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Note de lecture sur le tome 2 de Jésus de
Nazareth de Benoît XVI
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Le 10 mars 2011 -
(E.S.M.)
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Ce 10 mars a paru Jésus de Nazareth. De l’entrée à Jérusalem à la
Résurrection, de Benoît XVI, qui fait suite à Jésus de Nazareth.
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Note de lecture sur le tome 2 de Jésus de Nazareth
de Benoît XVI
Le 10 mars 2011 - E.
S. M. - Ce 10 mars a paru Jésus de Nazareth. De l’entrée à
Jérusalem à la Résurrection, de Benoît XVI, qui fait suite à
Jésus de Nazareth. Du baptême dans le Jourdain à la Transfiguration. Le
pape y exprime une réflexion personnelle en abordant le « cœur de la vie
du Christ », de l’entrée à Jérusalem en passant par la Passion jusqu’à
la Résurrection.
Après une présentation de l’ouvrage par le cardinal André Vingt-Trois, des
intellectuels et théologiens sont venus témoigner et engager la discussion
autour de ce livre.
Note de lecture sur le tome 2 de « Jésus de
Nazareth »
Après le succès de « Lumière du monde », ouvrage plus
circonstanciel mais qui a permis à certains égards une réconciliation avec
l'opinion (cf. le retour sur l'affaire Williamson, les
propos sur la morale, la question de la liturgie...), Benoît XVI
renoue avec un genre littéraire où il est plus à l'aise, le grand exposé sur
la foi. Dans ce cadre, il n'est pas tributaire des questions des
intervieweurs et se détache dune actualité plus immédiate. Son propos y
gagne en liberté.
Avec une sorte de force paisible et équilibrée, le pape ouvre donc à nouveau
le dossier Jésus. Mais pour autant, cette tranquillité de ton n'entame pas
la gravité et l'importance du sujet. Il ne s'agit en effet rien de moins que
du cœur du christianisme, les derniers moments de Jésus, sa Passion, sa mort
et sa résurrection. Les questions clé de la foi, donc.
Notons d’emblée que ce livre sérieux de théologie biblique se laisse
découvrir à travers des chapitres accessibles et de longueur raisonnable,
qui ouvrent autant la réflexion que la méditation. En cela, le livre peut
tout à fait répondre aux attentes d'un lecteur moderne qui n'est pas féru de
science théologique mais veut en savoir davantage.
1) Une vie de Jésus ?
C'était lune critique lancée au premier tome du « Jésus » de dire que
le livre en restait à la « christologie den haut », à une approche trop
abstraite et théologique sans tenir vraiment compte des attentes de l'homme
contemporain en matière d'histoire. Même sil reste marqué par une approche
biblico-spirituelle héritière d'un Romano Guardini, par exemple, ce nouvel
ouvrage signale cette objection d'emblée et introduit davantage d'éléments
historiques objectifs. Ainsi du passage sur la datation de la Cène durant la
Semaine sainte, avec des informations précises, des détails sur les mœurs
religieuses de l'époque.
On sait, depuis en particulier la fameuse thèse d'Albert Schweitzer qu'il
est vain de vouloir écrire une « Vie de Jésus ». Si le pape ne se
livre pas à l'exercice, son récit suit souvent néanmoins une forme de
narration, relate des épisodes évangéliques propres à stimuler l'imaginaire
du lecteur. Mais toujours cette narration va de pair avec des exposés ou des
réflexions catéchétiques, elle fait appel aussi à des lectures transversales
et traditionnelles de la Bible : le serviteur souffrant d'Isaïe ou le martyr
d'Etienne dans les Actes des Apôtres permettent d'expliciter l'expérience du
Christ à partir d'excursus. Comme le dit le pape, l'examen des faits
s'entremêle avec la Parole de Dieu. Il reste que le propos suit souvent le
cours d'un récit classique qu'un historien ne renierait pas.
2) une lecture en dialogue
D'emblée, ce pape qui a réputation d'intransigeance entend se situer
sur un plan de dialogue. Dialogue avec un livre « jumeau » protestant
consacré lui aussi à Jésus. Dialogue avec le monde juif engagé dans une même
recherche spirituelle, dans une approche conjointe de Dieu, selon les
propres termes de Benoît XVI. Dialogue aussi avec le monde universitaire par
le biais de la discussion de thèses et d'argumentations, comme il fait avec
la somme de Meier sur Jésus. Et à travers ses développements sur la vérité
ou le pouvoir, les citations d'auteurs, les ouvertures vers la philosophie
sont nombreuses également : saint Thomas dAquin bien sur, mais aussi Hegel
ou Heidegger.
On a pu écrire que Benoît XVI n'était pas le pape de l'esprit d'Assise : ce
livre montre à l'inverse qu'il n'est pas fermé à une lecture en résonance
avec des approches venues d'autres traditions que le catholicisme.
3) la condamnation de la violence
L'esprit d'Assise, on le retrouve justement dans le sens de la paix
et surtout le refus de la violence qui est affirmé très tôt dans le texte.
