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19 Avril 2005
 

Du Concile de Trente au Concile de Vatican II

 

 Les ministères ordonnés

J'ose faire un rapprochement avec les quatre textes les plus importants du Concile de Vatican II, à savoir les Constitutions Lumen Gentium, Dei Verbum, Sacrosanctum Concilium, Gaudium et Spes. Lumen Gentium), qui proclame la Parole Dei Verbum), qui s'offre et intercède auprès de son Père Sacrosanctum Concilium), qui est le premier Missionnaire et envoie son Eglise dans le monde (Gaudium et Spes).

Mgr Raymon Bouchex, Archevêque d'Avignon

Avant propos: Les quelque titres ci-dessous reflètent, l'intention du Saint-Père de nous remettre Vatican II "bien en mémoire". Nous avons pensé que c'était une bonne occasion pour survoler 450 ans d'histoire de l'Eglise catholique. Mgr Raymon Bouchex, nous en donne l'occasion. C'est un vibrant hommage à la fonction sacerdotale

Benoît XVI le 30 octobre: La majeure partie des documents conciliaires méritent d’être rappelés, parce qu’ils conservent leur valeur et qu’ils révèlent une actualité qui, sous certains aspects, s’est accrue.

Le 22 décembre, le pape Benoît XVI a entrepris une réflexion sur le Concile à 40 ans de sa conclusion, se demandant quels étaient les résultats de cet événement, et comment il a été reçu.

Une juste interprétation du concile Vatican II en fait une "grande force de renouveau"  pour l’Eglise catholique, explique le pape Benoît XVI.

Le 6 novembre: ce dimanche, le pape a évoqué la constitution « DEI VERBUM », sur la Révélation, « l’un des piliers de tout l’édifice conciliaire », dira Benoît XVI.

Le 29 novembre: Propos du pape Benoît XVI: "je voudrais rappeler aujourd’hui également la Constitution du Concile Vatican II "Gaudium et spes" sur l’Eglise dans le monde de ce temps : il s’agit d’un texte profondément empreint d’espérance chrétienne.


Voici cette conférence:

Les ministères ordonnés

Du Concile de Trente et au Concile de Vatican II

Mgr Raymon Bouchex, Archevêque d'Avignon

 

Table des matières

I - Evêques et prêtres (et diacres) dans le Concile de Trente
II- Evêques, prêtres (et diacres) dans le Concile de Vatican II

1 - Dans "le Mystère de l'Eglise"
2 - Ministres (signes et serviteurs) du Christ Tête construisant son Corps
3 - Dans la succession apostolique
4 - Institués dans l'appel et l'envoi des apôtres
5 - Par un sacrement
6 - Consacrés dans leur personne.
7 - Dans la collégialité des évêques et l'unité du presbyterium
8 - Consacrés pour la Mission
9 - Au service des autres membres de l'Eglise
10 - Quelques conséquences pour les évêques et les prêtres
Conclusion

Introduction

Le sujet est immense . Je vais me contenter de relever les grands traits des données du concile de Trente et du concile de Vatican II, en ce qui concerne les évêques, les prêtres, et plus brièvement les diacres.

Remarques: Quelques remarques préalables sont nécessaires.

- Les conciles ne nous disent pas tout de la vie et de la théologie de l'Eglise, donc de ceux qui dans l'Eglise sont évêques, prêtres et diacres. Ils sont des moments forts de cette vie et de cette théologie, soit pour réaffirmer la foi de l'Église catholique à l'encontre d'erreurs - c'est le cas du concile de Trente -, soit pour permettre à l'Eglise de mieux se préciser et vivre sa mission dans le contexte particulier d'une époque donnée - c'est le cas du concile de Vatican II. Pour avoir une idée plus complète des ministres ordonnés, y compris au moment du concile de Trente et après le concile de Trente, nous devrons élargir notre champ de vision en direction des décrets de réforme qui suit ses affirmations et ses condamnations dogmatiques, et en direction de la manière dont les évêques et les prêtres ont vécu leur ministère.

- Les conciles ne sont pas un commencement absolu dans la vie de l'Église, donc dans la conception et la vie des évêques et des prêtres. Le concile de Vatican Il a été un point d'aboutissement autant qu'un nouveau commencement. Il en est de même du concile de Trente. Il a été un nouvel élan donné à la Réforme catholique. Mais cette Réforme catholique était commencée avant lui. Il n'a pu avoir lieu que parce que la Réforme catholique était ressentie comme nécessaire et parce que des catholiques avaient commencé ce mouvement de Réform.

- Enfin, il ne faut jamais opposer les conciles entre eux. C'est vrai du concile de Trente et du Concile de Vatican Il. Vatican II n'a pas désapprouvé, encore moins renié, Trente. Il a repris ce que Trente avait affirmé et fait pour le remettre dans un cadre plus large, plus précisément dans une vision de l'Église, non pas nouvelle, mais retrouvée dans sa richesse, celle qui est présentée dans Lumen Gentium, et en d'autres textes comme Sacrosanctum Concilium, Gaudium et Spes , Unitatis redintegratio, Ad Gentes.

 

I- Evêques et prêtres (et diacres)
dans le Concile de Trente

Il ne m'appartient pas de présenter l'histoire longue et mouvementée du Concile de Trente. Il suffit de savoir qu'il a duré 18 ans, du 13 décembre 1545 au 4 décembre 1563 . C'est à la 23 ème session (15 juillet 1563), avant dernière du concile, que furent votés la doctrine, les canons et les décrets de réforme sur les ministères, sous le titre: " Doctrine véritable et catholique sur le sacrement de l'ordre pour condamner les erreurs de notre temps ". Le texte comporte 4 chapitres dogmatiques, 8 canons de condamnation, 18 canons des décrets de réforme.

Le titre dit bien l'objectif des Pères du concile de Trente concernant les ministères ordonnés. Leur objectif a été d'affirmer la foi catholique mise en cause par les Protestants, Luther en particulier. Cela explique le caractère limité de leurs déclarations. Ils n'ont pas voulu faire une présentation globale du mystère de l'Eglise et des ministères, mais réfuter point par point les positions principales des Protestants. Je les résume ainsi :

- Le concile ne parle pas de presbytéral, mais toujours de sacerdoce . Les protestants disaient qu'il n'y a qu'un seul sacerdoce, le sacerdoce commun des fidèles, que tous sont égaux dans le sacerdoce, que tout autre sacerdoce est une invention humaine. Le concile ne nie pas le sacerdoce commun. Il l'affirme implicitement en disant qu'il existe de par la volonté du Christ un autre sacerdoce, le sacerdoce des évêques et des prêtres. C'est donc une grave erreur de penser et d'enseigner qu'il n'y a pas de ministres ordonnés pour consacrer l'Eucharistie et remettre les péchés (session 23, ch. 4; can. 1).

- En opposition avec les positions protestantes qui ne reconnaissaient que deux sacrements et pour qui le ministère pastoral n'était pas un sacrement, mais une invention imaginée par des hommes ou un simple rite députant des hommes à la prédication et à l'administration des sacrements, le concile affirme que ce sacerdoce est un véritable sacrement. Il constitue le sacrement de l'ordre. Ce sacrement confère un caractère, ce qui veut dire que, contrairement a ce que disaient les protestants, un prêtre ne peut pas l'être à durée déterminée et redevenir laïc. Ce sacrement est donné par les évêques grâce à l'imposition des mains (session 23, ch. 3-4; can. 3 et 4).

- Le concile définit surtout le sacrement de l'Ordre par rapport à l'Eucharistie (et le sacrement de Pénitence). L'Eucharistie a tenu une grande place dans le concile. Plusieurs sessions lui ont été consacrées: la 13 ème (11 octobre 1551), la 21 ème (16 juillet 1562), la 22 ème 17 septembre 1562). Ces deux dernières précèdent immédiatement la session sur le sacrement de l'Ordre. Si l'Eucharistie (comme aussi la Pénitence) a une telle place, c'est qu'elle était gravement remise en cause par les Protestants en particulier en ce qui concerne son caractère sacrificiel, le culte eucharistique, et le fait que seuls les prêtres peuvent la consacrer et la présider.

En outre les protestants affirmaient que le seul ministère essentiel est l'annonce de la Parole et qu'il cesse si les pasteurs n'annoncent pas la Parole. C'est pourquoi, le sacerdoce des prêtres est présenté à partir de l'Eucharistie et justifié par son rôle vis-à-vis de l'Eucharistie. "Comme l'Eglise catholique a reçu dans le Nouveau Testament, par une institution du Seigneur, le saint sacrifice visible de l'Eucharistie, il faut aussi reconnaître qu'il y a en elle un nouveau sacerdoce, visible et extérieur, dans lequel est passé l'ancien sacerdoce" (session 23, chap. 1).

- Dès lors, c'est en instituant l'Eucharistie que le Christ a institué le sacerdoce des apôtres et de leurs successeurs. Il y a bien la succession apostolique, mais vue comme une succession "dans le sacerdoce" (cf. aussi session 22, chap. 1, où cela est affirmé avec encore plus de force).

- Cela nous permet de voir comment le concile conçoit le lien des évêques aux prêtres. Le concile a deux façons de parler de la succession apostolique. D'une part, elle est présentée comme passant par le sacerdoce capable d'offrir le sacrifice eucharistique. De ce point de vue, il n'y a pas de différence entre les prêtres et les évêques. La succession passe immédiatement des apôtres à leurs successeurs "dans le sacerdoce", c'est-à-dire à ceux qui ont le pouvoir sur l'Eucharistie.

