Catéchèse de Benoît XVI, Saint Benoît
de Nursie |
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Cité du Vatican, le 10 avril 2008 -
(E.S.M.)
- Devant plus de 30.000 fidèles réunis Place Saint Pierre
pour assister à la Catéchèse, le Saint-Père Benoît XVI a rappelé que
seule la « sève vitale » des « racines chrétiennes » peut assurer une
Union Européenne qui dépasse les horizons simplement économiques et
politiques.
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Catéchèse de Benoît XVI, Saint Benoît de Nursie
Puiser au christianisme pour construire une nouvelle Europe
Un renouveau éthique et spirituel qui puise aux racines chrétiennes du
continent est indispensable à la construction d’une unité européenne
authentique. Benoît XVI l’a réaffirmé lors de sa catéchèse à l’audience
générale consacrée à la vie et à l’œuvre de Saint Benoît de Nursie. Une
audience au cours de laquelle il a salué les religieuses, filles de la
Croix, venues commémorer Sœur Maria Laura Minetti, assassinée par trois
jeunes filles qu’elle assistait. Quant à Saint Benoît, le Pape a rappelé
qu’il a vécu à une époque difficile, celle de la désagrégation de l’empire
romain. Saint Benoît est l’initiateur d’un monachisme qui vit le regard
tourné vers Dieu sans perdre de vue les devoirs de la vie quotidienne et
l’homme avec ses besoins concrets. Paul VI l’a proclamé Patron de l’Europe
car la véritable unité du continent se construit sur les valeurs et le
christianisme en est le fondement.
Sans cette sève vitale, l’homme risque de succomber à la vieille tentation
de vouloir se racheter tout seul - une utopie qui, comme l'a souligné le
pape Jean Paul II, a produit, de diverses manières dans l’Europe du 20ème
siècle, un retour en arrière sans précédent dans l’histoire tourmentée de
l’humanité». Devant plus de 30.000 fidèles réunis Place Saint Pierre pour
assister à la Catéchèse, le Saint-Père a rappelé que seule la «sève
vitale » des « racines chrétiennes » peut assurer une Union Européenne qui
dépasse les horizons simplement économiques et politiques.
Pour cela, a expliqué le pape, Paul VI proclama Saint
Benoît, Patron de l'Europe le 24 octobre 1964, voulut reconnaître l'œuvre
merveilleuse accomplie par le saint à travers la Règle pour la formation de
la civilisation et de la culture européenne. Et l'Audience Générale a été consacrée par le Pape à celui dont
il porte le nom, la figure de Saint Benoît (« qui est le patron de son
Pontificat ») et à l'éternelle actualité de sa règle, «
détentrice d'un authentique ferment spirituel qui transforma le visage de
l'Europe au cours des siècles, bien au-delà des frontières de sa patrie et
de son temps, suscitant après la chute de l'unité politique créée par
l'empire romain une nouvelle unité spirituelle et culturelle, celle de la
foi chrétienne partagée par les peuples du continent. C'est précisément
ainsi qu'est née la réalité que nous appelons « Europe ».
Saint Benoît de Nursie, ajouté Benoît XVI, a exercé « une
influence fondamentale sur le développement de la civilisation et de la
culture européenne » et encore aujourd'hui, a-t-il continué, la règle bénédictine
« offre des indications utiles non seulement aux moines, mais aussi à tous
ceux qui cherchent un guide dans leur chemin vers Dieu.
Par sa mesure, son humanité et son discernement sobre entre
ce qui est essentiel et secondaire dans la vie spirituelle, elle a pu
conserver sa force illuminatrice jusqu'à aujourd'hui ». D'où une éternelle validité de l'« œuvre merveilleuse »
déroulée de Sainy Benoît et de sa règle « pour la formation de la
civilisation et de la culture européenne ».
