Offensive intellectuelle
anticatholique : c’est une "réplique sismique" de l’affaire lefebvriste |
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Le 26 février 2009 -
(E.S.M.)
- Pourquoi Le Monde est-il allé chercher le vieux Küng ? Parce
que les jeunes théologiens ne pensent pas comme les media le voudraient
? Le « christianisme critique » (de moins en
moins chrétien) a fondu et achève de disparaître. Bientôt le
catholicisme ne sera plus composé que de gens qui y croient !
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Hans Küng
Offensive intellectuelle anticatholique : c’est une
"réplique sismique" de l’affaire lefebvriste
Interviewé sur une page entière du Monde, Hans Küng demande que l’on «
corrige » le Credo de Nicée :
Le 26 février 2009 - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
- Dans l’affaire Williamson, on a été en présence d’une « faute » [1]
(ou d’un sabotage ?) commis par des bureaux
romains. Aujourd’hui cette faute est exploitée contre le catholicisme en
lui-même, par une véritable offensive intellectuelle qui survient comme une
« réplique » sismique. Ne disons pas que cette offensive est sans
importance, à moins de juger sans importance ce que pensent les gens : ce
qui serait idiot.
Dans Le Monde du 22 février, sur cinq colonnes, le médiéviste allemand Kurt
Flasch assure que le cafouillage romain dans l’affaire Williamson ne
viendrait pas d’un « incident de parcours » mais de la « ligne
générale » du Vatican : pactiser avec l’intégrisme au nom d’un désir
d’unité et de cohérence dans l’Eglise. Désir qui transgresserait le
relativisme postmoderne... Le Pr Flasch veut nous convaincre que l’Eglise
commet des fautes de gouvernement parce qu’elle est coupée de la société, et
que cette coupure tient à la nature même de la foi catholique !
Moralité, selon lui : l’Eglise agira faux tant qu’elle croira que sa foi est
vraie.
Un tel article est une mise en demeure. C’est un défi lancé aux
intellectuels et aux historiens catholiques. Oseront-ils y répondre ?
Ils ne l’ont pas encore fait le 25 février, quand Le Monde lance une
deuxième attaque. Toute la page 3 – annoncée à la une – est consacrée à
interviewer Hans Küng, que les media prennent encore pour un symbole de la
jeunesse contestataire (il a 81 ans) et de la « base progressiste de
l’Eglise » (qui a quitté l’Eglise depuis belle
lurette). Titre de la page : « L’Eglise risque de devenir une
secte ».
De la part d’un esprit aussi célébré que Küng, l’argumentation qui suit est
décevante. Il nous déclare en effet :
- que Benoît XVI ne s’est pas montré « sans ambiguité sur l’Holocauste
» (c’est honteusement faux),
- que ce pape « a été élu par des conservateurs »
(c’est matériellement faux, à moins que l’on n’appelle « conservateur » tout
cardinal n’adhérant pas aux thèses de Hans Küng),
- que Vatican II a bel et bien été « une rupture » (ici
Küng parle comme feu Mgr Lefebvre),
- que le tort de Benoît XVI est de nier cette rupture au profit d’une
herméneutique de la continuité (Küng, pourtant âgé, ne semble pas connaître
les travaux des chercheurs des années 1990 qui ont établi le bien-fondé de
cette herméneutique),
- que Benoît XVI a tort de vouloir un catholicisme de convaincus
(en quoi est-ce un tort ? le protestantisme de convaincus
progresse partout),
- que Benoît XVI faute « lorsqu’il dit aux protestants que l’Eglise
catholique est la seule vraie Eglise » (si c’est une
allusion à Dominus Jesus, l’idée alléguée par Küng n’est pas dans ce
document),
- que « l’Eglise catholique risque de devenir une secte »
(en s’obstinant à vouloir que ses membres adhèrent au Credo),
- qu’il faut « corriger » la théologie du concile de Nicée
(c’est-à-dire le Credo !),
- que Benoît XVI est « revenu » (?) au conservatisme à cause du «
choc des mouvements de protestation de 1968 »
(totalement inexact, comme je l’ai montré en 2005 dans Benoît XVI et le
plan de Dieu),
- que « les divorcés » ne sont pas admis à la communion
(comment Küng peut-il dire une chose pareille ?),
- et qu’il faut convoquer un concile Vatican III pour parler des questions
d'actualité : mariage des prêtres et pilule (Küng en est
resté à ce qui échauffait les esprits il y a trente ou quarante ans).
Dans cette liste de platitudes, on aura reconnu la doctrine médiatique en
matière de catholicisme. Cette grossièreté est surprenante de la part du
grand Küng. Que lui est-il arrivé ? Est-il devenu avec l’âge une sorte de
Jacques Duquesne pour plaire aux grand-mères ? Poser la question, c’est y
répondre. Hélas.
