Lectio divina de Benoît XVI au grand
séminaire pontifical romain |
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Le 16 février 2010 -
(E.S.M.)
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Dans la soirée du vendredi 12 février 2010, le Pape Benoît XVI s'est rendu
au grand séminaire pontifical romain. Au cours de la rencontre, le Pape a
tenu une "lectio divina", dont nous publions la traduction
ci-dessous:
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Le pape Benoît XVI -
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Lectio divina de Benoît XVI au grand séminaire pontifical
romain
Dans le Christ, Dieu s'est manifesté comme raison et amour
Le 16 février 2010 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
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Dans la soirée du vendredi 12 février 2010, le Pape Benoît XVI s'est rendu
au grand séminaire pontifical romain. Au cours de la rencontre, le Pape a
tenu une "lectio divina", dont nous publions la traduction
ci-dessous:
Eminence, Excellences, chers amis,
C'est pour moi une grande joie de me retrouver chaque année avec les
séminaristes du diocèse de Rome, avec les jeunes qui se préparent à répondre
à l'appel du Seigneur pour être des travailleurs dans sa vigne, des prêtres
de son mystère. C'est la joie de voir que l'Église vit, que l'avenir de
l'Église est présent également sur nos terres, précisément à Rome aussi.
En cette Année sacerdotale, nous voulons être particulièrement attentifs aux
paroles du Seigneur concernant notre service. Le passage de l'Évangile qui
vient d'être lu parle indirectement, mais profondément, de notre Sacrement,
de notre appel à être dans la vigne du Seigneur, à être des serviteurs de
son mystère.
Dans ce bref passage, nous trouvons plusieurs paroles-clés, qui donnent
l'indication de l'annonce que le Seigneur veut faire à travers ce texte: "Demeurer":
dans ce bref passage, nous trouvons dix fois le mot "demeurer";
ensuite, le nouveau commandement: "Aimez-vous les uns les autres comme je
vous ai aimés", "Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis",
"Donnez du fruit"; et, finalement: "Demandez, priez et il vous
sera donné, la joie vous sera donnée". Nous prions le Seigneur pour
qu'il nous aide à entrer dans le sens de ses paroles, pour que ces paroles
puissent pénétrer notre coeur et puissent ainsi être la voie et la vie en
nous, avec nous et à travers nous.
La première parole est: "Demeurez en moi, dans mon amour". Demeurer
dans le Seigneur est fondamental comme premier thème de ce passage.
Demeurer: où? Dans l'amour, dans l'amour du Christ, dans le fait d'être
aimés et d'aimer le Seigneur. Tout le chapitre 15 concrétise le lieu où nous
demeurons, car les huit premiers versets exposent et présentent la parabole
de la vigne: "Je suis la vigne et vous les sarments". La vigne est
une image vétéro-testamentaire que nous trouvons aussi bien chez les
prophètes, que dans les psaumes et elle a une double signification: c'est
une parabole pour le peuple de Dieu, qui est sa vigne. Il a planté une vigne
dans ce monde, il a cultivé cette vigne, protégé sa vigne, mais dans quelle
intention? Naturellement dans l'intention de trouver du fruit, de trouver le
don précieux du raisin, du bon vin.
C'est ainsi qu'apparaît la deuxième signification: le vin est le symbole,
est l'expression de la joie de l'amour. Le Seigneur a créé son peuple pour
trouver la réponse de son amour et, ainsi, cette image de la vigne possède
une signification sponsale, elle est l'expression du fait que Dieu cherche
l'amour de sa créature, veut entrer dans une relation d'amour, dans une
relation sponsale avec le monde, à travers le peuple qu'il a élu.
Mais ensuite, dans les faits concrets, l'histoire est une histoire
d'infidélité: au lieu de raisins précieux ne sont produites que de petites "choses
immangeables", aucune réponse n'est donnée à ce grand amour, il ne naît
pas d'unité, d'union sans condition entre l'homme et Dieu, dans la communion
de l'amour. L'homme se retire en lui-même, il veut se posséder lui-même
uniquement pour lui, il veut avoir Dieu pour lui, il veut avoir le monde
pour lui. Et ainsi, la vigne est dévastée, le sanglier du bois, tous les
ennemis arrivent, et la vigne devient un désert.
