Benoît XVI à Gênes : Homélie du pape |
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Cité du Vatican, le 20 mai 2008 -
(E.S.M.)
- Dans la soirée du dimanche 18 mai 2008, solennité de la Très
Sainte Trinité, le Pape Benoît XVI a présidé une concélébration
eucharistique à Gênes, sur la Place de la Victoire, dans le cadre de sa
visite pastorale à Gênes et à Savone. Au cours de la Messe, le
Saint-Père a prononcé l'homélie suivante:
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Benoît XVI à Gênes : Homélie du pape
Dans la soirée du dimanche 18 mai 2008, solennité de la Très Sainte Trinité,
le Pape Benoît XVI a présidé une concélébration eucharistique à Gênes, sur
la Place de la Victoire, dans le cadre de sa visite pastorale à Gênes et à
Savone. Au cours de la Messe, le Saint-Père a prononcé l'homélie suivante:
Texte intégral de l'homélie du Saint-Père
Chers frères et sœurs,
Au terme d'une intense journée passée dans votre ville, nous nous retrouvons
réunis autour de l'autel pour célébrer l'Eucharistie, en la solennité de la
Très Sainte Trinité. De cette place centrale « de la Victoire », qui nous
accueille pour notre acte choral de louange et d'action de grâce à Dieu qui
conclut ma visite pastorale, j'envoie mes salutations les plus cordiales à
toute la communauté civile et ecclésiale de Gênes. Je salue tout d'abord
avec affection l'archevêque, le cardinal
Angelo Bagnasco, que je remercie de
la courtoisie avec laquelle il m'a accueilli et des paroles touchantes qu'il
m'a adressées au début de la Messe. Ensuite, comment ne pas saluer le
cardinal Tarcisio Bertone, mon Secrétaire d'Etat, ancien pasteur de cette
ancienne et noble Eglise ? Je lui adresse mes remerciements les plus sincères
pour sa proximité spirituelle et pour sa précieuse collaboration. Je salue
ensuite l'Evêque auxiliaire, Mgr Luigi Ernesto Palletti, les évêques de
Ligurie et les autres prélats. J'adresse ma pensée respectueuse aux
Autorités civiles, auxquelles je suis reconnaissant de leur accueil et du
soutien concret qu'elles ont apporté à la préparation et au déroulement de
mon pèlerinage apostolique. Je salue en particulier M. le ministre Claudio Scaiola,
qui représente le nouveau gouvernement, qui précisément a pris ses pleines fonctions au service de la bien-aimée nation
italienne ces derniers jours. Je m'adresse ensuite avec une vive reconnaissance aux prêtres,
aux religieux et aux religieuses, aux diacres, aux laïcs engagés, aux
séminaristes et aux jeunes. A vous tous, chers frères et sœurs, j'adresse
mes salutations affectueuses. J'étends ma pensée à ceux qui n'ont pas pu être
présents, tout particulièrement aux malades, aux personnes seules et à
ceux qui se trouvent en difficulté. Je confie au Seigneur la ville de Gênes
et tous ses habitants en cette concélébration eucharistique solennelle, qui,
comme chaque dimanche, nous invite à participer de manière communautaire à
la double table de la Parole de Vérité et du Pain de Vie éternelle.
Nous avons écouté, dans la première
Lecture (Ex 34, 4b-6.8-9), un texte
biblique qui nous présente la révélation du nom de Dieu. C'est Dieu
lui-même, l'Eternel et l'Invisible, qui le proclame, en passant devant Moïse
dans une nuée, sur le mont Sinaï. Son nom est: « Yahvé, Yahvé, Dieu de
tendresse et de pitié, lent à la colère, riche en grâce et en fidélité ».
Saint Jean, dans le nouveau Testament, résume cette expression en un seul
mot: « Amour » (cf. 1 Jn 4, 8.16). L'Evangile
d'aujourd'hui l'atteste également: « Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné
son Fils unique »
(Jn 3, 16). Ce nom exprime donc clairement que le
Dieu de la Bible n'est pas une sorte de monade fermée sur elle-même et
satisfaite de sa propre autosuffisance, mais il est la vie qui veut se
communiquer, il est ouverture, relation. Des expressions comme « Dieu de
miséricorde », « de pitié », « riche en grâce » nous parlent tous d'une
relation, en particulier d'un Etre vital qui s'offre, qui veut combler
chaque lacune, chaque manque, qui veut donner et pardonner, qui désire
établir un lien stable et durable. L'Ecriture Sainte ne connaît pas d'autre
Dieu que le Dieu de l'Alliance, qui a créé le monde pour répandre son amour
sur toutes les créatures
(cf. Missel romain, Prière eucharistique, IV) et
qui s'est choisi un peuple pour établir avec lui un pacte nuptial, le faire
devenir une bénédiction pour toutes les nations et former ainsi une grande
famille de toute l'humanité (cf. Gn 12, 1-3; Ex 19, 3-6).
