Lettre ouverte à Sa Sainteté le Pape
Benoît XVI |
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Le 24 mars 2009 -
(E.S.M.)
- Lettre ouverte à Sa Sainteté le Pape Benoît XVI par Bruno BEN-MOUBAMBA,
Porte-parole des Acteurs Libres la Société Civile Gabonaise
en Europe Journaliste et doctorant à l’EHESS :
Au nom de l’Afrique qui est dans les chaînes, nous vous demandons
pardon pour les insultes qui vous ont été adressées.
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Bruno BEN-MOUBAMBA,
Porte-parole des Acteurs Libres la Société Civile Gabonaise en Europe
Journaliste et doctorant à l’EHESS -
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Lettre ouverte à Sa Sainteté le Pape Benoît XVI
par Bruno BEN-MOUBAMBA
Très Saint Père,
Au cours de votre voyage apostolique au Cameroun et en Angola (17-23 mars
2009), vous avez rejoint par vos paroles les préoccupations profondes des
populations africaines, même si cela n’a pas été relevé par les
commentateurs et les observateurs. Les préoccupations de ces derniers sont
malheureusement souvent lointaines de celles de nos Peuples qui ploient sous
un fardeau imposé par de mauvais dirigeants et une communauté internationale
qui pratique à notre égard une indifférence sans équivalent dans le monde.
Nous, les Acteurs Libres de la Société Civile Gabonaise en Europe, au nom
des citoyens libres du continent noir, tenons particulièrement à vous
remercier chaleureusement pour votre
Discours du 20 mars 2009 devant les
autorités politiques et civiles, ainsi que le corps diplomatique, au Palais
présidentiel de Luanda.
Vos paroles prophétiques sont sans doute allées au cœur de tous les
Africains lorsque vous avez déclaré qu’ « est arrivé pour l’Afrique le
temps d’être le continent de l’espérance. Tout comportement humain droit est
espérance en action. Nos actions ne sont jamais indifférentes devant Dieu ;
et elles ne le sont pas non plus pour le développement de l’histoire. (…)
Vous pouvez transformer ce continent, libérant votre peuple du fléau de
l’avidité, de la violence et du désordre en le conduisant sur le chemin
indiqué par les principes indispensables à toute démocratie civile moderne :
le respect et la promotion des droits de l’homme, un gouvernement
transparent, une magistrature indépendante, des moyens de communication
sociale libres, une administration publique honnête, un réseau d’écoles et
d’hôpitaux fonctionnant de façon adéquate, et la ferme détermination, basée
sur la conversion des cœurs, d’éradiquer une fois pour toutes la
corruption.(… )
En effet, plus que de simples programmes et protocoles, les habitants de ce
continent demandent à juste titre une conversion profonde, authentique et
durable des cœurs à la fraternité. Leur exigence vis-à-vis de ceux qui
œuvrent dans la politique, dans l’administration publique, dans les agences
internationales et dans les compagnies multinationales est avant tout
celle-ci : soyez à nos côtés de façon vraiment humaine, accompagnez-nous,
ainsi que nos familles et nos communautés ».
Très Saint Père,
Vous avez ajouté que « Le développement économique et social en Afrique
requiert la coordination des actions gouvernementales nationales avec les
initiatives régionales et avec les décisions internationales. Une telle
coordination suppose que les nations africaines ne soient pas seulement
considérées comme les destinataires des plans et des solutions élaborées par
d’autres. Les africains eux-mêmes, œuvrant ensemble pour le bien de leurs
communautés, doivent être les premiers acteurs de leur développement. À ce
propos, il y a un nombre croissant d’initiatives qui méritent d’être
encouragées. Parmi elles, la New Partnership for Africa’s Development
(NEPAD), le Pacte sur la sécurité, la stabilité et
le développement dans la Région des Grands Lacs, le Kimberley Process, la
Publish What You Pay Coalition et l’Extractive Industries Transparency
Initiative : leur objectif commun est de promouvoir la transparence, la
pratique honnête du commerce et la bonne gouvernance. Quant à la communauté
internationale dans son ensemble, la coordination des efforts pour affronter
la question du changement climatique est d’une urgence décisive, tout comme
l’entière et juste réalisation des engagements pour le développement
indiqués par le Doha round, ainsi que la concrétisation de la promesse des
Pays développés, faite à plusieurs reprises, de consacrer 0,7% de leur PIB
(Produit Intérieur Brut) à l’aide officielle au
développement. Cette assistance est encore plus nécessaire aujourd’hui avec
la tempête financière mondiale qui sévit. Mon souhait est que cette
assistance ne soit pas une autre de ses victimes ».
