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Pour défendre les franciscains punis par le pape François
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Le 21 septembre 2013 -
(E.S.M.)
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Quatre universitaires ont envoyé au Vatican un exposé critiquant
l'interdiction qui a été faite aux franciscains de l'Immaculée de
célébrer la messe selon le rite ancien. "C'est une sanction qui
est en contradiction flagrante avec le motu proprio 'Summorum
pontificum' de Benoît XVI"
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Pour défendre les franciscains punis par le pape François
par Sandro Magister
Le 21 septembre 2013 - E.
S. M. -
L’interdiction faite par le pape François aux
franciscains de l'Immaculée de célébrer la messe selon le rite ancien
continue à susciter de nombreuses et vives réactions.
Un article avait été publié sur cette question par www.chiesa, le 29
juillet, sous le titre :
Pour la première fois François contredit Benoît XVI - 29.07.2013
En réalité, cette liberté de célébrer la messe selon le rite ancien que le
pape Joseph Ratzinger avait assurée à tous par son motu proprio "Summorum
Pontificum" n’a plus une portée universelle, parce que son successeur l’a
retirée à une congrégation religieuse et aussi, par conséquent, aux fidèles
qui assistaient aux messes qu’elle célébrait.
Avec des contrecoups qui touchent l’Église tout entière.
Beaucoup de gens qui sont attachés à la tradition craignent en effet que
cette restriction apportée à un élément majeur du pontificat de Benoît XVI
ne devienne rapidement une limitation plus générale.
Tandis que, dans le camp opposé, d’autres souhaitent que la messe selon le
rite ancien soit rejetée définitivement dans le passé et saluent
l’interdiction faite par le pape François aux franciscains de l'Immaculée
comme un premier pas dans cette direction.
Les franciscains de l'Immaculée ont obéi. Mais il y a des gens qui ne se
sont pas inclinés et qui ont envoyé au Vatican une critique serrée du décret
par lequel la congrégation pour les religieux – avec l’approbation explicite
du pape – a interdit à ces franciscains de célébrer la messe selon le rite
ancien.
Les auteurs de cette analyse critique sont quatre universitaires catholiques
renommés : Roberto de Mattei, historien et auteur d’une importante
reconstitution du concile Vatican II dans une optique traditionaliste, Mario
Palmaro, philosophe du droit, Andrea Sandri, expert en droit
constitutionnel, et Giovanni Turco, philosophe. Les deux premiers enseignent
à l’Université Européenne de Rome, le troisième à l'Université Catholique de
Milan, le quatrième à l'Université d’Udine.
Ces quatre universitaires – qui se sont réunis en une commission d’étude
qu’ils ont appelée "Bonum Veritatis" – ont envoyé, le 14 septembre, leur
exposé au cardinal Joao Braz de Aviz, préfet de la congrégation pour les
instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique, celle qui a
publié le décret, et, pour information, à d’autres dirigeants du Vatican :
le nouveau secrétaire d’état Pietro Parolin, le cardinal Raymond L. Burke,
président du tribunal suprême de la signature apostolique, l'archevêque
Guido Pozzo, secrétaire de la commission pontificale "Ecclesia Dei".
Voici comment, dans la lettre qui accompagnait leur exposé, les quatre
hommes motivent leur initiative :
"L'analyse, coordonnée par nous, a été rédigée par un groupe de chercheurs,
travaillant dans diverses disciplines, qui ont estimé, en conscience, qu’il
était de leur devoir de proposer une réflexion sur cette question, en raison
de son intérêt universel, et qui savent que les fidèles ont le droit,
consacré par le code de droit canonique (can. 212), de proposer aux pasteurs
des opinions relatives à la vie de l’Église. Ils ont relevé dans le décret
une série de graves problèmes qui touchent au respect de la loi naturelle et
du droit canonique, ainsi qu’à celui de la 'lex credendi', et qui sont
importants pour tout le monde catholique. La gravité de ces problèmes mérite
d’être prise en considération dans leur portée et dans ses conséquences".
Dans la conclusion de leur lettre, les signataires demandent "une
intervention opportune du Saint-Siège en vue d’un réexamen de la question à
la lumière de la justice et de l’équité, ainsi que du bien spirituel de
prêtres et de fidèles".
Voici le lien qui permet de lire le décret interdisant la messe selon le
rite ancien aux franciscains de l'Immaculée
►
"Il Santo Padre Francesco ha disposto…"
Et voici le texte intégral de l’analyse critique du décret, rédigée par les
quatre universitaires
►
"Una sanzione in palese contrasto..."