Le vrai fond du problème est difficile à expliquer aux gens. Le public n'a
rien à faire de questions théologiques : il entend les rumeurs, il ne
cherche pas à savoir ce que croient les chrétiens. Or c'est le cœur de la
question : la foi, ou l’absence de foi ! Hans Küng n’adhère plus à la foi
catholique. C’est son droit. En revanche, ça lui ôte la faculté de
donner des leçons à l’Eglise. Surtout pour exprimer des choses mal vues, mal
dites, dans un langage basique pour plaire aux médias…
Pourquoi Le Monde est-il allé chercher le vieux Küng ? Parce que les jeunes
théologiens ne pensent pas comme les media le voudraient ? Le «
christianisme critique » (de moins en moins chrétien)
a fondu et achève de disparaître. Bientôt le catholicisme ne sera
plus composé que de gens qui y croient ! Ils seront, ils sont déjà, peu
nombreux mais convaincus et bien formés : capables de témoigner de ce qu’est
réellement la foi chrétienne. Cette perspective irrite le journal. D’où
l’ardeur avec laquelle il tente de transformer l’essai, dans l’affaire
lefebvriste, en envoyant le ballon très loin jusqu’au but. Ce but est-il de
discréditer médiatiquement le Symbole de Nicée ? L'ambition serait
risible.
[1] Dixit le cardinal Schönborn.
L'entretien (lemonde.fr)
"L'Eglise risque de devenir une secte"
Longue silhouette au visage glabre et à la mèche rebelle, Hans Küng,
considéré comme le plus grand théologien contestataire catholique vivant,
reçoit chez lui, en Allemagne, à Tübingen, dans sa propriété élégante aux
murs tapissés d'ouvrages. Les siens, innombrables et traduits dans toutes
les langues, trônent en bonne place dans son bureau personnel. Il revient
ici sur la tempête déclenchée par la main tendue du pape Benoît XVI aux
intégristes catholiques.
Comment analysez-vous la décision de Benoît XVI de
lever l'excommunication de quatre évêques du courant intégriste de Mgr
Lefebvre, dont l'un, Richard Williamson, est un négationniste affirmé ?
Je n'ai pas été surpris. Dès 1977, dans un entretien à un journal italien,
Mgr Lefebvre indique que "des cardinaux soutiennent (son) courant" et que
"le nouveau cardinal Ratzinger a promis d'intervenir auprès du pape pour
(leur) trouver une solution". Cela montre que cette affaire n'est ni un
problème nouveau ni une surprise. Benoît XVI a toujours beaucoup parlé avec
ces personnes. Aujourd'hui, il lève leur excommunication, car il juge que le
temps est venu. Il a pensé qu'il pourrait trouver une formule pour
réintégrer les schismatiques, qui, tout en conservant leurs convictions,
pourraient donner l'apparence qu'ils sont en accord avec le concile Vatican
II. Il s'est bien trompé.
Comment expliquez-vous que le pape n'ait pas mesuré le tollé que sa décision
allait susciter, au-delà même des propos négationnistes de Richard
Williamson ?
La levée des excommunications n'a pas été un défaut de communication ou de
tactique, mais elle a constitué une erreur de gouvernement du Vatican. Même
si le pape n'avait pas connaissance des propos négationnistes de Mgr
Williamson et même s'il n'est pas lui-même antisémite, chacun sait que les
quatre évêques en question sont antisémites. Dans cette affaire, le problème
fondamental, c'est l'opposition à Vatican II, et notamment le refus d'une
relation nouvelle au judaïsme. Un pape allemand aurait dû considérer cela
comme un point central et se montrer sans ambiguïté sur l'Holocauste. Il n'a
pas mesuré le danger. Contrairement à la chancelière Angela Merkel, qui a
vivement réagi.
Benoît XVI a toujours vécu dans un milieu ecclésiastique. Il a très peu
voyagé. Il est resté enfermé au Vatican - qui est comme le Kremlin
d'autrefois -, où il est préservé des critiques. Du coup, il n'a pas été
capable de réaliser l'impact d'une telle décision dans le monde. Le
secrétaire d'Etat, Tarcisio Bertone, qui pourrait être un contre-pouvoir,
était son subordonné à la Congrégation pour la doctrine de la foi ; c'est un
homme de doctrine, absolument soumis à Benoît XVI. On est face à un problème
de structure. Il n'y aucun élément démocratique dans ce système, aucune
correction. Le pape a été élu par des conservateurs, et aujourd'hui c'est
lui qui nomme les conservateurs.
Dans quelle mesure peut-on dire que le pape est encore
fidèle aux enseignements de Vatican II ?
