|
La vie qui n'est plus soumise à la mort
|
Le 01 novembre 2014 -
(E.S.M.)
- A propos de la vie éternelle, Benoît XVI répond : Il est
effectivement venu pour que nous connaissions la vérité. Pour que
nous puissions toucher Dieu. Pour que la porte nous soit ouverte.
Pour que nous trouvions la vie, la vie véritable, celle qui n'est
plus soumise à la mort.
|
|
Extraits de la troisième partie "OÙ ALLONS-NOUS?" Entretien de Benoît XVI
avec Peter Seewald.
1)
Le pape, l'Église et les signes des temps - 16.10.2014
2)
Le prétendu blocage des réformes 18.10.2014
3)
Comment avance la Rénovation ?
4)
Marie et le message de Fatima - 27.10.2014
5)
Benoît XVI : le simple est vrai - et le vrai est simple - 29.10.2014
DES CHOSES DERNIÈRES
Jésus n'a pas recommandé l'usage de l'épée à ses disciples, mais leur a
confié un autre équipement : « Je vous envoie l'Esprit », a-t-il promis.
Ouvre-t-on ainsi l'accès à une pensée qui mène au-delà de l'ordinaire ? Une
sorte d'intelligence spirituelle dont nous pourrions aujourd'hui faire la
découverte sous un jour entièrement nouveau ?
On ne doit pas imaginer cela de manière trop mécanique, bien entendu. Ce
n'est pas qu'on surélève notre existence ordinaire d'un étage
supplémentaire. Cela signifie au contraire que le contact intérieur avec
Dieu, avec et dans le Christ, ouvre en nous des possibilités réellement
nouvelles et élargit notre cœur et notre esprit, la
foi donne effectivement à notre vie une nouvelle dimension.
Ce serait peut-être une sorte de méta-Net,
infiniment plus rapide que l'Internet, et en tout cas plus libre, plus
authentique et plus positif.
Ce que l'on a exprimé en parlant de Communio Sanctorum : l'idée que
nous sommes tous, d'une manière ou d'une autre, associés par un lien assez
profond, et que nous nous reconnaissons même si nous ne nous sommes jamais
vus, parce que le même Esprit, le même Seigneur agit en nous.
Dans votre discours de Lisbonne, ( L'optimisme
de Benoît XVI - 18.05.10) vous avez déclaré que
l'une des missions prioritaires de l'Église était aujourd'hui de rendre
l'homme capable « de voir au-delà des avant-dernières choses — afin de
chercher les dernières ». La théorie des « choses dernières » est au cœur de
la foi. Elle traite des sujets comme l'enfer, le purgatoire, l'antéchrist,
la persécution de l'Église à la fin des temps, le retour du Christ et le
Jugement dernier. Pourquoi la Proclamation fait-elle peser un silence aussi
frappant sur des thèmes eschatologiques qui, contrairement à certains «
sujets brûlants permanents » internes à l'Église, sont tout de même de
nature existentielle et concernent tout un chacun ?
C'est une question très sérieuse. Notre prédication, notre proclamation est
effectivement orientée en bonne partie sur la seule création d'un monde
meilleur, alors que le monde réellement meilleur n'est pratiquement plus
mentionné. Nous devons sur ce point procéder à un examen de conscience. On
tente, bien sûr, d'aller au-devant de nos auditeurs, de leur dire ce qui se
trouve à leur horizon. Mais notre mission est aussi d'ouvrir cet horizon, de
l'élargir et de regarder vers ce qui vient à la fin.
Ces idées-là sont difficiles à admettre pour les gens d'aujourd'hui. Elles
leur paraissent irréelles. Ils préféreraient avoir des réponses concrètes
pour ce qu'ils vivent maintenant, pour les tourments du quotidien. Mais ces
réponses restent des demi-réponses si elles ne font pas aussi ressentir et
comprendre intimement que je vais au-delà de cette vie matérielle, qu'il
existe un Jugement, qu'il existe la Grâce et l'Éternité. Dans cette mesure,
nous devons aussi trouver de nouveaux mots et de nouvelles manières pour
permettre aux gens de franchir le mur du son de la finitude.
Toutes les prophéties de Jésus se sont accomplies,
une seule est encore à venir : celle de son retour. Seul son accomplissement
donnera toute sa vérité au mot de « Rédemption ». Vous avez inventé la
notion de « réalisme eschatologique ». Qu'est-ce que cela signifie au juste
?
Cela signifie que ces choses ne sont pas des mirages ou je ne sais quelles
utopies inventées, mais qu'elles rendent compte avec exactitude de la
réalité. Nous devons effectivement toujours nous rappeler qu'il nous dit,
avec la plus grande certitude : Je reviendrai.
Ces mots-là sont au-dessus de tout. C'est pour cette raison que
primitivement, la messe se dit tourné vers l'Orient, vers le Seigneur qui
revient, symbolisé par le soleil levant. Chaque messe est par conséquent une
manière d'aller au-devant de celui qui vient. On anticipe ainsi cette venue
; nous allons dans Sa direction — et II vient déjà, par anticipation.