Les parties de ce texte qui concernent directement l’interdiction de
célébrer la messe selon le rite ancien sont reproduites en traduction
ci-dessous.
***
ANALYSE DU DÉCRET QUI PLACE UN COMMISSAIRE APOSTOLIQUE À LA TÊTE DES
FRANCISCAINS DE L'IMMACULÉE
par Roberto de Mattei, Mario Palmaro, Andrea Sandri, Giovanni Turco
Le décret de la congrégation pour les instituts de vie consacrée et les
sociétés de vie apostolique daté du 11 juillet 2013 […] est un acte d’une
gravité telle que l’on ne peut pas le considérer comme n’ayant qu’une
importance interne, uniquement pour les destinataires. […]
Ce décret impose aux religieux franciscains de l’Immaculée – contrairement
aux dispositions contenues dans la bulle "Quo primum" de saint Pie V et dans
le motu proprio "Summorum pontificum" de Benoît XVI – l’interdiction de
célébrer la messe traditionnelle.
Par là même, il prive d’un bien d’une valeur incommensurable – la messe
(célébrée selon le rite romain ancien) – non seulement ces religieux mais
également les fidèles qui, à travers leur ministère, ont pu participer à la
messe tridentine, ainsi que tous ceux qui auraient éventuellement pu, à
l’avenir, y participer.
Par conséquent le décret ne concerne pas seulement un bien – et, de ce fait,
"le" bien – dont sont privés (sauf autorisation expresse) les franciscains
de l’Immaculée, mais également un bien – et, de ce fait, "le" bien –
spirituel des fidèles qui, à travers le ministère de ces religieux,
désiraient et désirent avoir accès à la messe traditionnelle.
Ils se trouvent ainsi amenés à subir – malgré eux et au-delà de quelque
faute que ce soit, et donc sans raison – une sanction qui est en
contradiction flagrante avec l’esprit et la lettre de l’indult "Quattuor
abhinc annos" et de la lettre apostolique "Ecclesia Dei" publiés par
Jean-Paul II, ainsi que du motu proprio "Summorum pontificum" publié par
Benoît XVI.
En effet ces documents ont manifestement pour objectif de satisfaire
l’exigence de participation à la messe selon le rite romain classique,
formulée par tous les fidèles qui le désirent.
C’est pourquoi ce décret revêt de manière évidente une importance objective
pour toutes les personnes qui – pour les raisons les plus diverses –
apprécient et aiment la messe latino-grégorienne. Ces fidèles représentent,
à l’heure actuelle, une proportion importante, et certainement pas
négligeable, des catholiques, présents dans le monde entier. Ils pourraient
même, potentiellement, coïncider avec la totalité des membres de l’Église.
Ceux-ci sont également frappés objectivement par le décret.
De même il frappe tous ceux qui, y compris parmi les non-catholiques,
seraient attachés – pour différentes raisons, comme on a déjà pu le
constater, historiquement, à l’occasion de l’appel qui avait été présenté à
Paul VI en 1971 – à la continuité de la messe traditionnelle. Le décret
(bien au-delà, par conséquent, de cette affaire qui concerne un Institut
religieux) revêt clairement une importance universelle également à ce point
de vue. […]
*
En ce qui concerne l’interdiction de célébrer la messe selon le rite romain
ancien (également appelée messe selon la “forme extraordinaire”), on peut
relever de nombreux et graves problèmes posés par le décret dont il est
question, qui mettent objectivement en évidence autant d’anomalies
manifestes aux points de vue logique et juridique.
Tout d’abord, en ce qui concerne l’interdiction faite aux franciscains de
l’Immaculée, qui découle du fait qu’on leur impose de célébrer la messe
exclusivement selon le nouveau missel (également appelée messe selon la
“forme ordinaire”), sauf autorisation expresse, on ne peut pas ne pas
constater que cette interdiction est clairement en contradiction avec ce qui
a été décidé pour l’Église universelle à la fois par la bulle "Quo primum"
de saint Pie V (1570) et par le motu proprio "Summorum pontificum" de Benoît
XVI (2007).
