Dieu ne se résout pas à laisser la
violence des hommes pervertir sa création
Le 01 septembre 2008 - (E.S.M.)
- Dans la perspective
du prochain Synode des Évêques sur "La Parole de Dieu dans la
vie et dans la mission de l'Église".
La Parole de Dieu -
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Dieu ne se résout pas à laisser la violence des hommes pervertir sa création
Le 01 septembre 2008 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde -
Interrogé sur la Parole de Dieu, Benoît XVI a
recommandé aux jeunes de lire "la Bible" non pas
comme un livre historique quelconque mais véritablement comme la Parole de
Dieu, c'est-à-dire un dialogue avec Dieu.
La parole de Dieu : Pourquoi lire la Bible ?
Par Frédéric Manns, ofm
« Car éternel est son amour »
Il arrive que la lecture d’une page de la Bible déconcerte, ou même révolte,
lorsqu’il y est question de la violence cautionnée par Dieu. La première
chose à faire, comme face à une personne, est d’essayer d’écouter, jusqu’au
bout, si difficile que ce soit. Shema Israel, écoute Israël.
Le refrain qui scande le récit du passage de la Mer Rouge dans le Hallel
« car éternel est son amour » choque certains lecteurs qui ne partagent pas
pour autant les idées de Marcion. Ce dernier voyait dans l’Ancien Testament
l’oeuvre d’un Dieu violent et dans le Nouveau Testament l’oeuvre d’un Dieu
bon. Les appels à la vengeance de certains psaumes surprennent. Même les
liturgistes ont éliminé du lectionnaire les psaumes de malédiction, les
invectives contre les Pharisiens de Mt 23,13-39, l’épisode d’Ananie et
Saphire en Ac 5,1-11 et le décret d’excommunication proféré par Paul contre
un membre de l’Église de Corinthe en 1 Co 5.
Il est clair que la Bible enracinée dans la culture orientale n’hésite pas à
associer à Dieu des images violentes. Yhwh Sabaoth
(le Dieu des armées) combat « à mains fortes et à bras étendus »,
ordonne aux armées d’Israël de jeter l’anathème sur des villes
(Dt 20,16) et permet au prophète Elie d’égorger les faux
prophètes de Baal (1 R 18,40). La colère divine
s’abat sur le peuple (Os 5,10) et sur les
nations orgueilleuses (Is 10,5-15). Le jour du
jugement est défini comme un « jour de colère" » (Am
5,18).
Par contre le vocabulaire de la violence est affaibli dans la traduction
grecque de la Bible: les verbes grecs « tuer », « violenter », ont en grec
des sens plus faibles. « Le Seigneur est un homme de guerre » d’Ex 15,3
devient « Le Seigneur brise les guerres » dans la version grecque.
Même le Nouveau Testament évoque le feu et la géhenne (Mt
3,12), le sang et les supplices (Mt 18,34)
ainsi que les pleurs et les grincements de dents dans la Géhenne
(Mt 13,42). Certains gestes symboliques de Jésus,
en particulier le récit des vendeurs chassés du temple sont marqués par la
violence. Le Dieu de Jésus est aussi violent que celui des livres de
l’Ancien Testament.
Il faut observer cependant remettre ces textes dans leur contexte : pour
signifier que la paix constitue la visée ultime de la Parole de Dieu, le
récit biblique est encadré par deux fresques d’un monde sans violence. Dans
les premières pages de la Bible, un projet d’harmonie est évoqué lorsque
Dieu se promène avec Adam dans le jardin à la brise du soir. Et l’Apocalypse
de St Jean offre la vision d’un monde réconcilié par la victoire de l’Agneau
sur les puissances de mal, d’un monde débarrassé de la violence
(Ap 21).
Sur cet arrière-plan de paix paradisiaque se déroule l’histoire biblique, la
révélation d’un Dieu « lent à la colère » (Ex 34,6)
qui ne se résout pas à laisser la violence des hommes pervertir sa création.
La Bible est la trace d’une histoire que Dieu cherche à rendre sainte au
long des siècles. Le projet de Dieu est de « détruire la guerre jusqu’au
bout du monde » (Ps 45,10). Dieu, même s’il
semble traiter avec la violence des hommes jusqu’à paraître violent à leurs
yeux, ne se laissera pas contaminer par cette violence.
Un Dieu violent ou violenté ?
Le philosophe René Girard, dans son livre "Je vois Satan tomber comme
l’éclair" (Paris 1999), a mis en évidence
l’originalité du discours biblique sur la violence : « Le Dieu unique est
celui qui reproche aux hommes leur violence et s’apitoie sur leurs victimes,
celui qui substitue aux sacrifices des premiers-nés l’immolation des animaux
et plus tard critique même les sacrifices animaux ».
Les psaumes « donnent la parole aux victimes plutôt qu’à leurs persécuteurs
» (p. 184)) et le livre de Job présente Dieu
lui-même arraché à la violence des persécuteurs. C’est ce que fait Job
lorsqu’il affirme enfin: ’Je sais, moi, que mon Défenseur est vivant.’