J'aime faire à ce sujet la comparaison avec l'histoire des noces de Cana. Le
Seigneur dit à Marie : « Mon heure n'est pas encore venue1.
» Mais ensuite, il donne tout de même le nouveau vin et anticipe en quelque
sorte son heure, qui n'est pas encore venue.
Ce réalisme eschatologique est présent dans l'eucharistie : nous allons
au-devant de Lui, qui vient, et Lui vient et anticipe d'ores et déjà cette
heure qui, un jour, prendra son caractère définitif. Nous devrions
comprendre cela dans l'idée que nous allons au-devant du Seigneur qui est
déjà en train de venir, que nous allons dans sa venue même — et que nous
nous intégrons ainsi dans une réalité plus grande — qui dépasse justement le
quotidien.
1. Jn2,4. (N.d.T.)
La religieuse Faustyna Kowalska, canonisée par
Jean-Paul II, a entendu voici environ quatre-vingts ans les mots de Jésus
dans une vision : « Tu vas préparer le monde à mon retour définitif. »
Faut-il prendre cela au sérieux ?
Si l'on prenait ça dans un sens chronologique, afin de nous pourvoir
immédiatement pour le retour du Messie, si je puis dire, on se tromperait.
Si on le conçoit dans le sens spirituel que je viens de donner, dans l'idée
que le Seigneur est celui qui vient et que nous nous préparons donc toujours
à la venue définitive, justement lorsque nous allons vers Sa miséricorde et
nous laissons nous-mêmes modeler par Lui, alors c'est exact. Se laisser
modeler par la miséricorde de Dieu, comme contre-pouvoir à l'absence de
miséricorde du monde, c'est en quelque sorte la préparation du moment où
Lui-même viendra avec sa miséricorde.
Je voudrais revenir une fois encore sur ce point.
Dans l'unique livre prophétique du Nouveau Testament, la « Révélation
secrète de Jean » (le nom que l'on donne en allemand à l'Apocalypse selon
saint Jean), que l'on comprend comme un message de joie, est centrée sur
tout, sauf sur la deuxième apparition du Christ. Les érudits de la Bible,
les moines et les astronomes de l'époque de Jésus s'étaient déjà mis à
travailler au calcul du moment où arriverait le Messie.
Le scientifique allemand Rudiger Holinski croit avoir établi que les sept
lettres aux Églises mentionnées dans l'Apocalypse ne sont pas des lettres
destinées à sept lieux différents, mais des codes désignant les époques qui
se succéderont dans l'histoire de l'Église. Ainsi, le nom de la septième et
dernière communauté, Laodicée (terme qui signifie « le droit du peuple »),
symboliserait un soulèvement général et la pression pour avoir sa part dans
l'action. Le « septième sceau » parallèle désignerait une époque
caractérisée par les angoisses, les dépressions, les faux enseignants
religieux et les nouvelles religions, une époque où les œuvres ne sont ni
froides, ni chaudes.
Quoi qu'il en soit, le monde est aujourd'hui plus menacé qu'il ne l'a jamais
été. Dans de nombreux domaines — et nous en avons déjà parlé ici —, la
dévastation de la planète où nous vivons a atteint le point de non-retour.
Des transformations dramatiques ont touché la situation de la foi. La
conscience de la foi se tarit, il faut fermer des églises, une dictature
d'opinion antichrétienne agit d'une manière qui n'est plus seulement
subtile, mais ouvertement agressive. À cela s'ajoute le fait que l'homme
s'en prend désormais au dernier tabou biblique, « l'arbre de la vie », la
manipulation et la production de la vie elle-même.
Est-ce ce constat qui vous a incité à souligner, dans votre livre sur Jésus,
(Jésus
de Nazareth) que l'on devrait notamment appliquer les mots de Jésus sur
le Jugement dernier à notre situation actuelle ?
Je suis sceptique face à ce genre d'interprétation. L'Apocalypse est un
livre mystérieux, et il a de nombreuses dimensions. Ce que dit l'interprète
en question est-il l'une de ces dimensions ? Je laisserais la question en
suspens. En tout cas, l'Apocalypse ne fournit pas de schéma qui permettrait
de calculer une date. Ce qui est frappant, en lui, c'est précisément qu'au
moment où l'on croit être arrivé à la fin, tout repart du début. Cela
signifie que l'Apocalypse reflète de manière mystérieuse la poursuite des
tourments sans nous dire en même temps quand viendra une réponse, quelle
sera sa précision, ni quand et comment le Seigneur se montrera à nous.
Ce n'est pas un livre qui se prête aux calculs chronologiques. L'important,
c'est que chaque époque se place à proximité du Seigneur. Que nous,
justement, ici et aujourd'hui, nous nous trouvions devant le Tribunal du
Seigneur et nous fassions juger par Son Tribunal. Alors que l'on parlait
jusqu'alors d'une deuxième venue du Christ — une fois à Bethléem, la
deuxième fois à la fin des temps —, saint Bernard de Clairvaux a parlé d'un
Adventus médius, une venue intermédiaire par laquelle II refait
régulièrement son entrée dans l'Histoire.
