion de l'audience générale Salle Paul VI, à laquelle ont pris part
8.000 pèlerins, le Saint-Père Benoît XVI a revenu sur la figure de l'Apôtre
des gentils, auquel est consacrée l'Année
Paulinienne inaugurée samedi
dernier (conclusion le 29 juin 2009). Il est, a-t-il dit,
un exemple "de
totale consécration au Seigneur et à son Eglise, de grande ouverture à
l'humanité et à ses cultures. Pour comprendre ce qu'il dit aux chrétiens
d'aujourd'hui, il faut revenir sur le contexte dans lequel il vécut et
agit sous de multiples aspects, assez proche du nôtre".
Saint Paul, a rappelé Benoît XVI, venait "d'une culture particulière et
certainement minoritaire, celle d'Israël et de sa tradition nettement
différenciée du contexte général, ce qui pouvait avoir deux conséquences: la
dérision, qui pouvait aller jusqu'à l'intolérance comme jusqu'à
l'admiration". Deux facteurs ont cependant favorisé l'action de Paul : la
diffusion de "la culture hellénistique, devenue après Alexandre le grand
patrimoine de la Méditerranée orientale et du Proche Orient", et "la
structure politique et administrative de l'empire romain" qui unifiait les
peuples. "La conception universelle qui lui est propre donna sans nul doute
une impulsion fondamentale à la foi en Jésus-Christ. La situation
historique et culturelle et le milieu d'où il venait influèrent sur ses
choix et son projet".
Puis le Saint-Père a rappelé que Paul a été appelé "l'homme des trois
cultures", regroupement de ses origines juives, de la langue grecque et de
son statut de citoyen romain, dont témoigne son nom latin Paul. On trouve
aussi dans sa formation intellectuelle la philosophie stoïcienne, dominante
à son époque, porteuse "de hautes valeurs humaines et morales qui seront
inclues par le christianisme". Et puis, c'était un moment agité par une
crise de la religion traditionnelle, principalement sous ses aspects
mythologiques ou sociologiques.
Après avoir fait un premier survol du climat culturel de notre premier
siècle, Benoît XVI a dit qu'on ne pouvait pas correctement comprendre Paul
sans le replacer dans un contexte intellectuel juif et païen à la fois, où
il s'est forgé une personnalité qui dépasse ce cadre et lui donne une
dimension historique et idéale originale. Mais il en va de même pour le
christianisme même plus généralement dont l'Apôtre est un paradigme de
premier ordre, et de qui nous pouvons toujours et encore apprendre".
Texte intégral de la catéchèse du Saint-Père
Chers frères et sœurs,
Je voudrais entamer aujourd'hui un nouveau cycle de catéchèses, dédié au
grand Apôtre saint Paul. C'est à lui, comme vous le savez, qu'est consacrée
cette année qui s'étend de la fête liturgique des saints Pierre et Paul du
29 juin 2008 jusqu'à la même fête de 2009. L'apôtre Paul, figure
extraordinaire et presque inimitable, mais pourtant stimulante, se présente
à nous comme un exemple de dévouement total au Seigneur et à son Eglise,
ainsi que de grande ouverture à l'humanité et à ses cultures. Il est donc
juste que nous lui réservions une place particulière, non seulement dans
notre vénération, mais également dans l'effort de comprendre ce qu'il a nous
à dire à nous aussi, chrétiens d'aujourd'hui. Au cours de cette première
rencontre, nous voulons nous arrêter pour prendre en considération le milieu
dans lequel il vécut et œuvra. Un thème du genre semblerait nous conduire
loin de notre époque, vu que nous devons nous insérer dans le monde d'il y a
deux mille ans. Mais toutefois cela n'est vrai qu'en apparence et seulement
en partie, car nous pourrons constater que, sous divers aspects, le contexte
socio-culturel d'aujourd'hui ne diffère pas beaucoup de celui d'alors.
