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Synode : Le verrouillage de l’information voulu par le
pape !
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Le 13 octobre 2014 -
(E.S.M.)
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Ce synode n’est pas appelé à décider. Mais désormais l'hypothèse
des remariages a pleinement droit de cité à la tête de l’Église. Le
commentaire du cardinal Camillo Ruini.
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Synode : Le verrouillage de l’information voulu par le pape !
Le vrai dilemme: indissolubilité ou divorce par Sandro Magister
Le 13 octobre 2014 - E.
S. M. -
Au bout d’une semaine de synode, une chose est certaine : le véritable feu
qui anime la discussion, c’est la question de savoir s’il faut ou non
admettre le divorce dans le mariage catholique.
Au synode, le mot divorce est tabou. Personne ne dit vouloir en arriver là.
Tout le monde proclame, haut et fort, qu’il faut que la doctrine de
l'indissolubilité reste intacte.
Et pourtant, lorsque l’on veut donner la communion eucharistique aux
divorcés remariés, c’est comme si, dans leur cas, le lien conjugal sacré
d’origine avait en fait cessé d’exister. Comme le font déjà les Églises
orthodoxes, l’Église catholique admettrait, de fait, les remariages.
C’est en effet la voie qui a été adoptée par les partisans de l'innovation :
non pas une campagne irréaliste en faveur du divorce catholique, que seuls
quelques théologiens comme Andrea Grillo ou Hermann Häring réclament de
manière explicite, mais la proposition d’accorder un secours miséricordieux
aux personnes qui se voient refuser la communion parce qu’elles se sont
remariées civilement après la dissolution civile de leur mariage
sacramentel.
La proposition est tentante. Elle est présentée comme un médicament en cas
de souffrance provoquée par le refus d’un "droit" sacramentel. Peu importe
que de tels cas existent en nombre extrêmement limité. Ils suffisent à
servir de levier en vue d’un changement dont on peut prévoir que les effets
seront considérablement plus grands.
La sociologie religieuse aurait beaucoup de choses à dire à ce propos.
Jusqu’au milieu du XXe siècle, dans les paroisses catholiques,
l’interdiction de communier qui frappait les personnes en situation
matrimoniale irrégulière ne posait pas de problèmes, parce qu’elle restait
pratiquement invisible. Même dans les endroits où les fidèles se rendaient
fréquemment à la messe, en effet, les gens qui communiaient chaque dimanche
n’étaient pas nombreux. La communion fréquente n’était pratiquée que par des
personnes qui, d’autre part, allaient fréquemment se confesser. On en trouve
la preuve dans le double précepte de l’Église à l’usage de la grande masse
des fidèles : il fallait se confesser "une fois par an" et communier "au
moins à Pâques".
Par conséquent le fait de ne pas pouvoir accéder à la communion n’était pas
une marque visible de punition ou de marginalisation. La principale raison
qui éloignait de la communion fréquente une grande partie des fidèles était
le très grand respect que l’on avait alors pour l'eucharistie, dont on ne
devait s’approcher qu’après une préparation adéquate et toujours avec
crainte et tremblement.
Tout cela va changer au cours des années du concile Vatican II et de
l’après-concile. En résumé, la pratique de la confession s’effondre, tandis
que la communion devient un phénomène de masse. Tout le monde, ou presque,
communie, tout le temps. Parce que, dans le même temps, il y a un changement
dans la perception du sacrement de l’eucharistie par la plupart des gens. La
présence réelle du corps et du sang de Jésus dans le pain et le vin
consacrés n’est plus qu’une présence symbolique. La communion devient, à
l’instar du baiser de paix, un signe d’amitié, de partage, de fraternité,
"dans la série : tout le monde fait comme ça, alors moi aussi", pour
reprendre une formule du pape Benoît XVI, qui tenta de remettre à l’honneur
le sens authentique de l'eucharistie, notamment en demandant que les fidèles
à qui il distribuait la communion s’agenouillent pour recevoir l’hostie dans
la bouche.
