Depuis le Motu Proprio de Benoît XVI... |
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Le 02 mai 2008 -
(E.S.M.) - Depuis la promulgation du Motu Proprio Summorum
Pontificum de Benoît XVI en juillet 2007, reconnaissant, à côté du rite
romain « ordinaire », un rite « extraordinaire », le paysage liturgique
de l’Église a, qu’on le veuille ou non, profondément changé.
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L’Art de célébrer la messe
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Depuis le Motu Proprio de Benoît XVI...
Une traduction qui vient à point
Père Michel Gitton
La traduction française de l’édition 2002 de la Présentation générale du
Missel Romain est disponible en français depuis avril 2008 (1). Présentation
et analyse.
Depuis le
Motu Proprio Summorum Pontificum de Benoît XVI en juillet 2007,
reconnaissant, à côté du rite romain « ordinaire », un rite « extraordinaire
», le paysage liturgique de l’Église a, qu’on le veuille ou non,
profondément changé. C’est donc dans un tout autre esprit que nous pouvons
recevoir la traduction française enfin réalisée de la Présentation générale
du Missel Romain (PGMR) qui vient de paraître.
On sait que le pape Jean-Paul II avait tenu en 2002 à donner à l’Église une
édition à jour du Missel Romain restauré à la suite du Concile Vatican II,
dont la première édition remontait à 1969. Ce travail considérable, qui
intégrait les additions faites au sanctoral, mais qui donnait aussi les
mélodies complètes pour la célébration de la messe en langue latine,
comportait, comme il se doit, des préliminaires. Ceux-ci, qui sont les
héritiers de l’ancien code des rubriques (dont la dernière
édition était de 1962), donnent les principes généraux de la
célébration et de ses différentes parties, ainsi que des règles sur le rôle
des divers ministres, sur le choix des formulaires, sur l’ornementation, etc.
La nouveauté, c’est que ce document est inévitablement pris dans l’optique
d’une comparaison implicite avec le rite « extraordinaire ». Naguère, le
triomphalisme post-conciliaire était de règle dans beaucoup de milieux :
l’Église avait abandonné définitivement les vieilles pratiques pour des
usages plus éclairés, qui avaient le double avantage de retrouver la
simplicité des origines et d’être mieux compris des hommes d’aujourd’hui.
Sur ces deux points, il a fallu déchanter, le thème du « retour aux sources
» n’a pas résisté sur tous les points à une meilleure connaissance des
origines (notamment sur la concélébration et la question
de l’orientation de l’autel), et quant à la compréhension plus
facile, on ne peut pas dire qu’elle ait abouti à ramener les foules dans les
églises !
Ce n’est pas dire que le rite « ordinaire » ne puisse faire valoir des
qualités propres qui ne sont pas nulles et qui, à notre avis, justifient
largement son usage dans la plus grande partie de l’Église catholique. Mais
la preuve doit en être faite et le document mis aujourd’hui à la disposition
des prêtres et des fidèles peut sans doute y aider. Mais surtout, si l’on
veut soutenir la comparaison, il convient que la célébration de la messe
selon le missel de 2002 s’améliore, et donc que l’on accepte de lire,
d’étudier et, au besoin, de se réformer.
Le premier usage de ce PGMR est donc de rappeler qu’il existe un rite romain
de la messe, que ce n’est pas une pâte à modeler que chacun peut interpréter
à sa guise, le § 42 introduit d’ailleurs une autre source, tout à fait
essentielle, « la pratique léguée du Rite romain ». Nous sortons de «
l’herméneutique de la rupture » et nous apprenons qu’il y a derrière nous
une longue histoire dont ce missel est l’héritier, c’est là que nous pouvons
trouver les solutions aux questions que le missel laisse sans réponse et que
nous pouvons éclairer des choix que le missel laisse ouverts.
Le titre donné à la traduction française : l’Art de
célébrer la messe est sans doute une heureuse trouvaille, il
renvoie aux conclusions du synode de 2006 sur la Sainte Eucharistie,
reprises dans
l’exhortation apostolique du Saint-Père Benoît XVI (2). En
réalité, l’objectif du texte dont nous avons maintenant la traduction n’est
pas de donner une nouvelle législation sur le sujet (la
liturgie ne se réforme pas par décret). On peine en effet à
trouver au fil des pages des points qui traduiraient des modifications
sensibles : même la prescription plus claire sur les pouvoirs des évêques et
des conférences épiscopales (§ 387-390) est
plutôt contraignante à leur égard. On peut citer l’insistance pour que
toutes les lectures prévues soient faites « strictement »
(§ 357), et quelques autres points en plus ou en moins. Mais on
peut dire que l’objectif essentiel est de tirer les conclusions de la
réception du missel de 1969, canalisant certains abus, remettant le tout
dans une ambiance plus traditionnelle, comme en témoigne le préambule qui
situe le missel dans la tradition liturgique de l’Église. On retrouve là un
usage plus normal du ministère de Pierre qui n’est pas chargé de créer ex
nihilo, mais de discerner dans la pratique ce qui
va dans le sens de la continuité et du développement du rite romain et ce
qui s’en écarte.
La traduction française, quant à elle, pour tardive qu’elle soit, arrive
sans doute au bon moment. Elle se recommande par son incontestable
lisibilité, même si certains choix aboutissent à de légères confusions (3).
On voit la timide réintroduction d’un vocabulaire usant des termes propres
au culte catholique, même si la tendance est encore limitée : on ose
quelques fois parler de la « sainte communion », de l’« adoration de la
croix », mais malheureusement pas du calice (qui est
toujours une « coupe » sauf p. 126, § 327), on risque la « patène
», etc. Surtout, les intitulés des prières retrouvent leur forme classique
(Sanctus, Orate fratres, Agnus Dei), même si c’est avec
traduction à la suite.
Si c’est un art qui est demandé, cet art demandera
encore beaucoup de travail à ceux qui en sont les premiers usagers,
c’est-à-dire les prêtres, souvent dépourvus en ce domaine de toute formation
sérieuse (ceci étant vrai tous rites confondus).
La perte de mémoire qui affecte notre société a
atteint en ce domaine une ampleur vertigineuse. La défaillance d’une
génération, qui avait pu recevoir l’écho de l’usage « reçu » mais ne l’a pas
transmis, se fera encore longtemps sentir. Mais la prétention et le mauvais
goût avec lequel tout liturge se croit volontiers compétent et prend ses
habitudes pour la loi de l’Église (celle d’aujourd’hui ou
de toujours, peu importe) n’est guère moins dommageable.
Le chemin sera long, raison de plus pour s’y mettre sans retard....
Père Michel Gitton
(1) L’Art de célébrer la Messe. Présentation générale du
Missel Romain, 3e édition typique 2002, préface de Mgr Robert Le Gall,
Desclée-Mame, 2008, 224 pages, 12,50 e.
(2)
Sacramentum Caritatis, Exhortation apostolique post-synodale,
22 février 2007, § 38 et suiv.
(3) L’un au deuxième alinéa du n. 22 in fine, où, parlant des Messes
stationales de l’évêque, le texte latin dit : Quare huiusmodi Missarum
sollemnia exemplo esse debent universæ diœcesi, que cette traduction
rend par : « C’est pourquoi de telles messes
solennelles doivent être un exemple pour tout le diocèse » (p. 32) ;
inutile de souligner que pour l’auteur du texte latin c’est la solennité de
ces Messes – voire leur cérémonial – qui devrait être un [bon] exemple pour
tout le diocèse. L’autre au troisième alinéa du n. 309, sur l’emploi de
l’ambon.
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