En effet la bulle de saint Pie V décide, de manière universelle et
perpétuelle : “en vertu de notre autorité apostolique nous concédons à tous
les prêtres, de par les dispositions de la présente, l’indult perpétuel de
pouvoir suivre, en totalité, dans quelque Église que ce soit, sans aucun
scrupule de conscience et sans danger d’encourir quelque punition,
condamnation ou censure que ce soit, ce même missel, dont ils auront la
pleine possibilité de se servir librement et licitement, de telle sorte que
les prélats, administrateurs, chanoines, chapelains et tous les autres
prêtres séculiers, quel que soit leur grade, ou les prêtres réguliers, à
quelque ordre qu’ils appartiennent, ne soient pas tenus de célébrer la messe
d’une manière différente de celle que nous avons prescrite et que, d’autre
part, ils ne puissent pas être contraints et poussés par qui que ce soit à
modifier ce missel”.
Pour sa part, le motu proprio de Benoît XVI affirme qu’il “est permis de
célébrer le sacrifice de la messe selon l’édition typique du missel romain
promulgué par le bienheureux Jean XXIII en 1962 et jamais abrogé”. Et il
précise que “pour célébrer ainsi selon l’un ou l’autre missel, le prêtre n’a
besoin d’aucune autorisation, ni du Siège Apostolique, ni de son ordinaire”.
Par ailleurs le motu proprio affirme que “les communautés d’instituts de vie
consacrée et de sociétés de vie apostolique de droit pontifical ou de droit
diocésain qui désirent, pour la célébration conventuelle ou 'communautaire',
célébrer dans leurs oratoires propres la sainte messe selon l’édition du
missel romain promulgué en 1962, peuvent le faire”. De même, il déclare que
“les clercs dans les ordres sacrés ont l’autorisation d’utiliser le
bréviaire romain promulgué par le bienheureux Jean XXIII en 1962”.
Le même motu proprio précise sans équivoque que “tout ce que nous avons
établi par la présente lettre apostolique donnée sous forme de motu proprio,
nous ordonnons que ce soit considéré comme 'établi et décrété' et que ce
soit observé à compter du 14 septembre de cette année [2007], nonobstant
toutes choses contraires”.
Comme le démontrent de manière claire les deux textes mentionnés ci-dessus
ainsi que leurs éléments essentiels, la liberté de célébration de la messe
tridentine fait partie de la législation universelle de l’Église et elle
constitue pour chaque prêtre un droit.
De manière analogue, il en découle un droit pour les fidèles qui sont
attachés à cette “tradition liturgique”. En ce qui concerne ces derniers, en
effet, le code de droit canonique reconnaît : “Les fidèles ont le droit de
rendre un culte à Dieu selon les dispositions de leur rite approuvé par les
légitimes pasteurs de l’Église” (can. 214).
Par conséquent l’interdiction, sauf autorisation, qui est édictée par le
décret méconnaît objectivement cette législation universelle de l’Église, en
statuant – à travers un acte qui doit bien évidemment être subordonné à
celle-ci (en ce qui concerne aussi bien le fond que la forme) – de manière
opposée à la discipline universelle et permanente. Cette dernière, en raison
de ses origines apostoliques, bénéficie – comme le soutiennent des
chercheurs illustres – du caractère de l’irréformabilité.
L’interdiction de célébrer la messe tridentine que formule le décret est
injustement discriminante à l’égard du rite latino-grégorien. Non seulement
celui-ci remonte du concile de Trente jusqu’à saint Grégoire le Grand et de
celui-ci jusqu’à la tradition apostolique mais, selon le jugement sans
équivoque qui est formulé par le motu proprio "Summorum pontificum" de
Benoît XV, "il doit être dûment honoré en raison de son usage vénérable et
antique". Il est, en effet, une expression de la "lex orandi" de l’Église.
C’est donc un bien qu’il faut conserver. Et non pas un mal qu’il faut
écarter.
De plus, le fait d’imposer aux franciscains de l’Immaculée la célébration
uniquement selon le nouveau missel suppose une réglementation portant
autorisation spéciale en ce qui concerne le missel latino-grégorien ; or
celle-ci est objectivement inexistante. Ou alors il en introduit
l’application, face à une législation dont le contenu est manifestement
différent et opposé.
Il est clair, en effet, que le régime d’autorisation d’un acte ou d’une
activité particulière présuppose une interdiction ordinaire à laquelle,
éventuellement, il est possible de déroger dans des cas extraordinaires
(particuliers et déterminés). Mais cela (autrement dit l’interdiction
ordinaire) est explicitement exclu par la législation de l’Église, qui
affirme que le prêtre a le droit, qu’il peut utiliser librement et sans
aucune autorisation, de célébrer la messe tridentine.