Mais Dieu ne se rend pas: Dieu trouve une nouvelle manière pour arriver à un
amour libre, irrévocable, au fruit de cet amour, au raisin véritable: Dieu
se fait homme, et ainsi Il devient lui-même racine de la vigne, Il devient
lui-même la vigne, et ainsi la vigne devient indestructible. Ce peuple de
Dieu ne peut pas être détruit, car Dieu lui-même y est entré, il s'est
implanté dans cette terre. Le nouveau peuple de Dieu est réellement fondé en
Dieu lui-même, qui se fait homme et nous appelle ainsi à être en Lui la
nouvelle vigne et nous appelle à rester, à demeurer en Lui.
Il faut en outre avoir à l'esprit que, dans le chapitre 6 de l'Évangile de
Jean, nous trouvons le discours sur le pain, qui devient le grand discours
sur le mystère eucharistique. Dans ce chapitre 15, nous trouvons le discours
sur le vin: le Seigneur ne parle pas explicitement de l'Eucharistie, mais,
naturellement, derrière le mystère du vin se trouve la réalité selon
laquelle Il s'est fait fruit et vin pour nous, le fait que son sang est le
fruit de l'amour qui naît de la terre pour toujours et que, dans
l'Eucharistie, son sang devient notre sang, nous nous renouvelons, nous
recevons une nouvelle identité, car le sang de Jésus devient notre sang.
Nous sommes ainsi parents avec Dieu dans le Fils et, dans l'Eucharistie,
cette grande réalité de la vigne devient réalité, dans laquelle nous sommes
des sarments unis au Fils et unis de cette manière dans l'amour éternel.
"Demeurez": demeurer dans ce grand mystère, demeurer dans ce nouveau don du
Seigneur, qui a fait de nous un peuple en lui, dans son Corps et avec son
Sang. Il me semble que nous devons beaucoup méditer sur ce mystère,
c'est-à-dire que Dieu lui-même se fait Corps, un avec nous; que nous pouvons
demeurer - en demeurant dans ce mystère - dans la communion avec Dieu
lui-même, dans cette grande histoire d'amour, qui est l'histoire du
véritable bonheur. En méditant ce don - Dieu s'est fait un avec nous tous
et, dans le même temps, il nous fait un, une seule vigne - nous devons
également commencer à prier, afin que ce mystère pénètre toujours davantage
dans notre esprit, dans notre coeur, et que nous soyons toujours plus
capables de voir et de vivre la grandeur du mystère, et ainsi de commencer à
réaliser cet impératif: "Demeurez".
Si nous continuons à lire attentivement ce passage de l'Évangile de Jean,
nous trouvons également un deuxième impératif: "Demeurez" et "Observez
mes commandements". "Observez" n'est que le deuxième niveau; le
premier est celui de "demeurer", le niveau ontologique; c'est-à-dire que
nous nous sommes unis à Lui, qui s'est donné Lui-même à nous comme
anticipation, qui nous a déjà donné son amour, le fruit. Ce n'est pas nous
qui devons produire le grand fruit; le christianisme n'est pas un moralisme,
ce n'est pas nous qui devons faire ce que Dieu s'attend du monde, mais nous
devons tout d'abord entrer dans ce mystère ontologique: Dieu se donne
Lui-même. Son être, son amour, précède notre agir et, dans le fait d'être
avec Lui, identifiés à Lui, ennoblis par son sang, nous pouvons nous aussi
agir avec le Christ.
L'éthique est une conséquence de l'être: le Seigneur nous donne tout d'abord
un nouvel être, tel est le grand don; l'être précède l'agir et ensuite, de
cet être, découle l'agir, comme une réalité organique; car ce que nous
sommes, nous pouvons l'être également dans notre activité. Et ainsi, nous
rendons grâce au Seigneur, car il nous a détournés du pur moralisme; nous ne
pouvons pas obéir à une loi qui se trouve face à nous, mais nous devons agir
selon notre nouvelle identité. Il ne s'agit donc plus d'une obéissance,
d'une chose extérieure, mais d'une réalisation du don du nouvel être.