D'autre part le concile affirme d'une façon générale que les évêques sont les successeurs des apôtres, mais dans l'ordre de la juridiction. Cette double affirmation vient de ce que le concile de Trente n'a pas tranché, car cela n'entrait pas dans sa perspective, la question discutée par les théologiens sur le caractère sacramentel de l'épiscopat. L'épiscopat fait-il partie du sacrement de l'ordre ? Le concile affirme qu'il y a un ordre hiérarchique, institué par le Christ, composé "d'évêques, de prêtres et de ministres". Mais il n'est pas question là de sacrement de l'ordre.

Dans cet ordre hiérarchique, il faut le souligner, le concile place les diacres. "La Sainte Ecriture ne fait pas clairement mention des prêtres seulement, mais aussi des diacres; elle enseigne par les expressions les plus graves, ce à quoi il faut être attentif en ordonnant ceux-ci". Le concile évoque aussi "plusieurs ordres différents de ministères" au service du sacerdoce, et conduisant au sacerdoce, depuis la tonsure, jusqu'aux ordres majeurs en passant par les ordres mineurs (can. 2 et 6).

Dans cet ordre hiérarchique le concile place les évêques "à titre principal". Ils sont les successeurs des apôtres, mais dans le registre du gouvernement. De ce point de vue ils sont supérieurs aux prêtres, et certaines tâches leur sont propres : l'ordination, la confirmation, et d'autres fonctions que ne peuvent pas exercer les autres ministres (session 23, ch. 4; can. 7).

(Veuillez nous excuser, il manque un §)

Il faut en même temps tenir compte de deux choses. D'une part, les suites du Concile ont créé peu à peu une conscience commune chez les prêtres des siècles qui ont suivi, y compris en notre siècle. La Réforme que le Concile de Trente n'a pas lancée, mais qu'il a relayée, a produit des figures admirables de prêtres, non pas d'abord par les textes eux-mêmes, que sans doute beaucoup de prêtres n'ont pas lus, comme d'ailleurs beaucoup de prêtres d'aujourd'hui n'ont pas lu les textes de Vatican II, mais par la mise en œuvre du concile et toutes les initiatives auxquelles il a donné lieu .

D'autre part les données du Concile de Trente sur le sacrement de l'Ordre, comme sur d'autres questions, ne se sont pas réduites aux affirmations et condamnations dogmatiques. Ces affirmations et condamnations ont été accompagnées des 18 canons "super reformatione", des décrets de réforme. Le ministère apparaît en eux comme débordant la célébration de l'Eucharistie et de la Pénitence. Ce que ces canons visent à développer, c'est la dimension pastorale du ministère des prêtres et des évêques. L'historien Marc VENARD, en conclusion de sa présentation du concile de Trente dans "Les Conciles œcuméniques. L'histoire" (Le Cerf), écrit: "Certes, l'assemblée de Trente ne chercha pas à aller au devant du protestantisme, elle eut pour souci majeur de répondre à des négations et conserva jusqu'au bout une mentalité de ville assiégée. Mais, le constat de rupture étant établi, elle donna à ceux qui restaient fidèles à Rome ce à quoi aspiraient tous les chrétiens d'Occident, au début des temps modernes: un catéchisme et des pasteurs " (p. 335).

C'est bien des pasteurs que chercha à susciter le Concile dans ses canons de réforme. Je cite quelques exemples : Ceux à qui a été confiée la charge des âmes doivent connaître leurs brebis, offrir pour elles le sacrifice, les nourrir par la prédication de la Parole de Dieu, par l'administration des sacrements, par l'exemple de toutes les bonnes œuvres, par le soin paternel des pauvres et des autres personnes dans le malheur, par l'attention à donner aux autres charges pastorales. Pour cela, ils doivent faire paître et gouverner le troupeau dans le jugement et la vérité et s'en faire les modèles. Cela exige le devoir de résidence pour laquelle des normes sont données. Ces canons insistent sur la nécessité de bien choisir ceux qui se destinent aux ordres mineurs puis majeurs. Des règles sont données pour les ordinations, pour l'instruction et la formation pastorale, pour l'âge des ordinands, pour le refus des prêtres vagabonds.

Et l'une des grandes initiatives de Trente a été la fondation des Séminaires, pour lesquels les canons de réforme fixent des règles précises. Il faut aussi mentionner la publication du " Catéchisme romain " (dit catéchisme du concile de Trente), demandé par le Concile, dont les historiens du catéchisme reconnaissent la valeur. Marc VENARD dit de cet ouvrage: "On peut dire sans exagération que le Catéchisme romain constitue le canal principal par lequel le concile de Trente a atteint la masse des catholiques" (p. 325). Or ce Catéchisme a été fait essentiellement pour les prêtres et a été l'instrument de base dont des générations de prêtres se sont servis.

Pour être complet sur l'influence du concile de Trente, il faudrait parcourir la période qui va du concile de Trente aux décennies qui ont précédé le concile de Vatican II, en passant par les éducateurs du clergé qu'ont été Saint Vincent de Paul et les Prêtres de la Mission, Saint François de Sales, la Compagnie de Saint Sulpice et l'École Française, les Eudistes, et combien d'autres, qui ont marqué, non seulement la France, mais le monde catholique tout entier. Notons en particulier l'apport de l'École française, pour qui la source du sacerdoce n'est pas seulement la Cène, mais l'Être de Jésus Christ lui-même, son Union Hypostatique. Une insistance très forte est mise sur l'identification du prêtre au Christ, et donc sur la sainteté du prêtre.

Bien sûr des formules demandent à être bien comprises comme "le prêtre, Religieux de Dieu", "le prêtre autre Christ" (alter Christus), le "sacerdos in aeternum". Mais nous ne pouvons oublier le saint Curé d'Ars, les curés à la fois amoureux de l'Eucharistie et proches des gens, même des plus pauvres, le Père Chevrier et "le véritable disciple", Frère Charles de Jésus et l'adoration de l'Eucharistie en pays touareg, les prêtres sociaux, les fondateurs de la JOC et les premiers aumôniers d'action catholique. Ils étaient toujours les prêtres du concile de Trente, centrés sur l'Eucharistie et sur la célébration de la Messe, ce dont témoignent les images d'ordination et les Premières Messes plus solennelles que le sacre des évêques (c'est encore parfois le cas aujourd'hui), mais faisant éclater le vêtement tridentin pour devenir de plus en plus missionnaires et pasteurs dans les sociétés contemporaines.

Le fait de relier étroitement les prêtres et l'Eucharistie a été très mobilisateur pour les vocations . Le prêtre est l'homme de l'Eucharistie. Cela donnait un visage vivant et un modèle tangible de prêtre facile à présenter et capable d'attirer des jeunes. Nous savons l'importance de modèles pour toucher et appeler des enfants et des jeunes . Ce qui rend souvent difficile aujourd'hui la pastorale des vocations, c'est justement la difficulté à présenter une définition claire et un modèle concret de prêtres.

De toute façon, il y a dans le prêtre du concile de Trente quelque chose qui fait partie intégrante du ministère et de la vie des prêtres, que le Concile de Vatican II n'a pas renié et rejeté, mais qu'il a intégré dans une vision plus vaste de l'Eglise, parce qu'il s'est donné comme objectif, non de condamner des erreurs, mais de prendre conscience à la fois de ce qui est le cœur de l'Eglise et de sa présence missionnaire dans le monde.

II- Evêques, prêtres (et diacres)
dans le Concile de Vatican II

Comme le concile de Trente, le Concile de Vatican II n'a pas été un commencement absolu. Il a été préparé par la vie de l'Eglise et les générations de prêtres qui l'ont précédé. Il a été lentement engendré par les études bibliques, liturgiques, patristiques, théologiques, par les initiatives missionnaires et pastorales des décennies précédentes, par les interventions de la Hiérarchie elle-même. N'oublions pas le rôle de Pie XII dans cette évolution. Citons à titre d'exemples: l'encyclique sur le Corps Mystique ( Mystici Corporis ), la réforme liturgique qu'il a commencée, ainsi la vigile pascale, l'encyclique Fidei Donum, ses orientations sur les études bibliques, etc.

En ce qui concerne le ministère des évêques et des prêtres, il y a eu comme un lent passage du Concile de Trente au Concile de Vatican II. Entre les deux conciles, il ne faut pas imaginer une rupture et une transition brusque. Les Conciles successifs ne s'annulent pas, mais s'enrichissent mutuellement. Ainsi dans le n° 1 de L.G., Vatican II déclare qu'il procède "en suivant de près l'enseignement des précédents conciles". Nombreuses sont les notes renvoyant au Concile de Trente. Je vous laisse le soin de les découvrir en lisant les textes.

Mon propos est de montrer à la fois ce que le Concile de Vatican II a apporté de nouveau et ce qu'il a assumé du Concile de Trente. Il sera sans cesse question des évêques et des prêtres, puisque les prêtres sont ce que sont les évêques , mais d'une manière seconde ou subordonnée ( in subordinato gradu , comme le répète P.O.). Je dirai aussi un mot des diacres pour les situer dans l'ensemble des ministères ordonnés.

1. Dans "le Mystère de l'Eglise"

Le Concile de Trente n'a pas parlé des évêques, des prêtres et des diacres en les situant explicitement dans l'ensemble de l'Eglise. Il est pourtant évident que l'Eglise n'était pas absente de la perspective du concile. Par exemple, et c'est important, il a évoqué le sacerdoce des fidèles, même si c'est pour dire qu'il ne remplace pas le sacerdoce propre des prêtres. Ce qui était en cause dans la Réforme protestante, c'était surtout la constitution hiérarchique de l'Eglise. Le Concile de Vatican II au contraire, à la suite des recherches dont j'ai parlé plus haut, à cause des questions qui étaient posées à l'Eglise et que l'Eglise se posait à elle-même sous l'influence de l'œcuménisme, de la rencontre des autres religions, de la situation du monde contemporain, a voulu mener une réflexion de fond sur l'Eglise.

