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Benoît XVI aborde les
thèmes de la société |
Rome le 14.08.2006 -
Dans une interview accordée par le pape Benoît XVI à la télévision
publique de Bavière, Bayerischer Rundfunk (ARD), à la chaîne de
télévision publique allemande ZDF, à la chaîne d’information
allemande Deutsche Welle, et à Radio Vatican, dans le cadre de sa
prochaine visite en Bavière, son pays natal, le pape Benoît XVI
aborde des thèmes de société les plus divers. |
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Interview de
Benoît XVI
Benoît XVI aborde les thèmes de
la société
Publication de
l'interview du pape à la veille de sa visite en Allemagne (1ère partie)
Dans une interview accordée par le pape Benoît XVI à la
télévision publique de Bavière, Bayerischer Rundfunk (ARD), à la chaîne de
télévision publique allemande ZDF, à la chaîne d’information allemande
Deutsche Welle, et à Radio Vatican, dans le cadre de sa prochaine visite en
Bavière, son pays natal, le pape Benoît XVI aborde des thèmes de société les
plus divers.
Le pape visitera l'Allemagne, ou plus précisément, la
Bavière en septembre. Il explique
les raisons de ce voyage: "Le motif de ma visite c’est justement mon désir
de revoir encore une fois les lieux, les personnes auprès desquels j’ai
grandi, qui m’ont marqué et qui ont façonné ma vie, je voulais remercier ces
personnes. Et naturellement aussi adresser un message qui aille au-delà de
ma terre, en accord avec mon ministère".
La
visite du pape focalise l’attention sur la situation des catholiques en
Allemagne. Or, les observateurs sont d’accord pour dire que le climat est
bon, grâce aussi à votre élection. Bien entendu, les vieux problèmes
demeurent, pour ne citer que quelques exemples: il y a toujours moins de
pratiquants, moins de baptêmes, et surtout moins d’influence sur la société.
Comment voyez-vous la situation actuelle de l’Eglise catholique en Allemagne?
A cette question, Benoît XVI relève que "l’Allemagne appartient à l’Occident,
même s’il y a des nuances qui lui sont propres, et dans le monde occidental
aujourd’hui nous connaissons une nouvelle vague d’illuminisme drastique ou
de laïcité, si vous préférez. Il est devenu plus difficile de croire,
puisque le monde où nous nous trouvons, nous le faisons par nous-mêmes, et
Dieu, pour ainsi dire, n’y comparaît plus directement. On ne boit plus
directement à la source, mais dans le récipient qu’on nous présente déjà
plein et ainsi de suite. Les hommes ont reconstruit leur propre monde par
eux-mêmes, et il est devenu plus difficile de retrouver Dieu dans ce monde.
Cela n’est pas une spécificité de l’Allemagne, c’est quelque chose qui se
produit dans le monde entier, en particulier en Occident".
D’un autre
côté, poursuit le pape, "l’Occident est aujourd’hui fortement touché par
d’autres cultures, où l’élément religieux d’origine est très marqué, et qui
sont horrifiées par la froideur qu’elles constatent en Occident à l’égard de
Dieu. Et cette présence du sacré dans d’autres cultures, même si elle est
voilée de diverses façons, touche à nouveau le monde occidental, elle nous
touche nous qui nous trouvons au carrefour de tant de cultures. Et d’autre
part le besoin de quelque chose « de plus grand » est entrain de poindre du
plus profond de l’homme occidental et en Allemagne aussi. Nous voyons que
les jeunes cherchent un « supplément », nous voyons que d’une certaine
manière le phénomène religieux – comme on dit – revient, même si cette
recherche est souvent plutôt floue. Mais avec tout cela l’Eglise est à
nouveau présente, la foi s’offre comme réponse".
"Politique étrangère" du Saint-Siège
A propos de la politique étrangère, et des
possibilités pour le Saint-Siège concernant la situation actuelle, à propos
aussi de l'influence positive que le pape peut exercer sur la situation, sur
les développements au Moyen Orient, Benoît XVI répond:
"Nous
n’avons aucune possibilité politique, et nous ne voulons aucun pouvoir
politique. Mais nous voulons faire appel aux chrétiens et à tous ceux qui se
sentent d’une manière ou d’une autre interpellés par la parole du
Saint-Siège, afin que soient mobilisées toutes les forces qui reconnaissent
que la guerre est la pire des solutions pour tous. Qu’elle n’apporte rien de
bon pour personne, pas même pour ses apparents vainqueurs. Nous le savons
très bien en Europe, après deux guerres mondiales. Ce dont tous ont besoin
c’est la paix".