Je le répète encore une fois: rendons grâce au Seigneur parce qu'il nous
précède, il nous donne ce que nous devons donner, et nous pouvons ensuite
être, dans la vérité et dans la force de notre être nouveau, acteurs de sa
réalité. Demeurer et observer: observer est le signe du fait de demeurer et
demeurer est le don qu'Il nous donne, mais qui doit être renouvelé chaque
jour dans notre vie.
Il s'ensuit alors ce nouveau commandement: "Aimez-vous comme je vous ai
aimés". Aucun amour n'est plus grand que celui-ci: "Donner la vie pour
ses amis". Qu'est-ce que cela veut dire? Là encore, il ne s'agit pas
d'un moralisme. On pourrait dire: "Ce n'est pas un nouveau commandement;
le commandement d'aimer son prochain comme soi-même existe déjà dans
l'Ancien Testament". Certains affirment: "Cet amour doit être encore
plus radical; il faut aimer l'autre en imitant le Christ, qui s'est donné
pour nous; ce doit être un amour héroïque, jusqu'au don de soi". Mais
dans ce cas, le christianisme serait un moralisme héroïque. Il est vrai que
nous devons arriver jusqu'à cette radicalité de l'amour, que le Christ nous
a montrée et donnée, mais ici aussi, la vraie nouveauté n'est pas ce que
nous faisons nous, la vraie nouveauté est ce qu'il a fait Lui: le Seigneur
s'est donné lui-même à nous, et le Seigneur nous a donné la vraie nouveauté
d'être les membres de son corps, d'être les sarments de la vigne qu'il est
lui-même. La nouveauté est donc le don, le grand don, et de ce don, de la
nouveauté de ce don, s'ensuit aussi, comme je l'ai dit, une nouvelle manière
d'agir.
Saint Thomas d'Aquin le dit de manière très précise lorsqu'il écrit: "La
nouvelle loi est la grâce de l'Esprit Saint" (Summa
theologiae, i-iiae, q. 106, a. 1). La nouvelle loi n'est pas un
commandement plus difficile que les autres: la nouvelle loi est un don, la
nouvelle loi est la présence de l'Esprit Saint qui nous est donné dans le
Sacrement du Baptême, dans la Confirmation et qui nous est donné chaque jour
dans la Très Sainte Eucharistie. Les Pères ont fait ici la distinction entre
"sacramentum" et "exemplum". "Sacramentum" est le don de
l'être nouveau, et ce don devient également un exemple pour notre action,
mais le "sacramentum" est placé avant, et nous, nous vivons du
sacrement. Nous voyons ici la place centrale du sacrement, qui est la place
du don.
Poursuivons notre réflexion. Le Seigneur dit: "Je ne vous appelle plus
serviteurs, le serviteur ne sait pas ce que fait son maître. Je vous ai
appelés amis parce que tout ce que j'ai entendu du Père je vous l'ai fait
connaître". Non plus serviteurs, qui obéissent à un ordre, mais amis, qui
connaissent, qui sont unis dans la même volonté, dans le même amour. La
nouveauté est donc que Dieu s'est fait connaître, que Dieu s'est montré, que
Dieu n'est plus le Dieu inconnu, recherché, mais que l'on ne trouve pas ou
que l'on devine seulement de loin. Dieu s'est fait voir: dans le visage du
Christ, nous voyons Dieu, Dieu s'est fait connaître, et ainsi, il a fait de
nous ses amis. Rappelons-nous que dans l'histoire de l'humanité, dans toutes
les religions archaïques, on sait qu'il y a un Dieu. Il s'agit d'une
connaissance présente au plus profond du coeur de l'homme, que Dieu est un,
les dieux ne sont pas "le" Dieu. Mais ce Dieu demeure très lointain, il
semble qu'il ne se fasse pas connaître, qu'il ne se fasse pas aimer, il
n'est pas ami, mais il est lointain. C'est pourquoi les religions s'occupent
peu de ce Dieu, la vie concrète s'occupe des esprits, des réalités concrètes
que nous rencontrons chaque jour et avec lesquelles nous devons compter
quotidiennement. Dieu demeure lointain.
Puis nous voyons le grand mouvement de la philosophie: pensons à Platon,
Aristote, qui commencent à avoir l'intuition que ce Dieu est l'agathòn, la
bonté même, c'est l'éros qui fait se mouvoir le monde, mais cela reste une
pensée humaine, c'est une idée de Dieu, qui s'approche de la vérité, mais
une idée qui est la nôtre et Dieu reste un Dieu caché.
