EXHORTATION APOSTOLIQUE POST-SYNODALE
ECCLESIA IN EUROPA
DE SA SAINTETÉ
LE PAPE JEAN-PAUL II
AUX ÉVÊQUES
AUX PRÊTRES ET AUX DIACRES
AUX PERSONNES CONSACRÉES
ET À TOUS LES FIDÈLES LAÏCS
SUR JÉSUS CHRIST
,
VIVANT DANS L'ÉGLISE,
SOURCE D'ESPÉRANCE
POUR L'EUROPE
INTRODUCTION
Annonce joyeuse pour l'Europe
1. L'Église en Europe a accompagné en esprit de participation
ses évêques réunis en Synode pour la deuxième fois, tandis qu'ils se livraient à
une méditation sur
Jésus Christ, vivant dans l'Église, source d'espérance pour l'Europe
.
C'est un thème que je veux moi aussi, reprenant avec mes
frères évêques les paroles de la Première Lettre de saint Pierre, proclamer à
tous les chrétiens d'Europe au début du troisième millénaire. « N'ayez aucune
crainte [...], ne vous laissez pas troubler. C'est le Seigneur, le Christ, que
vous devez reconnaître dans vos cœurs comme le seul Saint. Vous devez toujours
être prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent de rendre compte
de l'espérance qui est en vous » (3, 14-15).
1
Cette annonce a retenti continuellement tout au long du grand
Jubilé de l'An 2000, auquel le Synode, qui s'est tenu juste avant, a été
étroitement lié, étant en quelque sorte une porte qui s'ouvrait sur lui.
2
Le Jubilé a été « un chant unique, ininterrompu, de louange à la
Trinité », un vrai « chemin de réconciliation » et un « signe d'espérance
authentique pour ceux qui regardent le Christ et son Église ».
3
Nous laissant en héritage la joie de la rencontre vivifiante avec
le Christ, qui est « le même, hier, aujourd'hui et pour l'éternité » (
He
13, 8), il nous a proposé de nouveau le Seigneur Jésus comme fondement
unique et indéfectible de la véritable espérance.
Un deuxième Synode pour l'Europe
2. L'approfondissement du thème de l'espérance constituait
dès le début le but principal de la Deuxième Assemblée spéciale pour l'Europe du
Synode des Évêques. Dernier des séries de Synodes de caractère continental tenus
en préparation du grand Jubilé de l'An 2000,
4
il avait pour buts d'analyser la situation de l'Église en Europe et de
donner des orientations pour promouvoir une nouvelle annonce de l'Évangile,
comme je l'ai souligné dans la convocation que j'ai rendue publique le 23 juin
1996, au terme de l'Eucharistie célébrée au stade olympique de Berlin.
5
L'Assemblée synodale ne pouvait omettre de reprendre, de
vérifier et de développer ce qui était ressorti lors du précédent Synode
consacré à l'Europe, qui s'était réuni en 1991, au lendemain de la chute des
murs, sur le thème « Pour que nous soyons témoins du Christ qui nous a libérés
». Dans cette première Assemblée spéciale étaient apparues l'urgence et la
nécessité de la « nouvelle évangélisation », dans la certitude que « l'Europe ne
doit pas purement et simplement en appeler aujourd'hui à son héritage chrétien
antérieur: il lui faut trouver la capacité de décider à nouveau de son avenir
dans la rencontre avec la personne et le message de Jésus Christ ».
6
Neuf ans après, la conviction que « l'Église a le devoir
pressant d'apporter à nouveau aux Européens l'annonce libératrice de l'Évangile
»
7
s'est présentée encore une fois avec sa force stimulante. Le thème choisi
pour la nouvelle Assemblée synodale proposait encore, sous l'angle de
l'espérance, le même défi. Il s'agissait donc de proclamer cette annonce
d'espérance à une Europe qui semblait l'avoir perdue.
8
L'expérience du Synode
3. L'Assemblée synodale, qui a eu lieu du 1
er
au 23 octobre 1999, s'est avérée une précieuse
occasion de rencontre, d'écoute et de confrontation
: on y a approfondi la connaissance réciproque entre évêques des diverses
parties de l'Europe et avec le Successeur de Pierre, et tous ensemble nous avons
pu nous édifier mutuellement, grâce surtout au témoignage de ceux qui, sous les
anciens régimes totalitaires, ont supporté pour la foi de dures et longues
persécutions.
9
Une fois encore, nous avons vécu des moments de communion dans la foi et
dans la charité, animés par le désir de réaliser un fraternel « échange de dons
», enrichis réciproquement par la diversité des expériences de chacun.
10
Il en est ressorti la volonté d'accueillir l'appel que
l'Esprit adresse aux Églises en Europe pour les mobiliser face aux nouveaux
défis.
11
Le
regard rempli d'amour
, les participants de la rencontre synodale n'ont pas craint d'observer
la réalité actuelle du continent
, notant ses lumières et ses ombres. Il en ressort une claire conscience que
la situation est marquée par de graves incertitudes dans les domaines culturel,
anthropologique, éthique et spirituel. Une volonté croissante s'est affirmée
tout aussi clairement, celle de pénétrer dans cette situation et de
l'interpréter pour voir les tâches qui attendent l'Église; il en est résulté «
des orientations utiles afin de rendre toujours plus visible le visage du Christ
par une annonce plus incisive, corroborée par un témoignage cohérent ».
12
4. Le fait de vivre l'expérience synodale avec un
discernement évangélique a fait mûrir progressivement la
conscience de l'unité qui
, sans nier les différences provenant des vicissitudes historiques,
lie les diverses parties de l'Europe
. C'est une unité qui, s'enracinant dans une commune inspiration chrétienne,
sait harmoniser les traditions culturelles et qui requiert, sur le plan social
comme sur le plan ecclésial, une progression constante dans la connaissance
réciproque ouverte à un plus grand partage des valeurs de chacun.
Peu à peu, au cours du Synode,
est devenue évidente une forte propension à l'espérance
. Tout en faisant leurs les analyses de la complexité caractéristique du
continent, les Pères synodaux ont compris que la plus grande urgence peut-être
qui l'envahit, à l'Est comme à l'Ouest, est un besoin accru d'espérance, capable
de donner un sens à la vie et à l'histoire, et d'aider à marcher ensemble.
Toutes les réflexions du Synode ont cherché à répondre à ce besoin à partir
du mystère du Christ et du mystère trinitaire
. Le Synode a voulu proposer à nouveau la figure de Jésus vivant dans son
Église, révélateur du Dieu Amour qui est communion des trois Personnes divines.
L'icône de l'Apocalypse
5. Par la présente Exhortation post-synodale, je suis heureux
de pouvoir partager avec l'Église qui est en Europe les fruits de cette Deuxième
Assemblée spéciale pour l'Europe du Synode des Évêques. Je désire ainsi répondre
au souhait exprimé au terme des assises synodales, quand les Pasteurs m'ont
transmis les textes de leurs réflexions, et m'ont prié de donner à l'Église en
marche en Europe un document sur le thème même du Synode.
13
« Celui qui a des oreilles, qu'il entende ce que l'Esprit dit aux Églises! »
(
Ap
2, 7). En annonçant à l'Europe l'Évangile de l'espérance, je prendrai pour
guide le
Livre de l'Apocalypse
, « révélation prophétique » qui révèle à la communauté des croyants le sens
caché et profond de ce qui arrivera (cf.