Dans un tel contexte, il était inévitable que l’interdiction de communier
soit considérée parmi les divorcés remariés comme revenant à leur refuser
publiquement un sacrement auquel tout le monde a "droit". Cette
revendication émanait – et émane – d’un petit nombre de personnes, parce que
la plupart des divorcés remariés sont éloignés de la pratique religieuse,
tandis qu’il ne manque pas, parmi les catholiques pratiquants, de gens qui
comprennent et qui respectent la discipline de l’Église. Mais ce tout petit
nombre de cas a servi de point d’appui, à partir des années 90 et
principalement dans quelques diocèses de langue allemande, à une campagne
ayant pour objectif le changement de la discipline de l’Église catholique en
matière de mariage, campagne qui a atteint son point culminant sous le
pontificat du pape François, avec le consentement manifeste de celui-ci.
D’autre part le fait que le synode se concentre sur la question des divorcés
remariés risque de faire perdre de vue des situations de crise concernant le
mariage catholique qui impliquent beaucoup plus de gens.
Par exemple, on a pu trouver dans les librairies italiennes, peu de temps
avant que le début du synode, un reportage concernant l'action pastorale
mise en place dans les périphéries de Buenos Aires par celui qui était alors
le cardinal Jorge Mario Bergoglio
►
P. De Robertis,
"Le pecore di Bergoglio. Le periferie di Buenos Aires svelano chi è
Francesco", Editrice Missionaria Italiana, Bologna, 2014.
Cet ouvrage explique qu’une large majorité - entre 80 et 85 % - des gens de
ces périphéries qui vivent en couple ne sont pas mariés mais qu’ils se
contentent de vivre ensemble, tandis que, en ce qui concerne les gens
mariés, "les mariages sont en majorité invalides, parce que ceux qui se
marient sont immatures", mais ils ne cherchent d’ailleurs même pas à faire
établir la nullité de leur mariage par les tribunaux diocésains.
C’est par les "curas villeros", les prêtres qui ont été envoyés dans les
périphéries par Bergoglio, que ces indications ont été fournies. Ils
précisent avec fierté que, de toute façon, ils donnent la communion à tous
ceux qui le souhaitent, "sans élever de barrières".
Les périphéries de Buenos Aires ne constituent pas, en Amérique latine, un
cas isolé. Et elles témoignent non pas d’un succès mais, en réalité, d’une
absence ou d’un échec de la pastorale du mariage. Sur d’autres continents,
le mariage chrétien est aux prises avec des défis qui ne sont pas moins
graves et qui vont de la polygamie aux accouplements forcés, des théories du
"gender" aux "mariages" homosexuels.
Confrontés à un tel défi, ce synode et celui qui viendra ensuite devront
décider si la bonne réponse va consister à frayer un passage au divorce ou
bien à restituer au mariage catholique indissoluble toute sa force et toute
sa beauté différente, révolutionnaire.
Le texte qui suit est l'intervention dans la discussion non pas d’un père
synodal, mais d’un cardinal de la Sainte Église Romaine qui a estimé qu’il
était de son devoir de ne pas se taire.
L'Évangile de la famille dans l'Occident sécularisé
par Camillo Ruini
Cette cellule fondamentale de la société qu’est la famille est en train de
traverser une période d’évolution extraordinairement rapide.
Désormais les rapports sexuels avant le mariage sont considérés comme une
évidence et les divorces comme étant presque normaux, très souvent comme une
conséquence de la rupture de la fidélité conjugale. Nous nous éloignons
ainsi de la physionomie traditionnelle de la famille, dans les pays et dans
les civilisations marqués par le christianisme.
D’autre part, au cours de ces dernières décennies, nous sommes entrés, au
moins en Occident, dans des territoires inexplorés. En effet la question du
"gender" et celle des “mariages homosexuels” ont fait leur chemin.
À la racine de tout cela, il y a la primauté, et presque l’absolutisation,
de la liberté individuelle et du sentiment personnel. Voilà pourquoi le lien
familial doit être malléable à volonté et, en tout cas, ne pas être
contraignant, au point de disparaître ou d’être pratiquement insignifiant.