Il est fidèle au concile, à sa manière. Il insiste toujours, comme Jean Paul
II, sur la continuité avec la "tradition". Pour lui, cette tradition remonte
à la période médiévale et hellénistique. Il ne veut surtout pas admettre que
Vatican II a provoqué une rupture, par exemple, sur la reconnaissance de la
liberté religieuse, combattue par tous les papes antérieurs au concile.
La conception profonde de Benoît XVI est qu'il faut accueillir le concile,
mais qu'il convient de l'interpréter ; peut-être pas à la manière des
lefebvristes, mais en tout cas dans le respect de la tradition et de manière
restrictive. Il a par exemple toujours été critique sur la liturgie de
Vatican II.
Au fond, Benoît XVI a une position ambiguë sur les textes du concile, car il
n'est pas à l'aise avec la modernité et la réforme. Or Vatican II a
représenté l'intégration du paradigme de la réforme et de la modernité dans
l'Eglise catholique. Mgr Lefebvre ne l'a jamais accepté, et ses amis à la
Curie non plus. En cela Benoît XVI a une certaine sympathie envers Mgr
Lefebvre.
Par ailleurs, je trouve scandaleux que pour le cinquantième anniversaire du
lancement du concile par Jean XXIII (en janvier 1959), le pape n'ait pas
fait l'éloge de son prédécesseur, mais ait choisi de lever l'excommunication
de personnes opposées à ce concile.
Quelle Eglise le pape Benoît XVI est-il en train de
léguer à ses successeurs ?
Je pense qu'il défend l'idée du "petit troupeau". C'est un peu la ligne des
intégristes, qui estiment que, même si l'Eglise perd beaucoup de ses
fidèles, il y aura au final une Eglise élitiste, formée de "vrais"
catholiques. C'est une illusion de penser que l'on peut continuer comme
cela, sans prêtres, sans vocations. Cette évolution est clairement un
mouvement de restauration. Cela se manifeste par la liturgie, mais aussi par
des actes ou des gestes, par exemple lorsqu'il dit aux protestants que
l'Eglise catholique est la seule vraie Eglise.
L'Eglise catholique est-elle en danger ?
L'Eglise risque de devenir une secte. Beaucoup de catholiques n'attendent
plus rien de ce pape. Et c'est très douloureux.
Vous avez écrit : "Comment un théoricien aussi doué,
aimable et ouvert que Joseph Ratzinger a pu changer à ce point et devenir le
Grand Inquisiteur romain ?" Alors, comment ?
Je pense que le choc des mouvements de protestation de 1968 a ressuscité son
passé. Ratzinger était conservateur. Durant le concile, il s'est ouvert,
même s'il était déjà sceptique. Avec 68, il est revenu à des positions très
conservatrice, qu'il a gardées jusqu'à aujourd'hui.
Le pape actuel peut-il encore corriger cette évolution
?
Quand il m'a reçu en 2005, il a fait un acte courageux et j'ai vraiment cru
qu'il trouverait le chemin pour réformer, même lentement. Mais, en quatre
ans, il a prouvé le contraire. Aujourd'hui, je me demande s'il est capable
de faire quelque chose de courageux. Déjà, il faudrait qu'il reconnaisse que
l'Eglise catholique traverse une crise profonde. Ensuite, il pourrait très
facilement faire un geste pour les divorcés et dire qu'à certaines
conditions ils peuvent être admis à la communion. Il pourrait corriger
l'encyclique Humanae Vitae (qui a condamné toutes formes de contraception en
1968) en disant que dans certains cas la pilule est possible. Il pourrait
corriger sa théologie, qui date du concile de Nicée (en 325). Il pourrait
dire demain : "J'abolis la loi du célibat pour les prêtres." Il est beaucoup
plus puissant que le président des Etats-Unis ! Il n'a pas à rendre compte à
une Cour suprême ! Il pourrait aussi convoquer un nouveau concile.
Un Vatican III ?
Cela pourrait aider. Une telle réunion permettrait de régler des questions
auxquelles Vatican II n'a pas répondu, comme le célibat des prêtres ou le
contrôle des naissances. Il faudrait aussi prévoir un nouveau mode
d'élection des évêques, dans lequel le peuple aurait davantage son mot à
dire. La crise actuelle a suscité un mouvement de résistance. Beaucoup de
fidèles refusent de revenir à l'ancien système. Même des évêques ont été
obligés de critiquer la politique du Vatican. La hiérarchie ne peut
l'ignorer.
Votre réhabilitation pourrait faire partie de ces
gestes forts ?
Elle serait en tout cas plus facile que la réintégration des schismatiques !
Mais je n'y crois pas, car Benoît XVI se sent plus proche des intégristes
que des gens comme moi, qui ont travaillé et accepté le concile.
Propos recueillis par Nicolas Bourcier et Stéphanie Le
Bars
Sources : plunkett.hautetfort
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 26.02.2009 -
T/Benoît XVI |