Ap
1, 1). L'Apocalypse nous place devant une parole adressée aux communautés
chrétiennes, afin qu'elles sachent interpréter et vivre leur insertion dans
l'histoire, avec ses interrogations et ses tribulations, à la lumière de la
victoire définitive de l'Agneau immolé et ressuscité. En même temps, nous nous
trouvons face à une parole qui engage à vivre en abandonnant la tentation
permanente de bâtir la cité des hommes sans tenir compte de Dieu ou même contre
lui. En effet, si cela se vérifiait, ce serait la convivialité humaine elle-même
qui essuierait, à plus ou moins brève échéance, une défaite irrémédiable.
L'Apocalypse contient un encouragement adressé aux croyants:
au-delà de toute apparence, et même si l'on n'en voit pas encore les effets, la
victoire du Christ est déjà advenue et elle est définitive. Il s'ensuit une
tendance à se placer face aux vicissitudes humaines dans une attitude de
confiance fondamentale, qui découle de la foi dans le Ressuscité, présent et
agissant dans l'histoire.
CHAPITRE I
JÉSUS CHRIST EST NOTRE ESPÉRANCE
« Sois sans crainte. Je suis le Premier et le Dernier
,
je suis le Vivant »
(
Ap
1, 17-18)
Le Ressuscité est toujours avec nous
6. En un temps de persécutions, de tribulations et
d'égarement pour l'Église à l'époque de l'auteur de l'Apocalypse (cf.
Ap
1, 9), la parole qui retentit dans la vision est une
parole d'espérance
: « Sois sans crainte. Je suis le Premier et le Dernier, je suis le Vivant:
j'étais mort, mais me voici vivant pour les siècles des siècles, et je détiens
les clés de la mort et du séjour des morts » (
Ap
1, 17- 18). Nous sommes ainsi placés face à l'Évangile, à la « bonne
nouvelle », qui est
Jésus Christ lui- même
. Il est
le Premier et le Dernier
: en Lui, toute l'histoire trouve son commencement, sa signification, sa
direction, son accomplissement; en Lui et avec Lui, dans sa mort et sa
résurrection, tout a déjà été dit. Il est
le Vivant
: il était mort, mais maintenant il vit pour toujours. Il est
l'Agneau
qui se tient debout face au trône de Dieu (cf.
Ap
5, 6): il est
immolé
, car il a versé son sang pour nous sur le bois de la Croix; il est
debout
, car il est revenu à la vie pour toujours et il nous a montré la
toute-puissance infinie de l'amour du Père. Il
tient fermement dans ses mains les sept étoiles
(cf.
Ap
1, 16), c'est-à-dire l'Église de Dieu persécutée, en lutte contre le mal et
contre le péché, mais qui a également le droit d'être joyeuse et victorieuse
parce qu'elle est entre les mains de Celui qui a déjà vaincu le mal. Il
marche au milieu des sept chandeliers d'or
(cf.
Ap
2, 1): il est présent et agissant dans son Église en prière. Il est aussi
« celui qui vient »
(
Ap
1, 4) à travers la mission et l'action de l'Église tout au long de
l'histoire humaine; il vient comme le moissonneur eschatologique, à la fin des
temps, pour porter toute chose à son accomplissement (cf.
Ap
14, 15-16; 22, 20).
I. Défis et signes d'espérance
pour l'Église en Europe
L'obscurcissement de l'espérance
7. Cette parole est aussi adressée
aujourd'hui
aux Églises en
Europe, souvent tentées par l'obscurcissement de l'espérance
. En effet, le temps que nous vivons, avec les défis qui lui sont propres,
apparaît comme une époque d'égarement. Beaucoup d'hommes et de femmes semblent
désorientés, incertains, sans espérance, et de nombreux chrétiens partagent ces
états d'âme. Nombreux sont les
signes préoccupants
qui, au début du troisième millénaire, troublent l'horizon du
continent européen, lequel, « tout en étant riche d'immenses signes de foi et de
témoignage, et dans le cadre d'une vie commune certainement plus libre et plus
unie, ressent toute l'usure que l'histoire ancienne et récente a provoquée dans
les fibres les plus profondes de ses populations, entraînant souvent la
déception ».
14
Parmi les nombreux aspects, amplement rappelés aussi à
l'occasion du Synode
,
15
je voudrais mentionner la
perte de la mémoire et de l'héritage chrétiens
, accompagnée d'une sorte d'agnosticisme pratique et d'indifférentisme
religieux, qui fait que beaucoup d'Européens donnent l'impression de vivre sans
terreau spirituel et comme des héritiers qui ont dilapidé le patrimoine qui leur
a été légué par l'histoire. On n'est donc plus tellement étonné par les
tentatives de donner à l'Europe un visage qui exclut son héritage religieux, en
particulier son âme profondément chrétienne, fondant les droits des peuples qui
la composent sans les greffer sur le tronc irrigué par la sève vitale du
christianisme.
Certes, les prestigieux symboles de la présence chrétienne ne
manquent pas dans le continent européen, mais avec l'expansion lente et
progressive de la sécularisation, ils risquent de devenir un pur vestige du
passé. Beaucoup n'arrivent plus à intégrer le message évangélique dans
l'expérience quotidienne; il est de plus en plus difficile de vivre la foi en
Jésus dans un contexte social et culturel où le projet chrétien de vie est
continuellement mis au défi et menacé; dans de nombreux milieux de vie, il est
plus facile de se dire athée que croyant; on a l'impression que la non-croyance
va de soi tandis que la croyance a besoin d'une légitimation sociale qui n'est
ni évidente ni escomptée.
8. Cette perte de la mémoire chrétienne s'accompagne d'une
sorte de
peur d'affronter l'avenir
. L'image du lendemain qui est cultivée s'avère souvent pâle et incertaine.
Face à l'avenir, on ressent plus de peur que de désir. On en trouve des signes
préoccupants, entre autres, dans le vide intérieur qui tenaille de nombreuses
personnes et dans la perte du sens de la vie. Parmi les expressions et les
conséquences de cette angoisse existentielle, il faut compter en particulier la
dramatique diminution de la natalité, la baisse des vocations au sacerdoce et à
la vie consacrée, la difficulté, sinon le refus, de faire des choix définitifs
de vie, même dans le mariage.
On assiste à une
fragmentation
diffuse
de l'existence
; ce qui prévaut, c'est une sensation de solitude; les divisions et les
oppositions se multiplient. Parmi les autres symptômes de cet état de fait, la
situation actuelle de l'Europe connaît le grave phénomène des crises de la
famille et de la disparition du concept même de famille, la persistance ou la
réactivation de conflits ethniques, la résurgence de certaines attitudes
racistes, les tensions interreligieuses elles-mêmes, l'attitude égocentrique qui
enferme les personnes et les groupes sur eux-mêmes, la croissance d'une
indifférence éthique générale et de la crispation excessive sur ses propres
intérêts et privilèges. Pour beaucoup de personnes, au lieu d'orienter vers une
plus grande unité du genre humain, la mondialisation en cours risque de suivre
une logique qui marginalise les plus faibles et qui accroît le nombre des
pauvres sur la terre.
Parallèlement à l'expansion de l'individualisme, on note un
affaiblissement croissant de la solidarité
entre les personnes: alors que les institutions d'assistance accomplissent
un travail louable, on observe une disparition du sens de la solidarité, de
sorte que, même si elles ne manquent pas du nécessaire matériel, beaucoup de
personnes se sentent plus seules, livrées à elles-mêmes, sans réseau de soutien
affectif.
9. À la racine de la perte de l'espérance se trouve la
tentative de faire prévaloir une anthropologie sans Dieu et sans le Christ
. Cette manière de penser a conduit à considérer l'homme comme « le centre
absolu de la réalité, lui faisant occuper faussement la place de Dieu. On oublie
alors que ce n'est pas l'homme qui fait Dieu, mais Dieu qui fait l'homme.
