Dans cette page, Benoît XVI nous invite à prendre
le parti de Dieu |
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Le 25 novembre 2007 -
(E.S.M.) -
Benoît XVI nous explique que la tristesse dont parle le Seigneur, est le
refus de se conformer au mal, elle est une manière d'aller contre ce que
tout le monde fait, contre les modèles de comportement qui s'imposent à
l'individu.
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Le Christ en croix, Marie
et Jean, image de la tristesse salutaire -
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Dans cette page, Benoît XVI nous invite à prendre le parti de Dieu
Quatrième chapitre - Le Sermon sur
la montagne (p. 85 à 150)
1) De quoi s'agit-il ?
Benoît XVI
2)
Le renversement
des valeurs
:
Benoît
XVI
3) Les pauvres de cœur :
Benoît XVI
4)
Les doux posséderont la terre :
Benoît XVI
5)
Le pays du roi de la paix :
Benoît XVI
6)
(suite)
Le contre-pouvoir au règne du mal
Dans cette page, Benoît XVI propose que nous passions à la troisième Béatitude : « Heureux ceux qui pleurent : ils seront
consolés » (Mt 5, 5). Est-il bon d'être dans l'affliction et de faire de la
tristesse une Béatitude ? Il existe deux sortes de tristesses :
une
tristesse qui a perdu l'espérance, celle de la perte de confiance dans
l'amour comme dans la vérité qui mine l'homme de l'intérieur et le détruit,
mais aussi la tristesse qui procède du bouleversement provoqué par la vérité
et qui amène l'homme à la conversion, à la résistance au mal.
Cette
tristesse est salutaire parce qu'elle enseigne à l'homme à espérer et à
aimer à nouveau. Celui qui incarne la première forme de tristesse, c'est
Judas, qui, frappé de frayeur en songeant à sa chute, n'ose plus espérer et
qui se pend, en proie au désespoir. Incarnant la seconde forme de tristesse,
il y a Pierre qui, sous le regard du Seigneur, verse des larmes salutaires
car elles labourent la terre de son âme. Il prend un nouveau départ et
devient un homme nouveau.
Ézéchiel nous livre un témoignage impressionnant de cette forme positive de
tristesse, contre-pouvoir au règne du mal
(cf. Ez 9, 4). Six hommes,
commente Benoît XVI, reçoivent la mission
d'exécuter le châtiment de Jérusalem, de ce pays coupable de crimes
sanglants, de cette ville emplie de violence
(cf. Ez 9, 9). Mais auparavant,
un homme vêtu de lin doit dessiner un tau (une sorte de croix) sur le front
de tous ceux qui « gémissent et qui pleurent sur toutes les abominations
qu'on y commet » (Ez 9, 4), et ceux qui portent cette marque sont exemptés
du châtiment. Il s'agit d'hommes qui ne hurlent pas avec les loups, qui ne
se laissent pas entraîner à se faire les complices de l'injustice devenue
naturelle, mais qui au contraire en souffrent. Même s'il n'est pas en leur
pouvoir de changer dans son ensemble cette situation, ils opposent au règne
du mal la résistance passive de la souffrance, la tristesse qui assigne une
limite au pouvoir du mal.
La tradition nous a légué une autre image de la tristesse salutaire,
celle
de Marie au pied de la croix en compagnie de sa sœur — femme de Cléophas -,
de Marie de Magdala et de Jean. Comme dans la vision d'Ezéchiel, nous
rencontrons à nouveau, dans un monde empli de cruauté et de cynisme ou de
connivences dictées par la peur, le petit groupe de ceux qui restent
fidèles. Ils ne peuvent détourner le malheur, mais, en partageant sa
souffrance, ils se placent du côté du condamné, en partageant l'amour,
ils
prennent le parti de Dieu, qui est amour. Cette compassion rappelle la
magnifique parole de saint Bernard de Clairvaux dans son commentaire du
Cantique des Cantiques : « impassibilis est Deusy sed non incompassibilis,
Dieu est impassible, mais il peut compatir
(Bernard de Clairvaux, Sermon 26, n. 5
SERMON XXVI).». C'est au pied de la croix que
l'on peut le mieux comprendre cette parole : « Heureux ceux qui pleurent :
ils seront consolés. » Celui qui n'endurcit pas son cœur devant la
souffrance, devant la détresse de l'autre, celui qui, au lieu d'ouvrir son
âme au mal, souffre de son pouvoir, donnant par là même raison à la vérité
et à Dieu, là, expose Benoît XVI,
ouvre les fenêtres du monde et fait entrer la lumière. A ceux qui
pleurent ainsi, la grande consolation est promise. C'est ce qui relie
étroitement la troisième Béatitude à la huitième : « Heureux ceux qui sont
persécutés pour la justice : le Royaume des cieux est à eux »
(Mt 5, 10).
La tristesse dont parle le Seigneur est le refus de se conformer au mal,
elle est une manière d'aller contre ce que tout le monde fait,
contre les
modèles de comportement qui s'imposent à l'individu. Le monde ne supporte
pas ce genre de résistance, il exige que l'on fasse
comme tout le monde. A
ses yeux, la tristesse est accusatrice, elle s'oppose à l'engourdissement
des consciences, et c'est effectivement le cas. C'est pourquoi « ceux qui
pleurent » deviennent des « persécutés pour la justice ». À ceux qui
pleurent, on promet la consolation, à ceux qui sont persécutés, le Royaume
de Dieu. Il s'agit de la même promesse que celle faite aux pauvres de cœur,
de deux promesses très proches l'une de l'autre : le Royaume de Dieu -
être
sous la protection du pouvoir de Dieu et dans la sécurité dans son amour -,
telle est la véritable consolation.