Récemment, un professeur de Ratisbonne m'a écrit, un professeur de physique,
qui avait lu avec beaucoup de retard mon discours à l'université de
Ratisbonne, pour me dire qu'il ne pouvait pas être d'accord avec ma logique
ou qu'il pouvait l'être seulement en partie. Il dit: "Bien sûr, je suis
convaincu par l'idée que la structure rationnelle du monde exige une raison
créatrice, qui a fait cette rationalité, qui ne s'explique pas par elle-même".
Et il continue: "Mais s'il peut exister un démiurge - ainsi
s'exprime-t-il - un démiurge me semble quelque chose de sûr d'après ce
que vous dites, je ne vois pas qu'existe un Dieu amour, bon, juste et
miséricordieux. Je peux voir qu'il y a une raison qui précède la rationalité
de l'univers, mais le reste non". Et ainsi Dieu lui est caché. Il est
une raison qui précède nos raisons, notre rationalité, la rationalité de
l'être, mais il n'existe pas un amour éternel, il n'existe pas la grande
miséricorde qui nous permet de vivre.
Et voilà, dans le Christ, Dieu s'est montré dans sa pleine vérité, il a
montré qu'il est raison et amour, que la raison éternelle est amour et que
c'est ainsi qu'elle crée. Malheureusement, aujourd'hui encore, beaucoup
vivent encore éloignés du Christ, ils ne connaissent pas son visage et
ainsi, la tentation éternelle du dualisme, qui se cache également dans la
lettre de ce professeur, se renouvelle toujours, c'est-à-dire qu'il n'y a
peut-être pas seulement un principe bon, mais aussi un principe mauvais, un
principe du mal; que le monde est partagé et que ce sont deux réalités aussi
fortes l'une que l'autre: et que le Dieu bon est seulement une partie de la
réalité. Dans la théologie également, y compris la théologie catholique, se
diffuse actuellement cette thèse: Dieu ne serait pas tout-puissant. De cette
manière, on cherche une apologie de Dieu, qui ainsi ne serait pas
responsable du mal que nous trouvons largement à travers le monde. Mais
quelle pauvre apologie! Un Dieu qui ne serait pas tout-puissant! Le mal
n'est pas entre ses mains! Et comment pourrions-nous nous en remettre à ce
Dieu? Comment pourrions-nous être sûrs de son amour si cet amour finit là où
commence le pouvoir du mal?
Mais Dieu n'est plus inconnu: dans le visage du Christ crucifié, nous voyons
Dieu et nous voyons la vraie toute-puissance, et non le mythe de la
toute-puissance. Pour nous les hommes, puissance, pouvoir, sont toujours
identiques à la capacité de détruire, de faire le mal. Mais la vraie
conception de la toute-puissance qui apparaît dans le Christ est précisément
le contraire: en Lui, la vraie toute-puissance est d'aimer, jusqu'au point
où Dieu peut souffrir: c'est ici que se montre sa véritable toute-puissance,
qui peut aller jusqu'à un amour qui souffre pour nous. Et nous voyons ainsi
qu'Il est le vrai Dieu et le vrai Dieu, qui est amour, est pouvoir: le
pouvoir de l'amour. Et nous pouvons faire confiance à son amour
tout-puissant et vivre en celui-ci, avec cet amour tout-puissant.
Je pense que nous devons toujours méditer à nouveau sur cette réalité,
rendre grâce à Dieu parce qu'il s'est montré, parce que nous connaissons son
visage, face-à-face; ce n'est plus comme Moïse qui ne pouvait voir que le
dos du Seigneur. C'est aussi une belle image, dont saint Grégoire de Nysse
dit: "Ne voir que le dos, veut dire que nous devons toujours suivre le
Christ". Mais dans le même temps, Dieu a montré avec le Christ sa face,
son visage. Le voile du temple s'est déchiré, s'est ouvert, le mystère de
Dieu est visible. Le premier commandement qui exclut des images de Dieu,
parce qu'elles pourraient seulement en diminuer la réalité, a changé, s'est
renouvelé, a une autre forme. Nous pouvons à présent, dans le Christ homme,
voir le visage de Dieu, nous pouvons posséder des icônes du Christ et ainsi
voir qui est Dieu.