L'oubli de Dieu a conduit à l'abandon de l'homme », et c'est pourquoi, « dans ce
contexte, il n'est pas surprenant que se soient largement développés le
nihilisme en philosophie, le relativisme en gnoséologie et en morale, et le
pragmatisme, voire un hédonisme cynique, dans la manière d'aborder la vie
quotidienne ».
16
La culture européenne donne l'impression d'une « apostasie silencieuse »
de la part de l'homme comblé qui vit comme si Dieu n'existait pas.
Dans une telle perspective prennent corps les tentatives,
renouvelées tout récemment encore, de présenter la culture européenne en faisant
abstraction de l'apport du christianisme qui a marqué son développement
historique et sa diffusion universelle. Nous sommes là devant l'apparition d'une
nouvelle culture
, pour une large part influencée par les médias, dont les caractéristiques
et le contenu sont souvent contraires à l'Évangile et à la dignité de la
personne humaine. De cette culture fait partie aussi un agnosticisme religieux
toujours plus répandu, lié à un relativisme moral et juridique plus profond, qui
prend racine dans la perte de la vérité de l'homme comme fondement des droits
inaliénables de chacun. Les signes de la disparition de l'espérance se
manifestent parfois à travers des formes préoccupantes de ce que l'on peut
appeler une « culture de mort ».
17
L'inéluctable nostalgie de l'espérance
10. Mais, comme l'ont souligné les Pères synodaux, «
l'homme ne peut pas vivre sans espérance
: sa vie serait vouée à l'insignifiance et deviendrait insupportable ».
18
Bien souvent, celui qui a besoin d'espérance croit pouvoir trouver un
apaisement dans des réalités éphémères et fragiles. Et ainsi, l'
espérance
, emprisonnée
dans un milieu purement humain
fermé à la transcendance, est identifiée, par exemple, au paradis promis
par la science et par la technique, ou à des formes diverses de messianisme, au
bonheur de nature hédoniste procuré par le consumérisme ou au bonheur imaginaire
et artificiel produit par des stupéfiants, à certaines formes de millénarisme, à
l'attrait des philosophies orientales, à la recherche de formes de spiritualité
ésotériques, aux divers courants du
New Age
.
19
Mais tout cela se révèle profondément illusoire et incapable
de satisfaire la soif de bonheur que le cœur de l'homme continue à ressentir en
lui-même. Ainsi subsistent et s'intensifient les signes préoccupants de la
disparition de l'espérance, qui parfois se manifestent même à travers des formes
d'agressivité et de violence.
20
Signes d'espérance
11. Aucun être humain ne peut vivre sans perspectives
d'avenir, et moins encore l'Église, qui vit dans l'attente du Royaume qui vient
et qui est déjà présent dans ce monde. Il serait injuste de ne pas voir
les signes
de l'influence
de l'Évangile du Christ
dans la vie des sociétés. Les Pères synodaux les ont recherchés et
soulignés.
Il faut inscrire parmi ces signes le retour à la liberté pour
l'Église dans l'Est européen, avec les nouvelles possibilités ainsi ouvertes
pour l'action pastorale; le fait pour l'Église de se concentrer sur sa mission
spirituelle et sur son engagement à vivre le primat de l'évangélisation, même
dans ses rapports avec la réalité sociale et politique; la prise de conscience
accrue de la mission propre de tous les baptisés, dans la diversité et la
complémentarité des dons et des tâches; la présence plus marquée de la femme
dans les structures et dans les milieux de la communauté chrétienne.
Une communauté de peuples
12. En considérant l'Europe en tant que communauté de
citoyens, on ne manque pas de
signes qui ouvrent à l'espérance
; malgré les contradictions de l'histoire, nous pouvons, avec un regard de
foi, voir en eux la présence de l'Esprit de Dieu qui renouvelle la face de la
terre. Les Pères synodaux les ont décrits ainsi à la fin de leurs travaux: «
Nous constatons avec joie
l'ouverture
croissante des peuples les uns aux autres, la
réconciliation
entre nations longtemps hostiles et ennemies,
l'élargissement
progressif du processus d'unification aux pays de l'Est européen.
Reconnaissances,
collaborations et échanges
de tous ordres sont en développement, de sorte que se crée peu à peu
une culture européenne, on peut même dire une
conscience européenne
, dont nous espérons qu'elle pourra faire croître, spécialement auprès des
jeunes, le sentiment de la fraternité et la volonté du partage. Nous
enregistrons comme positif le fait que tout ce processus se développe selon des
méthodes
démocratiques
, sur un mode pacifique et dans un esprit de
liberté
qui respecte et valorise les légitimes diversités, suscitant et soutenant
le processus d'
unification de l'Europe
. Nous saluons avec satisfaction ce qui a été fait pour préciser les
conditions et les modalités du respect des
droits humains
. Dans le contexte, enfin, de la légitime et nécessaire unité économique et
politique en Europe, tandis que nous enregistrons les signes de l'espérance
qu'offre la considération accordée au
droit
et à la
qualité de la vie
, nous souhaitons vivement que, dans une fidélité créatrice à la tradition
humaniste et chrétienne de notre continent, soit garanti le primat des
valeurs éthiques et spirituelles
».
21
Les martyrs et les témoins de la foi
13. Mais je voudrais attirer l'attention en particulier sur
certains signes qui se sont manifestés dans la vie proprement ecclésiale. Tout
d'abord, avec les Pères synodaux, je veux proposer de nouveau à tous, afin qu'il
ne soit jamais oublié, le grand signe d'espérance constitué par les nombreux
témoins de la foi chrétienne
qui ont vécu au siècle dernier, à l'Est comme à l'Ouest. Ils ont su faire
leur l'Évangile dans des situations d'hostilité et de persécution, souvent
jusqu'à l'épreuve finale de l'effusion du sang.
Ces témoins, en particulier ceux qui ont affronté l'épreuve
du martyre, sont un signe éloquent et grandiose, qu'il nous est demandé de
contempler et d'imiter. Ils attestent à nos yeux la vitalité de l'Église; ils
nous apparaissent comme une lumière pour l'Église et pour l'humanité, car ils
ont fait resplendir dans les ténèbres la lumière du Christ; appartenant à
diverses confessions chrétiennes, ils resplendissent de ce fait comme un signe
d'espérance pour le cheminement œcuménique, dans la certitude que leur sang «
est aussi une sève d'unité pour l'Église ».
22
Plus radicalement encore, ils nous disent que
le martyre
est l'incarnation suprême de l'Évangile de l'espérance: « En effet, les
martyrs annoncent cet Évangile et en témoignent par leur vie jusqu'à l'effusion
du sang, car ils sont certains de ne pas pouvoir vivre sans le Christ et ils
sont prêts à mourir pour lui, dans la conviction que Jésus est le Seigneur et le
Sauveur des hommes et qu'en lui seulement l'homme peut donc trouver la véritable
plénitude de la vie. De cette façon, selon l'avertissement de l'Apôtre Pierre,
ils se montrent prêts à rendre compte de l'espérance qui est en eux (cf.
1 P
3, 15). En outre, les martyrs célèbrent l' Évangile de l'espérance , car
l'offrande de leur vie est la manifestation la plus grande et la plus radicale
de ce sacrifice vivant, saint et accepté par Dieu, qui constitue le véritable
culte spirituel (cf.
Rm
12, 1), origine, âme et sommet de toute célébration chrétienne. Enfin, ils
servent l' Évangile de l'espérance parce que, par leur martyre, ils expriment au
plus haut degré l'amour et le service de l'homme, en ce qu'ils démontrent que
l'obéissance à la loi évangélique engendre une vie morale et une convivialité
qui honorent et promeuvent la dignité et la liberté de chaque personne ».
