Benoît XVI: l'amour, seule réponse à la violence qui menace la paix du monde.
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ROME, 1 mars 2006 - le pape Benoît XVI a présidé, en fin de journée la traditionnelle messe solennelle à Ste. Sabine avec la bénédiction et l'imposition des cendres. Le pape Benoît XVI a déclaré dans son homélie que l'amour était la seule "réponse chrétienne à la violence qui menace la paix du monde".
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Benoît XVI: l'amour, seule réponse à la violence qui menace la paix du monde.
Le pape Benoît XVI a déclaré mercredi après-midi que "l'amour était la seule réponse chrétienne à la violence qui menace la paix du monde", en célébrant la liturgie des cendres dans une des plus anciennes églises de Rome sur la colline de l'Aventin.
La période de carême "nous aide à mieux comprendre ce que doit être la réponse chrétienne à la violence qui menace la paix du monde", a déclaré le pape benoît XVI dans son homélie. "Ce n'est ni la vengeance, ni la haine, ni la fuite dans un faux spiritualisme", mais "le chemin plus long mais plus efficace de l'amour".
"
Nous devons nous engager à nous opposer au mal par le bien, au mensonge par la vérité, à la haine par l'amour
", a ajouté le Saint-Père.
"L'amour vrai se traduit par des gestes qui n'excluent personne", a encore précisé Benoît XVI.
Le mercredi des cendres marque pour les chrétiens l'entrée dans le Carême, une période de pénitence et de retour sur soi de quarante jours jusqu'à la fête de Pâques.
Ces dernières semaines, Benoît XVI s'est inquiété à plusieurs reprises de la montée des tensions religieuses dans le monde et appelé au respect des convictions et des pratiques religieuses d'autrui.
Son message de préparation au carême, rendu public le 31 janvier, soulignait
la nécessité pour l'Eglise de mettre au premier plan de ses préoccupations son action pour changer l'esprit des êtres humains
.
"Nous ne pouvons pas ignorer que des erreurs ont été commises au cours de l'histoire par nombre de ceux qui se disaient disciples de Jésus. Souvent, face aux graves problèmes qui se posaient, ils ont pensé qu'il valait mieux d'abord améliorer la terre et ensuite penser au ciel", a écrit Benoît XVI.
Texte intégral de l'homélie du Saint Père:
Messieurs les Cardinaux,
vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce!
chers frères et soeurs!
La procession pénitentielle, par laquelle nous avons commencé la célébration
d'aujourd'hui, nous a aidés à entrer dans le climat typique du Carême, qui est
un pèlerinage personnel et communautaire de conversion et de renouvellement
spirituel. Selon la très antique tradition romaine des stationes
quadragésimales, au cours de ce temps, les fidèles, avec les pèlerins, se
réunissent chaque jour et s'arrêtent - statio - devant l'une des nombreuses
"mémoires" des Martyrs, qui constituent les fondements de l'Eglise de Rome. Dans
les Basiliques, où sont exposées leurs reliques, est célébrée la Messe, précédée
par une procession, au cours de laquelle on chante les litanies des Saints. On
fait ainsi mémoire de tous ceux qui, à travers leur sang, ont rendu témoignage
au Christ, et leur évocation devient un encouragement pour chaque chrétien à
renouveler son adhésion à l'Evangile. En dépit des siècles écoulés, ces rites
conservent leur valeur, car ils rappellent combien il est important, notamment à
notre époque, d'accueillir sans compromis les paroles de Jésus: "Si quelqu'un
veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, qu'il se charge de sa croix
chaque jour, et qu'il me suive" (Lc 9, 23).
Un autre rite symbolique, geste caractéristique et exclusif du premier jour du
Carême, est l'imposition des Cendres. Quelle est sa signification la plus
profonde? Il ne s'agit certes pas d'un simple rituel, mais de quelque chose de
très profond, qui touche notre coeur. Celui-ci nous fait comprendre l'actualité
de l'avertissement du prophète Joël, qui a retenti au cours de la première
lecture, un avertissement qui conserve sa valeur salutaire également pour nous:
aux gestes extérieurs doit toujours correspondre la sincérité de l'âme et la
cohérence des oeuvres. A quoi sert en effet - se demande l'auteur inspiré - de
déchirer ses vêtements, si le coeur demeure éloigné du Seigneur, c'est-à-dire du
bien et de la justice? Voilà ce qui compte véritablement: retourner à Dieu, avec
une âme sincèrement repentie, pour obtenir sa miséricorde (cf. Jl 2, 12-18). Un
coeur nouveau et un esprit nouveau: c'est ce que nous demandons à travers le
Psaume pénitentiel par excellence, le Miserere, dont nous chantons aujourd'hui
le refrain: "Aie pitié de nous Seigneur, car nous avons péché". Le vrai croyant,
conscient d'être pécheur, aspire de tout son être - esprit, âme et corps - au
pardon divin, comme à une nouvelle création, en mesure de lui redonner joie et
espérance (cf. Ps 50, 3.5.12.14).
