Le motu proprio "révélera les pensées
secrètes d'un grand nombre" |
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Rome, le 20 juillet 2007 -
(E.S.M.) -
Voici, ci-dessous, l'article de François Cassingena-Trévedy, bénédictin
de Ligugé & enseignant à l'Institut supérieur de liturgie de Paris, paru
dans La croix du 17 juillet 2007 sous le titre Pour bien recevoir
"Summorum pontificum".
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Le motu proprio "révélera les pensées secrètes d'un grand nombre"
Voici, ci-dessous, l'article de François Cassingena-Trévedy, bénédictin de
Ligugé & enseignant à l'Institut supérieur de liturgie de Paris, paru dans
La croix
du 17 juillet 2007 sous le titre Pour bien recevoir "Summorum pontificum".
L'auteur vient de publier Te igitur, sur le Missel de saint Pie V
(Ad
Solem, 95 p., 10 €), et La Liturgie, art et métier
(Ad
Solem 181 p., 25 €).
La Croix met en exergue la citation suivante : Comment pourrions-nous avoir
la prétention d'enfermer Dieu dans un rite, dans une expression liturgique ?
Toute « réception », au sens ecclésial du terme, du motu proprio est à
asseoir sur une perception claire de ce qu'est la liturgie, dans et pour
l'Église : l'œuvre du Christ et de l'Église, l'œuvre du Peuple de Dieu qui,
par des rites et des prières, célèbre la Pâque de son Seigneur pour entrer
dans une intelligence toujours plus savoureuse de la foi, comme aussi dans
une expérience proprement vertigineuse de la condition pascale de Jésus-
Christ. Il ne s'agit pas pour nous de recevoir le motu proprio de manière
émotionnelle, mais de cette manière intelligente et responsable qui convient
à des fils. Et d'abord en étant capables d'évaluer la nature, la situation
exacte de cet acte pontifical, dans le contexte de la récente exhortation
apostolique post synodale Sacramentum caritatis, et bien sûr de tout ce qu'a
introduit la réforme de Vatican II dans la vie liturgique courante de
l'Église.
Le
Motu Proprio Summorum Pontificum est d'abord un acte destiné à réparer l'unité brisée de fait
par le schisme de Mgr Lefebvre. Comme toute décision de ce type, il requiert
une attitude d'obéissance, une écoute attentive dans l'onde longue d'une
histoire qui le précède et qui le suivra. On prendra soin de ne pas «
surcharger » cet acte de réconciliation, quant à son contenu, en le
sollicitant pour soutenir des positions trop éloignées de cette visée
pastorale fondamentale. Laissons calmement les semaines, les mois, les
décennies à venir décider de son incidence, de son efficience réelle dans le
paysage liturgique. Voyons ce qui va se passer, combien vont s'en réclamer.
L'histoire, qui ne fait pas de sentiment, dira sur le long terme ce qu'il en
est, et ce que sera la liturgie de demain, puisque, aussi bien, la liturgie
est elle-même une réalité historique. Le motu proprio jouera en tout cas le
rôle de révélateur. Pour reprendre une expression scripturaire, « il
révélera les pensées secrètes d'un grand nombre »
(cf. Lc 2,35).
On peut espérer que le Summorum pontificum, qui va travailler aussi -
indirectement - la célébration selon la forme «ordinaire» du rite romain,
provoquera chacun à promouvoir ce véritable ars celebrandi
sur lequel la
récente
Exhortation post Synodale "Sacramentum Caritatis" mettait un accent particulièrement senti.
Les deux textes gagnent ainsi à être lus en étroit voisinage. Non pas que la
célébration tridentine monopolise le privilège de l'ars celebrandi; mais sa
présence dans le paysage rituel du catholicisme indiquera des dimensions
parfois oubliées ces dernières décennies.
Corrélativement, cette présence permettra de mieux évaluer les dimensions
hautement traditionnelles que la réforme de Vatican II a si heureusement
restaurées. De la sorte, le motu proprio pourrait être un stimulant pour
réinvestir, redécouvrir plus mûrement et plus respectueusement l'ordo de
Paul VI et sa célébration. Car la célébration tridentine aussi doit faire
l'objet d'un vrai effort de mystagogie. Il est indispensable qu'elle soit
accompagnée et, pour ainsi dire, compensée, par un effort théologique
contemporain : tous, tridentins ou non, à égalité, nous sommes mis au défi
de franchir la barre du grand estuaire qui, de la civilisation (apparemment
chrétienne) qui était la nôtre, nous porte vers la « multi civilisation »
postmoderne.
Soyons raisonnables : le motu proprio n'est pas le tout de l'actualité
ecclésiale. Pas davantage que nous ne saurions laisser les médias nous
enfermer dans un « scoop » à sensation, nous ne devons nous y enfermer
nous-mêmes. Nous avons, à l'heure qu'il est, bien d'autres chantiers. Étant
acquise l'obéissance intelligente que réclame de nous l'acte du Siège
apostolique, l'affaire qui l'a rendu nécessaire n'est jamais qu'un remous
particulier, au regard de l'énorme mascaret qui confronte l'Église au «
monde de ce temps », ce monde que, dans le généreux sillage du Concile, nous
devons à la fois comprendre et aimer.
Le motu proprio est un instrumentum caritatis ; faisons-en vraiment
eucharistie. Car, bien au-delà du plan de la stricte ritualité comme aussi
du sentiment (légitime) qu'elle suscite, ce qui reste fondamental et urgent,
c'est que nous vivions tous jusqu'au vertige l'Eucharistie que nous
célébrons. Pour le salut et l'édification d'un monde que notre querelle des
rites depuis trop longtemps étonne, amuse ou scandalise, il faut que nous
nous ressaisissions tous - liturgiquement; théologiquement,
existentiellement surtout - de ce geste de Jésus qui prit du pain
(Mt 26, 26) dans ses mains très
saintes (1), inventant ainsi pour nous cette nouvelle manière de vivre qui
consiste à donner sa vie (Jn 10,11).
(1) Prière eucharistique I (dite « canon romain »).
Le
Motu Proprio
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Le texte officiel et tous les commentaires
Source:
Forum Catholique - Scola
Saint Maur
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
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