23
La sainteté de beaucoup
14. La conversion opérée par l'Évangile a donné comme fruit
la
sainteté
de beaucoup d'hommes et de femmes de notre temps. Non seulement de ceux qui
ont été proclamés officiellement comme tels par l'Église, mais aussi de ceux
qui, avec simplicité et dans la vie quotidienne, ont donné le témoignage de leur
fidélité au Christ. Comment ne pas penser aux innombrables fils et filles de
l'Église qui, tout au long de l'histoire du continent européen, ont vécu une
généreuse et authentique sainteté dans le secret de la vie familiale,
professionnelle et sociale? « Tous ensemble, tels des pierres vivantes adhérant
au Christ, la pierre angulaire , ils ont construit l'Europe comme édifice
spirituel et moral, en laissant à la postérité l'héritage le plus précieux. Le
Seigneur Jésus l'avait promis: Celui qui croit en moi accomplira les mêmes
œuvres que moi. Il en accomplira même de plus grandes, puisque je pars vers le
Père (
Jn
14, 12). Les saints sont la preuve vivante de l'accomplissement de cette
promesse et ils encouragent à croire que cela est possible, même dans les heures
les plus difficiles de l'histoire ».
24
La paroisse et les mouvements ecclésiaux
15. L'Évangile continue à porter ses fruits dans les
communautés paroissiales, parmi les personnes consacrées, dans les associations
de laïcs, dans les groupes de prière et d'apostolat, dans diverses communautés
de jeunes, comme aussi à travers la présence et la diffusion de réalités et de
mouvements ecclésiaux nouveaux. En chacun d'eux, en effet, le même Esprit sait
susciter un don de soi renouvelé à l'Évangile, une généreuse disponibilité pour
le service, une vie chrétienne marquée par la radicalité évangélique et par
l'élan missionnaire.
Aujourd'hui encore en Europe, dans les pays anciennement
communistes comme en Occident,
la paroisse
, tout en ayant besoin d'un renouvellement constant,
25
garde encore et continue d'exercer une mission indispensable et de grande
actualité dans le domaine pastoral et ecclésial. Elle reste en mesure d'offrir
aux fidèles le milieu adapté pour un exercice réel de la vie chrétienne et
d'être le lieu d'une authentique humanisation et socialisation, que ce soit dans
un contexte de dispersion et d'anonymat propre aux grandes villes modernes, ou
dans les zones rurales peu peuplées.
26
16. En même temps, tandis que j'exprime ma grande estime pour
la présence et l'action des diverses associations et organisations d'apostolat,
en particulier de l'Action catholique, avec les Pères synodaux je voudrais
souligner la contribution propre que peuvent offrir, en communion avec les
autres réalités ecclésiales et jamais de manière isolée,
les nouveaux mouvements ecclésiaux et les nouvelles communautés ecclésiales
. En effet, « ils aident les chrétiens à vivre plus radicalement selon
l'Évangile; ils sont le berceau de diverses vocations et ils engendrent de
nouvelles formes de consécration; ils promeuvent surtout la vocation des laïcs
et l'amènent à s'exprimer dans les divers milieux de vie; ils favorisent la
sainteté du peuple; ils peuvent être une annonce et une exhortation pour ceux
qui n'ont pas d'autre occasion de rencontrer l'Église; bien souvent, ils
soutiennent le cheminement œcuménique et ouvrent les voies au dialogue
interreligieux; ils sont un antidote contre la diffusion des sectes; ils
apportent une aide importante à la diffusion de la vivacité et de la joie dans
l'Église ».
27
Le cheminement œcuménique
17. Nous remercions le Seigneur pour le grand et stimulant
signe d'espérance constitué par les
progrès qu'a su réaliser le cheminement œcuménique
à l'enseigne de la vérité, de la charité et de la réconciliation. Il s'agit
là de l'un des grands dons de l'Esprit Saint pour un continent comme l'Europe,
qui a donné naissance aux graves divisions entre les chrétiens du deuxième
millénaire et qui souffre encore beaucoup de leurs conséquences.
Je me souviens avec émotion de certains moments de grande
intensité vécus durant les travaux synodaux et de la conviction unanime,
exprimée également par les Délégués fraternels, que ce cheminement – malgré les
problèmes qui subsistent encore et ceux, nouveaux, qui naissent peu à peu – ne
peut être interrompu, mais qu'il doit se poursuivre avec une ardeur renouvelée,
avec une détermination plus profonde et avec l'humble disposition de tous au
pardon réciproque. Je fais volontiers miennes certaines expressions des Pères
synodaux, car « le progrès dans le dialogue œcuménique, qui a son fondement le
plus profond dans le Verbe même de Dieu, représente un signe de grande espérance
pour l'Église d'aujourd'hui: la croissance de l'unité entre les chrétiens est en
effet un enrichissement mutuel pour tous ».
28
Il faut « considérer avec joie les progrès obtenus jusqu'à maintenant
dans le dialogue, tant avec les frères des Églises orthodoxes qu'avec ceux des
Communautés ecclésiales provenant de la Réforme, reconnaissant en eux un signe
de l'action de l'Esprit, pour laquelle nous devons louer et remercier le
Seigneur ».
29
II. Revenir au Christ
,
source de toute espérance
Confesser notre foi
18. De l'Assemblée synodale a jailli, lumineuse et puissante,
la certitude que l'Église doit offrir à l'Europe le bien le plus précieux, que
personne d'autre ne peut lui donner: la foi en Jésus Christ, source de
l'espérance qui ne déçoit pas.
30
Ce don est à l'origine de l'unité spirituelle et culturelle des peuples
européens et, aujourd'hui encore comme à l'avenir, il peut constituer une
contribution essentielle à leur développement et à leur intégration. Oui, en ce
début du troisième millénaire, après vingt siècles, l'Église se présente
toujours avec la même annonce, qui constitue son unique trésor: Jésus Christ est
le Seigneur; en Lui et en nul autre est le salut (cf.
Ac
4, 12). La source de l'espérance, pour l'Europe et pour le monde entier,
c'est le Christ, et l'Église est « le chemin par lequel passe et se répand la
vague de grâce surgie du Cœur transpercé du Rédempteur ».
31
À partir de cette confession de foi jaillit de nos cœurs et
de nos lèvres « une joyeuse [...]
confession d'espérance
: Toi, Seigneur ressuscité et vivant, [...] tu es l'unique et vraie
espérance de l'homme et de l'histoire; tu es parmi nous l'espérance de la gloire
(
Col
1, 27), déjà en cette vie et aussi par-delà la mort. En toi et avec
toi, nous pouvons accéder à la vérité, notre existence a un sens, la communion
est possible, la diversité peut devenir richesse, la puissance du Règne est à
l'œuvre dans l'histoire et aide à l'édification de la cité des hommes, la
charité donne une valeur durable aux efforts de l'humanité, la souffrance peut
devenir salvifique, la vie vaincra la mort, la création participera à la gloire
des fils de Dieu ».
32
Jésus Christ, notre espérance
19. Jésus Christ est notre espérance parce que Lui, le Verbe
éternel qui est éternellement dans le sein du Père (cf.
Jn
1, 18), nous a aimés au point d'assumer notre nature humaine, excepté le
péché, partageant notre vie pour nous sauver. La confession de cette vérité est
au cœur même de notre foi. La perte de la vérité sur Jésus Christ ou son
incompréhension empêchent de pénétrer dans le mystère même de l'amour de Dieu et
de la communion trinitaire.