Sa réflexion sur les ministères ordonnés est à situer dans "le Mystère de l'Église". C'est le titre et le contenu du premier chapitre de la Constitution sur l'Eglise. Cette vision du Mystère donne son sens à toute la Constitution. Celle-ci débute en se référant aux chapitres l er de la lettre aux Colossiens et de la lettre aux Ephésiens où il est question du "Mystère de la volonté" de Dieu (Col 1, 24-29; Ep 1, 3-14).

Le Mystère, c'est le dessein libre et caché que Dieu a dévoilé en le réalisant peu à peu par la création, par l'histoire du peuple d'Israël, définitivement par le Christ dans sa mort, sa résurrection et le don de l'Esprit Saint. "Le Mystère", c'est le Christ au milieu de nous (Col 1, 27), le Christ en qui s'est approché et rendu présent "le mystère du Royaume" (Mc 4, 11 :à propos des paraboles), en qui tous les hommes sont appelés au même héritage (Ep 3, 1-21). "Il est grand le Mystère de la piété ; c'est le Christ manifesté dans la chair, justifié par l'Esprit, apparu aux anges, proclamé dans les nations, cru dans le monde, enlevé dans la gloire" (1 Tm 3, 16). Ce Mystère inclut la relation de l'Eglise au Christ (cf. Ep 5, 32 : "ce Mystère est grand : je le dis en pensant au Christ et à l'Eglise"). Le concile peut écrire : "l'Eglise, qui est le Règne du Christ déjà présent en Mystère, croît dans le monde de façon visible sous l'effet de la puissance de Dieu" (n° 2-3).

Cette Église, en qui est commencé et est appelé à se développer, grâce au don de l'Esprit, le Mystère, est présentée dans le Nouveau Testament sous différentes figures. Celle sur laquelle s'étend le plus L.G. est celle du corps du Christ (tout le n° 7). Certes le chapitre 2 est centré sur le Peuple de Dieu. Mais l'originalité de ce Peuple et tout ce qui le définit viennent de ce qu'il est le Corps du Christ. "En effet, communiquant son Esprit à ses frères qu'il a appelés de toutes les nations en les rassemblant, il a fait d'eux, mystiquement (= en Mystère), son Corps". La figure du corps est immédiatement rattachée aux sacrements. Par les sacrements qui la rattachent au Corps, c'est-à-dire à la personne du Christ souffrant et glorifié, l'Eglise devient son corps dans le monde : sa présence visible, sa voix, ses gestes...

L'Eglise Corps du Christ est une réalité sacramentelle ( musterion devient en latin sacramentum ). Car elle est faite par le baptême (1 Co 12, 13), et surtout par l'Eucharistie (1 Co 10, 17 ; 12, 27). Ainsi devient-elle un corps aux membres divers, parmi lesquels le premier rang revient par grâce aux apôtres. Et bien sûr, "de ce corps le Christ est la Tête... Il est la tête du corps qu'est l'Eglise... Encore en pèlerinage sur cette terre, marchant sur ses traces dans la tribulation et la persécution, nous sommes associés à ses souffrances comme le corps à la Tête, souffrant avec lui afin d'être glorifiés avec lui (cf. Rm 8, 17) (L.G. 7)". Cette réalité de Tête est tellement fondamentale que le Christ est dit : "Tête du Peuple nouveau et universel des fils de Dieu" (L.G. 13).

"C'est de lui que le corps tout entier, grâce aux articulations et jointures qui le desservent et le renforcent, tire son accroissement en Dieu (Col 2, 19). C'est lui qui distribue sans cesse dans son Corps, c'est-à-dire dans l'Eglise, les dons des ministères par lesquels, grâce à sa vertu, nous nous rendons mutuellement des services en vue du salut, de façon à ce que, faisant la vérité dans la charité, nous puissions grandir en toutes choses vers celui qui est notre tête (cf. Ep 4, 11-16) (L.G. 7)".

L'Église Corps du Christ est une réalité sacramentelle en un autre sens. Le Père a envoyé le Christ, pour être le sacrement de l'union des hommes avec Dieu en étant Dieu et homme. Il a, dans l'engendrement filial qu'a été la résurrection, engendré l'Eglise comme le corps du Christ dans le monde. De ce corps, le Christ est la Tête, car c'est lui qui la construit d'une manière à la fois visible et invisible par la Parole qu'il est lui-même, par les sacrements qui sont ses gestes de salut continués, et par les apôtres et leurs successeurs qui sont sa présence visible et ses serviteurs indispensables pour que l'Eglise soit bien son corps visible dans le monde.

C'est pourquoi dans le n° 8, qui suit le long passage sur l'Eglise corps du Christ, le concile présente l'Eglise comme un "organisme visible", qui fait partie de son mystère, qui est une dimension fondamentale de son être de corps du Christ. Il dit même : "en vertu d'une analogie non sans valeur, (l'Eglise) entretient un rapport de similitude avec le mystère (remarquer le mot) du Verbe incarné... L'organisme social de l'Eglise est au service de l'Esprit du Christ, qui le vivifie, en vue de la croissance du corps (cf. Ep 4, 16)".

L'Eglise est corps du Christ, en étant dans le monde la présence et la servante du Mystère du Christ, c'est-à-dire de son corps mort et glorifié. En ce sens, elle est sacrement, comme le dit le concile dès le début de L.G. : "Elle est, dans le Christ, en quelque sorte le sacrement, c'est-à-dire le signe et l'instrument de l'union intime avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain" (n° 1). L'être de l'Eglise est "mystérique", "mystique", au sens premier de ces mots, comme dans l'expression "corps mystique", c'est-à-dire le signe et la présence agissante du Christ qui est le Mystère, la pleine réalisation et révélation du Dessein trinitaire. L'Eglise est le corps du Christ, c'est-à-dire la réalisation terrestre et la forme visible de la communion trinitaire que le Père communique aux hommes par le Christ dans l'Esprit.

Tout dans l'être et l'agir de l'Eglise doit être compris et vécu à la lumière du Corps du Christ. Les sacrements, qui sont les gestes que le Christ Tête continue à faire pour guérir, pardonner, nourrir, consacrer. Le service de la Parole et de la foi qui est l'actualisation de la Parole devenue chair afin de faire connaître le Père et son dessein d'amour et de salut. L'autorité et le pouvoir (cf. Mt 28, 19) du Christ Tête, Seigneur et Pasteur, qui continue à guider et rassembler son Corps.

C'est à l'intérieur du Mystère de l'Eglise, qui est le Corps du Christ, que le concile nous invite à situer les évêques, les prêtres et les diacres pour comprendre ce qu'ils sont et ce qu'ils ont à faire. Ils sont les " intendants des mystères de Dieu" (1 Co 4, 1 ), c'est-à-dire du Christ et de ses actes de salut. Il faut relire à cette lumière L.G., spécialement les chapitres 2 et 3, Presbyterorum ordinis, Christus Dominus, et bien d'autres textes. Dans presque tous les documents de ce concile, il est question de l'Eglise, de ses membres et de ses ministres, ce qui rend difficile le repérage des textes qu'il faudrait citer.

2- Ministres (signes et serviteurs) du Christ Tête construisant son Corps

"Le Christ Seigneur, pour paître le Peuple de Dieu et l'accroître sans cesse, a institué dans son Église des ministres variés qui visent au bien de tout le corps" (L.G. 18). " Ainsi donc en la personne des évêques, assistés des prêtres, le Seigneur Jésus, Pontife suprême, est présent au milieu des croyants" (L.G. 21). Le sacrement fait que "d'une façon éminente et visible, (les évêques) jouent le rôle du Christ lui-même, Maître, Pasteur et Pontife, et agissent en sa personne" (L.G. 21). Le sacerdoce des prêtres est "conféré au moyen de ce sacrement particulier qui, par l'onction du Saint Esprit, marque les prêtres d'un caractère spécial et les configure au Christ prêtre, de façon à ce qu'ils soient capables d'agir au nom du Christ Tête ( in persona Christi capitis )" (P.O., n° 2).

Qu'est-ce qui fait l'originalité spécifique et la nécessité irremplaçable des Ministres ordonnés? Le Concile de Trente mettait cette originalité et cette nécessité dans la nécessité qu'il y ait un sacerdoce "extérieur et visible" pour célébrer le sacrifice eucharistique. Avec ses mots à lui, tributaires de son insistance sur le ministère eucharistique qu'il défendait contre les Protestants, il situait bien le rôle des évêques et des prêtres dans le ministère de l'Eucharistie.

Car leur originalité et leur nécessité, je les résume en disant: les prêtres sont indispensables pour qu'il y ait Corps du Christ, donc Peuple de Dieu. Ils sont indispensables pour manifester et servir l'initiative et la gratuité de la grâce du Christ. Ils sont comme les sacrements, les symboles réels, les ministres du Christ source de la vie et de l'unité de son Corps. Il faut relire en ce sens le chapitre III de Lumen Gentium (par exemple n° 18) et d'une façon plus précise encore le chapitre 1 du Décret sur le ministère et la vie des prêtres (P. 0. n° 2).

Qu'en est-il des diacres dans cette perspective des évêques et des prêtres comme sacrements du Christ Tête ? Bien que la chose ne soit pas dite dans le concile, je suggère ceci : les diacres manifestent que le Christ a été et demeure Tête de l'Eglise en étant serviteur de Dieu, jusqu'à la mort et à la mort de la croix. Le diaconat manifeste ce caractère humilié, humble, pauvre de la Seigneurie du Christ. Il montre sans cesse que les ministères, tous les ministères, sont sacrements d'une Tête qui a été couronnée d'épines, frappée, méprisée, mise à mort. Les diacres sont appelés à manifester cela dans toutes les tâches de l'Eglise.