D'autre part, celui qui souffre ne sera vraiment consolé, ses larmes ne
tariront totalement que le jour où plus aucune violence meurtrière ne
viendra le menacer, lui et les hommes dépourvus de pouvoir ici-bas, la
consolation ne sera achevée que le jour où les souffrances incomprises du
passé seront élevées dans la lumière de Dieu et où sa bonté permettra de
leur donner un sens porteur de réconciliation. La véritable consolation ne
se manifestera que le jour où « le dernier ennemi », la mort
(1 Co 15, 26),
et tous ses acolytes auront perdu tout pouvoir. Ainsi, la parole relative à
la consolation nous aide à comprendre ce qu'il faut entendre par « Royaume
de Dieu » (des deux), et réciproquement le « Royaume de Dieu » nous fait
entrevoir quelle sorte de consolation le Seigneur tient prête pour tous ceux
qui pleurent et qui souffrent ici-bas.
Il nous faut ici insérer une autre remarque : pour Matthieu, pour ses
lecteurs et ses auditeurs, la parole relative aux « persécutés pour la
justice » avait valeur prophétique. Pour eux, cette affirmation du
Seigneur anticipait la situation de l'Église telle qu'ils la vivaient à leur
époque. L'Église était devenue l'objet de persécutions, elle était
persécutée « pour la justice ». Dans le langage de l'Ancienne
Alliance, la « justice » est l'expression de la
fidélité à la Torah, de la fidélité à la Parole de Dieu à laquelle
les Prophètes n'ont cessé d'exhorter. Il s'agit de persévérer sur le chemin
indiqué par Dieu, au centre duquel se trouve le Décalogue. Le concept du
Nouveau Testament qui correspond à celui de justice dans l'Ancien Testament
est la « foi ». Celui qui a la foi est
le « juste » qui « suit les voies de Dieu »
(Ps 1 ;Jr 17, 5-8). Car la foi
signifie accompagner le Christ, en qui s'accomplit la loi tout entière ; par
elle, nous nous unissons à la justice du Christ lui-même.
Les hommes persécutés pour la justice sont ceux qui vivent de la justice
divine, de la foi. Parce que les hommes ne cessent d'aspirer à s'émanciper
de la volonté de Dieu pour ne suivre qu'eux-mêmes, la foi ne cessera
d'apparaître comme contredisant le « monde », c'est-à-dire les pouvoirs
établis du moment et, de ce fait, à toutes les périodes de l'histoire, on
sera persécuté pour la justice. Cette parole de consolation est un
encouragement adressé à l'Église persécutée de tous les temps. Dans son
impuissance et ses souffrances, elle sait qu'elle se situe là où advient le
Royaume de Dieu.
Si par conséquent, tout comme dans les Béatitudes précédentes, nous sommes
en droit de voir dans cette promesse une dimension ecclésiologique, une
explication de la nature de l'Église, nous y retrouvons également le
fondement christologique : le Christ crucifié est le
juste persécuté dont parlent les prophéties de l'Ancien Testament et
en particulier les chants du Serviteur de Dieu, et que Platon lui aussi
avait déjà pressenti
(Platon, La République, II 36le-362a).
Et, partant, le Christ est lui-même l'avènement du Royaume de Dieu. Cette
Béatitude est une invitation directe adressée à l'individu, comme à l'Église
tout entière, à suivre le crucifié.
La Béatitude des persécutés se conclut, à la dernière phrase des «
macarismes »
(Du grec macarios qui signifie « heureux, béni ». C'est ainsi qu'en terme
technique, on nomme les Béatitudes), par une variante qui met au
jour un nouvel aspect. Jésus promet joie, allégresse et grande récompense «
si l'on vous insulte, si l'on vous persécute et si l'on dit faussement
toute sorte de mal contre vous, à cause de moi »
(Mt 5, 11). Sa personne, le fait
de prendre parti pour lui, est désormais l'aune à laquelle se mesurent la
justice et le salut. Si dans les autres Béatitudes la christologie est pour
ainsi dire voilée, le message qui définit ici le Christ comme le centre de
l'histoire apparaît ouvertement. Jésus attribue à son « je » un caractère de
norme dont aucun Maître en Israël ni aucun Docteur de l'Église ne peut se
prévaloir. Celui qui parle ainsi n'est plus un prophète au sens
traditionnel, détenteur d'un message et d'un mandat conférés par un tiers,
il est lui-même le point de référence de la vie juste, il est lui-même fin
et centre de toute chose.
Nous verrons en poursuivant nos méditations que le caractère explicite de
cette christologie est constitutif du Sermon sur la montagne dans son
ensemble. Ce qui n'a fait que transparaître jusqu'ici va se développer au
fur et à mesure que nous en suivrons le déroulement.
à suivre... : 7)
La quatrième Béatitude
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"Jésus de Nazareth"
Sources: www.vatican.va
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Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 25.11.2007 - BENOÎT XVI
- T/J.N. |