33
Jésus Christ est notre espérance parce qu'Il
révèle le mystère de la Trinité
. Tel est le centre de la foi chrétienne qui peut encore offrir, comme elle
l'a fait jusqu'à présent, une importante contribution à la mise en place de
structures qui, en s'inspirant des grandes valeurs évangéliques ou en se
mesurant à leur aune, promeuvent la vie, l'histoire et la culture des différents
peuples du continent.
Nombreuses sont les racines qui, par leur sève, ont conduit à
reconnaître la valeur de la personne et de sa dignité inaliénable, le caractère
sacré de la vie humaine et le rôle central de la famille, l'importance de
l'enseignement et de la liberté de pensée, d'expression et de religion, tout
comme elles ont conduit à la protection juridique des individus et des groupes,
à la promotion de la solidarité et du bien commun, à la reconnaissance de la
dignité du travail. Ces racines ont favorisé la sujétion du pouvoir politique à
la loi et au respect du droit des personnes et des peuples. Il convient de
rappeler ici l'esprit de la Grèce antique et de Rome, l'apport des peuples
celtes, germaniques, slaves, finno-ougriens, ainsi que de la culture juive et du
monde de l'islam. Mais il faut reconnaître que, historiquement parlant, ces
inspirations ont trouvé dans la tradition judéo-chrétienne une force capable de
les harmoniser, de les consolider et de les promouvoir. C'est un fait que l'on
ne peut ignorer; au contraire, dans le processus de construction de la « maison
commune européenne », il faut reconnaître que cet édifice doit s'appuyer aussi
sur les valeurs qui ont trouvé dans la tradition chrétienne leur pleine
manifestation. En prendre acte tourne à l'avantage de tous.
L'Église « n'a pas qualité pour exprimer une préférence en
faveur de l'une ou l'autre solution institutionnelle ou constitutionnelle » de
l'Europe, et elle veut donc respecter de manière cohérente la légitime autonomie
de l'ordre civil.
34
Mais elle a le devoir de raviver dans le cœur des chrétiens d'Europe la
foi en la Trinité, en sachant bien qu'une telle foi est un signe avant-coureur
d'une authentique espérance pour le continent. Bien des grands paradigmes de
référence mentionnés ci-dessus, qui sont à la base de la civilisation
européenne,
ont
leurs racines les plus profondes dans la foi trinitaire. Cette dernière
porte en elle une extraordinaire puissance spirituelle, culturelle et éthique,
capable, entre autres, d'éclairer aussi certaines grandes questions qui se
posent aujourd'hui en Europe, telles que la désagrégation sociale et la perte
d'une référence qui donne un sens à la vie et à l'histoire. Il apparaît donc
nécessaire de renouveler la réflexion théologique, spirituelle et pastorale du
mystère trinitaire.
35
20. Les Églises particulières en Europe
ne sont
pas de simples entités ou organisations privées. En réalité, elles
déploient leur action dans une dimension institutionnelle spécifique qui mérite
d'être mise en valeur sur le plan juridique, dans le plein respect du bon
ordonnancement civil. Réfléchissant sur elles-mêmes, les communautés chrétiennes
doivent se découvrir à nouveau comme un don par lequel Dieu enrichit les peuples
qui vivent sur le continent. Telle est l'annonce joyeuse qu'elles sont appelées
à transmettre à toute personne. En approfondissant la dimension missionnaire qui
leur est propre, elles doivent attester constamment que Jésus Christ « est
l'unique médiateur, porteur de salut pour l'humanité tout entière
: en lui seulement l'humanité, l'histoire et le cosmos trouvent leur
signification définitivement positive et se réalisent en totalité; il recèle en
lui-même, dans son événement et dans sa personne, les raisons ultimes du salut;
il n'est pas seulement un médiateur de salut, il est aussi la source même de ce
salut ».
36
Dans le contexte actuel du pluralisme éthique et religieux
qui caractérise de plus en plus l'Europe, il est donc nécessaire de confesser et
de proposer à nouveau la vérité sur le Christ, unique Médiateur entre Dieu et
les hommes, et unique Rédempteur du monde. C'est pourquoi – comme je l'ai fait à
la fin de l'Assemblée synodale – avec toute l'Église j'invite mes frères et
sœurs dans la foi à savoir constamment s'ouvrir en toute confiance au Christ et
à se laisser renouveler par lui, annonçant à toute personne de bonne volonté,
avec la force de la paix et de l'amour, que celui qui rencontre le Seigneur
connaît la Vérité, découvre la Vie, trouve la Voie qui y conduit (cf.
Jn
14, 6;
Ps
16 [15], 11). Par le style de vie des chrétiens et par leur témoignage en
parole, les habitants de l'Europe pourront découvrir que le Christ est l'avenir
de l'homme. Dans la foi de l'Église, « il n'y a pas sous le ciel d'autre nom
donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés » (
Ac
4, 12).
37
21. Pour les croyants, Jésus Christ est l'espérance de toute
personne parce qu'il
donne la vie éternelle.
Il est « le Verbe de vie » (
1 Jn
1, 1), venu dans le monde pour que les hommes « aient la vie et l'aient en
surabondance » (
Jn
10, 10). Il nous montre ainsi que le sens véritable de l'existence de
l'homme ne reste pas enfermé sur l'horizon humain, mais qu'il s'ouvre sur
l'éternité. Chaque Église particulière en Europe a la mission de prendre en
compte la soif de vérité de toute personne et le besoin de valeurs authentiques
susceptibles d'animer les peuples du continent. Avec une énergie renouvelée, il
lui revient de présenter la nouveauté qui la fait vivre. Il s'agit de mettre en
œuvre une action culturelle et missionnaire organique qui, par des activités et
des argumentations convaincantes, montre que la nouvelle Europe a besoin de
retrouver ses racines profondes. Dans ce contexte, ceux qui s'inspirent des
valeurs évangéliques ont une fonction essentielle à exercer, qui fait partie du
fondement solide sur lequel doit être édifiée une convivialité plus humaine et
plus pacifique, parce qu'elle respecte tous et chacun.
Il est nécessaire que les Églises particulières en Europe
sachent redonner à l'espérance sa dimension eschatologique originale.
38
La véritable espérance chrétienne est en effet théologale et
eschatologique, fondée sur le Ressuscité qui viendra de nouveau comme Rédempteur
et Juge, et qui nous appelle à la résurrection et au bonheur éternel.
Jésus Christ vivant dans l'Église
22. En retournant au Christ, les peuples européens pourront
retrouver l'espérance qui seule offre une plénitude de sens à la vie.
Aujourd'hui encore, ils peuvent le rencontrer car
Jésus est présent, il vit et il agit au cœur de son Église
: il est dans l'Église et l'Église est en lui (cf.
Jn
15, 1ss;
Ga
3, 28;
Ep
4, 15-16;
Ac
9, 5). En elle, par le don de l'Esprit Saint, il poursuit constamment son
œuvre de salut.
39
Avec les yeux de la foi, nous devenons capables de voir la
présence mystérieuse de Jésus dans les divers signes qu'il nous a laissés. Avant
tout, il est présent dans la sainte Écriture, qui, en toutes ses parties, parle
de Lui (cf.
Lc
24, 27. 44- 47). Cependant, de manière vraiment unique, il est présent sous
les espèces eucharistiques. Cette « présence, on la nomme réelle , non à titre
exclusif, comme si les autres présences n'étaient pas réelles , mais par
excellence parce qu'elle est
substantielle
et que par elle le Christ, Homme-Dieu, se rend présent tout entier ».