3- Dans la succession apostolique.

Le concile de Trente affirmait que les évêques et les prêtres étaient les successeurs des apôtres "dans le sacerdoce". Les prêtres étaient reliés directement aux apôtres, puisque l'essentiel de leur ministère était l'Eucharistie et qu'ainsi il n'y avait aucune différence entre évêques et prêtres. En outre l'épiscopat n'était pas clairement présenté comme faisant partie du sacrement de l'ordre. Le Concile de Vatican Il affirme que la succession apostolique va des apôtres aux évêques et par eux à leurs collaborateurs les prêtres et les diacres.

Cette affirmation de la succession apostolique des évêques et, par eux, des prêtres et des diacres se trouve développée en L.G. 20 : tout le paragraphe est à lire. En note, il est renvoyé au concile de Trente, session 23. Voici un passage du n° 20. Les apôtres "" (L.G. 20). instituèrent donc des hommes de ce genre et disposèrent ensuite qu'après leur mort, d'autres hommes éprouvés recueilleraient leur ministère. Parmi les divers ministères qui s'exercent dans l'Eglise depuis les premiers temps, le premier rang, au témoignage de la Tradition, est occupé par la charge de ceux qui, établis dans l'épiscopat, en vertu d'une succession qui remonte jusqu'aux origines, possèdent la bouture provenant de la semence apostolique.

Le concile dit nettement que les diacres sont aussi collaborateurs des évêques (L.G. 20). Au titre de leur ministère humble, les diacres font partie de cette succession apostolique qui doit être toujours à l'image de Celui que cette succession est appelée à servir.

4- Institués dans l'appel et l'envoi des apôtres

Le Concile de Trente mettait l'institution du sacerdoce des apôtres et de leurs successeurs dans le sacerdoce lors de la Cène célébrée le Jeudi Saint. Il y a là quelque chose de juste. En ce qui concerne le ministère de l'Eucharistie, c'est bien à la Cène que sont institués ceux qui devront continuer à la présider et à la consacrer (le concile de Vatican II le dit après le concile de Trente). Mais le ministère des évêques, des prêtres et des diacres est plus large que celui de la célébration eucharistique. Il concerne tout ce qui constitue le Corps du Christ. Son institution se situe dans l'appel et l'envoi des apôtres.

"Cette mission divine, confiée par le Christ aux apôtres, est destinée à durer jusqu'à la fin du monde, puisque l'Évangile qu'ils doivent transmettre, est pour l'Eglise, pour toute la durée du temps, principe de toute sa vie" (L.G. 20). Jésus a choisi et appelé parmi le groupe des disciples le groupe des Douze, afin qu'ils soient "institués" pour être "avec lui" et être envoyés afin d'actualiser, de rendre actuelle, de rendre présente sa propre mission, qui est de prêcher et de chasser les esprits mauvais (Mc 3, 13-15). On dira plus tard- pour qu'ils soient consacrés (Jn 17 ), configurés à Lui dans leur personne, conformés à Lui dans leur vie, envoyés pour manifester, signifier, annoncer, proposer le Mystère dont il est le Grand Sacrement. A ces Douze d'autres ont été peu à peu adjoints, dont le plus grand est Saint Paul (cf. L.G. 20).

Ce Corps apostolique a eu le souci de choisir, d'appeler, de consacrer et d'envoyer d'autres hommes, qui sont devenus assez rapidement les évêques, les prêtres et les diacres (cf. les lettres pastorales et les lettres de St Ignace d'Antioche...). Ces successeurs d'apôtres n'ont pas toutes les fonctions des apôtres, en particulier celles d'être témoins directs de la résurrection du Christ et d'être fondations de l'Eglise (Ep 2, 20). Mais ils ont été appelés par les apôtres à continuer et à signifier et à servir la Tête, sans laquelle il n'est pas de Corps, auprès de ceux qui sont déjà membres de ce Corps et de ceux qui sont appelés à l'être, c'est-à-dire tous les hommes. La succession apostolique touche directement les évêques, et par eux leurs collaborateurs dans le ministère les prêtres et des diacres.

5- Par un sacrement

"Il ressort clairement de la Tradition, qui s'exprime surtout dans les rites liturgiques et dans l'usage de l'Eglise aussi bien d'Orient que d'Occident, que par l'imposition des mains et par les paroles de la consécration la grâce de l'Esprit Saint est donnée et un caractère sacré est imprimé, de sorte que les évêques, d'une façon éminente et visible, jouent le rôle du Christ lui-même, Maître, pasteur et Pontife, et agissent en sa personne" (L.G. 21).


Le Concile de Trente a fortement affirmé que l'Ordre est un sacrement et un sacrement "à caractère". Il s'agissait pour lui des prêtres, le caractère sacramentel de l'épiscopat n'étant pas abordé. Le Concile de Vatican II est tout à fait fidèle à cette donnée du Concile de Trente, en précisant que le sacrement de l'Ordre est d'abord celui des évêques et par eux celui des prêtres. Il n'est pas clairement dit que les diacres participent au sacrement de l'Ordre. Les évêques et les prêtres le deviennent par un sacrement original et à caractère (L.G. 21, qui renvoie à la note 21 à Trente pour le sacrement de l'épiscopat; en ce qui concerne les prêtres, cf. L.G. 28, qui par deux fois renvoie en note au concile de Trente; le même n° reprend la position de Trente concernant la diversité des ministères).

Le sacrement manifeste que les prêtres comme les évêques ne se donnent pas eux-mêmes le ministère. Ils ne le reçoivent pas des autres chrétiens ni des communautés. Ils ne se font pas évêques et prêtres eux-mêmes, et la communauté ne peut pas les faire évêques et prêtres, même si elle peut les désigner, même si c'est le Pape qui nomme les évêques. Seul le Père qui a envoyé le Christ peut, par ce même Christ dans l'Esprit Saint, les "faire" évêques et prêtres, puisqu'ils sont ordonnés à être les sacrements du Christ. Personne ne peut de lui-même se donner la mission de représenter visiblement le Christ Tête. Tel est le sens de l'ordination par l'imposition des mains. Ils ne peuvent être remplacés que par ceux qui reçoivent le même sacrement et qui sont ainsi qualifiés extérieurement et intérieurement pour un tel ministère.

Ce sacrement fait partie des sacrements "à caractère". Les évêques, les prêtres et les diacres le demeurent par la permanence de ce sacrement. Il ne peut pas être renouvelé, comme le baptême et la confirmation. Il "établit" ceux qui le reçoivent dans une situation à la fois intérieure et extérieure au sein de l'Eglise (L.G. 21 pour les évêques et 28 pour les prêtres renvoie en notre à Trente). Le baptême et la confirmation "établissent" quelqu'un, extérieurement et intérieurement, dans la situation du sacerdoce des fidèles, membres du Corps du Christ. Le sacrement de l'Ordre n'est pas sur une ligne qui prolonge le baptême et la confirmation. Il y a entre eux une différence de nature et non de degré (L.G. 10). Il établit un baptisé-confirmé, extérieurement et intérieurement, dans l'Ordre de ceux qui sont "ordonnés", c'est-à-dire consacrés et envoyés pour être d'une manière spéciale au service de l'ordre sacramentel de l'Eglise.

6- Consacrés dans leur personne.

"Par l'imposition des mains et par les paroles de la consécration la grâce de l'Esprit Saint est donnée et un caractère sacré est imprimé" (L.G. 21). Par le sacrement, les évêques et les prêtres sont consacrés dans leur être. De ce fait le ministère n'est pas extérieur à leur personne. Il prend et marque de l'intérieur leur personne. Ils ne sont pas évêques et prêtres uniquement quand ils exercent le ministère, quand ils accomplissent les tâches de leur ministère. Ils le sont dans leur personne et par leur personne.

Les évêques et les prêtres ne sont donc pas de simples rouages destinés au bon fonctionnement de la société-Eglise. Ils ne sont pas de simples agents pastoraux, des animateurs sociaux, des coordinateurs d'entreprise, des responsables d'associations, des accompagnateurs culturels, des gestionnaires des affaires de la communauté. Ils ne sont pas des fonctionnaires du Christ ou de l'Eglise, même si la profession de fonctionnaire est digne d'estime et d'honneur. Bien sûr, ils sont amenés à jouer ces rôles par nécessité. Ces aspects humains font partie de l'Eglise-sacrement.

Mais ce n'est pas cela qui les définit en profondeur. Ce qui les définit, c'est d'être ministres, présence et action, du Christ pour que l'Eglise tout entière puisse être Corps du Christ. Pour que l'Eglise soit manifestée et agisse comme Corps du Christ, il faut que des baptisés-confirmés soient choisis et appelés, non par eux-mêmes, mais par d'autres qui ont été choisis et appelés avant eux, pour être, non les remplaçants, ni les successeurs, mais les représentants et serviteurs, la présence et l'action, du Christ construisant et faisant vivre son Église.

7- Dans la collégialité des évêques et
l'unité du presbyterium


"De même que, selon les dispositions du Seigneur, saint Pierre et les autres apôtres constituent un seul collège apostolique, d'une manière semblable, le Pontife romain, successeur de Pierre, et les évêques, successeurs des apôtres, sont unis entre eux". Dès l'origine ont été manifestés "le caractère et la nature collégiale de l'ordre épiscopal". Ce caractère et cette nature collégiale apparaissent bien dans le fait que plusieurs évêques coopèrent à l'ordination d'un nouvel évêque. "On est constitué membre du corps épiscopal en vertu de la consécration sacramentelle et par la communion hiérarchique avec la Tête du Collège et avec ses membres" (L.G. 22).

