Benoît XVI et Jean Paul II : Une
amitié qui n’est pas née de la chair |
|
Le 18 janvier 2011
-
(E.S.M.)
- Certains pensaient que le Pape Benoît XVI ferait un peu de politique et ralentirait la marche de la cause de béatification de Jean-Paul II, pour éviter des commentaires déplacés d’une certaine presse Il faut être aveugle pour penser que cet homme se laisserait intimider par les rumeurs et la malveillance.
|
Le cardinal Ratzinger
et le pape Jean Paul II
Benoît XVI et Jean Paul II : Une amitié qui n’est pas née
de la chair
Par
José Luis Restán
Le 18 janvier 2011 - E.
S. M.
-
"Il n’est pas nécessaire que vous écriviez cette lettre, car je veux vous
avoir avec moi jusqu’à la fin”.
Ce furent les mots que Jean Paul II adressa à Joseph Ratzinger alors que
s’approchait la date de l’anniversaire de ses 75 ans et qu’il devait par
conséquent présenter la lettre obligatoire de renoncement. « Il avait placé
une grande confiance, une confiance très cordiale et profonde en ma
personne, c’était pour ainsi dire la garantie de garder le bon cap en
matière de foi ». L’intéressé lui-même le raconte dans le livre La lumière
du monde (page 21). Et ce fut ainsi jusqu'au serrement de main final, quand
le Pape Wojtyla ne pouvait plus articuler une parole. Une amitié pour
l’histoire, qu’il faut rappeler aujourd’hui alors que nous avons appris que
le 1er mai prochain Jean-Paul II sera proclamé bienheureux.
Ce fut une unité, comme dit l’apôtre, qui ne naît ni de la chair ni du sang,
mais de la reconnaissance mutuelle dans la foi. Il y avait beaucoup
d’aspects tant au niveau du tempérament que de l’histoire qui pouvaient les
séparer. L’un était polonais et homme d’action, l’autre allemand et
intellectuel méthodique, le premier extraverti et doué pour la dramatique
des grands gestes, le second bien plus contenu et aux manières douces.
Wojtyla fit chercher Ratzinger dès le premier moment de son pontificat. Il
le connaissait depuis le Concile et ensuite il l’avait rencontré à Munich à
l’époque des dialogues (pas toujours suaves) entre les épiscopats allemand
et polonais pour sceller la réconciliation. Et il l’eut très en évidence, il
voulut l’avoir avec lui jusqu’à la fin.
Les confidences des Papes sont une fleur rare, mais Jean-Paul II laissa par
écrit que le cardinal Ratzinger avait été plus qu’un collaborateur sûr, un
ami de confiance. Il y avait quelque chose qui les unissait bien au delà
d’une quelconque différence, leur double ancrage dans la Tradition de
l’Église et dans le monde qu’il leur avait appartenu de vivre, un monde
plein de tensions dans lequel de larges franges de la vieille chrétienté
s’éloignaient sous leurs yeux du patrimoine de la foi. Mais ni l’un ni
l’autre ne reculaient d’un pas, effrayés par l’aspérité des temps, ni ne se
livraient à la lamentation facile sur les maux de l’époque et les tourments
de l’Église en pleine digestion des contenus de Vatican II. Tous les deux
étaient des hommes libres qui avaient forgé l’intelligence et le courage de
leur foi dans le défi des deux grands monstres totalitaire. Et tous deux
aimaient la beauté comme expression de la vérité de Dieu, de sa tendresse
pour l’homme. Wojtyla le théâtre et la poésie, Ratzinger la musique. Les
deux enfin, partageaient la cause de revitaliser le corps fatigué de
l’Église et de relancer le grand défi missionnaire avec le monde moderne: ce
fut la grande cause du Concile et tous deux souffrirent des incompréhensions
et des tergiversations d’un côté et de l’autre.