Je pense que quiconque a compris cela, quiconque a été touché par ce
mystère, selon lequel Dieu s'est révélé, que le voile du temple s'est
déchiré, qu'il a montré son visage, trouve une source de joie permanente.
Nous pouvons seulement dire: "Merci. Oui, à présent nous savons qui tu
es, qui est Dieu et comment lui répondre". Et je pense que cette joie de
connaître Dieu qui s'est montré, montré jusqu'à l'intimité de son être,
implique également la joie de communiquer: qui a compris cela, vit touché
par cette réalité, doit faire comme ont fait les premiers disciples qui vont
chez leurs amis et leurs frères en disant: "Nous avons trouvé celui dont
parlent les prophètes. Désormais il est présent". La dimension
missionnaire n'est pas quelque chose d'extérieur, d'ajouté à la foi, mais
c'est le dynamisme de la foi elle-même. Celui qui a vu, qui a rencontré le
Christ, doit aller auprès de ses amis, et dire à ses amis: "Nous l'avons
trouvé, c'est Jésus, le Crucifié pour nous".
Puis le texte continue et dit: "Je vous ai constitués pour que vous
alliez et portiez du fruit et que votre fruit demeure". Avec cela, nous
revenons au commencement, à l'image, à la parabole de la vigne: elle est
créée pour porter du fruit. Et quel est ce fruit? Comme nous l'avons dit, ce
fruit est l'amour. Dans l'Ancien Testament, avec la Torah comme première
étape de l'autorévélation de Dieu, le fruit était entendu comme justice,
c'est-à-dire vivre selon la Parole de Dieu, vivre dans la volonté de Dieu,
et ainsi vivre bien.
Cela demeure, mais dans le même temps, est transcendé: la vraie justice ne
consiste pas en une obéissance à certaines normes, mais elle est amour,
amour créateur, qui trouve seul la richesse, l'abondance du bien. Abondance
est l'une des paroles-clés du Nouveau Testament. Dieu lui-même donne
toujours en abondance. Pour créer l'homme, il crée cette abondance d'un
univers immense; pour racheter l'homme, il se donne lui-même, dans
l'Eucharistie, il se donne lui-même. Et qui est uni avec le Christ, qui est
sarment de la vigne, vit de cette loi, il ne demande pas: "Puis-je encore
faire cela ou non?", "Dois-je faire cela ou non?", mais il vit dans
l'enthousiasme de l'amour qui ne demande pas: "Cela est-il encore nécessaire
ou interdit", mais simplement, dans la créativité de l'amour, il veut vivre
avec le Christ et pour le Christ et donner tout son être pour Lui et entrer
ainsi dans la joie de porter du fruit. Souvenons-nous également que le
Seigneur dit: "Je vous ai constitués pour que vous alliez": c'est le
dynamisme qui vit dans l'amour du Christ; aller, c'est-à-dire ne pas rester
seul, voir ma perfection, m'assurer le bonheur éternel, mais m'oublier
moi-même, aller comme le Christ est allé, aller comme Dieu est allé dans son
immense majesté jusque dans notre pauvreté, pour trouver du fruit, pour nous
aider, pour nous donner la possibilité de porter le vrai fruit de l'amour.
Plus nous sommes emplis de cette joie d'avoir découvert le visage de Dieu,
plus l'enthousiasme de l'amour sera réel en nous et portera du fruit.
Et nous en venons enfin à la dernière parole de ce passage: "Et je vous dis:
"Tout ce que vous demanderez au Père, qu'il vous le concède en mon nom"".