Comment, en tant qu'évêque de Rome, le pape voit le
rapport de tension et d’équilibre entre la primauté du pape d’un côté et la
collégialité des évêques de l’autre? "Il y a naturellement un rapport fait
de tension et d’équilibre, et nous disons que cela est bien, reconnaît
Benoît XVI. La multiplicité et l’unité doivent sans cesse redéfinir leur
rapport réciproque et ce rapport doit s’intégrer d’une manière toujours
nouvelle dans les situations mouvantes du monde. Aujourd’hui nous avons une
nouvelle polyphonie de cultures, où l’Europe n’est plus le seul élément
déterminant, mais où les communautés chrétiennes des divers continents sont
en train d’acquérir leur propre poids, leur propre couleur. Nous devons
toujours apprendre à nouveau cette fusion des diverses composantes. C’est
pour cela que nous avons développé divers instruments; ce que l’on appelle «
visites ad limina » des évêques ; elles ont toujours existé, mais on s’en
sert beaucoup plus aujourd’hui pour dialoguer réellement avec toutes les
instances du Saint-Siège et avec moi-même. Je parle personnellement avec
chaque évêque. J’ai déjà parlé avec presque tous les évêques d’Afrique et
avec de nombreux évêques d’Asie. Maintenant, ce sera le tour de l’Europe
Centrale, l’Allemagne, la Suisse: au cours de ces rencontres, justement le
Centre et la Périphérie se retrouvent ensemble, dans un échange franc.
Oecuménisme allemand
Question: l’Allemagne en tant que terre de la réforme
est naturellement marquée d’une manière particulière par les rapports entre
les diverses confessions. Les rapports oecuméniques sont une réalité
sensible qui se heurte toujours à de nouvelles difficultés. "Quelles
possibilités voyez-vous d’améliorer les rapports avec l’Eglise évangélique
ou quelles difficultés voyez-vous sur ce chemin?"
Pour Benoît
XVI, il est important de dire avant tout que l’Eglise évangélique présente
une remarquable diversité. "En Allemagne nous avons, si je ne m’abuse, trois
communautés principales: les Luthériens, les Réformés et l’Union Prussienne.
En outre de nombreuses Eglises libres (Freikirchen) se forment aujourd’hui
et, au sein même des Eglises classiques, des mouvements, comme « l’Eglise
qui confesse » et ainsi de suite. Il s’agit donc d’un ensemble à plusieurs
voix avec lequel nous devons entrer en dialogue dans la recherche de
l’unité, en respectant la multiplicité des voix et avec lequel nous voulons
collaborer. Je crois que la première chose à faire dans la société actuelle
c’est de nous engager tous ensemble à clarifier, trouver et mettre en
pratique les grandes lignes directrices éthiques afin de garantir la
consistance éthique de la société, sans laquelle cette société ne pourra pas
réaliser l’objectif ultime de la politique, qui est justice pour tous, paix
et convivialité. Dans ce domaine, je crois que l’on fait déjà beaucoup, que
nous nous retrouvons déjà réellement ensemble sur un fondement chrétien
commun face aux grands défis moraux".
Les
discours de Valence
L'interview revient en outre sur la
récente visite du pape à
Valence, dans le cadre de la
rencontre mondiale des familles. A la question de savoir pourquoi le pape
n'a jamais prononcé les mots « mariages homosexuels », ni parlé d’avortement
ni de contraception, le pape note: "Il faut avant tout dire que j’avais à ma
disposition pour parler en tout deux fois 20 minutes. Et quand on a aussi
peu de temps, on ne peut pas en venir à bout en disant simplement non. Il
faut savoir avant tout ce que nous voulons réellement, n’est-ce pas? Et le
christianisme, le catholicisme, n’est pas une somme d’interdits, mais une
option positive. Et il est très important que cela soit à nouveau visible,
car aujourd’hui cette conscience a presque totalement disparu. On a
tellement entendu parler de ce qui n’était pas permis qu’il est nécessaire
de proposer.
A propos de réponses aux problèmes urgents de la
société, comme le sida ou la surpopulation et l’Eglise catholique
insiste-t-elle autant sur la morale plutôt que sur les efforts destinés à
apporter une solution concrète à ces problèmes cruciaux pour l’humanité, par
exemple sur le continent africain, Benoît XVI relève: "Justement, c’est le
problème: est-ce que nous insistons vraiment tant que cela sur la morale?