40
En effet, dans l'Eucharistie « sont contenus
vraiment, réellement et substantiellement
, le Corps et le Sang conjointement avec l'âme et la divinité de notre
Seigneur Jésus Christ, et, par conséquent, le Christ tout entier ».
41
« L'Eucharistie est vraiment
mysterium fidei
, mystère qui dépasse notre intelligence et qui ne peut être accueilli que
dans la foi ».
42
Réelle aussi est la présence de Jésus dans les autres actions liturgiques
que l'Église célèbre en son nom. Au nombre de celles-ci, il faut compter les
sacrements, actions du Christ qu'il accomplit par l'intermédiaire des hommes.
43
Jésus est aussi présent dans le monde par d'autres modes tout
à fait réels, et spécialement dans ses disciples qui, fidèles au double
commandement de la charité, adorent Dieu en esprit et en vérité (cf.
Jn
4, 24) et témoignent par leur vie de l'amour fraternel qui les fait
reconnaître comme disciples du Seigneur (cf.
Mt
25, 31-46;
Jn
13, 35; 15, 1-17).
44
CHAPITRE II
L'ÉVANGILE DE L'ESPÉRANCE
CONFIÉ À L'ÉGLISE
DU NOUVEAU MILLÉNAIRE
« Réveille-toi, ranime ce qui te reste
de vie défaillante! » (Ap
3, 2)
I. Le Seigneur appelle à la conversion
Jésus s'adresse aujourd'hui à nos Églises
23. « Ainsi parle celui qui tient les sept étoiles en sa droite et qui marche
au milieu des sept candélabres d'or [...], le Premier et le Dernier, celui qui
fut mort et qui a repris vie [...], le Fils de Dieu » (
Ap
2, 1. 8. 18). C'est
Jésus lui-même
qui
parle à son Église
. Son message s'adresse à toutes les Églises particulières et concerne leur
vie interne, parfois marquée par la présence de conceptions et de mentalités
incompatibles avec la tradition évangélique, souvent en butte à diverses formes
de persécutions et, de façon plus périlleuse encore, menacée par des symptômes
préoccupants de sécularisation, de perte de la foi des origines, de compromis
avec la logique du monde. Il est fréquent que les communautés aient perdu
l'amour d'antan (cf.
Ap
2, 4).
On constate que
nos communautés ecclésiales
sont affrontées à des faiblesses, à des lassitudes et à des contradictions.
Elles ont besoin, elles aussi, d'écouter à nouveau la voix de l'Époux qui les
invite à la conversion, qui les pousse à se lancer avec audace sur des chemins
nouveaux et qui les appelle à s'engager dans la grande œuvre de la « nouvelle
évangélisation ». L'Église doit constamment se soumettre au jugement de la
parole du Christ et vivre son existence humaine dans un état de purification
pour être toujours plus et toujours mieux l'Épouse sans tache ni ride, revêtue
de lin d'une blancheur éclatante (cf.
Ep
5, 27;
Ap
19, 7-8).
C'est ainsi que
Jésus Christ appelle nos Églises en Europe à la conversion
et elles deviennent alors, avec leur Seigneur et par la force de sa
présence, porteuses d'espérance pour l'humanité.
L'action de l'Évangile tout au long de l'histoire
24.
L'Europe a été largement et profondément pénétrée par le christianisme
. « Il n'y a pas de doute que, dans l'histoire complexe de l'Europe, le
christianisme représente un élément central et caractéristique, renforcé par le
solide fondement de l'héritage classique et des contributions multiples
apportées par divers mouvements ethniques et culturels qui se sont succédée au
cours des siècles. La foi chrétienne a façonné la culture du continent et a été
mêlée de façon inextricable à son histoire, au point que celle-ci serait
incompréhensible sans référence aux événements qui ont caractérisé d'abord la
grande période de l'évangélisation, puis les longs siècles au cours desquels le
christianisme, malgré la douloureuse division entre l'Orient et l'Occident,
s'est affirmé comme la religion des Européens eux-mêmes. Dans la période moderne
et contemporaine aussi, lorsque l'unité religieuse s'est progressivement
fractionnée tant à cause de nouvelles divisions intervenues entre les chrétiens
qu'en raison des processus qui ont amené la culture à se détacher des
perspectives de la foi, le rôle de cette dernière a gardé un relief non
négligeable ».
45
25.
L'intérêt que l'Église porte à l'Europe
provient de sa nature même et de sa mission. Tout au long des siècles en
effet, l'Église a eu des liens très étroits avec notre continent, si bien que le
visage spirituel de l'Europe s'est trouvé modelé par les efforts de grands
missionnaires, par le témoignage de saints et de martyrs, et par l'action
assidue de moines, de religieux et de pasteurs. À partir de la conception
biblique de l'homme, l'Europe a forgé sa culture humaniste dans ce qu'elle a de
meilleur; elle y a puisé son inspiration pour ses créations intellectuelles et
artistiques; elle a élaboré des normes de droit et, par-dessus tout, elle a
promu la dignité de la personne, source de droits inaliénables.
46
Ainsi l'Église, dépositaire de l'Évangile, a contribué à répandre et à
affermir les valeurs qui ont donné un caractère universel à la culture
européenne.
Se souvenant de tout cela, l'Église d'aujourd'hui se rend compte, avec une
responsabilité renouvelée, qu'il est urgent de ne pas perdre ce précieux
patrimoine et d'aider l'Europe à se construire elle-même en redonnant vie aux
racines chrétiennes de ses origines.
47
Pour façonner un véritable visage d'Église
26. Que l'ensemble de l'Église en Europe entende comme lui étant adressés le
commandement et l'invitation du Seigneur: reviens à moi, convertis-toi, «
Réveille-toi, ranime ce qui te reste de vie défaillante! » (
Ap
3, 2). C'est une exigence qui se fait jour aussi lorsqu'on observe notre
temps: « La grave situation d'indifférence religieuse de tant d'Européens, le
grand nombre de ceux qui, sur notre continent aussi, ne connaissent pas encore
Jésus Christ et son Église, et qui ne sont pas encore baptisés, le sécularisme
qui gagne une large frange de chrétiens qui pensent, décident et vivent de
manière habituelle comme si le Christ n'existait pas , tout cela, loin
d'éteindre notre espérance, la rend plus humble et plus capable de se fier à
Dieu seul. De sa miséricorde, nous recevons
la grâce et l'engagement de la conversion
».
48
27. Même si parfois, comme dans l'épisode évangélique de la tempête apaisée
(cf.
Mc
4, 35-41;
Lc
8, 22-25), on a l'impression que le Christ dort et abandonne sa barque à la
fureur des vagues, il est demandé à l'Église en Europe de
cultiver la certitude que le Seigneur
, par le don de son Esprit,
est toujours présent et agit toujours en elle et dans l'histoire de
l'humanité
. Il prolonge sa mission dans le temps, faisant de l'Église un fleuve de vie
nouvelle qui se répand dans la vie de l'humanité comme un signe d'espérance pour
tous.
Dans un contexte où l'on est facilement tenté par l'activisme, même sur le
plan pastoral, il est demandé aux chrétiens en Europe de continuer à
être un vrai reflet du Ressuscité, en vivant dans une communion intime
avec lui
. On a besoin de communautés qui, contemplant et imitant la Vierge Marie,
figure et modèle de l'Église par sa foi et sa sainteté
,
49
gardent le sens de la vie liturgique et de la vie intérieure. Avant tout
et surtout, elles devront louer le Seigneur, le prier, l'adorer et écouter sa
Parole. Ce n'est qu'ainsi qu'elles pourront assimiler son mystère, vivant
totalement pour Lui, comme membres de son Épouse fidèle.