Une brève catéchèse sur la prière qui nous surprend toujours à nouveau. Deux
fois dans ce chapitre 15, le Seigneur dit: "Ce que vous demanderez je vous
le donne", et une fois encore dans le chapitre 16. Et nous voudrions dire:
"Mais non, Seigneur, ce n'est pas vrai". Tant de prières bonnes et profondes
de mères qui prient pour leur enfant mourant et qui ne sont pas exaucées,
tant de prières pour qu'arrive une chose bonne et que le Seigneur n'exauce
pas. Que veut dire cette promesse? Dans le chapitre 16, le Seigneur nous
offre la clé pour comprendre: il nous dit ce qu'il nous donne, ce qu'est ce
tout, la charà, la joie: si quelqu'un a trouvé la joie, il a tout trouvé et
il voit tout dans la lumière de l'amour divin. Comme Saint François qui a
composé la grande poésie sur la création dans une situation terrible, et
pourtant là précisément, proche du Seigneur souffrant, il a redécouvert la
beauté de l'être, la bonté de Dieu et il a composé cette grande poésie.
Il est également utile de rappeler, dans le même temps, plusieurs versets de
l'Évangile de Luc, où le Seigneur, dans une parabole, parle de la prière, en
disant: "Si donc vous, qui êtes mauvais, vous savez donner de bonnes choses
à vos enfants, combien plus le Père céleste donnera-t-il l'Esprit Saint à
ceux qui le lui demandent". L'Esprit Saint - dans l'Évangile de Luc - est
joie; dans l'Évangile de Jean, il est la même réalité: la joie est l'Esprit
Saint et l'Esprit Saint est la joie, ou bien, en d'autres termes, ne
demandons pas à Dieu des choses petites ou grandes, invoquons de Dieu le don
divin, Dieu lui-même; tel est le grand don que Dieu nous donne: Dieu
lui-même. Dans ce sens, nous devons apprendre à prier, prier pour la grande
réalité, pour la réalité divine, pour qu'Il se donne à nous, qu'Il nous
donne son Esprit et que nous puissions ainsi répondre aux exigences de la
vie et aider les autres dans leurs souffrances. Naturellement, le Notre Père
nous l'enseigne. Nous pouvons prier pour tant de choses, dans tous nos
besoins nous pouvons prier: "Aide-moi!". Cela est très humain et Dieu
est humain, comme nous l'avons vu; il est donc juste de prier Dieu également
pour les petites choses de notre vie quotidienne.
Mais, dans le même temps, prier est un chemin, je dirais une échelle: nous
devons apprendre toujours plus les choses pour lesquelles nous pouvons prier
et les choses pour lesquelles nous ne pouvons pas prier, car elles sont
l'expression de mon égoïsme. Je ne peux pas prier pour des choses qui sont
nuisibles pour les autres, je ne peux pas prier pour des choses qui aident
mon égoïsme, mon orgueil. Ainsi, prier sous les yeux de Dieu devient un
processus de purification de nos pensées, de nos désirs. Comme le dit le
Seigneur dans la parabole de la vigne: nous devons être élagués, purifiés,
chaque jour; vivre avec le Christ, dans le Christ, demeurer dans le Christ
est un processus de purification, et ce n'est que dans ce processus de lente
purification, de libération de nous-mêmes, que se trouve le chemin véritable
de la vie, que s'ouvre le chemin de la joie.
Comme je l'ai déjà mentionné, toutes ces paroles du Seigneur possèdent un
arrière-plan sacramentel. L'arrière-plan sacramentel de la parabole de la
vigne est le Baptême: nous sommes greffés dans le Christ; et l'Eucharistie:
nous sommes un pain, un corps, un sang, une vie avec le Christ. Et ainsi, ce
processus de purification possède lui aussi un arrière-plan sacramentel: le
sacrement de la pénitence, de la réconciliation dans lequel nous acceptons
cette pédagogie divine qui, jour après jour, au cours d'une vie, nous
purifie et fait de nous toujours davantage de véritables membres de son
corps. De cette manière, nous pouvons apprendre que Dieu répond à nos
prières, il répond souvent avec bonté également aux petites prières, mais il
les corrige aussi souvent, il les transforme et les guide, afin que nous
puissions être finalement et réellement des sarments de son Fils, de la
vraie vigne, des membres de son Corps.
Rendons grâce à Dieu pour la grandeur de son amour, prions afin qu'il nous
aide à grandir dans son amour, à demeurer réellement dans son amour.
►
Benoît XVI visite la Caritas diocésaine de Rome
Texte original du
discours du Saint Père
►
Italien
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KTO
Sources : www.vatican.va
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E.S.M.
(©L'Osservatore Romano - 16 février 2010)
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 16.02.2010 -
T/Benoît XVI
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