Un facteur primordial et fondamental qu'il faut garder à l'esprit est
constitué par le rapport entre le milieu dans lequel Paul naît et se
développe et le contexte global dans lequel successivement il s'insère. Il
provient d'une culture bien précise et circonscrite, certainement
minoritaire, qui est celle du peuple d'Israël et de sa tradition. Dans le
monde antique et particulièrement au sein de l'empire romain, comme nous
l'enseignent les spécialistes en la matière, les juifs devaient correspondre
à environ 10% de la population totale; mais ici à Rome, vers la moitié du
Ier siècle, leur nombre était encore plus faible, atteignant au maximum 3%
des habitants de la ville. Leurs croyances et leur style de vie, comme cela
arrive encore aujourd'hui, les différenciaient nettement du milieu
environnant; et cela pouvait avoir deux résultats: ou la dérision, qui
pouvait conduire à l'intolérance, ou bien l'admiration, qui s'exprimait sous
diverses formes de sympathie comme dans le cas des «timorés de Dieu» ou des
«prosélytes», païens qui s'associaient à la Synagogue et partageaient la foi
dans le Dieu d'Israël. Comme exemples concrets de cette double attitude nous
pouvons citer, d'une part, le jugement lapidaire d'un orateur tel que le fut
Cicéron, qui méprisait leur religion et même la ville de Jérusalem
(cf. Pro Flacco, 66-69) et, de l'autre, l'attitude la femme de Néron, Popée, qui est
rappelée par Flavius Josèphe comme «sympathisante» des Juifs
(cf. Antiquités
juives 20, 195.252; Vie 16), sans rappeler que Jules César leur avait déjà
officiellement reconnu des droits particuliers qui nous ont été transmis par
l'historien juif Flavius Joseph (cf. ibid. 4, 200-216). Il est certain que
le nombre de juifs, comme du reste c'est le cas aujourd'hui, était beaucoup
plus important en dehors de la terre d'Israël, c'est-à-dire dans la
diaspora, que sur le territoire que les autres appelaient Palestine.
Il n'est donc pas étonnant que Paul lui-même ait été l'objet de la double
évaluation, opposé, que nous avons évoquée. Une chose est certaine: le
particularisme de la culture et de la religion juive trouve tranquillement
place au sein d'une institution aussi omniprésente que l'était l'empire
romain. Plus difficile et plus compliquée sera la position du groupe de
ceux, juifs ou païens, qui adhèreront avec foi à la personne de Jésus de
Nazareth, dans la mesure où ceux-ci se distingueront aussi bien du judaïsme
que du paganisme régnant. Quoi qu'il en soit, deux facteurs favorisèrent
l'engagement de Paul. Le premier fut la culture grecque ou plutôt
hellénistique, qui après Alexandre le Grand était devenue le patrimoine
commun de l'ouest méditerranéen et du Moyen-Orient, tout en intégrant en
elle de nombreux éléments des cultures de peuples traditionnellement jugés
barbares. A cet égard, l'un des écrivains de l'époque affirme qu'Alexandre
«ordonna que tous considèrent comme patrie l'ekumene tout entier... et que
le Grec et le Barbare ne se différencient plus» (Plutarque De Alexandri
Magni fortuna aut virtute, §§ 6.8). Le deuxième facteur fut la structure
politique et administrative de l'empire romain, qui garantissait la paix et
la stabilité de la Britannia jusqu'à l'Egypte du sud, unifiant un territoire
aux dimensions jamais vues auparavant. Dans cet espace, il était possible de
se déplacer avec une liberté et une sécurité suffisantes, en profitant,
entre autres, d'un système routier extraordinaire, et en trouvant en chaque
lieu d'arrivée des caractéristiques culturelles de base qui, sans aller au
détriment des valeurs locales, représentaient cependant un tissu commun
d'unification vraiment super partes, si bien que le philosophe juif Philon
d'Alexandrie, contemporain de Paul, loue l'empereur Auguste car «il a
composé en harmonie tous les peuples sauvages... en se faisant le gardien de
la paix» (Legatio ad Caium, §§ 146-147).
