Benoît XVI assure qu'une catholicité
qui renoncerait à Rome ne serait plus catholique |
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Le 08 août 2008 -
(E.S.M.)
- En associant les deux termes, « catholique romain
», l'Église exprime la riche dialectique d'une relation mutuelle du
primat et de l'épiscopat, au sein de laquelle l'un ne peut exister sans
l'autre. Sans relation communautaire à Rome, affirme Benoît XVI, on ne
peut pas faire partie de la « catholica »
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Rome est le nom de la
catholicité - Pour
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Benoît XVI assure qu'une catholicité qui renoncerait à Rome ne serait plus
catholique
LA PAROLE DE DIEU
Rubrique : Théologie
Primauté, épiscopat et succession apostolique
1ère partie
►
Le papisme
2ème
partie ►
"Tradition" et "succession", furent
originellement très proches
3ème partie
►
La succession apostolique et le Verbe
4ème
partie
►
Les deux formes de succession apostolique - 29.07.08
(suite) Le
siège de saint Pierre et saint Paul, norme par excellence de toute
succession apostolique
Dans le concept de sedes apostolica s'exprime en fait le véritable contenu
de la revendication de la sedes Romana, et ce de façon centrale. Mais on y
trouve également l'expression de la soumission à la totalité de l'Église (pleroma).
Il en résulte, déclare Benoît XVI/Ratzinger, l'image suivante :
l'Église est la présence vivante du Verbe
divin; cette présence s'incarne dans des personnes - les évêques -, dont la
mission fondamentale est de fixer le Verbe; celles-ci représentent donc la
personnification de la « transmission » et sont, en tant que telles, dans la «
succession » des apôtres. Au sein de cette
succession, il y a la lignée distincte des sedes apostolicae qui, en fin de
compte, se concentre principalement dans le siège de saint Pierre et saint
Paul, norme par excellence de toute succession apostolique. Ainsi, les «
évêques » doivent avant tout en référer à Rome - seul le lien à Rome leur
procure à la fois la catholicité et cette pleine mesure d'apostolicité sans
lesquelles ils ne sont pas de véritables évêques; sans relation
communautaire à Rome, affirme Benoît XVI, on ne peut pas faire partie de la «
catholica ». Cette
référence des évêques à Rome est la relation primaire qui se donne à voir.
Toutefois, le siège épiscopal de Rome ne peut être uniquement auto référent.
Il donne la catholicité aux autres et, pour cette raison, il a
besoin de catholicité à son tour. C'est lui qui confère l'ordre naturel
[Wesensordnung]
de la catholicité, et c'est bien pour cela qu'il a besoin de la réalité de
la catholicité. Tout comme il est, d'un côté, le garant de la catholicité
conforme à son être [wesensmäßige] la catholicité
(véritable) se porte,
d'un autre côté, garante de lui. De même que les uns ont besoin de son
témoignage apostolique afin d'être « catholiques », de même il a besoin de
leur témoignage catholique, du témoignage de la plénitude authentique, afin
de demeurer authentique. Sans le témoignage de la réalité, il serait dans la
négation de son propre esprit. Un pape qui excommunierait l'épiscopat tout
entier n'existe pas et ne peut pas exister, car une église qui ne serait
plus que romaine ne serait plus catholique. Inversement, un épiscopat qui
excommunierait le pape n'existe également pas et ne peut légitimement pas
exister, car une catholicité qui renoncerait à Rome ne serait plus
catholique. Le concept de catholicité, s'il est bien compris, renferme à
égalité les deux concepts suivants : le titre universel de pape et la limite
intérieure de ce titre, qui reste rattaché à la loi naturelle [Wesensgesetz]
de la plénitude et donc au divinum ius des évêques.
Finalement, tout cela ouvre une perspective importante sur la question par
laquelle le problème du Verbe parvient à un point critique - la question de
l'infaillibilité de l'Église, ou plutôt du rapport entre les infaillibilités
épiscopale (conciliaire) et papale. Dans le cadre de cette contribution, il est
impossible d'analyser de plus près la controverse compliquée qui s'est
déclenchée autour de l'étude de cette question (Cf. Th. SPACIL, « Le Détenteur de l'infaillibilité ecclésiastique »,
dans ZkTh 40, 1916, 524-552; contre lui, A. STRAUB, « Existe-t-il deux
détenteurs indépendants de l'infaillibilité ecclésiastique ? », ibid. 42,
1918, 254-300; voir également H. VAN LAAK, Institutionum theol.
funda-mentalis repetitorium, Rome, 1921;W. BARTZ, L'Église doctrinaire. Une
contribution à l'ecclésiologie. M. J. Scheebens, Trêves, 1959, en
particulier p. 140-141)., au sein de laquelle la
précision des concepts a souvent été obtenue au prix d'une perte de réalité.