"Tous les prêtres, en union avec les évêques, participent au seul et même sacerdoce et ministère du Christ, à tel point que l'unité de consécration et de mission requiert leur communion hiérarchique avec l'ordre des évêques, qu'ils manifestent au mieux dans la concélébration liturgique qui a lieu quelquefois, tout comme ils proclament qu'ils célèbrent l'Eucharistie en union avec les évêques" (P.O. 7). " Établis par leur ordination dans l'ordre du presbytérat, les prêtres sont tous liés entre eux par une intime fraternité sacramentelle, mais de façon spéciale dans le diocèse au service duquel ils sont affectés sous l'autorité de l'évêque propre, ils forment un seul presbyterium. Même s'ils s'adonnent à de tâches diverses, ils exercent cependant un unique ministère sacerdotal au bénéfice des hommes " (P.O. 8 et la suite).

Le Concile de Trente a considéré le prêtre dans son identité personnelle, et même individuelle. Il n'a pas présenté le sacrement de l'Ordre comme le sacrement de l'intégration de chaque prêtre dans un corps de ministres. Ce n'est pas vers cela que l'orientaient les positions protestantes. Resituant les ministères dans le Mystère de l'Eglise, le Concile de Vatican II a remis en lumière le caractère collégial de l'épiscopat et le caractère communautaire du presbytérat. Il est significatif que ce dernier Concile parle en général des évêques et des prêtres au pluriel.

Ce ministère de ministres du Christ Tête ne peut être qu'un ministère exercé en corps. Car il n'y a qu'une seule Tête, le Christ. Nous ne sommes pas sacrements individuellement, mais ensemble, et chacun personnellement dans cet ensemble. C'est vrai pour les évêques dont chacun d'eux est intégré par l'ordination dans le collège des évêques (L.G. 22-23). C'est vrai pour les prêtres, dont chacun par l'ordination est intégré dans le corps des prêtres coopérateur du collège des évêques et dans un presbyterium rassemblé autour d'un évêque (P.0. 7-8). Entre évêques, existe une fraternité sacramentelle. Entre prêtres aussi. Et aussi entre évêques et prêtres.

Cette fraternité n'est pas d'abord une affaire de sentiment ou d'amité. Elle est fondée sur le sacrement. Elle est donnée dans le sacrement. Mais elle doit, comme toute fraternité, être reconnue, reçue et vécue peu à peu. Il ne doit pas y avoir de cavalier seul. Nous sommes différents. Nous avons des dons, des attraits, des sensibilités divers. Nous ne devons pas les annuler. C'est d'ailleurs impossible. Nous devons les assumer et les développer dans des relations de fraternité avec les autres prêtres, en particulier dans le corps du presbyterium diocésain auquel nous appartenons. Le travail entre prêtres n'est pas fait seulement pour une efficacité meilleure, mais d'abord pour être sacrements de la Tête unique qu'est le Christ.

8- Consacrés pour la Mission

Le Concile de Trente insistait sur l'Eucharistie et le sacrement de la Pénitence, sans négliger pour autant dans ses décrets de réforme l'aspect pastoral, en premier lieu la prédication, le service de la Parole, l'amour des personnes, en particulier des plus pauvres. Le Concile de Vatican II, partant de la mission des apôtres, présente le ministère des évêques, des prêtres et des diacres comme ordonné à la mission au travers des trois grands domaines que nous connaissons.

1*- Les évêques, les prêtres et les diacres sont missionnaires en étant, par le service de la Parole, les ministres du Christ Parole de Dieu, Prophète, Docteur, Maître. C'est le ministère de l'enseignement. Le Concile place ce ministère en premier aussi bien pour les évêques que pour les prêtres. "En tant que successeurs des apôtres, les évêques reçoivent du Seigneur, à qui a été donné tout pouvoir au ciel et sur la terre, la mission d'enseigner toutes les nations et d'annoncer l'Évangile à toute créature..." (L.G. 24). Parmi les principales charges des évêques, une place éminente revient à la proclamation de l'Évangile. Les évêques en effet sont les hérauts de la foi (L.G. 25) (renvoi à Trente, session 5, c. 2 et session 24, n. 4).

"Le Peuple de Dieu est rassemblé d'abord par la Parole du Dieu vivant dont on peut demander à bon droit qu'elle vienne de la bouche des prêtres... Les prêtres ont donc envers tous les hommes le devoir de partager avec eux la vérité de l'Évangile dont ils bénéficient dans le Seigneur" (P.O. 4 ; L.G. 28).

Il faut bien comprendre en quel sens. Le ministère de la Parole confié aux évêques, aux prêtres et aux diacres n'est pas d'abord l'enseignement de la théologie. Il faut autant que possible que les évêques, les prêtres et les diacres connaissent et travaillent la théologie. Le concile de Trente y insistait déjà. Il est recommandé que des évêques et des prêtres soient des théologiens de métier. L'histoire de l'Eglise en a toujours connu et en connaît toujours. D'où l'importance accordée par le concile et par les papes aux études dans la formation des prêtres et des diacres. D'où encore l'encyclique "Fides et ratio". Mais le ministère de la Parole confié aux évêques et aux prêtres n'est pas en premier le service théologique. Pour être évêque et prêtre, il n'est pas nécessaire d'être théologien de métier ou chercheur en théologie.

Certes, pour annoncer la Parole, il faut bien utiliser des mots humains, et c'est en général la théologie qui nous les fournit ou nous aide à les trouver. Mais le ministère de la parole confié aux évêques, aux prêtres et aux diacres ne consiste pas à enseigner, encore moins à imposer, un système théologique donné. Il consiste à annoncer et à faire connaître le message de la foi, tel que nous le trouvons dans l'Ecriture, lue et interprétée en Église. Il consiste à authentifier et garantir le contenu de la foi. Son objectif est la connaissance de la foi, l'appel à la foi, l'invitation à vivre de la foi. Il n'est pas de proposer des hypothèses théologiques, encore moins les controverses théologiques du moment ou du passé. Ou si on les propose, c'est pour rappeler ce dont l'Eglise a vécu, ce dont elle vit, ce qu'elle croit et qui la fait Église du Christ.

Être ministre du Christ Parole de Dieu nous appelle à l'humilité de celui qui sait qu'il est au service du Christ Parole de Dieu voulant nourrir la foi des membres de son corps et les hommes. Si le ministère de la Parole confié aux évêques et aux prêtres est si nécessaire, même s'il est assuré par des évêques et des prêtres qui ne sont pas théologiens ou qui sont parfois moins théologiens que les laïcs auxquels ils s'adressent, c'est pour montrer et rappeler que la foi, qui nous fait croyants et qui fait l'Eglise, est un don du Christ par l'Esprit, et non le résultat de la seule science théologique.

Ce ministère de la Parole prend des formes diverses: prédication dans la liturgie, catéchèse des adultes, des jeunes et des enfants, éducation de la foi dans la rencontre des personnes, des groupes, des relations quotidiennes au cœur des événements de la vie personnelle ou sociale.

2*- Les évêques et les prêtres sont missionnaires en étant les ministres du Christ Prêtre par le ministère des sacrements. C'est le ministère de la sanctification, pour les évêques (L.G. 26) comme pour les prêtres (P.O. 5). Le ministère des sacrements est le cœur, la pointe, le sommet, la source du ministère des évêques, des prêtres (et des diacres). Cela nous permet de comprendre comment se situe le concile de Vatican II par rapport au concile de Trente en ce qui concerne les prêtres. Le concile de Trente a présenté le ministère des prêtres en référence au ministère des sacrements, spécialement de l'Eucharistie et de la pénitence. Cela se comprend. La réforme protestante mettant en cause la doctrine catholique des sacrements et sa doctrine sur le ministère des prêtres dans les sacrements, en particulier dans le sacrifice eucharistique, c'est le ministère des sacrements, et donc le caractère sacerdotal des prêtres, qui ont été soulignés.

Le Concile de Trente a fortement mis en valeur que le prêtre, dans le ministère des sacrements et spécialement de l'Eucharistie, agissait " in persona Christ ". C'est très exactement la manière de dire que le Christ est le vrai ministre des sacrements, et que le prêtre est sacrement du Christ, c'est-à-dire la présence signifiée et agissante du Christ. Le concile Vatican II se situe dans la même ligne. Il développe, élargit ce ministère des sacrements en le mettant en relation avec le ministère de la Parole et le ministère pastoral. Mais pour lui aussi le ministère des sacrements est capital. Il est tellement capital qu'il apparaît comme le sommet où convergent et d'où partent tous les autres aspects du ministère des évêques, des prêtres et aussi des diacres. Et le concile de Vatican II met l'Eucharistie au cœur, au centre, au sommet de la vie et de la mission de l'Eglise, donc de tout ministère dans l'Eglise.

L'évêque est dispensateur de la sainteté "surtout dans l'Eucharistie... Toute célébration légitime de l'Eucharistie est dirigée par l'Évêque à qui a été confiée la charge d'offrir à la divine majesté le culte de la religion chrétienne et de la régler selon les préceptes du Seigneur et les lois de l'Eglise" (L.G. 26). Les sacrements, et surtout l'Eucharistie, occupent la place centrale et déterminante dans le ministère des prêtres. "Ainsi, par le ministère de l'évêque, des prêtres sont consacrés par Dieu afin que, participant d'une façon spéciale au sacerdoce du Christ, ils agissent dans la célébration des mystères sacrés en qualité de ministres de Celui qui, par son Esprit, exerce sans cesse pour nous dans la liturgie sa fonction sacerdotale... Quant aux autres sacrements et à tous les ministères ecclésiaux et aux œuvres d'apostolat, ils sont étroitement liés à l'Eucharistie et ordonnés à elle. La très Sainte Eucharistie contient en effet l'ensemble des biens spirituels de l'Eglise, à savoir le Christ lui-même, notre Pâque, le pain vivant, qui par sa Chair, vivifiée et vivifiante par l'Esprit Saint, procure la vie aux hommes et les invite et les conduit à s'offrir eux-mêmes, à offrir leurs travaux et toutes les choses créées, en union avec lui. Pour cette raison, l'Eucharistie apparaît comme la source et le sommet de toute l'évangélisation..." (P.O. 5).