Cette révélation de Dieu s'est pleinement définie dans le Nouveau Testament,
grâce à la parole du Christ. Jésus nous a manifesté le visage de Dieu, Un
dans l'essence et Trine dans les personnes :
Dieu est Amour, Amour Père - Amour Fils - Amour Esprit
Saint. Et c'est précisément au nom de ce Dieu que l'apôtre Paul salue
la communauté de Corinthe: « Que la grâce du Seigneur Jésus Christ,
l'amour de Dieu et la communion de l'Esprit Saint soient avec vous tous
» (2 Co 13, 13). C'est un salut qui est devenu,
comme vous le savez, une formule liturgique.
Il y a donc, dans ces lectures, un contenu principal qui concerne Dieu et,
en effet, la fête d'aujourd'hui nous invite à Le contempler, Lui, le
Seigneur, elle nous invite à monter dans un certain sens « sur le mont »,
comme le fit Moïse. Cela semble à première vue nous conduire loin du monde
et de ses problèmes, mais en réalité on découvre que c'est précisément en
connaissant Dieu de plus près que l'on reçoit également des indications
pratiques précieuses pour la vie : un peu comme cela arriva à Moïse qui, en
montant sur le Sinaï et en restant en présence de Dieu, reçut la loi gravée
sur les tables de pierre, dont le peuple tira la direction pour aller de
l'avant, pour ne pas redevenir esclave mais grandir dans la liberté. Du nom
de Dieu dépend notre histoire; de la lumière de son visage, notre chemin.
De cette réalité de Dieu, qu'Il nous a lui-même fait connaître en nous
révélant son « nom », dérive une certaine image d'homme, c'est-à-dire le
concept exact de personne. Comme on le sait, ce concept s'est formé dans
notre culture d'Occident au cours du débat enflammé qui s'est développé
précisément autour de la vérité de Dieu, et en particulier de Jésus Christ.
Si Dieu est une unité dialogique, substance en relation, la créature
humaine, faite à son image et ressemblance, reflète cette constitution: elle
est donc appelée à se réaliser dans le dialogue, dans le colloque, dans la
rencontre. Jésus nous a en particulier révélé que l'homme est
essentiellement «fils», créature qui vit dans la relation avec Dieu le Père.
L'homme ne se réalise pas dans une autonomie absolue, en ayant l'illusion
d'être Dieu, mais, au contraire, en se reconnaissant en tant que fils,
créature ouverte, tendue vers Dieu et vers ses frères, dans le visage
desquels il retrouve l'image du Père commun. On voit bien que cette
conception de Dieu et de l'homme se trouve à la base d'un modèle
correspondant de communauté humaine, et donc de société. C'est un modèle qui
existe avant toute règlementation législative, juridique, institutionnelle,
mais je dirais également avant les particularités culturelles. Un modèle de
famille humaine commun à toutes les civilisations, que nous chrétiens avons
l'habitude d'exprimer dès l'enfance en affirmant que les hommes sont tous
des fils de Dieu et donc tous frères. Il s'agit d'une vérité qui se trouve
dès le début derrière nous et, dans le même temps, qui est toujours devant
nous, comme un projet auquel aspirer toujours dans chaque construction
sociale. C'est une conception qui se fonde sur l'idée de Dieu Trinité, de
l'homme comme personne - non comme pur individu - et de la société comme
communauté - non comme pure collectivité.
Le Magistère de l'Eglise qui s'est développé précisément à partir de cette
vision de Dieu et de l'homme est très riche. Il suffit de parcourir les
chapitres les plus importants de la
Doctrine
sociale de l'Eglise, auxquels mes vénérés prédécesseurs ont apporté des
contributions substantielles, en particulier au cours des cent vingt
dernières années, en se faisant les interprètes influents et les guides du
mouvement social d'inspiration chrétienne. La Constitution conciliaire
Gaudium et
Spes et les Encycliques de Jean XXIII, Paul VI et Jean-Paul II tracent
un dessein complet et articulé, capable de motiver et d'orienter
l'engagement de la promotion humaine et du service social et politique des
catholiques. Ma première Encyclique
Deus Caritas Est, se réfère à cet horizon: en effet, elle repropose
l'exercice de la charité concrète, de la part de l'Eglise, à partir de la
foi en Dieu Amour, incarné en Jésus Christ. C'est spontanément que je
rappelle le Congrès ecclésial national de Vérone, auquel j'ai participé en
proposant une profonde réflexion, pleinement accueillie dans la Note
pastorale successive de l'épiscopat: "Régénérés pour une espérance
vivante"
:
témoins du grand "oui" de Dieu à l'homme (29 juin
2007). J'ai plaisir à rappeler ici comment deux choix de fond,
indiqués par les évêques au début de ce document (n. 4),
s'accordent avec ce que la Parole de Dieu vient de nous suggérer. Tout
d'abord, le choix du « primat de Dieu »: toute la vie et l'œuvre de l'Eglise
dépendent du fait de placer Dieu au premier plan; mais pas un Dieu
générique, mais plutôt le Seigneur avec son nom et son visage, le Dieu de
l'Alliance qui a fait sortir le peuple de l'esclavage d'Egypte, qui a
ressuscité Jésus d'entre les morts et qui veut conduire l'humanité à la
liberté dans la paix et la justice. Un autre choix consiste à placer au
centre la personne et l'unité de son existence, dans les divers milieux de
son activité : la vie affective, le travail et la fête, sa propre fragilité,
la tradition, la citoyenneté. Le Dieu Un et Trine et la personne en
relation: ce sont les deux références que l'Eglise à la tâche d'offrir à
chaque génération humaine, comme service à l'édification d'une société libre
et solidaire. L'Eglise le fait certainement par sa doctrine, mais surtout à
travers le témoignage, qui n'est pas pour rien le troisième choix
fondamental de l'épiscopat italien : témoignage personnel et communautaire,
dans lequel convergent vie spirituelle, mission pastorale et dimension
culturelle.