Nous allons simplement tenter de montrer quelle lumière projette sur ce
point ce qui a été dit jusqu'ici. On constate alors, expose Benoît XVI, que, de par sa nature,
l'infaillibilité épiscopale conciliaire ne saurait jamais s'opposer
légitimement à celle du pape : un concile « œcuménique » qui se dresserait
contre le pape s'avérerait justement non œcuménique parce qu'un concile tenu
contre ou sans le sedes Pétri ne peut pas être œcuménique, car l'œcuménicité
dépend justement et essentiellement de la participation du sedes apostolica
qui sert de référence suprême. Depuis toujours, en effet, la majorité des
évêques au sein de l'Église n'est pas déterminée en fonction d'une majorité
de sièges, mais selon le poids de ceux-ci - aussi important soit-il, le
nombre de sièges ne pourra jamais équivaloir au poids décisif du sedes
sancti Pétri : autrement, cela voudrait dire que l'on substitue des valeurs
arithmétiques profanes au
lien sacré de la Tradition. En cela, le concile n'est jamais détenteur de
façon indépendante de l'infaillibilité, ni à côté ni encore moins contre le
pape. Le pape lui-même est après tout un évêque, l'évêque œcuménique par
excellence, sans lequel l'épiscopat serait incomplet en nombre et surtout «
en poids »; sans lequel il serait nécessairement considéré comme « trop
léger ». Pour cette raison, il est acquis que les décrets papaux ex sese
sont irréformables (D 1839). D'un autre côté, comme le pape est l'évêque
œcuménique, il ne peut, s'il se conforme à son rôle, s'opposer à
l'œcuménicité, et n'en a d'ailleurs pas le droit. Il est le signe de la
véritable œcuménicité, qui, elle, est le signe qui le légitime. C'est
justement du fait de la nature profonde de son infaillibilité que le pape a
besoin de l'attestation de l'œcuménicité, non pas d'un épiscopat qui se
composerait de fonctionnaires pontificaux et serait une sorte d'ombre de
lui-même, mais bien d'évêques de droit divin à part entière, dont
l'œcuménicité concrète atteste et accomplit de façon visible sa propre
œcuménicité intérieure et essentielle. L'orientation du concile reste et
demeure nécessaire et même intangible, surtout après le constat de
l'infaillibilité papale.
Pour finir, revenons à l'expression de sociologie religieuse «
catholique
romain », le point de départ de notre étude. Elle reflète au fond,
souligne Benoît XVI, tout le cercle de problèmes et
de tâches à accomplir que nous avons abordés au fil de nos réflexions. Le
terme « catholique » transcende un christianisme qui serait exclusivement
celui de l'Écriture, et lui substitue la soumission à l'auctoritas du Verbe
vivant, c'est-à-dire à la fonction de la succession apostolique. Par le
terme « romain », cette expression confère à la fonction son orientation
fixe et centrée sur le rôle clé du successeur de saint Pierre, dans la ville
baignée du sang de deux apôtres. Enfin, en associant les deux termes, «
catholique romain », elle exprime la riche dialectique d'une relation
mutuelle du primat et de l'épiscopat, au sein de laquelle l'un ne peut
exister sans l'autre. Une Église qui ne voudrait être que « catholique »
sans référence à Rome perdrait de ce fait même sa catholicité. Une Église
qui - per impossibile - ne voudrait plus être que romaine sans être
catholique serait, elle aussi, dans le déni de soi et se ravalerait à l'état
de secte. L'adjectif « romain » est le garant de la catholicité authentique,
tandis que la catholicité factuelle atteste le droit de Rome. Ainsi
l'expression manifeste-t-elle aussi la double division qui traverse
l'Église : d'abord la division entre le « catholicisme » et le christianisme
du simple Verbe de l'Écriture, puis la division entre le christianisme
orienté vers l'office romain de saint Pierre et celui qui s'en est détaché.
Dans les deux cas, c'est en fin de compte au
niveau de la « charge » que se séparent les chemins. Cela ne rappelle-t-il
pas de façon bouleversante que la querelle des disciples de Jésus en vue des
places à la droite et à la gauche du Maître (Mc 10, 35-45; 9, 33 et suiv.)
avait déjà pour objet l'attribution des fonctions dans le royaume
messianique à venir ? Et chaque camp ne devrait-il pas se souvenir des
paroles du Seigneur, déclarant que le plus grand devait être comme le
dernier et au service de tous (Mc 9 3 35; 10, 43). Ce n'est pas une
suppression de la charge - la mission confiée à saint Pierre et la mission
confiée aux apôtres ne sont pas annulées. Mais c'est un avertissement des
plus sérieux adressé à ceux qui, en tant que détenteurs de la charge,
proclament de la Parole, ainsi qu'à leurs auditeurs. Il exhorte les premiers
à essayer d'être en toute vérité des servi servorum Dei et les autres à ne
pas refuser d'être en apparence les « derniers », afin d'accepter dans une
humble joie que c'est ainsi et pas autrement qu'ils sont de fait les «
premiers ». Ce n'est que lorsque les deux - ceux en fonction et ceux hors de
la fonction -, rechercheront ainsi, dans un climat d'innocence et sans
préjugés, l'esprit de l'Évangile, qu'il pourra exister quelque espérance en
un accord entre ceux qui - n'était la négation de cet esprit -, ne seraient
pas déchirés.
à suivre :
Essai sur la question du
concept de Tradition
"Rome est le nom de la catholicité et de la
mission" (Méditation du Regina caeli en la
Solennité de la Pentecôte 2007)
Sources : La Parole de Dieu, cardinal Ratzinger/Benoît XVI
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 08.08.2008 -
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