Selon la même logique, ce lien doit être accessible à toutes les sortes de
couples, sur la base de la revendication d’une égalité totale qui n’accepte
pas les différences, en particulier celles qui trouvent leur origine dans
une volonté extérieure, que celle-ci soit humaine (le droit civil) ou divine
(le droit naturel).
Cependant, le désir d’avoir une famille - et autant que possible une famille
stable - reste fort et largement répandu. C’est un désir qui se traduit dans
la réalité d’innombrables familles “normales” et également dans celle de
nombreuses familles authentiquement chrétiennes. Certes ces dernières sont
une minorité, mais elle est consistante et très motivée.
La sensation que la famille au sens propre est actuellement en train de
disparaître est donc, pour une bonne part, le résultat de la distance qui
existe entre le monde réel et le monde virtuel construit par les moyens de
communication, même s’il ne faut pas oublier que ce monde virtuel a une
influence très forte sur les comportements réels.
Par conséquent, si l’on porte sur cette question un regard serein et
équilibré, le pessimisme unilatéral et la résignation paraissent peu fondés
en ce qui concerne la famille et son avenir. On peut plutôt considérer que
l’attitude du concile Vatican II vis-à-vis des temps nouveaux - attitude que
l’on peut résumer par le binôme accueil/réorientation vers le Christ sauveur
- est également applicable à la pastorale de la famille.
Concrètement, on trouve dans "Gaudium
et Spes" (n° 47-52), en ce qui
concerne le mariage et la famille, une nouvelle approche, nettement plus
personnaliste mais sans rupture avec la conception traditionnelle. Ensuite
les catéchèses de saint Jean-Paul II relatives à l’amour humain et
l’exhortation apostolique "Familiaris
Consortio" ont constitué un grand
approfondissement, qui ouvre de nouvelles perspectives et aborde un grand
nombre des problèmes actuels. Même si ces catéchèses n’ont pas eu la
possibilité d’affronter de manière explicite les développements les plus
récents et les plus radicaux, tels que la théorie du "gender" et le mariage
entre personnes de même sexe, elles ont en tout cas posé, dans une large
mesure, les bases permettant de les affronter.
Il est indubitable que la pratique pastorale n’a pas toujours été à la
hauteur de ces enseignements – et, du reste, elle ne peut jamais l’être
complètement – mais elle a opéré en suivant la ligne qu’ils définissent et
elle est parvenue à des résultats importants : en effet nos jeunes familles
chrétiennes sont également dues à son action.
*
Maintenant, avec le pape François, nous avons deux synodes consacrés aux
défis pastoraux relatifs à la famille dans le contexte de la nouvelle
évangélisation, après le consistoire du mois de février dernier qui avait
déjà abordé ce sujet : il s’agit d’une étape supplémentaire dans cette
démarche d’accueil et de réorientation que l’Église tout entière est appelée
à entreprendre avec confiance.
Ces deux synodes doivent être conçus dans une optique clairement universelle
et il n’y a aucun secteur géographique ou culturel qui puisse exiger que les
synodes se concentrent uniquement sur ses propres problèmes.
Cela posé, les questions les plus significatives, pour l’Occident, semblent
être celles, plus radicales, qui sont apparues au cours de ces dernières
décennies. Elles incitent à repenser et à réexpliquer, à la lumière de
l’Évangile de la famille, la signification et la valeur du mariage en tant
qu’alliance pour la vie entre l’homme et la femme, une alliance orientée
vers le bien des époux et vers la mise au monde et l’éducation des enfants
et également dotée d’une importance décisive aux points de vue social et
public.
Sur ce point la foi chrétienne doit faire preuve d’une véritable créativité
culturelle, que les synodes ne peuvent pas produire automatiquement mais
qu’ils peuvent stimuler, chez les croyants et chez ceux qui se rendent
compte que ce qui est en jeu, c’est une dimension humaine fondamentale.
*
Cependant il y a également d’autres questions qui ont déjà été traitées à
de multiples reprises par le magistère mais qui continuent à nous
interpeller et qui semblent se poser de manière de plus en plus aigüe. L’une
de ces questions est celle des divorcés remariés.