Texte intégral de la catéchèse du Saint-Père
Chers frères et sœurs,
Je voudrais parler aujourd'hui de Saint Benoît, fondateur du monachisme
occidental, et aussi Patron de mon pontificat. Je commence par une parole de
Saint Grégoire le Grand, qui écrit à propos de Saint Benoît : « L'homme
de Dieu qui brilla sur cette terre par de si nombreux miracles, ne brilla
pas moins par l'éloquence avec laquelle il sut exposer sa doctrine »
(Dial. II, 36). Telles sont les paroles que ce
grand Pape écrivit en l'an 592 ; le saint moine était mort à peine 50 ans
auparavant et il était encore vivant dans la mémoire des personnes et en
particulier dans l'Ordre religieux florissant qu'il avait fondé. Saint
Benoît de Nursie, par sa vie et par son œuvre, a exercé une influence
fondamentale sur le développement de la civilisation et de la culture
européenne. La source la plus importante à propos de la vie de ce saint est
le deuxième livre des Dialogues de Saint Grégoire le Grand. Il ne s'agit pas
d'une biographie au sens classique. Selon les idées de son temps, il voulut
illustrer à travers l'exemple d'un homme concret - précisément Saint Benoît
- l'ascension au sommet de la contemplation, qui peut être réalisée par
celui qui s'abandonne à Dieu. Il nous donne donc un modèle de vie humaine
comme ascension vers le sommet de la perfection. Saint Grégoire le Grand
raconte également dans ce livre des Dialogues de nombreux miracles accomplis
par le saint, et ici encore il ne veut pas raconter simplement quelque chose
d'étrange, mais démontrer comment Dieu, en admonestant, en aidant et aussi
en punissant, intervient dans les situations concrètes de la vie de l'homme.
Il veut démontrer que Dieu n'est pas une hypothèse lointaine placée à
l'origine du monde, mais qu'il est présent dans la vie de l'homme, de tout
homme.
Cette perspective du « biographe » s'explique également à la lumière du
contexte général de son époque : entre le Ve et le VIe siècle, le monde
était bouleversé par une terrible crise des valeurs et des institutions,
causée par la chute de l'Empire romain, par l'invasion des nouveaux peuples
et par la décadence des mœurs. En présentant Saint Benoît comme un « astre
lumineux », Grégoire voulait indiquer, dans cette situation terrible,
précisément ici dans cette ville de Rome, l'issue de la « nuit obscure de
l'histoire » (Jean-Paul II, Insegnamenti, II/1, 1979, p.
1158). De fait, l'œuvre du saint et, en particulier sa Règle, se
révélèrent détentrices d'un authentique ferment spirituel qui transforma le
visage de l'Europe au cours des siècles, bien au-delà des frontières de sa
patrie et de son temps, suscitant après la chute de l'unité politique créée
par l'empire romain une nouvelle unité spirituelle et culturelle, celle de
la foi chrétienne partagée par les peuples du continent. C'est précisément
ainsi qu'est née la réalité que nous appelons « Europe ».
La naissance de Saint Benoît se situe autour de l'an 480. Il provenait,
comme le dit saint Grégoire, « ex provincia Nursiae » - de la région
de la Nursie. Ses parents, qui étaient aisés, l'envoyèrent suivre des études
à Rome pour sa formation. Il ne s'arrêta cependant pas longtemps dans la
Ville éternelle. Comme explication, tout à fait crédible, Grégoire mentionne
le fait que le jeune Benoît était écœuré par le style de vie d'un grand
nombre de ses compagnons d'étude, qui vivaient de manière dissolue, et qu'il
ne voulait pas tomber dans les mêmes erreurs. Il voulait ne plaire qu'à Dieu
seul ; « soli Deo placere desiderans » (II Dial.
Prol. 1). Ainsi, avant même la conclusion de ses études, Benoît
quitta Rome et se retira dans la solitude des montagnes à l'est de Rome.