C'est l'attitude de Jésus qui refuse toute forme de violence dans le
contexte de son arrestation. C'est le refus dune violence politique, de la
figure du Jésus « révolutionnaire » ou « radical » : le Christ
n'est pas un zélote, ni un Messie temporel et l'on ne peut le mettre sur le
même plan que Barrabas le « terroriste ». Mais se trouve surtout
énoncé dans le livre le refus de toute violence en matière religieuse, avec
insistance et sans concession.
Au delà d'Assise, ce propos induit plusieurs résonances là encore. Le
concile Vatican II et l'importance de la conscience, la liberté religieuse,
la polémique de Ratisbonne, la démarche de repentance de Jean-Paul II pour
les violences de l'Eglise au cours de l'histoire sont comme en arrière-plan.
Mais aussi, bien sûr, les violences actuelles de certains groupes religieux
qui se font « au nom de Dieu » ou celles dont les chrétiens ou
d'autres croyants sont victimes. On ne peut pas lire le livre du pape sans
penser à tout cela.
4) le christianisme n'est pas une morale.
Tout en poursuivant son propos, au travers de considérations
d'histoire ou d'exégèse, Benoît XVI s'autorise des petites phrases qui sont
autant de mises au point appuyées. Ainsi, il n'hésite pas à dire que le
christianisme n'est pas une morale et qu'il ne faut pas le réduire à cette
dimension. Et de prendre pour exemple l'obsession de l'Eglise en matière de
pureté sexuelle, en particulier ! Gageons que ce propos peut avoir un réel
écho avec plus d'impact peut être que ceux tenus dans « Lumière du monde
». Pour le pape, l'expérience de la foi prime sur la nécessité de
respecter des lois ou un code. Une affirmation qui sera sans doute pour
certains une libération, pour d'autres...une révélation !
5) entre vérité et liberté
Si le christianisme n'est pas une morale, encore moins un système
politique ou une idéologie révolutionnaire, il reste qu'il a une vision du
politique, ou du moins le souci de ne pas mélanger religion et pouvoir. On a
souvent l'habitude de voir commenter en ce sens l'Evangile du « Rendez à
César », mais ici le développement sur le politique se fait dune manière
plus originale à partir de l'interrogation de Pilate lors de la Passion : «
Qu'est-ce que la vérité ? ». Avant de commenter saint Thomas sur ce
thème, le pape souligne que tous les régimes totalitaires ont toujours eu un
problème avec la vérité, justement. Pour le pape, vérité, liberté, salut
sont des réalités liées. D’une certaine manière, Jésus se trouve victime
dune fâcheuse confusion entre pouvoir politique et religion, que traduit en
particulier l'attitude du Sanhédrin qui n'hésite pas à en appeler à
l'Empereur pour forcer la main à Pilate.
6) le sacrifice spirituel de Jésus
Méditant sur la Rédemption, Benoît XVI souligne la « fonction vicaire
» de Jésus dans son sacrifice spirituel même. Il se démarque de l'approche
païenne et antique du sacrifice sanglant, qui avait pour but d'apaiser la
colère de la divinité par une sorte de terrible marché. Pour lui, le
christianisme inverse cette vision en insistant sur la dimension de don,
d'amour, de victime offerte pour le salut des hommes et non de rétribution
sacrée. Cette vision théologique permet d'ailleurs à Benoît XVI de reprendre
la fameuse citation de Pascal : « Le Christ est en agonie jusqu'à la fin du
monde, il ne faut pas dormir pendant ce temps là... »
7) le mystère revisité.
L'occasion est belle également pour le pape de revisiter, d'expliquer
à nouveau le mystère de la foi à travers ses plus grandes déclinaisons :
Rédemption, Eucharistie,
Résurrection, Ascension... En ce sens, le lecteur est gratifié de catéchèses
souvent ramassées mais efficaces, avec de belles formules :
- ainsi sur les deux natures du Christ, à la fois homme et Dieu.
- sur la cohérence du parcours évangélique : il y a pas selon lui de rupture
entre la prédication du Royaume, qui aurait échoué, et la montée vers le
sacrifice d'expiation.
- la distinction entre Prière sacerdotale et Eucharistie.
- le très beau passage sur la Résurrection vue comme une « saut qualitatif»,
une « évasion » vers une réalité nouvelle, avec une dimension
d'universalité.
- l'Ascension, le cœur à cœur de Jésus avec son Père... il parle d’une sorte
de « voyage planétaire » en une expression surprenante.
8) une spiritualité retenue
Même si Benoît XVI ne cède pas ici à une démonstration de foi
expansive ou affective et se montre plus proche de la paix bénédictine que
du débordement charismatique, il n'hésite pas parfois pourtant à partager sa
vision méditative. Ainsi de cette belle méditation sur le visage de Jésus
crucifié, qui renvoie à toutes les victimes, tous les souffrants du monde.
Ou dans la finale de l'ouvrage qui ouvre sur une invitation à l'espérance
spirituelle.
► Extraits
du livre de Joseph Ratzinger-Benoît XVI- Jésus de Nazareth II
►
Présentation de la seconde partie du Jésus de
Nazareth de Benoît XVI le 10 mars
►
Avant-propos de Jésus de Nazareth de Benoît XVI
Sources : eglise.catholique.fr
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 10.03.2011 - T/Benoît XVI
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