Il faut remarquer, par ailleurs, que l’interdiction (sauf autorisation
expresse) de célébrer de cette manière met en évidence trois autres
anomalies objectives du décret.
Celui-ci établit en effet un régime d’autorisation pour la messe
traditionnelle et indique que le pouvoir d’autoriser est confié, d’une
manière générale, aux “autorités compétentes”. Mais, dans la mesure où la
règlementation prévue par l’indult "Quattuor abhinc annos" et par la lettre
apostolique "Ecclesia Dei" est abrogée, on ne comprend pas quelle est
précisément l’autorité compétente pour donner l’autorisation en question.
D’autant plus que la compétence, en ce domaine, fait certainement
abstraction de la congrégation pour les instituts de vie consacrée et
qu’elle relèverait, le cas échéant, de la commission pontificale "Ecclesia
Dei".
Il est étonnant, par ailleurs, que l’autorisation dont il est question dans
le décret doive être concédée “pour tout religieux et/ou communauté”, comme
si la messe était célébrée non seulement par chaque prêtre individuellement,
mais aussi par une communauté tout entière, dans son ensemble (y compris,
éventuellement, les religieux non prêtres). Comme si la communauté autorisée
pouvait à son tour autoriser, en transmettant (comment ?) l’autorisation (de
la part de qui ?), procéduralement (à quelles conditions ?) à chaque
célébrant.
Le décret est caractérisé par une autre anomalie : le fait que ce régime
d’autorisation est indéterminé dans le temps. C’est-à-dire que les dates
d’applicabilité du régime d’autorisation qui est imposé aux seuls
franciscains de l’Immaculée ne sont pas indiquées. Jusqu’à quand leur sera
imposée la demande d’autorisation ? Jusqu’à une date déterminée ? Jusqu’à ce
qu’un certain objectif soit atteint ? Perpétuellement ?
Le texte du décret ne dit rien à ce propos. Ce qui est contraire à la
nécessité d’une détermination dans le temps – autrement dit à la rationalité
et à la justice – qui doit caractériser n’importe quelle disposition
réglementaire (en fait, même une peine qui coïncide avec toute la durée
d’une vie ou qui est perpétuelle a une détermination dans le temps). C’est
une affaire de droit naturel et de droit canonique (cf. can. 1319). Ne pas
en tenir compte revient à porter une atteinte évidente au caractère
rétributif et au caractère curatif de n’importe quelle mesure restrictive
(dans le cas présent, d’une possibilité qui est donnée à tout prêtre).
D’autre part, l’interdiction de la célébration de la messe
latino-grégorienne – dont le décret rappelle pourtant qu’elle a fait l’objet
d’une décision du pape – reste objectivement limitée au contexte d’un décret
pris par une congrégation romaine.
Il en résulte que – au moins quant à sa forme et à l’obligation qui en
découle – elle ne peut que respecter les limites du décret lui-même et sa
nécessaire soumission à la législation universelle de l’Église. En effet,
contrairement à une quelconque décision disciplinaire pontificale – comme
"ex professo", si elle est prise dans le cadre de son pouvoir de
juridiction, autrement dit du "munus gubernandi", et selon ce qui est
légitimement possible conformément au droit divin positif et aux définitions
solennelles qui y sont relatives – la mesure dont il est question ne peut
que rester circonscrite au décret lui-même, dans les limites des compétences
de l’une des congrégations romaines.
En tout cas, ce qui est imposé par le décret, comme toute décision
disciplinaire émanant de qui que ce soit, ne peut pas ne pas être
objectivement défini par le droit naturel – autrement dit par la justice –
et par le droit divin positif, auxquels le droit canonique, la discipline et
la jurisprudence ecclésiastiques doivent nécessairement se conformer.
En effet, comme l’a rappelé Benoît XVI dans le discours qu’il a prononcé à
l’occasion de l’inauguration de l’année judiciaire du tribunal de la Rote
romaine le 21 janvier 2012, “la 'lex agendi' ne peut que refléter la 'lex
credendi'”.
Le motu proprio du 7 juillet 2007 par lequel Benoît XVI a libéralisé la
célébration de la messe selon le rite ancien
►
Summorum Pontificum
La lettre du pape Ratzinger qui accompagnait le motu proprio
►
Lettre du pape Benoît XVI aux évêques
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France.
Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 21.09.2013-
T/International |