Un autre aspect de la spiritualité quadragésimale est celui que nous pourrions
définir de "compétition", et qui ressort de la prière de la "collecte"
d'aujourd'hui, où il est question d'"armes" de la pénitence et de "lutte" contre
l'esprit du mal. Chaque jour, mais en particulier au cours du Carême, le
chrétien doit affronter une lutte comme celle que le Christ a soutenue dans le
désert de Judée, où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable, puis au
Gethsémani, lorsqu'il repoussa la tentation extrême en acceptant jusqu'au bout
la volonté du Père. Il s'agit d'une lutte spirituelle, qui est dirigée contre le
péché, et, en ultime analyse, contre satan. C'est une lutte qui engage la
personne tout entière, et qui exige une vigilance attentive et constante. Saint
Augustin observe que celui qui veut marcher dans l'amour de Dieu et dans sa
miséricorde ne peut se contenter de se libérer des péchés graves et mortels,
mais "accomplit la vérité en reconnaissant également les péchés que l'on
considère moins graves... et vient à la lumière en accomplissant des oeuvres
dignes. Même les péchés moins graves, s'ils sont négligés, prolifèrent et
conduisent à la mort" (In Io. evang. 12, 13, 35).
Le Carême nous rappelle donc que l'existence chrétienne est une lutte sans
relâche, au cours de laquelle sont utilisées les "armes" de la prière, du jeûne
et de la pénitence. Lutter contre le mal, contre toute forme d'égoïsme et de
haine, et mourir à soi-même pour vivre en Dieu représente l'itinéraire ascétique
que tout disciple de Jésus est appelé à parcourir avec humilité et patience,
avec générosité et persévérance. L'obéissance docile au Maître divin fait des
chrétiens des témoins et des apôtres de paix. Nous pourrions dire que cette
attitude intérieure nous aide à mieux mettre en évidence également quelle doit
être la réponse chrétienne à la violence qui menace la paix dans le monde.
Certainement pas la vengeance, ni la haine, ni même la fuite vers un faux
spiritualisme. La réponse de la personne qui suit le Christ est plutôt celle qui
consiste à parcourir la voie choisie par Celui qui, devant les maux de son temps
et de tous les temps, a embrassé de façon décidée la Croix, en suivant le chemin
plus long mais efficace de l'amour. Sur ses traces et unis à Lui, nous devons
tous nous engager en vue de lutter contre le mal par le bien, contre le mensonge
par la vérité, contre la haine par l'amour. Dans l'Encyclique Deus caritas est,
j'ai voulu présenter cet amour comme le secret de notre conversion personnelle
et ecclésiale. En me référant aux paroles de Paul aux Corinthiens, "l'amour du
Christ nous presse" (2 Co 5, 14), j'ai souligné que "la conscience qu'en Lui
Dieu lui-même s'est donné pour nous jusqu'à la mort doit nous amener à ne plus
vivre pour nous-mêmes, mais pour Lui et avec Lui pour les autres" (n. 33).
L'amour, comme le souligne Jésus aujourd'hui dans l'Evangile, doit ensuite se
traduire par des gestes concrets envers le prochain, en particulier envers les
pauvres et les personnes dans le besoin, en subordonnant toujours la valeur des
"bonnes actions" à la sincérité du rapport avec "le Père qui est dans les
cieux", qui "voit dans le secret" et "récompensera" ceux qui font le bien de
façon humble et désintéressée (cf. Mt 6, 1.4.6.18). Le caractère concret de
l'amour constitue l'un des éléments essentiels de la vie des chrétiens, qui sont
encouragés par Jésus à être la lumière du monde, afin que les hommes, en voyant
leurs "bonnes oeuvres", rendent gloire à Dieu (cf. Mt 5, 16). Cette
recommandation nous apparaît très opportune au début du Carême, car nous
comprenons toujours plus que "la charité n'est pas pour l'Eglise une sorte
d'activité d'assistance sociale [...] mais elle appartient à sa nature, elle est
une expression de son essence elle-même, à laquelle elle ne peut renoncer" ("Deus
Caritas Est", n. 25.a). L'amour véritable se
traduit en gestes qui n'excluent personne, à l'exemple du Bon Samaritain, qui,
avec une grande ouverture d'esprit, aida un inconnu en difficulté, rencontré
"par hasard" le long du chemin (cf. Lc 10, 31).
Messieurs les Cardinaux, vénérés Frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
chers religieux, religieuses et fidèles laïcs, que je salue tous avec une
profonde cordialité, entrons dans le climat caractéristique de cette période
liturgique avec ces sentiments, en nous laissant illuminer et guider par la
Parole de Dieu. Au cours du Carême, nous entendrons souvent retentir
l'invitation à nous convertir et à croire à l'Evangile, et nous serons
constamment encouragés à ouvrir notre esprit à la puissance de la grâce divine.
Tirons profit de ces enseignements que l'Eglise nous offrira en abondance au
cours de ces semaines. Animés par un profond engagement de prière, décidés à
accomplir un effort plus grand de pénitence, de jeûne et d'attention d'amour
envers nos frères, mettons-nous en marche vers Pâques, accompagnés de la Vierge
Marie, Mère de l'Eglise et modèle de tout disciple authentique du Christ.
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Libreria Editrice Vaticana
Eucharistie, Sacrement de la Miséricorde.
01.03.2006 - BENOIT XVI
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