Tout cela n’impliquait pas qu’ils fussent toujours d’accord, et chacun
savait quelle était sa place. La personnalité entraînante et le charisme de
Jean-Paul II étaient uniques, et en plus d’une occasion Ratzinger a montré
une sorte d’admiration étonnée pour cette énergie, cette force tranquille et
décomplexée avec laquelle le Pape Wojtyla abordait les problèmes les plus
épineux. Mais aussi il nous a révélé la grande patience du Pape polonais, sa
disponibilité pour écouter et son humilité pour accepter des opinions
diverses. Combien de dialogues entre eux deux, avec l’horizon et le poids de
toute l’Église ! « Parfois, nous pouvions ne pas être d’accord, mais je
ne lui ai jamais désobéi », confessait le Préfet de la foi dans le livre
"Le Sel de la terre".
Cette très belle histoire d’amitié dans la foi vient à point, car ces
derniers temps, on a diffusé un bruit stupide et vénéneux, qui essaie
d’établir une rupture entre les deux souverains pontifes.
Il est certain que Benoît XVI a dû affronter les questions laissées en
suspens, comme aura à le faire le Pape suivant quand il sera rappelé par le
Seigneur. Un pontificat n’est jamais une œuvre achevée, ce n’est que la
trame d’un chemin séculaire de l’Église, c’est une modestie essentielle sur
laquelle le Pape Ratzinger ne cesse d’insister. Et il est vrai aussi que les
circonstances changent avec une accélération croissante : le Mur de Berlin
n’est plus mais le nihilisme en Europe a grandi, une certaine Théologie de
la Libération n’a plus cours mais la crise globale pose de nouveau défis
anthropologiques ; et a éclaté avec toute sa cruauté la furie du terrorisme
d’origine islamiste et la persécution dans de nouveaux territoires comme
l’Inde. Le choc énorme du début du pontificat du Pape Jean-Paul ne s’est pas
toujours traduite par un fleuve de construction et d’éducation stable. Ce
sont des choses que seulement la perspective du temps et la sagesse
qu’accorde l’Esprit permettent d’apprécier et de distinguer.
La façon différente avec laquelle Benoît XVI a abordé, par exemple, la
tragédie des abus sexuels commis par des prêtres et des religieux, a
beaucoup à voir avec sa propre expérience en matière de Doctrine de la Foi,
avec la clarification de la psychologie moderne dans ce domaine, et avec
l’amère séquelle de tant de cas mal gérés en leur temps par les évêques. Et
pourquoi pas, aussi avec un génie particulier qui est le sien ? Tout cela a
permis une maturation douloureuse. Mais cela ne signifie absolument pas que
Jean-Paul II fut complaisant. Il affronta avec courage le cas des
Etats-Unis, en initiant une voie que seulement son successeur a pu
péniblement approfondir.
Certains pensaient que le Pape Benoît XVI ferait un peu de politique et
ralentirait la marche de la cause de béatification de Jean-Paul II, pour
éviter des commentaires déplacés d’une certaine presse, ou qu’il mettrait
une distance personnelle évidente par rapport à certaines manières de son
prédécesseur. Il faut être aveugle pour penser que cet homme se laisserait
intimider par les rumeurs et la malveillance de ceux qui aujourd’hui le
flattent (les mêmes qui auparavant le massacraient), mais qui demain
changeront leurs couplets.
Le cri de « Santo subito » a trouvé une réponse six ans après, temps
suffisant pour étudier à la loupe chaque recoin du cheminement de Karol Wojtyla (jusqu’aux lettres qu’il échangeait avec son amie Wanda !) et pour
vérifier les merveilles que le Seigneur fit au travers de sa vie. Et il
convenait de procéder ainsi, pour que la décision ne naquît pas seulement de
l’amour passionné du peuple, mais de l’assurance exigeante de l’Église.
« Nous nous sentons heureux! » a dit Benoît XVI en commentant la
nouvelle à l’Angelus.
►
Benoît XVI partage la joie de l'annonce de la béatification de Jean-Paul II avec les polonais - 16.01.11
►
Benoît XVI présidera la messe de béatification de Jean Paul II le 1er mai - 15.01.11
Sources :
Benoit-et-moi
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 18.01.2011 -
T/Jean Paul II
|