28. Face aux influences permanentes qui poussent à la division et à
l'opposition, les diverses Églises particulières en Europe, fortes de leur lien
avec le Successeur de Pierre, doivent s'engager à
être véritablement lieu et instrument de communion
pour tout le peuple de Dieu, dans la foi et dans l'amour.
50
C'est pourquoi elles cultiveront un climat de charité fraternelle, vécue
avec une radicalité évangélique, au nom de Jésus et de son amour; elles
développeront une ambiance de rapports amicaux, de communication, de
coresponsabilité, de participation, de conscience missionnaire, d'attention et
de service; elles seront animées par des attitudes d'estime, d'accueil et de
correction mutuelle (cf.
Rm
12, 10; 15, 7-14), ainsi que de service et de soutien réciproque (cf.
Ga
5, 13; 6, 2), de pardon mutuel (cf.
Col
3, 13) et d'édification les uns des autres (
1 Th
5, 11); elles s'emploieront à poursuivre une pastorale qui, mettant en
valeur toutes les légitimes diversités, favorise en même temps une collaboration
cordiale entre tous les fidèles et leurs différentes associations; elles
relanceront pour cela les organismes de participation, qui sont de précieux
instruments de communion en vue d'une action missionnaire concertée, suscitant
la présence d'agents pastoraux préparés de manière appropriée et dûment
qualifiés. Ainsi, ces Églises, animées par la communion qui est manifestation de
l'amour de Dieu, fondement et raison de l'espérance qui ne déçoit pas (cf.
Rm
5, 5), seront à la fois un reflet plus resplendissant de la Trinité et un
signe qui interpelle et invite à croire (cf.
Jn
17, 21).
29. Pour que la communion dans l'Église puisse être vécue plus pleinement, il
convient de
mettre en valeur la variété des charismes et des vocations
, qui convergent toujours plus vers l'unité et qui peuvent l'enrichir (cf.
1 Co
12). Dans cette perspective, il est également nécessaire, d'une part, que
les nouveaux mouvements et les nouvelles communautés d'Église, « renonçant à
toute tentation de revendiquer des droits d'aînesse et à toute incompréhension
des uns à l'égard des autres », progressent sur le chemin d'une plus authentique
communion entre eux et avec toutes les autres réalités ecclésiales, et qu'ils «
vivent avec amour dans la pleine obéissance aux Évêques »; d'autre part, il est
nécessaire aussi que les Évêques, « en leur manifestant l'amour paternel qui est
le propre des pasteurs »,
51
sachent reconnaître, mettre en valeur et coordonner leurs charismes et
leur présence, pour l'édification de l'unique Église.
En effet, par une collaboration croissante entre les différentes réalités
ecclésiales sous la conduite aimante des pasteurs, l'Église entière pourra
présenter à tous un visage plus beau et plus crédible, reflet plus limpide de
celui du Seigneur, et elle pourra ainsi contribuer à redonner espérance et
consolation à ceux qui la cherchent comme à ceux qui, bien qu'ils ne la
cherchent pas, en ont besoin.
Afin de pouvoir répondre à l'appel de l'Évangile à la conversion, « il nous
faut faire tous ensemble un humble et courageux
examen de conscience
pour reconnaître nos peurs et nos erreurs, pour confesser avec sincérité
nos lenteurs, nos omissions, nos infidélités et nos fautes ».
52
Loin de favoriser des attitudes défaitistes de découragement, la
reconnaissance évangélique de ses propres fautes ne pourra que susciter dans la
communauté l'expérience que vit le baptisé: la joie d'une profonde libération et
la grâce d'un nouveau départ, ce qui permet de poursuivre avec une vigueur
renouvelée le chemin de l'évangélisation.
Pour progresser vers l'unité des chrétiens
30. Enfin, c'est aussi
dans le domaine œcuménique
que l'Évangile de l'espérance est une force et un appel
à la conversion
. Dans la certitude que l'unité des chrétiens répond à la volonté du
Seigneur « pour qu'ils soient un » (cf.
Jn
17, 11) et qu'elle se présente aujourd'hui comme une nécessité pour une
plus grande crédibilité de l'évangélisation et comme une contribution à l'unité
de l'Europe, il faut que toutes les Églises et Communautés ecclésiales « soient
aidées et encouragées à interpréter le cheminement œcuménique comme un mouvement
où l'on va ensemble vers le Christ »
53
et vers l'unité visible voulue par lui, de telle sorte que l'unité dans
la diversité resplendisse dans l'Église comme don de l'Esprit Saint, artisan de
communion.
Pour que cela se réalise, il convient que tous fournissent un effort patient
et constant, animé d'une authentique espérance et en même temps d'un sobre
réalisme, et visant à « la mise en valeur de ce qui déjà nous unit, à l'estime
sincère et réciproque, à l'élimination des préjugés, à la connaissance et à
l'amour mutuels ».
54
Dans ce sens, le fait de s'engager pour l'unité, si l'on veut que cet
engagement repose sur des bases solides, ne peut pas ne pas comporter la
recherche passionnée de la vérité, par un dialogue et une confrontation qui,
tout en reconnaissant les résultats déjà obtenus, sachent les utiliser comme une
incitation à aller de l'avant pour surmonter les divergences qui divisent encore
les chrétiens.
31. Il est indispensable de
poursuivre le dialogue avec détermination
, sans capituler devant les difficultés et les épreuves. Ce dialogue doit
être mené « sous divers aspects (doctrinal, spirituel et pratique), en suivant
la logique de l'échange des dons, que l'Esprit suscite dans chaque Église, et en
éduquant les communautés et les fidèles, surtout les jeunes, à vivre des moments
de rencontres et à faire de l'œcuménisme bien compris une dimension ordinaire de
la vie et de l'action ecclésiales ».
55
Ce dialogue est une des préoccupations majeures de l'Église, surtout en
Europe, elle qui, au cours du précédent millénaire, a vu naître trop de
divisions entre les chrétiens et qui progresse aujourd'hui vers une plus grande
unité. Nous ne pouvons pas nous arrêter en chemin ni retourner en arrière! Nous
devons poursuivre notre marche et vivre dans la confiance, car, avec la grâce de
Dieu, l'estime réciproque, la recherche de la vérité, la collaboration dans la
charité et surtout l'œcuménisme de la sainteté ne pourront pas ne pas porter
leurs fruits.
32. Malgré les inévitables difficultés, j'invite tout le monde à reconnaître
et à apprécier, avec amour et dans un esprit fraternel, la contribution que les
Églises catholiques orientales
, par leur présence même, par la richesse de leur tradition, par le
témoignage de leur « unité dans la diversité », par l'inculturation qu'elles ont
réalisée dans l'annonce de l'Évangile et par la diversité de leurs rites,
peuvent apporter à une édification plus réelle de l'unité.
56
En même temps, je veux une fois encore assurer les pasteurs, ainsi que
nos frères et sœurs des Églises orthodoxes, que la nouvelle évangélisation ne
peut en aucune manière être confondue avec le prosélytisme, restant sauf le
devoir de respecter la vérité, la liberté et la dignité de toute personne.
II. L'Église entière envoyée en mission
33. Servir l'Évangile de l'espérance par une charité qui évangélise est un
devoir et une responsabilité pour tous
. Quel que soit en effet le charisme ou le ministère de chacun, la charité
est la voie royale indiquée à tous et que tous peuvent parcourir: c'est la voie
que la communauté ecclésiale tout entière est appelée à suivre sur les pas de
son Maître.