Ce caractère sacramentel de notre ministère des sacrements explique que les gens y voient l'aspect le plus important de notre ministère. Nous disons parfois qu'ils nous prennent pour des sorciers ou pour des druides. Nous ne voulons plus être des prêtres juifs ou des prêtres païens. Nous avons raison. Mais, outre que ces propos sont méprisants pour les gens, pour les sacrements, pour le sacerdoce juif ou païen, à un moment pourtant où nous voulons retrouver nos racines juives et les valeurs des religions non-chrétiennes, il faut voir la part de vérité qu'il y a dans le fait qu'ils voient en nous surtout les ministres des sacrements.

Il fait partie de l'homme d'être habité par un sens religieux. Nous savons mieux aujourd'hui l'importance des rites pour structurer un être et une société. Nous n'avons pas à détruire le sens des rites. Nous avons à l'évangéliser. C'est à travers le ministère des sacrements, depuis la préparation jusqu'à l'après-célébration, que nous pouvons faire avancer, si peu que ce soit, cette évangélisation. Aujourd'hui le ministère sacramentel est un domaine privilégié de la mission dans son aspect d'annonce première de l'Évangile. Car ce ministère de la Parole a une place importante dans la démarche sacramentelle. C'est peut-être là que nous saisissons le mieux ce qu'a d'original notre ministère de la Parole. Il est alors éminemment catéchétique. Notre ministère des sacrements nous fait aussi rejoindre notre ministère de la présence. Dans le ministère des sacrements, nous sommes sacrements du Christ autant sinon plus par notre personne et notre manière d'être présents (accueil, écoute, respect, mise en valeur des richesses humaines, etc.) que par nos paroles.

Ce ministère de sanctification justifie le caractère sacerdotal des évêques et des prêtres. Ministres du Christ prêtre, ils ont une fonction authentiquement sacerdotale. Leur sacerdoce n'est pas en concurrence avec le sacerdoce des fidèles. Il est bien plutôt au service du sacerdoce des fidèles. Il permet aux membres du Corps du Christ d'exercer leur propre sacerdoce. Ainsi en est-il en particulier dans la liturgie où, grâce aux évêques et aux prêtres qui consacrent et président, les membres de l'assemblée peuvent devenir à leur place les célébrants de l'Eucharistie.

3*- Enfin les évêques et les prêtres sont missionnaires en étant les ministres du Christ Pasteur par le ministère du gouvernement ou ministère pastoral. "Les évêques dirigent les Églises particulières qui leur sont confiées, en tant que vicaires et légats du Christ, par leurs conseils, leurs recommandations, leur exemple, mais aussi par l'exercice de leur autorité et de leur pouvoir sacré, dont toutefois ils ne font usage qu'en vue d'édifier leur troupeau dans la vérité et la sainteté, se souvenant que Celui qui est le plus grand doit se faire comme le plus petit et celui qui commande comme celui qui sert" (L.G. 27).

"Exerçant, pour la part d'autorité qui est la leur, la charge du Christ Tête et Pasteur, les prêtres, au nom de l'évêque, rassemblent la famille de Dieu qui, en tant que communauté fraternelle aspire à l'unité, et la conduisent par le Christ dans l'Esprit à Dieu le Père". Pour cela ils reçoivent un pouvoir spirituel tout ordonné à l'édification. Ce pouvoir doit viser avant tout à faire grandir les chrétiens, à les éduquer à juger les événements dans la foi, à se mettre au service les uns les autres. Cette charge pastorale doit s'exercer tout spécialement vis-à-vis des pauvres et des petits. Au cœur de toute communauté doit être située l'Eucharistie, source de la charité qui unit les membres entre eux et aux autres hommes (P.0. 6).

Gouverner un diocèse ou une paroisse, être évêque ou prêtre dans un groupe, être aumônier dans un mouvement ou un service, assurer des tâches qui semblent surtout administratives, cela semble très éloigné d'un ministère épiscopal, presbytéral, diaconal . La vie des communautés d'Église est pour une part semblable à la marche des autres groupes humains. On y rencontre les mêmes difficultés, les mêmes tensions, les mêmes conflits, les mêmes joies aussi.

Il paraîtrait donc plus utile de confier cette vie à des experts: animateurs sociaux, psychologues compétents en vie de groupe, bons gestionnaires, coordinateurs. Nous ne devons pas négliger l'acquis concernant le travail de groupe. Il est utile d'avoir des paroissiens ou des membres de groupes chrétiens experts en psychologie communautaire, par exemple dans nos conseils ou nos rassemblements.

Mais cela n'est pas nécessairement le rôle des évêques et prêtres. Le ministère dans la marche des communautés est d'un autre ordre. Il est de rappeler sans cesse qu'à travers les rouages humains, dont sont faits les diocèses, les paroisses, les mouvements ou services ecclésiaux, doivent s'incarner des relations d'un autre ordre, les relations annoncées et inaugurées par le Christ.

Les évêques et les prêtres, là encore, ont un ministère important d'ordre missionnaire: manifester et servir la présence du Pasteur qui est le Christ. Tout rassemblement ecclésial n'est pas une célébration liturgique. Pourtant tout rassemblement ecclésial doit tendre à être une sorte de célébration, dont le prêtre n'est pas forcément l'animateur, mais dont il est le président. Il est riche d'enseignement que les conciles et plus près de nous les synodes soient vécus comme des célébrations, et qu'on dise : célébrer un synode et non animer un synode, encore qu'une bonne animation soit nécessaire.

4*- A travers cette triple dimension du ministère, un point important est à souligner. Les évêques et les prêtres sont missionnaires en étant les ministres du Christ Parole, Prêtre, Pasteur, d'abord par leur personne, leur vie et leur présence au milieu des membres de l'Eglise et des autres hommes. Avant même d'agir en prêtres, ils sont prêtres . Ne nous étonnons pas que les gens, sans pouvoir toujours utiliser les mots adéquats, reconnaissent dans les évêques et les prêtres une présence qui les dépasse. Nous voudrions qu'il n'en soit pas ainsi. Nous voudrions qu'on ne voie pas toujours en nous des évêques et des prêtres. Nous pensons pouvoir à certains moments être purement et simplement des hommes. Aux yeux des gens, il n'en est pas ainsi. Ne disons pas trop vite qu'ils ont tort.

Les hommes ont besoin de personnes-symboles, de personnes-points de référence. Nous sommes cela pour eux. Ils voient en nous des hommes de Dieu, des représentants du Christ. En cela ils sont proches du Concile de Trente et des théologies qui ont suivi comme celle de l'École française, parlant du prêtre comme du Religieux de Dieu, d'un autre Christ, et de l'évêque comme de celui qui est établi en l'état de perfection.

Quoi qu'il en soit, seule une personne peut être pleinement sacrement du Christ. Cela est vrai dans l'annonce de la Parole (le christianisme n'est pas la religion du livre, mais de la Parole) et dans le ministère sacramentel. La Parole ne peut être dite vraiment que par une personne, et les sacrements ne peuvent être célébrés que par une personne, puisque c'est le Christ qui parle et agit. Qui dira tout ce qu'ont pu faire des prêtres simplement en "étant", en rencontrant les gens, même une seule fois, sans même qu'ils s'en rendent compte? Cela suppose les qualités humaines essentielles, sur lesquelles a insisté le Concile de Vatican Il en parlant de la présence des prêtres au milieu des hommes (P.O. 3). Le fait qu'ils soient mis à part dans l'Eglise pour le ministère ne signifie pas qu'ils sont séparés des hommes. Il n'y pas de sacrement sans réalité matérielle ou humaine (pain, vin, huile, eau, oui du mariage, etc.). Les prêtres ont à être des hommes vrais, mais des hommes dont il n'est plus possible d'extraire en quelque sorte l'être de prêtre (cf. Ce qui concerne la sainteté des prêtres, P.0. III).

Cela n'a rien pour nous rendre orgueilleux ou distants. Les signes sacramentels sont toujours humbles, à l'exemple du Christ qui a été et qui est toujours humble. En outre, le sacrement ne peut rien faire de lui-même. Il tient du Christ tout ce qu'il est et fait. Et il l'est et le fait pour les autres. Être prêtre, cela nous renvoie toujours au Christ et aux autres, au Christ qui veut faire des hommes les membres de son corps. Dans le succès comme dans l'échec, nous avons à penser à cela. Nous ne pouvons qu'y trouver humilité et sérénité. " N'oublie pas que tu n'es que le pape ", disait, paraît-il, Jean XIII.

En conclusion de cette réflexion, retenons que les évêques, les prêtres, et les diacres, ceux-ci à leur manière, sont des ministres du Christ Parole, Prêtre, Pasteur, qui construit l'Eglise. Ils ne sont opposés pas au sacerdoce des fidèles. Ils sont à son service. C'est à cette relation des prêtres et des autres membres du Corps qu'il convient maintenant de nous arrêter.

9- Au service des autres membres de l'Eglise

Il convient de lire L.G. chapitre 4 et P.O. 9. Les évêques et les prêtres signifient et servent le Christ Tête faisant des membres de son corps des membres vivants de sa vie, rattachés à lui comme les sarments à la vigne, ne formant qu'un avec lui, lui appartenant, demeurant en lui (cf. ce que disent saint Paul et saint Jean à ce propos).