Dans une société tendue entre la mondialisation et l'individualisme,
l'Eglise est appelée à offrir le témoignage de la koinonia, de la
communion. Cette réalité ne vient pas « du bas » mais est un mystère qui a,
pour ainsi dire, ses « racines au ciel » : précisément en Dieu Un et Trine.
C'est Lui, en lui-même, l'éternel dialogue d'amour qui s'est communiqué à
nous en Jésus Christ, qui est entré dans le tissu de l'humanité et de
l'histoire pour le conduire à la plénitude. Et voilà alors la grande
synthèse du Concile Vatican II : l'Eglise, mystère de communion, « est dans
le Christ comme un sacrement, c'est-à-dire signe et instrument de l'intime
union avec Dieu et de l'unité de toute le genre humain »
(Const.
Lumen
Gentium, n. 1). Ici aussi, dans cette grande ville, ainsi que
sur son territoire, avec la variété des problèmes humains et sociaux
respectifs, la Communauté ecclésiale, aujourd'hui comme hier, est avant tout
le signe, pauvre mais véritable, de Dieu Amour, dont le nom est imprimé dans
l'être profond de chaque personne et dans chaque expérience d'authentique
socialité et solidarité.
Après ces réflexions, chers frères, je vous laisse plusieurs exhortations
particulières. Ayez soin de la formation spirituelle et catéchétique, une
formation « substantielle », plus que jamais nécessaire pour bien vivre la
vocation chrétienne dans le monde d'aujourd'hui. Je le dis aux adultes et
aux jeunes : cultivez une foi pensée, capable de dialoguer en profondeur
avec tous, avec nos frères non catholiques, avec les non chrétiens et les
non-croyants. Poursuivez votre partage généreux avec les pauvres et les plus
faibles, selon la pratique originaire de l'Eglise, en puisant toujours votre
inspiration et votre force à l'Eucharistie, source éternelle de la charité.
J'encourage avec une affection particulière les séminaristes et les jeunes
engagés dans un chemin de vocation : n'ayez pas peur, au contraire, éprouvez
l'attirance des choix définitifs, d'un itinéraire de formation sérieux et
exigeant. Seule la mesure élevée de la condition de disciple fascine et
procure de la joie. J'exhorte chacun à grandir dans la dimension
missionnaire, qui est Co-essentielle à la communion. En effet, la Trinité
est en même temps unité et mission: plus l'amour est intense, plus
l'élan à se diffuser, à s'élargir, à se communiquer est fort. Eglise de
Gênes, sois unie et missionnaire, pour annoncer à tous la joie de la foi et
la beauté d'être Famille de Dieu. Ma pensée s'élargit à la ville tout
entière, à tous les Gênois et à ceux qui vivent et travaillent sur ce
territoire. Chers amis, envisagez l'avenir avec confiance et cherchez à le
construire ensemble, en évitant les attitudes factieuses et les
particularismes, en plaçant le bien commun avant les intérêts même
légitimes.
Je voudrais conclure avec un souhait que je reprends de la merveilleuse
prière de Moïse, que nous avons écoutée dans la première Lecture: que le
Seigneur veuille bien aller au milieu de nous et faire de nous son héritage
(cf. Ex 34, 9). Que l'intercession de la Très Sainte Vierge
Marie, que les Gênois invoquent comme Notre Dame de la Garde dans leur
patrie et dans le monde entier, l'obtienne pour vous. Par son aide et celle
des saints Patrons de votre ville bien-aimée et de votre région, que votre
foi et vos œuvres soient toujours à la louange et à la gloire de la Très
Sainte Trinité. En suivant l'exemple des saints de cette terre, soyez une
communauté missionnaire: à l'écoute de Dieu et au service des hommes ! Amen.
Texte original du
discours du Saint Père
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Sources : www.vatican.va
-
E.S.M.
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 20.05.2008 -
T/Savona - Gênes |