Moi je dirais – et j’en suis toujours plus convaincu après mes entretiens
avec les évêques africains – que la question fondamentale, si nous voulons
faire des pas en avant dans ce domaine, c’est l’éducation, la formation. Le
progrès ne peut être authentique que s’il rend service à la personne humaine
et si la personne humaine elle-même grandit, non seulement au niveau de son
potentiel technique, mais aussi de ses capacités morales. Et je crois que le
vrai problème dans la conjoncture historique actuelle c’est le déséquilibre
entre la croissance incroyablement rapide de notre potentiel technique et
celui de nos capacités morales, qui n’ont pas grandi de manière
proportionnelle. C’est pourquoi la vraie recette c’est la formation de la
personne humaine, c’est, selon moi, la clef de tout, et c’est aussi notre
option. Et cette formation – pour être bref – a deux dimensions : tout
d’abord naturellement nous. Mais si on se limite à propager uniquement le
know how, si on enseigne seulement la façon de construire et d’utiliser les
machines, et le mode d’emploi des contraceptifs, alors il ne faut pas
s’étonner si on finit par se retrouver avec des guerres et des épidémies de
SIDA. Nous avons besoin de deux dimensions: il faut dans le même temps la
formation des coeurs – si je peux m’exprimer ainsi – qui permet à la
personne humaine d’acquérir des repères et d’apprendre aussi à employer
correctement sa technique. Voilà ce que nous essayons de faire".
Christianisme en Europe
Benoît XVI
aborde enfin la question du christianisme en Europe, "où il a l’air de se
réduire petit à petit à une affaire privée ne touchant qu’une minorité". Il
rappelle: le christianisme est né au Proche-Orient. Et pendant longtemps
c’est là principalement qu’il s’est développé et il s’est répandu en Asie
beaucoup plus que ce que nous croyons aujourd’hui après les changements
apportés par l’Islam. "D’autre part pour ces raisons justement son axe s’est
déplacé sensiblement vers l’Occident et l’Europe, et l’Europe – nous en
sommes fiers et nous nous en félicitons – a ultérieurement développé le
christianisme dans ses grandes dimensions intellectuelles et culturelles
également. Mais je crois qu’il est important de se souvenir des chrétiens d’Orient,
puisqu’ils risquent d’émigrer, eux qui ont toujours représenté une minorité
importante, entretenant des rapports fructueux avec le contexte environnant.
Et le grand danger est que ces lieux d’origine du christianisme se vident de
leurs chrétiens. Je pense que nous devons les aider à rester".
Quant
à l’Europe, dit le pape, elle "est devenue certainement le coeur du
christianisme et de son mouvement missionnaire. Aujourd’hui les autres
continents, les autres cultures, font partie au même titre du concert de
l’histoire mondiale. Ce qui fait que le nombre des voix de l’Eglise
augmente, et c’est un bien. Il est bon que puissent s’exprimer les divers
tempéraments, les dons propres à l’Afrique, à l’Asie et à l’Amérique et en
particulier aussi à l’Amérique latine…" "Nous ne devons pas capituler, nous
plaindre, nous dire: « Voilà, nous ne sommes qu’une minorité, essayons au
moins de sauvegarder notre petit nombre! »; au contraire, nous devons tenir
en vie notre dynamisme, nouer des relations afin que nous puissions aussi
recevoir des autres des forces nouvelles. Aujourd’hui il y a des prêtres
indiens et africains en Europe, et au Canada aussi de nombreux prêtres
africains font un travail très intéressant. Il y a cet échange mutuel".
Les femmes et le Saint-Siège
La question des femmes figure elle aussi dans
l'interview: "Leur contribution ne devrait-elle pas devenir plus clairement
visible, même à des postes de responsabilité plus élevés dans l’Eglise?"
Benoît XVI l'admet: "Sur ce sujet naturellement on réfléchit beaucoup.
Comme vous le savez, nous considérons que notre foi, la constitution du
collège des Apôtres, nous obligent et ne nous permettent pas de conférer
l’ordination sacerdotale aux femmes. Mais il ne faut pas non plus penser que
dans l’Eglise seuls les prêtres ont un rôle à jouer. Dans l’histoire de l’Eglise
il y a eu de très nombreuses tâches et fonctions. En commençant par les
soeurs des Pères de l’Eglise, pour arriver au Moyen-âge, lorsque de grandes
femmes ont joué un rôle déterminant, et jusqu’aux temps modernes".
Aujourd’hui, ajoute le pape, les femmes sont bien présentes aussi dans les
Dicastères du Saint Siège. "Mais il y a un problème juridique: celui de la
juridiction, c’est-à-dire le fait que selon le Droit Canonique le pouvoir de
prendre des décisions juridiquement contraignantes est lié à l’Ordre sacré.
De ce point de vue il y a donc des limites, mais je crois que les femmes
elles-mêmes, avec leur élan et leur force, avec leur supériorité, avec ce
que je définirais leur « puissance spirituelle », sauront déblayer le
terrain".
Lire la
deuxième partie de l'interview du pape Benoît XVI:
Benoît XVI présente le côté positif de l'Eglise
Texte intégral:
Benoît XVI : Nous devons redécouvrir Dieu
Sources: Archives E.S.M.
Eucharistie sacrement de la miséricorde
- 14.08.2006 - BENOÎT XVI |