Dans vos propos se reflète l’humanisme intégral du catholicisme à l’égard
des victimes de la corruption et de la mauvaise distribution des richesses
du sous-sol africain.
Comme vous l’avez également souligné à l’Aéroport
international de Yaoundé au Cameroun, le 17 mars 2009, à propos d’un temps
pour l’espérance en Afrique : « ce moment de grâce est un appel pour
l’ensemble des Évêques, des prêtres, des religieux et des religieuses ainsi
que des fidèles laïcs de ce continent, à se consacrer avec un élan nouveau à
la mission de l’Église : apporter l’espérance au cœur des peuples de
l’Afrique et des peuples du monde entier ».
Très Saint Père,
Nous vous sommes reconnaissants de l’intérêt que vous avez manifesté envers
l’Afrique, notre beau continent crucifié par la rapacité de ceux qui la
dirigent ou qui la convoitent.
Le philosophe allemand Hegel, considérait que l’Afrique noire n’avait pas
d’Histoire : la conscience y étant à l’état d’inconscience, il n’y avait
chez les Africains pas de place pour l’Esprit et donc, pas d’Histoire. Le
Pape allemand que vous êtes a au contraire exhorté les Africains chrétiens à
relever la tête et l’honneur du continent : « Même au sein de grandes
souffrances, le message chrétien est toujours porteur d’espérance.(…).
Devant la souffrance ou la violence, devant la pauvreté ou la faim, devant
la corruption ou l’abus de pouvoir, un chrétien ne peut jamais garder le
silence. Le message de salut de l’Évangile doit être proclamé de manière
forte et claire, afin que la lumière du Christ puisse briller dans les
ténèbres où les gens sont plongés. Ici, en Afrique, tout comme en de si
nombreuses régions du monde, des foules innombrables d’hommes et de femmes
attendent de recevoir une parole d’espérance et de réconfort. Des conflits
régionaux laissent des milliers d’orphelins et de veuves, de sans abri et de
démunis. Sur un continent qui, par le passé, a vu tant de ses enfants
cruellement déracinés et vendus par delà les mers pour devenir des esclaves,
aujourd’hui le trafic des êtres humains, en particulier de femmes et
d’enfants sans défense, est devenu une forme nouvelle d’esclavage. Alors que
nous connaissons en ce moment une insuffisance de la production alimentaire,
des troubles financiers, et des perturbations liées au changement
climatique, l’Afrique souffre de façon disproportionnée : de plus en plus
d’habitants s’enfoncent dans la pauvreté, victimes de la faim et des
maladies. Ils crient leur besoin de réconciliation, de justice et de paix,
et c’est ce que l’Église leur offre. Non pas de nouvelles formes
d’oppression économique ou politique, mais la glorieuse liberté des enfants
de Dieu (Rm 8, 21) ».
Très Saint Père,
Nous, les Acteurs Libres de la Société Civile Gabonaise en Europe, au nom
des Peuples Africains, tenons à vous remercier pour ce que vous avez dit sur
le SIDA : « si les Africains n’aident pas [en engageant leur
responsabilité personnelle], on ne peut pas résoudre ce fléau par la
distribution de préservatifs : au contraire, ils augmentent le problème. La
solution ne peut se trouver que dans un double engagement : le premier, une
humanisation de la sexualité, c’est-à-dire un renouveau spirituel et humain
qui apporte avec soi une nouvelle manière de se comporter l’un envers
l’autre, et le deuxième, une véritable amitié également et surtout pour les
personnes qui souffrent, la disponibilité, même au prix de sacrifices, de
renoncements personnels, à être proches de ceux qui souffrent ».