(Jb 19,25) ».
Vatican II ne pouvait pas ignorer le problème de la violence dans la Bible
et l’aborde dans la Constitution
Dei Verbum 15-16 :
« Bien qu’ils contiennent de l’imparfait et du caduc, ils sont pourtant les
témoins d’une véritable pédagogie divine. C’est pourquoi les chrétiens
doivent les accepter avec vénération: en eux s’exprime un vif sens de Dieu;
en eux se trouvent de sublimes enseignements sur Dieu, une bienfaisante
sagesse sur la vie humaine, d’admirables trésors de prières; en eux enfin se
tient caché le mystère de notre salut ».
Dès l’Ancien Testament, Israël a entrevu que le châtiment et la vengeance ne
sont pas à mettre au compte de Dieu: certains textes se plaisent à souligner
la disproportion qu’il y a entre la colère de Dieu pour une génération et
son pardon pour mille générations (Ps 30,6).
Dieu est comparé à une mère qui ne peut pas oublier son enfant. D’autres
textes montrent que Dieu n’est jamais totalement déterminé à punir. Le
marchandage oriental d’Abraham en faveur de Sodome en Gn 18,22-32 s’inscrit
dans ce contexte. Le prophète Osée affirme que Dieu, même lorsque son amour
est bafoué ne se venge pas… précisément parce qu’Il ne ressemble pas aux
hommes: « Je ne donnerai pas cours à l’ardeur de ma colère, car je suis
Dieu, moi, et non pas homme » (Os 11,9).
Le Dieu de la Bible, dans son dessein de salut, veut sauver les méchants
eux-mêmes de leur violence. Pour ce faire, il fallait que Dieu prenne sur
lui cette violence, au risque d’apparaître lui-même comme violent. C’est ce
qui s’est réalisé en Jésus: « sur la croix, il a tué la haine »
(Ep 2,16). Il prend sur sa tête une couronne
d’épines, symboles de la malédiction de la terre, pour apporter la
bénédiction. Le dieu violent est ainsi devenu le Dieu crucifié, une image de
la divinité inacceptable pour les Juifs et pour les Grecs (1 Cor 1,23). Une
ère nouvelle commence et la miséricorde succède à la colère
(Rm 5,9)
Guerre et chant
La tradition juive, reprise par Origène, affirme que toute la Bible n’est
qu’une suite de guerres et de chants. Israël poursuivi par Pharaon est
libéré en traversant la mer des Roseaux. Moïse et Myriam invitent le peuple
à chanter (Ex 15). La traversée du désert se
solde par une rébellion contre Moïse et, lorsque le peuple découvre le puits
d’eaux vives, c’est un chant qui éclate (Nb 21).
A la fin de sa vie Moïse arrivé au Mont Nébo est puni pour son manque de
foi. Malgré tout il rend grâce à Dieu dans un chant d’action de grâce
(Dt 32). Le peuple, entré dans la terre promise,
est attaqué par une coalition de cinq rois. Vainqueur, il chante de nouveau
avec Josué (Jos 10). Attaqué par les cananéens
le peuple est victorieux grâce à une femme, Jaël, qui tue le général Sisara
auquel elle avait donné l’hospitalité sous sa tente. L’hymne de Débora
célèbre cette victoire (Jug 5). Le chant final,
celui du cantique des cantiques, est réservé pour la victoire définitive. En
d’autres mots, Dieu combat pour son peuple et lui demande de l’acclamer par
des chants à son retour de guerre. La violence se termine en explosion de
joie.
L’auteur de la seconde lettre de Pierre a donc raison d’affirmer :« Ainsi
nous tenons plus ferme la parole prophétique : vous faites bien de la
regarder, comme une lampe qui brille dans un lieu obscur, jusqu’à ce que le
jour commence à poindre et que l’astre du matin se lève dans vos cœurs.
Avant tout, sachez-le : aucune prophétie d’Écriture n’est objet
d’explication personnelle ; ce n’est pas d’une volonté humaine qu’est jamais
venue une prophétie, c’est poussés par l’Esprit Saint que des hommes ont
parlé de la part de Dieu » .
La parole de Dieu : Comment lire la Bible ?
Lecture critique de la Bible
La littérature mondiale abonde de chefs d’oeuvre supérieurs à certains
livres de la Bible, voire plus édifiants au plan moral. De plus, il arrive
que des archéologues contestent telle ou telle donnée historique relue dans
la Bible à partir des documents extra-bibliques, d’Assyrie ou d’Ebla en
particulier. Pourquoi perdre son temps à lire des récits dépassés ? Ces
contestations font venir à l’esprit le récit biblique de Naaman le syrien.
Quand le prophète Élisée dit à Naaman, qui était venu le voir pour être
guéri de la lèpre, de se laver sept fois dans le Jourdain, celui-ci
répondit, indigné : « Est-ce que les fleuves de Damas, l’Abana et le Parpar,
ne valent pas mieux que toutes les eaux d’Israël ? Ne pourrais-je pas m’y
baigner pour être purifié ? » (2 R 5, 12).