Ils sont dans le corps, non en dehors ou au dessus, comme baptisés et confirmés. Ils sont membres du corps, mais des membres du côté de la Tête. C'est pourquoi entre eux et les autres membres, il n'y a pas une différence de degré mais de nature (L.G. 10). Ils ne sont pas plus membres que les autres, mais des membres à un titre spécial, par un sacrement particulier.

Les baptisés sont un corps sacerdotal (L.G. 10-11). Ils participent au sacerdoce du Christ comme membres du Christ. Les évêques et les prêtres participent au sacerdoce du Christ comme sacrements du Christ Tête. La tête n'est pas plus membre du corps que les autres membres. Mais elle est un membre " capital ", c'est le cas de le dire.

Les membres du corps sont aussi sacrements du Christ, mais sacrements du Corps en tant qu'il reçoit la vie et l'unité du Christ. Les évêques et les prêtres sont sacrements du Christ qui donne la vie et l'unité au corps, tout en recevant eux-mêmes cette vie et cette unité. Les membres du corps sont sacrements du corps constitué par la Parole, les sacrements et l'unité. C'est là qu'est la racine de leur responsabilité propre.

Dans quel sens avons-nous à progresser? Nous sommes marqués par une vision dualiste de l'Eglise. Nous disons : dans l'Eglise, il y a les évêques, les prêtres et les diacres, en un mot les ministres ordonnés. Et il y a les laïcs. La façon courante de parler est d'utiliser le schéma: prêtres-laïcs, sacerdoce-laïcat. L'Eglise est ainsi un corps coupé en deux parties face à face avec risque de crispation des uns et des autres, ou de prise de pouvoir des uns et des autres, de concurrence et de rivalité. Ce qu'on accorde à l'un on l'enlève à l'autre.

L'image du corps serait à pousser jusqu'au bout. Dans le corps, il n'y a pas la tête d'un côté et la masse indifférenciée des membres de l'autre. Il y a la tête et les membres différenciés et plus ou moins indispensables à la vie du corps. C'est ainsi que S. Paul parle. La tête ne dit pas aux mains: je n'ai pas besoin de vous ; les mains ne disent pas aux pieds : je n'ai pas besoin de vous, etc. Les mains ne sont pas la tête, les pieds ne sont pas les mains, etc.

Les membres ont des fonctions diverses et toutes utiles, bien que plus ou moins indispensables. Le corps peut à la rigueur se passer de mains ou de pieds, mais non de tête, ni non plus de cœur. On a pris l'habitude de parler des évêques et des prêtres comme d'une catégorie bien typée et de parler des laïcs d'une manière indifférenciée. Ne faudrait-il pas nous habituer à ne plus parler d'évêques et de prêtres d'un côté et de laïcs de l'autre, mais des évêques, des prêtres, des diacres, et des baptisés qui ont des fonctions différentes ?

D'où vient-il que nous ne savons pas où mettre les diacres et que certains disent : ils font ce que font les laïcs; on dévalorise le laïcat en ordonnant diacres des militants ou des chrétiens actifs ; ils devraient rester laïcs ; ils sont des sous-prêtres? Cette difficulté vient du dualisme prêtres-laics. Cette dualité explique que nous ne savons pas où mettre non plus les religieux et religieuses.

Il faudrait dire : dans l'Eglise, il y a les baptisés qui par l'ordination signifient et servent par leur personne et leurs tâches le Christ-Tête, y compris le Christ qui a exercé et exerce toujours son rôle de Tête par le service, l'humilité, le don total de lui-même, comme Serviteur du Père et de son corps. Les diacres sont du côté de l'évêque pour signifier d'une manière effective et rappeler à l'évêque et aux prêtres et au corps tout entier que le service humble fait partie du ministère de sacrement de la Tête.


Et il y a les baptisés qui servent le corps au titre de membres en étant catéchistes, liturgistes, lecteurs de la Parole, serviteurs de l'Eucharistie, chantres, visiteurs de malades, accompagnateurs des mourants et des familles en deuil, animateurs de jeunes, gérants de la vie matérielle de l'Eglise, apôtres de leur milieu, acteurs de la vie sociale, époux (dont saint Paul dit qu'ils sont les signes du Mystère du Christ et de l'Eglise), parents, membres souffrants du corps, priants, etc. Au besoin avec des ministères institués, des missions confiées, avec une formation, peut-être avec un signe distinctif, et toujours avec la mention du lien à l'évêque et aux prêtres.

Nous avons à revoir certaines de nos pratiques, par exemple celles qui consistent à demander à n'importe quel laïc de lire, de donner la communion, etc. N'aurions-nous pas à faire en sorte que nos communautés apparaissent mieux comme le corps du Christ? Il ne s'agit pas de régenter, (il était écrit régimenter !)  mais de montrer à tous les membres du corps qu'ils ont une fonction au service du corps.

On verrait alors que tous ne font pas tout, que l'Eglise est vraiment le corps du Christ, qu'elle a besoin de la Tête et de nombreux membres pour être sacrement du salut dans le Christ. Il y aurait moins risque de concurrence. Les prêtres verraient mieux qu'ils sont indispensables, même si certaines de leurs activités sont accomplies par les fidèles laïcs du Christ.

 On verrait mieux la place des religieux-religieuses non-prêtres. Au lieu de nous demander s'ils sont du côté des prêtres ou des laïcs, il vaut mieux approfondir ce qu'ont d'indispensable pour la vie du corps leur consécration, leur vie de prière, leur vie en communauté, leur présence. Comme sainte Thérèse de l'Enfant qui avec un sens exégétique très sûr a découvert, en méditant la 1 Co 12, qu'elle était l'amour dans le cœur dont ne peut pas manquer le corps du Christ.

10- Quelques conséquences pour les évêques et
les prêtres.


1 *- L'Eglise ne peut pas se passer des évêques et des prêtres. La diminution du nombre de prêtres n'est pas un progrès, ni une chance, encore moins une grâce. C'est une pauvreté à vivre comme une pauvreté. La disparition des prêtres serait, non une nouvelle image de l'Eglise, mais une mutilation du Corps du Christ. Personne ne peut remplacer ceux qui sont sacrements de la Tête.

S'il en est besoin, des suppléances pourront et devront être données, par exemple pour présider les ADAP, pour célébrer des baptêmes (tout à fait exceptionnellement en cas d'extrême nécessité, le baptême étant le premier sacrement d'appartenance au corps du Christ), pour être témoin de l'Eglise aux mariages (là encore en cas de vraie nécessité), etc. Mais il doit être clair que cela est de l'ordre de la suppléance en des circonstances où il n'est pas possible de faire autrement et en tendant à retrouver la situation normale du corps du Christ le plus vite possible.

Notre objectif à tous, ce n'est pas la promotion des évêques et des prêtres, ni la promotion des laïcs. C'est la promotion du corps du Christ. La suppléance ne peut jamais devenir un droit ou une situation normale. Le caractère de suppléance doit toujours être exprimé et manifesté.

Même si d'autres font certaines activités que nous faisions, nous évêques et prêtres, nous ne sommes pas disqualifiés ni périmés Nous ne perdons pas notre absolue nécessité. Nous demeurons sacrements du Christ Tête, ne fût-ce que par notre présence, notre ministère des sacrements, notre ministère de la Parole parfois réduite à peu de chose. Les prêtres âgés ou de santé fragile peuvent assumer ce ministère d'être sacrements du Christ, à condition qu'ils acceptent leurs limites, qu'ils ne fassent pas obstacle à l'action d'autres qu'eux... et qu'ils soient acceptés, estimés, accueillis par les autres prêtres et les membres du corps. Il faut souligner l'importance de la présence d'un prêtre, que peuvent assumer des prêtres âgés. Il y a une réflexion à faire en ce sens et par les prêtres et par les autres baptisés : comment peut être assuré ce ministère des prêtres âgés ou malades ? Et à quelles conditions ?

2*- Tout doit être fait en référence à l'évêque et aux prêtres. Pas forcément sur l'ordre ou la permission de l'évêque et du prêtre. Mais en référence à lui. Par exemple la catéchèse, la liturgie, etc. Toute mission confiée doit comporter cette référence explicite. Il faut absolument éviter que de telles missions apparaissent comme un remplacement des prêtres, plus encore qu'elles apparaissent comme une manière de promouvoir les laïcs dans l'Eglise au détriment du ministère des prêtres. En même temps, il faut que les prêtres acceptent, apprécient, soutiennent, encouragent les baptisés qui reçoivent de telles missions. Qu'ils soient convaincus de plus en plus que leur ministère est fondamental, même s'il ne se traduit plus par toutes les activités qu'ils exerçaient autrefois.

3*- Ce ministère de ministres du Christ Tête donne valeur aux plus petites activités que nous assurons : rencontres simples et quotidiennes, préparation des sacrements... Notre rôle tire son efficacité du Christ. Encore faut-il y mettre toute notre expérience humaine et chrétienne. Et le sacrement nous renvoie à un Autre, le Christ.

Même s'il arrive que nous ayons une seule rencontre avec des gens, même si nous ne maîtrisons pas l'avenir, même si la suite nous échappe totalement, il faut mettre le plus de qualité possible dans cette rencontre. Qui sait si elle ne sera pas décisive pour ces gens ? Nous devons penser à la pratique du Christ. Ses rencontres étaient de divers types : rencontres de formation avec ses apôtre, rencontres régulières avec le groupe plus large de ses disciples, rencontre unique avec ceux qui l'approchaient ou qu'il guérissait, réconciliait ...