Après un premier séjour dans le village d'Effide (aujourd'hui Affile), où il
s'associa pendant un certain temps à une « communauté religieuse » de
moines, il devint ermite non loin de là, à Subiaco. Il y vécut pendant trois
ans complètement seul dans une grotte qui, depuis le Haut Moyen-âge,
constitue le « cœur » d'un monastère bénédictin appelé « Sacro Speco
». La période à Subiaco, une période de solitude avec Dieu, fut un temps de
maturation pour Benoît. Il dut supporter et surmonter en ce lieu les trois
tentations fondamentales de chaque être humain : la tentation de
l'affirmation personnelle et du désir de se placer lui-même au centre, la
tentation de la sensualité et, enfin, la tentation de la colère et de la
vengeance. Benoît était en effet convaincu que ce n'était qu'après avoir
vaincu ces tentations qu'il aurait pu adresser aux autres une parole pouvant
être utile à leur situation de besoin. Et ainsi, son âme désormais pacifiée
était en mesure de contrôler pleinement les pulsions du « moi » pour être un
bâtisseur de paix autour de lui. Ce n'est qu'alors qu'il décida de fonder
ses premiers monastères dans la vallée de l'Anio, près de Subiaco.
En l'an 529, Benoît quitta Subiaco pour s'installer à Montecassino. Certains
ont expliqué ce déplacement comme une fuite face aux intrigues d'un
ecclésiastique local envieux. Mais cette tentative d'explication s'est
révélée peu convaincante, car la mort soudaine de ce dernier n'incita pas
Benoît à revenir (II Dial. 8). En réalité,
cette décision s'imposa à lui car il était entré dans une nouvelle phase de
sa maturation intérieure et de son expérience monastique. Selon Grégoire le
Grand, l'exode de la vallée lointaine de l'Anio vers le Mont Cassio - une
hauteur qui, dominant la vaste plaine environnante, est visible de loin -
revêt un caractère symbolique : la vie monastique cachée a sa raison d'être,
mais un monastère possède aussi une finalité publique dans la vie de
l'Eglise et de la société, il doit donner de la visibilité à la foi comme
force de vie. De fait, lorsque Benoît conclut sa vie terrestre le 21 mars
547, il laissa avec sa Règle et avec la famille bénédictine qu'il avait
fondée un patrimoine qui a porté des fruits dans le monde entier jusqu'à
aujourd'hui.
Dans le deuxième livre des Dialogues, Grégoire nous montre que la vie de
Saint Benoît était plongée dans une atmosphère de prière, fondement central
de son existence. Sans la prière, l'expérience de Dieu n'existe pas. Mais la
spiritualité de Benoît n'était pas une intériorité en dehors de la réalité.
Dans la tourmente et la confusion de son temps, il vivait sous le regard de
Dieu et ne perdit ainsi jamais de vue les devoirs de la vie quotidienne et
l'homme avec ses besoins concrets. En voyant Dieu, il comprit la réalité de
l'homme et sa mission. Dans sa Règle, il qualifie la vie monastique d'«
école du service du Seigneur » (Prol. 45) et il
demande à ses moines de « ne rien placer avant l'Œuvre de Dieu [c'est-à-dire
l'Office divin ou la Liturgie des Heures] » (43, 3).
Cependant, Il souligne que la prière est en premier lieu un acte d'écoute
(Prol. 9-11), qui doit ensuite se traduire par
l'action concrète. « Le Seigneur attend que nous répondions chaque jour par
les faits à ses saints enseignements », affirme-t-il (Prol.
35). Ainsi, la vie du moine devient une symbiose féconde entre
action et contemplation « afin que Dieu soit glorifié en tout »
(57, 9). En opposition avec une réalisation personnelle facile et
égocentrique, aujourd'hui souvent exaltée, l'engagement premier et
incontournable du disciple de Saint Benoît est la recherche sincère de Dieu
(58, 7) sur la voie tracée par le Christ humble et obéissant
(5, 13), ne devant rien placer avant l'amour pour
celui-ci (4, 21 ; 72, 11) et c'est précisément
ainsi, au service de l'autre, qu'il devient un homme du service et de la
paix. Dans l'exercice de l'obéissance mise en acte avec une foi animée par
l'amour (5, 2), le moine conquiert l'humilité
(5, 1), à laquelle la Règle consacre un
chapitre entier (7). De cette manière, l'homme
devient toujours plus conforme au Christ et atteint la véritable réalisation
personnelle comme créature à l'image et à la ressemblance de Dieu.