"Familiaris
Consortio" a déjà indiqué (n° 84) quel est le comportement qu’il
convient d’adopter : ne pas abandonner ceux qui se trouvent dans cette
situation, mais au contraire prendre spécialement soin d’eux, en
s’appliquant à mettre à leur disposition les moyens de salut de l’Église.
Par conséquent, les aider à ne pas se considérer comme complètement séparés
de l’Église et, au contraire, les aider à participer à sa vie. Il faut bien
discerner, par ailleurs, les situations et en particulier distinguer les
époux qui ont été abandonnés injustement de ceux qui, eux, sont coupables
d’avoir détruit leur mariage.
Cependant cette même exhortation apostolique "Familiaris
Consortio"
réaffirme la pratique de l’Église, “fondée sur la Sainte Écriture,
consistant à ne pas permettre l’accès des divorcés remariés à la communion
eucharistique”. La raison fondamentale de cette pratique est que “leur état
et leur mode de vie sont objectivement en contradiction avec cette union
d’amour entre le Christ et l’Église qui est signifiée et réalisée par
l’Eucharistie”.
Ce qui est en question, par conséquent, ce n’est pas une faute personnelle
qu’ils ont commise, mais l’état dans lequel ils se trouvent objectivement.
C’est pourquoi l’homme et la femme qui ne peuvent pas, pour des raisons
sérieuses telles que, par exemple, l’éducation de leurs enfants, se
soumettre à l’obligation de vivre séparés, afin de pouvoir recevoir
l’absolution sacramentelle et s’approcher de l’Eucharistie, doivent prendre
“l’engagement de vivre dans une complète chasteté, c’est-à-dire de
s’abstenir des actes propres aux époux”.
Il s’agit là, indubitablement, d’un engagement très difficile qui, de fait,
n’est pris que par très peu de couples, alors que les divorcés remariés
sont, malheureusement, de plus en plus nombreux.
C’est pourquoi, depuis longtemps, on cherche d’autres solutions. L’une
d’elles, tout en maintenant fermement l’indissolubilité du mariage conclu et
consommé, considère qu’il est possible de permettre aux divorcés remariés de
recevoir l’absolution sacramentelle et de s’approcher de l’Eucharistie, à
des conditions précises mais sans qu’ils soient obligés de s’abstenir des
actes propres aux époux. Il s’agirait d’une seconde planche de salut,
offerte sur la base du critère de l’"epicheia" afin de joindre la
miséricorde à la vérité.
Cependant il ne semble pas que cette solution puisse être utilisée,
principalement parce qu’elle implique un exercice de la sexualité
extraconjugale, étant donné que le premier mariage, qui a été conclu et
consommé, perdure. En d’autres termes, le lien conjugal originel
continuerait à exister mais, pour ce qui est du comportement des fidèles et
dans la vie liturgique, il serait possible de procéder comme s’il n’existait
pas. Nous sommes donc confrontés, avec cette solution, à un problème de
cohérence entre la pratique et la doctrine, et pas seulement à un problème
disciplinaire.
Quant à l’"epicheia" et à l’"æquitas" canonique, ce sont des critères très
importants dans le domaine des normes humaines et purement ecclésiales, mais
elles ne peuvent pas être appliquées aux normes de droit divin, sur
lesquelles l’Église n’a aucun pouvoir discrétionnaire.
À l’appui de l’hypothèse que nous venons d’évoquer, on peut certainement
citer des solutions pastorales analogues à celles qui ont été proposées par
certains Pères de l’Église et qui sont également entrées, jusqu’à un certain
point, dans la pratique, mais elles n’ont jamais obtenu l’accord des Pères
et elles n’ont été en aucune manière la doctrine ou la discipline commune de
l’Église (cf. la lettre adressée par la congrégation pour la doctrine de la
foi aux évêques de l’Église catholique à propos de la distribution de la
communion eucharistique aux fidèles divorcés et remariés, 14 novembre 1994,
n° 4). À notre époque où, en raison de l’introduction du mariage civil et du
divorce, le problème s’est posé dans les termes actuels, il existe au
contraire, à partir de l'encyclique "Casti
Connubii" de Pie XI, une position
commune du magistère, claire et constante, qui va dans le sens contraire et
qui ne semble pas pouvoir être modifiée.