4*- Ce ministère de ministres du Christ Tête définit et appelle notre vie spirituelle. Nous sommes ministres du Christ parce que nous avons été ordonnés par lui et à lui. Un lien profond nous unit à lui. Nous mettons à son service non seulement nos activités, mais toute notre personne et notre vie. Dès lors notre vie est une vie " mystique " au beau sens du mot, une vie habitée par le Mystère, c'est-à-dire par le Dessein de Dieu réalisé dans et par le Christ. De ce fait, notre vie spirituelle est spécialement marquée :

- par la lecture priée de la Parole de Dieu dont nous sommes les ministres : lectio divina, chapelet ;

- par les sacrements que nous célébrons pour les autres et que nous devons faire nôtres, en particulier le sacrement de la réconciliation et l'amour de l'Eucharistie (adoration du Corps Eucharistique du Christ);

- par la charité pastorale, chemin de mort et de résurrection avec le Christ qui, par son amour pour tous, a été le sacrement de l'amour de Dieu.

La vie spirituelle est partie intégrante de notre personne, de notre vie, de notre ministère (Cf. P.0. III).

5*- Cette réalité de notre ministère comme sacrement du Christ doit orienter et animer la pastorale des vocations. Un ministère présenté comme trop exclusivement fonctionnel, destiné à faire fonctionner l'Eglise, n'attire pas et ne peut pas attirer. Il est donc capital de bien relier les prêtres au Christ , de montrer la vocation à être prêtre comme un amour du Christ , une marche à la suite du Christ , une configuration au Christ , une amitié pour le Christ , une communauté de destin avec le Christ en vue de servir les hommes comme lui-même les a servis.

6*- Finalement cette vision des prêtres est indissolublement liée à une vraie conception de l'Eglise. Nous avons à découvrir sans cesse l'Eglise comme Mystère et Sacrement du salut, comme Corps du Christ, comme réalité mystique. Il nous faut organiser, mais l'organisation doit être habitée et animée par la vie dans le Christ et ordonnée à cette vie dans le Christ.

Il nous faut prévoir l'avenir, autant qu'il est possible de le prévoir, et le préparer. Mais la meilleure façon de le prévoir et de le préparer, c'est de rendre l'Eglise de mieux en mieux sacrement du salut, et donc d'être nous-mêmes de plus en plus des sacrements du Christ , des prêtres qui désirent de plus en plus signifier et servir le Christ au milieu de ceux qui sont déjà les membres de son Corps et de ceux qui ne le sont pas encore, mais sont appelés à le devenir .

Conclusion

En conclusion: retour au Concile de Trente à la lumière du Concile de Vatican II

Le Concile de Trente a présenté les prêtres, et implicitement les évêques, en fonction de l'Eucharistie et du sacrement de la Pénitence. Reprise après le Concile de Vatican II, cette primauté du ministère de l'Eucharistie et de la Pénitence me semble toujours apte à synthétiser le ministère des évêques, des prêtres et des diacres. Volontiers, je dirai : l'Eucharistie et le sacrement de la réconciliation, qui est le renouvellement du baptême, premier sacrement de la rémission des péchés, sont toujours premiers, non pas uniques et exclusifs, mais premiers pour comprendre et vivre notre ministère. Cela me semble très favorable à la pastorale des vocations.

L'Eucharistie, dit Vatican Il, "contient l'ensemble des biens spirituels de l'Eglise, à savoir le Christ lui-même, notre Pâque... Pour cette raison, l'Eucharistie apparaît comme la source et le sommet de toute l'évangélisation " (P.O. 5 : tout ce numéro est à lire; cf. L.G. 26). De ce fait, l'Eucharistie est la source et le sommet du ministère des évêques, des prêtres et des diacres. Et elle nous renvoie nous évêques, prêtres et diacres à tous les aspects de notre ministère.

- Par la liturgie de l'ouverture et du rassemblement, l'Eucharistie nous redit à nous qui ouvrons la célébration, rassemblons l'assemblée au nom de la Trinité et présidons l'assemblée du commencement à la fin, que notre ministère est celui d'être ministres du Christ qui rassemble son Église, dans la célébration certes, mais aussi dans tous les autres aspects de notre mission.

- Par la liturgie pénitentielle, l'Eucharistie nous redit à nous qui invitons les membres de l'assemblée à se reconnaître pécheurs à la lumière du Christ Sauveur que nous avons en tous les aspects de notre ministère à nous reconnaître et à appeler les hommes à se reconnaître, non pas comme des justes, mais comme des pécheurs que le Christ est venu sauver.

- Par les prières d'action de grâce, de louange, de supplication qui font la trame de l'Eucharistie, il nous est rappelé à nous évêques, prêtres et diacres que nous avons à être des priants, et les initiateurs et éducateurs de la prière.

- Par la liturgie de la Parole, l'Eucharistie nous rappelle que nous avons à être dans tous les aspects de notre ministère les ministres du Christ Parole de Dieu et Premier Évangélisateur.

- Par l'offrande du sacrifice du Christ dont elle est le sacrement, l'Eucharistie nous rappelle que nous avons à être dans tous les aspects de notre ministère les ministres du sacrifice en esprit et en vérité, du sacrifice spirituel, que doit devenir notre vie et la vie des baptisés et des confirmés, en un mot du sacerdoce commun qu'ils ont à exercer dans la liturgie et en pleine vie.

- Par la communion au Corps et au Sang du Christ, l'Eucharistie nous redit que nous avons à vivre et à apprendre à vivre du Christ dans la vie la plus quotidienne, et que nous avons à être les ministres de la construction du Corps du Christ. "Le Corps du Christ. Amen". En recevant le Corps du Christ, vous devenez le Corps du Christ.

- Par l'envoi dans la paix du Christ et la Bénédiction du Père, du Fils et du Saint Esprit, l'Eucharistie nous rappelle que nous avons à vivre la mission et que nous avons à inviter et à aider tous les membres de l'Eglise à être missionnaires.

En voyant l'Eucharistie pour ce qu'elle est vraiment, c'est-à-dire la source et le sommet de la vie de l'Eglise comme de la vie de chaque chrétien, le début de la transfiguration du monde, l'énergie transformant le monde en Royaume, il est tout à fait exact de dire que le ministère de l'évêque, du prêtre, du diacre est un ministère essentiellement eucharistique. Non seulement nous pouvons, mais nous devons garder comme un trésor précieux ce que le Concile de Trente a dit et que le Concile de Vatican II a repris et développé.

Il faut en dire autant du sacrement de la pénitence et de la réconciliation que le Concile de Trente a présenté, quoique d'une façon moins appuyée, comme la tâche sacerdotale des prêtres. Il faut le relier d'ailleurs au baptême dont il est le renouvellement, d'où l'importance que le baptême soit célébré par les ministres ordonnés. Le pouvoir de remettre les péchés, par le baptême et la réconcilation-pénitence, que le Christ a donné à ses apôtres après sa mort et sa résurrection et après leur avoir donné l'Esprit Saint, nous rappelle que notre ministère est tout entier ministère de la réconciliation. Au moment du sacrement certes. Mais aussi dans le ministère de la Parole, des sacrements, de l'unité qui ne peut se réaliser que dans le pardon et la réconciliation, de la conduite du peuple de Dieu.

Célébrer le sacrement de la réconciliation, c'est entendre chaque fois saint Paul nous redire: "Dieu nous a réconciliés avec lui par le Christ, et il nous a donné pour ministère de travailler à cette réconciliation... Nous sommes donc les ambassadeurs du Christ, et par nous c'est Dieu lui-même qui, en fait, vous adresse son appel. Au nom du Christ, nous vous le demandons, laissez-vous réconcilier avec Dieu" (2 Co 5, 18-20). Là encore nous devons garder comme un trésor précieux ce que le concile de Trente a dit et que le Concile de Vatican II a repris et approfondi (L.G. 11 ; P.O. 5).

Ce qui est vrai des évêques, des prêtres et des diacres, au titre de leur ministère au service du Christ Tête, nous pouvons le dire de tous les membres de l'Eglise, au titre de leur être et de leur vocation de membres du corps. En faisant les transpositions nécessaires, nous pouvons dire que la vie et la vocation de tout chrétien est sous le signe de l'Eucharistie et de la réconciliation .

J'ose faire un rapprochement avec les quatre textes les plus importants du Concile de Vatican II, à savoir les Constitutions Lumen Gentium , Dei Verbum , Sacrosanctum Concilium , Gaudium et Spes . Dans l'Eucharistie les évêques et les prêtres sont les ministres du Christ qui rassemble l'Eglise (
Lumen Gentium ), qui proclame la Parole ( Dei Verbum ), qui s'offre et intercède auprès de son Père ( Sacrosanctum Concilium ), qui est le premier Missionnaire et envoie son Eglise dans le monde ( Gaudium et Spes ).

Ces quatre Constitutions sont les quatre piliers de l'Eglise du Christ. Elles sont comme résumées dans la célébration de l'Eucharistie  : liturgie de l'ouverture et du rassemblement, liturgie de la Parole, liturgie eucharistique, liturgie de l'envoi. Nous les retrouvons aussi, comme l'a voulu la réforme liturgique, dans la célébration de tous les sacrements : accueil qui fait l'assemblée, parole, célébration du sacrement, envoi. Ce que nous faisons dans la célébration de l'Eucharistie et des sacrements, nous dit ce que nous avons à le faire dans tous les aspects de notre ministère.

Il faut absolument récuser toute séparation, encore plus toute opposition, entre liturgie, Parole et mission, entre vie interne et vie externe de l'Eglise, entre ministère du culte et ministère évangélisateur, entre gloire de Dieu et salut des hommes. Nous avons à faire en nous de plus en plus l'unité de tous ces aspects. C'est une des conditions de notre joie d'être évêques, prêtres et diacres.

+R. BOUCHEX

Conférence donnée le 29 mai 1999

  Eucharistie, Sacrement de la Miséricorde.30.12.2005 - THEOLOGIE

 

 

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