Nous, les Acteurs Libres de la Société Civile Gabonaise, au nom de
l’Afrique, contestons la vision « copulative » à laquelle nous réduisent les
décideurs africains et les médias, comme si nous étions condamnés à vivre
dans le règne animal jusqu’à la fin des temps. Nous refusons les étiquettes
et les stéréotypes qui veulent faire de l’être africain uniquement une
personnalité destinée à la seule survie quotidienne, préoccupée par la
satisfaction de ses instincts primaires.
Très Saint Père,
Le monde ne refuse t-il pas, au fond, de nous reconnaître la pleine dignité
du genre humain en ne s’intéressant au sort des Africains que lorsqu’il
s’agit des questions sexuelles ? Comme si nous n’étions pas capables de nous
élever au dessus des instincts basiques ? Comme si le pouvoir de l’esprit et
de la pure abstraction n’étaient pas à notre portée ? Le monde refuse
d’entendre nos revendications : liberté, sortie de la misère, fin de la
corruption.
Pourquoi ceux qui s'intéressent tant à notre salut lorsqu'il s'agit de
préservatifs ne se coalisent-t-ils pas pour nous délivrer plutôt de la
dictature et du sous-développement ? Nous connaissons tous les dangers du
SIDA mais pourquoi taire le fait qu'il serait jugulé si les systèmes
politico-économiques totalitaires n'en encourageaient pas la propagation par
leurs comportements désordonnés élevés en référence, en incitant les
populations, dès leur plus jeune âge, à adopter des comportements
dramatiques. Tout ceci sur lit de misère liée à la mauvaise gestion et au
pillage par les « gouvernants » des immenses richesses de nos pays.
Les principaux responsables de cet état de fait sont d'abord nos chefs
d'état qui, pour un misérable plat de lentilles fait de valises d'argent,
choisissent d'organiser le malheur de leurs peuples pour satisfaire leurs
propres concupiscences
Très Saint Père,
Le monde accepte volontiers que les Africains vivent dans des conditions
qu’aucun décideur occidental n’accepterait pour ses administrés. Nous ne
l’acceptons plus, pour l’honneur et pour la dignité des Peuples Africains.
Nous sommes blessés par les agressions dont vous avez été victime, pour une
fois que les projecteurs de la communauté internationale étaient, grâce à
vous, braqués sur nous.
Où étaient donc les protecteurs quand des milliers de Congolais de
Brazzaville furent massacrés par leur Général de Président encore récemment
? Que toutes les bonnes âmes qui aiment tant les Africains quand il s’agit
de préservatifs viennent donc vivre avec nous au milieu des immondices et
des bidonvilles de Libreville ou de Lomé ! Le pillage éhonté du continent
par ses dirigeants, ses élites et leurs complices ne les dérangent pas ?
Non, ce qui les dérange, c’est que le Pape nous dise que nous ne sommes pas
faits pour vivre éternellement dans le règne animal dans lequel le monde se
complaît à nous enfermer.
Très Saint Père,
Au nom de l’Afrique qui est dans les chaînes, nous vous demandons pardon
pour les insultes qui vous ont été adressées.
Nous avons compris votre message d’espérance à l’endroit des Peuples
Africains, et, nous allons œuvrer, en prenant nos responsabilités
personnelles, pour « transformer ce continent, libérant notre peuple du
fléau de l’avidité, de la violence et du désordre en le conduisant sur le
chemin indiqué par les principes indispensables à toute démocratie civile
moderne : le respect et la promotion des droits de l’homme, un gouvernement
transparent, une magistrature indépendante, des moyens de communication
sociale libres, une administration publique honnête, un réseau d’écoles et
d’hôpitaux fonctionnant de façon adéquate, et la ferme détermination, basée
sur la conversion des cœurs, d’éradiquer une fois pour toutes la corruption.(…
) ».
Très filialement,
Le 25 mars 2009 Bruno BEN-MOUBAMBA
Porte-parole des Acteurs Libres la Société Civile Gabonaise
en Europe Journaliste et doctorant à l’EHESS
acteurslibres@gmail.com
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Toutes les
photos du voyage
Sources :francecatholique
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 24.03.09 -
T/Voyage Afrique |