*
On pourrait objecter que le concile Vatican II a procédé, sans violer la
tradition dogmatique, à de nouveaux développements concernant des questions,
telles que celle de la liberté religieuse, à propos desquelles il existait
des encycliques et des décisions du Saint-Office qui paraissaient les
exclure.
Mais cette comparaison n’est pas convaincante parce qu’un véritable
approfondissement conceptuel a été réalisé en ce qui concerne le droit à la
liberté religieuse et qu’il a rattaché ce droit à l’être humain en tant que
tel et à sa dignité intrinsèque, et non plus à la vérité conçue de manière
abstraite, comme on le faisait précédemment.
La solution proposée en ce qui concerne les divorcés remariés n’est pas
fondée, quant à elle, sur un approfondissement de ce genre. D’autre part les
problèmes relatifs à la famille et au mariage influent sur la vie
quotidienne des personnes d’une manière incomparablement plus forte et
concrète que ceux qui ont trait à l’établissement de la liberté religieuse,
l’exercice de cette dernière étant, en tout cas, déjà assuré dans une large
mesure dès avant Vatican II dans les pays de tradition chrétienne.
Il faut donc que nous soyons très prudents lorsqu’il est question d’apporter
des modifications, en ce qui concerne le mariage et la famille, aux
positions qui sont proposées par le magistère depuis longtemps et d’une
manière qui fait autorité : dans le cas contraire, les conséquences quant à
la crédibilité de l’Église seraient très graves.
Cela ne veut pas dire que toutes les possibilités de développement soient
exclues. Une voie qui pourrait, semble-t-il, être envisagée est celle de la
révision des procès en nullité du mariage : il s’agit là, en effet, de
normes qui sont de droit ecclésial et non pas divin.
Il s’agit donc d’examiner s’il est possible de remplacer le processus
judiciaire par une procédure administrative et pastorale, qui serait
destinée essentiellement à clarifier la situation du couple devant Dieu et
devant l’Église. Toutefois il est très important que tout changement de
procédure, quel qu’il soit, ne devienne pas un prétexte pour concéder, de
manière subreptice, ce qui serait en réalité un divorce : une hypocrisie de
ce genre causerait un tort très grave à l’Église tout entière.
*
Une question qui va au-delà des aspects de procédure est celle du rapport
entre la foi de ceux qui se marient et le sacrement du mariage.
"Familiaris
Consortio" (n° 68) met à juste titre l’accent sur les raisons
qui conduisent à considérer que les gens qui demandent à contracter un
mariage canonique ont la foi, même si celle-ci est faible et nécessite une
redécouverte, un renforcement et un mûrissement. L’exhortation apostolique
souligne par ailleurs que des raisons sociales peuvent entrer, de manière
licite, dans la demande de cette forme de mariage. Par conséquent il est
suffisant que les fiancés “au moins implicitement, consentent à ce que
l’Église entend faire lorsqu’elle célèbre le mariage”.
En revanche vouloir ajouter des critères supplémentaires d’admission à la
célébration, qui concerneraient le degré de foi des candidats au mariage,
comporterait des risques graves, à commencer par celui de prononcer des
jugements infondés et discriminatoires.
Cependant c’est un fait qu’il y a aujourd’hui, malheureusement, un grand
nombre de baptisés qui n’ont jamais cru, ou qui ne croient plus, en Dieu. La
question se pose donc de savoir si ces personnes peuvent contracter de
manière valide un mariage sacramentel.
Sur ce point, il y a un texte qui conserve une valeur fondamentale : c’est
l’introduction qui avait été rédigée par le cardinal Ratzinger pour le petit
livre intitulé "Sur la pastorale des divorcés remariés", qu’avait publié en
1998 la congrégation pour la doctrine de la foi.