Je crois qu'en prononçant ces mots, il a trouvé le ton juste. Nous ne
pouvons pas définir le moment où le monde va à sa fin. Le Christ lui-même
dit que personne ne le sait, pas même le Fils. Mais nous devons pour ainsi
dire nous tenir en permanence à proximité de sa venue — et être certain,
notamment lorsque nous sommes en proie aux tourments, qu'il est près de
nous. Nous devrions en même temps savoir, pour ce qui concerne nos actes,
que nous nous trouvons sous le coup du Jugement dernier.
Nous ne savons pas quand cela se passera, mais nous
savons par l'Évangile que cela se passera. « Quand le Fils de l'homme
viendra dans sa gloire, escorté de tous les anges, alors il prendra place
sur son trône de gloire », lit-on chez Matthieu1
Il séparera l'humanité comme un berger sépare les brebis et les
boucs. Aux uns, II dira : « Recevez le Royaume qui vous a été préparé depuis
la fondation du monde. » Mais aux autres : « Allez loin de moi, maudits2.
»
Jean souligne encore l'absence d'ambiguïté de ces mises en garde : « Je suis
la lumière du monde ; qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres3.
» II existe encore beaucoup de termes du même ordre, qui renvoient au
Tribunal. Tout cela n'a-t-il qu'une portée symbolique ?
Bien sûr que non. C'est bel et bien un Jugement
dernier qui aura lieu ici. Disons que l'avant-dernier jugement a déjà lieu
au cours de la mort. Le grand scénario que dessine surtout Matthieu 25, avec
les brebis et les boucs, est une métaphore de l'inconcevable. Nous ne
pouvons pas nous représenter ce processus inouï ; que tout le cosmos se
retrouve devant le Seigneur, que toute l'Histoire se tienne devant lui. Il
faut l'exprimer sous forme d'images qui nous permettent d'en avoir un
pressentiment. La manière dont cela se présentera visuellement échappe à
notre imagination.
Mais que lui est le juge, qu'un véritable Jugement aura lieu, qu'il va
séparer l'humanité et qu'il existe aussi une possibilité de rejet, que les
choses ne sont pas indifférentes, cela est très important. Aujourd'hui, les
gens tendent à dire, allons, ça ne sera pas aussi grave que ça. À la fin
Dieu ne peut pas être comme cela. Non. Il tient compte de nous. Et
l'existence du mal demeure et il doit être condamné. Dans cette mesure, avec
toute la joyeuse reconnaissance que nous inspire le fait que Dieu est bon et
qu'il nous accorde sa grâce, nous devrions aussi percevoir et inscrire dans
le programme de notre vie la gravité du mal, que nous avons vue sous le
nazisme, et que nous voyons aussi aujourd'hui tout autour de nous.
1. Mt 25,31.
2. Mt 25,41. (N.d.T.)
3. Jn 8,12.
Il y a quatorze ans, je vous demandais si cela
valait seulement encore la peine d'embarquer à bord de l'Église, ce bateau
qui paraît déjà un peu affecté par les faiblesses de l'âge. Il faut demander
aujourd'hui si ce navire ne ressemble pas de plus en plus à une arche de
Noé. Qu'en dit le pape ? Pouvez-vous encore nous sauver par nos propres
forces, sur cette planète ?
Par ses propres forces, l'homme ne peut de toute façon pas maîtriser
l'histoire. Que l'homme soit en péril et qu'il mette le monde en danger, on
en a aussi aujourd'hui des preuves scientifiques. Il ne peut être sauvé que
si les forces morales grandissent dans son cœur ; des forces qui ne peuvent
venir que de la rencontre avec Dieu ; des forces qui résistent. Dans cette
mesure, nous avons besoin de Lui, l'Autre, qui nous aide à être ce que nous
ne pouvons être nous-mêmes ; et nous avons besoin du Christ, qui nous
rassemble au sein d'une communauté que nous appelons l'Église.
D'après l'Évangile selon saint Jean, Jésus dit, à
un moment décisif, qu'il s'agit de la mission confiée par Son Père : « Et je
sais que son commandement est vie éternelle1.
» Est-ce pour cela que Jésus est venu dans le monde ?
Sans aucun doute. C'est de cela qu'il s'agit. Que nous
devenions capables de Dieu, pour pouvoir ainsi entrer dans la vie véritable,
dans la vie éternelle. Il est effectivement venu pour que nous connaissions
la vérité. Pour que nous puissions toucher Dieu. Pour que la porte nous soit
ouverte. Pour que nous trouvions la vie, la vie véritable, celle qui n'est
plus soumise à la mort.
1. Jn 12,50. (N.d.T.)
►
Lumière du Monde
Sources : www.vatican.va
-
E.S.M.
Ce document est destiné à l'information; il ne
constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 01.11.2014
|