La vision universaliste typique de la personnalité de saint Paul, tout au
moins du Paul chrétien après l'événement de la route de Damas, doit
certainement son impulsion de base à la foi en Jésus Christ, dans la mesure
où la figure du Ressuscité se place désormais au-delà de toute limitation
particulariste; en effet, pour l'apôtre «il n'y a plus ni juif ni païen, il
n'y a plus esclave ni homme libre, il n'y a plus l'homme et la femme, car
tous vous ne faites plus qu'un dans le Christ Jésus» (Ga 3, 28). Toutefois,
la situation historique et culturelle de son époque et de son milieu ne peut
elle aussi qu'avoir influencé ses choix et son engagement. Certains ont
défini Paul comme l'«homme des trois cultures», en tenant compte de son
origine juive, de sa langue grecque, et de sa prérogative de «civis romanus»,
comme l'atteste également le nom d'origine latine. Il faut en particulier
rappeler la philosophie stoïque, qui dominait à l'époque de Paul et qui
influença, même si c'est de manière marginale, également le christianisme. A
ce propos, nous ne pouvons pas ne pas citer plusieurs noms de philosophes
stoïciens comme Zénon et Cléanthe, et ensuite ceux chronologiquement plus
proches de Paul comme Sénèque, Musonius et Epictète: on trouve chez eux des
valeurs très élevées d'humanité et de sagesse, qui seront naturellement
accueillies par le christianisme. Comme l'écrit très justement un chercheur
dans ce domaine, «la Stoa... annonça un nouvel idéal, qui imposait en effet
des devoirs à l'homme envers ses semblables, mais qui dans le même temps le
libérait de tous les liens physiques et nationaux et en faisait un être
purement spirituel» (M. Pohlenz, La Stoa, I, Florence2 1978, pp. 565sq). Que
l'on pense, par exemple, à la doctrine de l'univers entendu comme un unique
grand corps harmonieux, et en conséquence à la doctrine de l'égalité entre
tous les hommes sans distinctions sociales, à l'équivalence tout au moins de
principe entre l'homme et la femme, et ensuite à l'idéal de la frugalité, de
la juste mesure et de la maîtrise de soi pour éviter tout excès. Lorsque
Paul écrit aux Philippiens: «Tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est
juste et pur, tout ce qui est digne d'être aimé et honoré, tout ce qui
s'appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela, prenez-le à votre
compte» (Ph 4, 8), il ne fait que reprendre une conception typiquement
humaniste propre à cette sagesse philosophique.
A l'époque de saint Paul était également en cours une crise de la religion
traditionnelle, tout au moins dans ses aspects mythologiques et également
civiques. Après que Lucrèce, déjà un siècle auparavant, avait de manière
polémique affirmé que «la religion a conduit à tant de méfaits»
(De rerum
natura, 1,101), un philosophe comme Sénèque, en allant bien au-delà de tout
ritualisme extérieur, enseignait que «Dieu est proche de toi, il est avec
toi, il est en toi» (Lettres à Lucilius, 41, 1). De même, quand Paul
s'adresse à un auditoire de philosophes épicuriens et stoïciens dans
l'Aréopage d'Athènes, il dit textuellement que «Dieu... n'habite pas les
temples construits par l'homme... En effet, c'est en lui qu'il nous est
donné de vivre, de nous mouvoir, d'exister» (Ac 17, 24.28). Avec ces termes,
il fait certainement écho à la foi juive dans un Dieu qui n'est pas
représentable en termes anthropomorphiques, mais il se place également sur
une longueur d'onde religieuse que ses auditeurs connaissaient bien. Nous
devons, en outre, tenir compte du fait que de nombreux cultes païens
n'utilisaient pas les temples officiels de la ville, et se déroulaient dans
des lieux privés qui favorisaient l'initiation des adeptes. Cela ne
constituait donc pas un motif d'étonnement si les réunions chrétiennes (le ekklesíai), comme nous l'attestent en particulier les lettres pauliniennes,
avaient lieu dans des maisons privées. A cette époque, du reste, il
n'existait encore aucun édifice public. Les réunions des chrétiens devaient
donc apparaître aux contemporains comme une simple variante de leur pratique
religieuse plus intime. Les différences entre les cultes païens et le culte
chrétien ne sont pourtant pas de moindre importance et concernent aussi bien
la conscience de l'identité des participants que la participation en commun
d'hommes et de femmes, la célébration de la «cène du Seigneur» et la lecture
des Ecritures.
En conclusion, de cette rapide vue d'ensemble du milieu culturel du premier
siècle de l'ère chrétienne il ressort qu'il n'est pas possible de comprendre
comme il se doit saint Paul sans le placer sur la toile de fond, aussi bien
juive que païenne, de son temps. De cette manière, sa figure acquiert une
force historique et idéale, en révélant à la fois les points communs et
l'originalité par rapport au milieu. Mais cela vaut également pour la
christianisme en général, dont l'apôtre Paul est un paradigme de premier
ordre, dont nous avons encore tous beaucoup à apprendre. Tel est l'objectif
de l'Année paulinienne: apprendre de saint Paul, apprendre la foi, apprendre
le Christ, apprendre enfin la route d'une vie juste.
(ZF08070302)
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Année Paulinienne, 28 juin 2008 - 29 juin 2009
Texte original du
discours du Saint Père ►
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Sources : - www.vatican.va
080702 (390)
-
E.S.M.
© Copyright du texte original : Librairie Editrice du Vatican
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 02.07.2008 -
T/Année Paulinienne |