Ratzinger considère (Introduction, III, 4, pp. 27-28) qu’il faut décider
clairement “si vraiment tout mariage entre deux baptisés est 'ipso facto' un
mariage sacramentel”. Le Code de droit canonique affirme que oui
(canon
1055, § 2) mais, comme le fait remarquer Ratzinger, le Code lui-même dit que
cela s’applique à un mariage contracté de manière valide ; or, dans ce cas,
c’est précisément la validité qui est mise en question. Et Ratzinger
d’ajouter : “La foi appartient à l’essence du sacrement ; il reste à régler
le problème juridique de savoir quelle évidence de 'non-foi' aurait comme
conséquence qu’un sacrement ne se réalise pas”.
Par conséquent il semble bien établi que, s’il n’y a vraiment pas de foi, il
n’y a pas non plus de sacrement du mariage.
En ce qui concerne la foi implicite, la tradition scholastique, faisant
référence à He 11, 6 (“Celui qui s’approche de Dieu doit croire qu’Il existe
et qu’Il se fait le rémunérateur de ceux qui Le cherchent”), demande que
l’on ait au moins la foi en Dieu rémunérateur et sauveur.
Cependant il me semble qu’il faudrait que cette tradition fasse l’objet
d’une mise à jour, à la lumière de l’enseignement de Vatican II, sur la base
duquel “tous les hommes de bonne volonté, dans le cœur desquels la grâce
travaille d’une manière invisible”, peuvent, eux aussi, parvenir au salut
qui demande la foi, y compris ceux qui se considèrent comme athées ou ceux
qui, en tout cas, ne sont pas parvenus à une connaissance explicite de Dieu
(cf. "Gaudium
et Spes", 22 ; "Lumen
Gentium ", 16).
En tout état de cause, cet enseignement du concile n’implique absolument pas
un automatisme du salut et une suppression de la nécessité de la foi : au
contraire il met l’accent non pas sur une reconnaissance intellectuelle
abstraite de Dieu, mais bien sur une adhésion à lui, si implicite soit-elle,
en tant que décision fondamentale de notre vie.
Si l’on tient compte de ce critère, peut-être faut-il considérer que, dans
la situation actuelle, les baptisés qui, en fait, n’ont pas la foi et qui,
par conséquent, ne peuvent pas contracter de manière valide un mariage
sacramentel, sont encore plus nombreux.
Il semble donc qu’il soit véritablement opportun et urgent de s’employer à
faire la lumière à propos du problème juridique de cette “évidence de non-foi” qui rendrait non valides les mariages sacramentels et qui, à
l’avenir, empêcherait les baptisés non croyants de contracter un tel
mariage.
D’autre part nous ne devons pas nous dissimuler que, de la sorte, la voie
est ouverte à des changements très profonds et porteurs de nombreuses
difficultés, non seulement pour la pastorale de l’Église mais aussi pour la
situation des baptisés non croyants.
Il est clair, en effet, que ces derniers ont, comme tout un chacun, le droit
de se marier, ce qu’ils feront sous la forme d’un mariage civil. La
difficulté la plus importante ne réside pas dans le danger de compromettre
le rapport entre le domaine canonique et le domaine civil : en réalité la
synergie entre l’un et l’autre est déjà devenue très faible et très
problématique, parce que le mariage civil s’est éloigné progressivement de
ce qui constitue les exigences essentielles du mariage naturel lui-même.
L’engagement des chrétiens et de toutes les personnes qui sont conscientes
de l’importance humaine et sociale de la famille fondée sur le mariage
devrait plutôt avoir comme objectif d’aider les hommes et les femmes de
notre temps à redécouvrir la signification de ces exigences. Celles-ci
reposent sur l’ordre de la création et, précisément pour cette raison, elles
gardent leur valeur à toutes les époques et elles peuvent se concrétiser
sous des formes qui conviennent aux périodes les plus diverses.
Je voudrais terminer en rappelant l’intention commune qui anime ceux qui
interviennent actuellement dans le débat synodal : associer, dans la
pastorale de la famille, la vérité de Dieu et de l’homme à l’amour
miséricordieux de Dieu pour nous, qui est le cœur de l’Évangile.