Naaman avait raison : les fleuves de Syrie étaient meilleurs et plus riches
en eau que le Jourdain; et pourtant, il fut guéri en se baignant dans ce
fleuve et sa peau devint comme celle d’un jeune homme, ce qui ne se serait
jamais produit s’il s’était baigné dans les grands fleuves de la Syrie.
De même aucun des livres classiques de la littérature mondiale ne produit
les mêmes effets que le plus modeste des livres inspirés. Dans la parole des
Écritures, il y a quelque chose qui agit au-delà de toute explication
humaine; la disproportion évidente entre le signe et la réalité qu’il
produit, fait penser à l’action des sacrements.
Les « eaux d’Israël », qui symbolisent les Écritures inspirées par Dieu,
continuent aujourd’hui de guérir de la lèpre du péché. Au cours de
l’eucharistie, après la proclamation de l’Évangile le célébrant récite cette
prière: « Que cet Évangile efface nos péchés ». Les Écritures elles-mêmes
attestent du pouvoir de guérison de la parole de Dieu. L’auteur du livre de
la Sagesse, relisant le livre de l’Exode, affirme : « Et de fait, ce n’est
ni herbe ni émollient qui leur rendit la santé, mais ta parole, Seigneur qui
guérit tout! » (Sg 16, 12).
Il n’en reste pas moins qu’il y a deux manières d’aborder la Bible - la
lecture scientifique et celle de la foi. Elles ne s’excluent pas, au
contraire, elles se complètent. Il est nécessaire d’étudier la Bible de
façon critique pour éviter le fondamentalisme qui consiste à prendre un
verset de la Bible, tel qu’il est, et l’appliquer aux situations concrètes,
sans tenir compte des différences de culture, de temps, et en oubliant les
genres littéraires de la Bible. On n’insistera jamais assez sur l’importance
d’une étude scientifique de la Bible. Cependant, la Bible n’est pas un livre
de science, mais elle relate l’histoire du salut. Dieu a adapté son langage
pour que les hommes puissent le comprendre ; il n’a pas écrit pour les
hommes de l’ère scientifique. La première page de la Bible est un hymne au
Dieu créateur et n’a aucune prétention critique. Par contre, réduire la
Bible à un objet d’érudition, en restant indifférent à son message, c’est
s’exposer à un grand danger, car « la lettre tue et l’esprit donne la vie ».
L’image du fiancé qui lit une lettre d’amour de sa fiancée est souvent
reprise. Si le fiancé se contente d’examiner la lettre en scrutant la
grammaire et la syntaxe, et s’arrête là, sans y reconnaître le message
d’amour qu’elle contient à travers la pauvreté des mots, il passe à côté de
l’essentiel. Lire la Bible sans la foi, c’est oublier l’intention de
l’auteur. Lire l’Écriture à la lumière de la foi signifie faire référence au
Christ et à son Église, en relevant, dans chaque page, ce qui se rapporte à
lui. Certains fondamentalistes veulent absolument que la Bible dise le vrai.
La Bible dit vrai quand elle enseigne le vrai visage de Dieu et le sens de
la destinée humaine. Mais elle le fait avec son langage, même avec divers
langages. De même que Jésus est venu prendre chair en un pays déterminé,
adoptant sa langue, ses coutumes, les écrivains sacrés se sont tous insérés
dans un temps, une culture. Ils en partagent les vues et les limites.
L’Esprit Saint a accepté de passer par leur médiation. Il y a une manière
d’écrire qui est poétique, une autre qui relève de la sagesse populaire ou
royale, une autre encore de la célébration épique et solennelle de la
libération ou de l’identité d’un peuple. La Bible dit le vrai, mais que
dit-elle de vrai ? et surtout comment le dit-elle ? Pour répondre à ces
questions, il est nécessaire de situer le texte de l’Ancien Testament dans
son contexte historique et sa culture.
Le chrétien lit toute la Bible en partant du mystère pascal. Jésus lui-même
y invitait les disciples d’Emmaüs : «Commençant par Moïse et parcourant tous
les Prophètes, il leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le
concernait » (Lc 24,27). C’est ainsi que,
revenant avec le Christ et sous sa conduite, vers les textes de l’Ancien
Testament, il y découvre le monde comme création, l’homme et la femme comme
créatures aimées de Dieu, la vocation du peuple de Dieu à être ferment de
communion et de justice au cœur du monde. Il y découvre également l’annonce
du Messie et la préparation de sa venue : toutes les Écritures sont orientés
vers cette venue. Saint Augustin disait : « Le lièvre et l’âne boivent à la
fontaine. L’âne boit davantage, mais chacun boit selon ses capacités ». Que
nous soyons des lièvres ou des ânes, nous avons tous besoin de boire l’eau.
Ayant étanché notre soif, il nous faudra revenir chaque jour nous approcher
à la source d’eau vive.
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Sources : Custodia Terre Sainte
-
(E.S.M.)
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01.09.2008 -
T/Parole de Dieu