A l'obéissance du disciple doit correspondre la sagesse de l'Abbé, qui dans
le monastère remplit « les fonctions du Christ » (2, 2 ;
63, 13). Sa figure, définie en particulier dans le deuxième
chapitre de la Règle, avec ses qualités de beauté spirituelle et
d'engagement exigeant, peut-être considérée comme un autoportrait de Benoît,
car - comme l'écrit Grégoire le Grand - « le saint ne put en aucune manière
enseigner différemment de la façon dont il vécut » (Dial.
II, 36). L'Abbé doit être à la fois un père tendre et également
un maître sévère (2, 24), un véritable
éducateur. Inflexible contre les vices, il est cependant appelé à imiter en
particulier la tendresse du Bon Pasteur (27, 8),
à « aider plutôt qu'à dominer » (64, 8), à «
accentuer davantage à travers les faits qu'à travers les paroles tout ce qui
est bon et saint » et à « illustrer les commandements divins par son exemple
» (2, 12). Pour être en mesure de décider de
manière responsable, l'Abbé doit aussi être une personne qui écoute « le
conseil de ses frères » (3, 2), car « souvent
Dieu révèle au plus jeune la solution la meilleure » (3,
3). Cette disposition rend étonnamment moderne une Règle écrite
il y a presque quinze siècles ! Un homme de responsabilité publique, même à
une petite échelle, doit toujours être également un homme qui sait écouter
et qui sait apprendre de ce qu'il écoute.
Benoît qualifie la Règle de « Règle minimale tracée uniquement pour le début
» (73, 8) ; en réalité, celle-ci offre
cependant des indications utiles non seulement aux moines, mais également à
tous ceux qui cherchent un guide sur leur chemin vers Dieu. En raison de sa
mesure, de son humanité et de son discernement sobre entre ce qui est
essentiel et secondaire dans la vie spirituelle, elle a pu conserver sa
force illuminatrice jusqu'à aujourd'hui. Paul VI, en proclamant Saint Benoît
Patron de l'Europe le 24 octobre 1964, voulut reconnaître l'œuvre
merveilleuse accomplie par le saint à travers la Règle pour la formation de
la civilisation et de la culture européenne. Aujourd'hui, l'Europe - à peine
sortie d'un siècle profondément blessé par deux guerres mondiales et après
l'effondrement des grandes idéologies qui se sont révélées de tragiques
utopies - est à la recherche de sa propre identité. Pour créer une unité
nouvelle et durable, les instruments politiques, économiques et juridiques
sont assurément importants, mais il faut également susciter un renouveau
éthique et spirituel qui puise aux racines chrétiennes du continent,
autrement on ne peut pas reconstruire l'Europe.
Sans cette sève qui le fait vivre, l’homme risque de succomber à la vieille
tentation de vouloir se racheter tout seul - une utopie qui, comme l'a
souligné le pape Jean Paul II, a produit, de diverses manières dans l’Europe
du 20ème siècle, "un retour en arrière sans précédent dans l’histoire
tourmentée de l’humanité" (Insegnamenti, XIII/1, 1990, p.
58). En recherchant le véritable progrès, écoutons encore
aujourd'hui la Règle de Saint Benoît comme une lumière pour notre chemin. Le
grand moine demeure un véritable maître à l'école de qui nous pouvons
apprendre l'art de vivre l'humanisme véritable.
Le pape Benoît XVI
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Sources : www.vatican.va
/trad. Flavio Esposito/KTO -
E.S.M.
© Copyright du texte original original : Librairie Editrice du Vatican
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 10.04.2008 -
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