À PROPOS D’INFORMATION
À l’occasion du synode organisé du 5 au 19 octobre, le bureau de presse du
Saint-Siège a créé un blog d'information en plusieurs langues.
Toutefois les interventions qui figurent sur ce blog du Vatican ont été
recueillies à l’extérieur de la salle où se déroule le synode. Parce qu’une
barrière infranchissable a été dressée autour des propos qui se tiennent à
l’intérieur.
Lors des synodes précédents, il n’en était pas ainsi. Chaque jour, deux
bulletins rédigés en différentes langues étaient diffusés afin de rendre
compte de toutes les interventions qui avaient eu lieu dans la salle, sous
forme de résumés qui étaient rédigés par les auteurs mêmes de ces
interventions.
Cette fois-ci, en revanche, seuls les noms des intervenants sont communiqués
à la presse. En ce qui concerne les propos qui ont été tenus, il n’y a de
disponible que le compte-rendu qui est fait chaque jour, verbalement, par le
père Federico Lombardi et qui est soigneusement purgé des indications
donnant la possibilité de savoir qui a dit quoi.
Le résultat qui a été immédiatement produit par ce système est un
dédoublement du synode en un synode réel et un synode virtuel, ce dernier
étant construit par les médias qui mettent systématiquement l’accent sur les
éléments qui correspondront le mieux à l’esprit du temps. Un dédoublement
que l’on avait déjà pu constater au moment du concile Vatican II, comme l’a
magistralement montré Benoît XVI lors de sa toute dernière rencontre avec le
clergé de Rome, alors qu’il avait déjà annoncé sa démission
►
La guerre des deux conciles: le vrai et le faux
(15.2.2013)
Une autre forme de censure qui a été imposée cette année aux pères synodaux
est l’interdiction qui leur a été faite de rendre publics les textes de
leurs interventions, textes qu’ils ont remis sous forme écrite, comme cela
leur avait été demandé, avant le 8 septembre dernier.
Cette interdiction leur a été communiquée verbalement, au moment de
l’ouverture du synode, par le cardinal Lorenzo Baldisseri, qui en est le
secrétaire général. La raison qui a été invoquée est que, une fois que ces
textes ont été remis, ils deviennent la propriété exclusive du synode. Lors
des synodes précédents il n’en était pas de même. Non seulement les résumés
de toutes les interventions étaient régulièrement publiés, mais chaque père
pouvait par ailleurs rendre public, s’il le souhaitait, le texte intégral de
celle-ci.
Lorsqu’il a ouvert le synode, le pape François a demandé aux pères synodaux
de s’exprimer avec “parrhésie”, avec franchise et de manière libre, sans
avoir peur que “le pape ne pense quelque chose de différent”.
Mais cette libre confrontation, c’est précisément ce que l’on avait vu se
réaliser au cours des mois précédents, pour et surtout contre les
propositions innovatrices du cardinal Walter Kasper, dont on savait qu’elles
avaient été élaborées en accord avec le pape.
À cela près que, étrangement, c’est justement Kasper et ceux qui le
soutiennent qui avaient montré qu’ils ne toléraient pas les critiques, tout
spécialement lorsque celles-ci émanaient de cardinaux de premier plan tels
que Gerhard L. Müller, le préfet de la congrégation pour la doctrine de la
foi.
Pendant le synode, le cardinal Müller a demandé que les textes des
interventions prononcées par les pères synodaux pendant les séances soient
rendus publics. En vain.
Par conséquent le verrouillage de l’information concernant le synode n’a pas
été voulu par lui, ni par les autres cardinaux qui, comme lui, se font les
défenseurs infatigables de l'indissolubilité du mariage catholique.
Celui qui l'a voulu et qui l’a décidé ne peut être, en définitive, que le
pape.
C’est également au pape qu’il faut attribuer la composition de la commission
qui a été chargée de rédiger la "Relatio Synodi" de conclusion. Or on trouve
dans cette commission une majorité écrasante de pères synodaux qui sont
favorables à la distribution de la communion aux personnes divorcées qui ont
contracté civilement un second mariage :
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France.
Source: Sandro Magister
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 13.10.2014-
T/International |