L'engagement des ministres ordonnés
34. Les prêtres, en vertu de leur ministère, sont appelés de manière spéciale
à célébrer, à enseigner et à servir l'Évangile de l'espérance. En raison du
sacrement de l'Ordre qui les configure au Christ, Chef et Pasteur, les évêques
et les prêtres doivent conformer toute leur vie et toute leur action à Jésus;
par la prédication de la Parole, par la célébration des sacrements et en guidant
la marche de la communauté chrétienne, ils rendent présent le mystère du Christ
et, à travers l'exercice même de leur ministère, ils « sont appelés à prolonger
la présence du Christ, unique et souverain Pasteur, en retrouvant son style de
vie et en se rendant en quelque sorte transparents à lui au milieu du troupeau
qui leur est confié ».
57
Insérés
dans
le monde sans être
du
monde (cf.
Jn
17, 15-16), ils sont appelés, dans la situa- tion culturelle et
spirituelle présente du continent européen, à être signes de contradiction et
d'espérance pour une société qui est malade de vivre à un niveau horizontal et
qui a besoin de s'ouvrir au Transcendant.
35. De ce point de vue, le
célibat sacerdotal
prend un relief particulier comme signe d'une espérance fondée totalement
sur le Seigneur. Le célibat n'est pas une simple discipline ecclésiastique
imposée par l'autorité; au contraire, il est avant tout une grâce, un don
inestimable de Dieu pour l'Église, valeur prophétique pour le monde actuel, don
de soi dans le Christ pour son Église, source de vie spirituelle intense et de
fécondité pastorale, témoignage du Royaume eschatologique, signe de l'amour de
Dieu envers ce monde en même temps que signe de l'amour sans partage du prêtre
envers Dieu et envers son peuple.
58
Vécu comme réponse au don de Dieu et dépassement des tentations d'une
société hédoniste, non seulement le célibat favorise l'épanouissement humain de
celui qui y est appelé, mais il se révèle un facteur de croissance pour les
autres aussi.
Estimé dans toute l'Église comme un bien pour le sacerdoce
,
59
exigé comme une obligation par l'Église latine,
60
tenu en grand respect par les Églises orientales,
61
le célibat, dans le contexte de la culture actuelle, apparaît comme un
signe éloquent qui doit être conservé comme un bien précieux pour l'Église. Une
révision de la discipline actuelle en ce domaine ne permettrait pas de résoudre
la crise des vocations au presbytérat à laquelle on assiste en de nombreuses
régions d'Europe.
62
Le service de l'Évangile de l'espérance requiert aussi que, dans
l'Église, on s'efforce de présenter le célibat dans toute sa richesse biblique,
théologique et spirituelle.
36. Nous ne pouvons ignorer que l'exercice du ministère sacré est confronté
de nos jours à bien des difficultés liées tant à l'ambiance culturelle qu'à la
diminution du nombre de prêtres, avec l'accroissement des charges pastorales et
la fatigue qui en découlent. En conséquence, les prêtres qui se consacrent avec
un dévouement et une fidélité admirables au ministère qui leur est confié sont
encore plus dignes d'
estime
, de
gratitude
et d'
affection
.
63
Avec confiance et gratitude, je veux moi aussi leur exprimer mes
encouragements
, en reprenant les propos des Pères du Synode: « Ne perdez pas cœur et ne
vous laissez pas accabler par la fatigue; en pleine communion avec nous,
évêques, en fraternité joyeuse avec les autres prêtres, en cordiale
responsabilité avec les consacrés et tous les fidèles laïcs, continuez votre
œuvre précieuse et irremplaçable »
64
!
Outre les prêtres, je désire évoquer aussi les
diacres
, qui participent au sacrement de l'Ordre, bien qu'à un degré différent.
Envoyés pour servir la communion ecclésiale, ils exercent, sous la direction de
l'Évêque et avec son presbyterium, la « diaconie » de la liturgie, de la parole
et de la charité.
65
De cette manière qui leur est propre, ils sont
au service de l'Évangile de l'espérance
.
Le témoignage des personnes consacrées
37. Le témoignage des
personnes consacrées
est particulièrement éloquent. À ce propos, il faut avant tout reconnaître
le rôle fondamental qu'ont eu le monachisme et la vie consacrée dans
l'évangélisation de l'Europe et dans l'édification de son identité chrétienne.
66
Un tel rôle ne doit pas disparaître de nos jours, au moment où une «
nouvelle évangélisation » du continent se fait urgente et où l'établissement de
structures et de liens plus complexes le met en face d'un tournant délicat.
L'Europe a toujours besoin de la sainteté, de l'esprit prophétique, de
l'activité d'évangélisation et de service des personnes consacrées. Il convient
aussi de souligner la contribution spécifique que les Instituts séculiers et les
Sociétés de Vie apostolique peuvent apporter grâce à leur aspiration à
transformer le monde, de l'intérieur, par la puissance des béatitudes.
38. L'
apport
spécifique que les personnes con- sacrées peuvent fournir à l'Évangile de
l'espérance
trouve son point de départ dans quelques aspects qui caractérisent de nos
jours le visage culturel et social de l'Europe
.
67
Ainsi, la demande de nouvelles formes de spiritualité, qui se fait sentir
aujourd'hui dans la société, doit trouver une réponse dans
la reconnaissance du primat absolu de Dieu
, vécu par les personnes consacrées dans le don total d'elles- mêmes, dans
la conversion permanente d'une existence offerte comme un vrai culte spirituel.
Dans un monde marqué par le laïcisme et soumis au vertige de la consommation, la
vie consacrée, don de l'Esprit à l'Église et pour l'Église, devient toujours
plus signe d'espérance dans la mesure où elle témoigne de la dimension
transcendante de l'existence. D'autre part, dans la situation pluriculturelle et
multireligieuse actuelle, le témoignage de
fraternité évangélique
qui caractérise la vie consacrée est
exigé
, faisant de cette dernière une incitation à la purification et à
l'intégration de valeurs différentes grâce au dépassement des antagonismes. La
présence de nouvelles formes de pauvreté et de marginalisation doit susciter la
créativité qui fut celle de tant de fondateurs d'Instituts religieux pour
venir en aide à ceux qui sont dans le besoin.
Enfin, la tendance à un certain repliement sur soi demande que l'on trouve
un antidote dans la disponibilité des personnes consacrées, afin que soit
poursuivie
l'œuvre de l'évangélisation sur d'autres continents
, malgré la diminution du nombre de membres que l'on constate dans certains
Instituts.
Le souci des vocations
39. L'engagement des ministres ordonnés et des personnes consacrées étant
déterminant, on ne peut passer sous silence le manque inquiétant de séminaristes
et de candidats à la vie religieuse, surtout en Europe occidentale. Une telle
situation exige l'engagement de tous en faveur d'
une pastorale appropriée des vocations
. C'est seulement « quand on présente aux jeunes la personne du Christ dans
toute sa plénitude que naît en eux une espérance qui les pousse à tout laisser
pour le suivre, en réponse à son appel, et pour être ses témoins auprès de leurs
contemporains ».
68
Le souci des vocations est donc une question vitale pour l'avenir de la
foi chrétienne en Europe et, par suite, pour le progrès spirituel des peuples
qui y vivent; c'est un passage obligé pour l'Église, si elle veut annoncer,
célébrer et servir l'Évangile de l'espérance.
69
40. Pour mettre en œuvre l'indispensable pastorale des vocations, il convient
de présenter aux fidèles la foi de l'Église concernant la nature et la dignité
du sacerdoce ministériel; d'encourager les familles à vivre comme de véritables
« Églises domestiques », afin que les diverses vocations puissent y être
discernées, accueillies et accompagnées; de réaliser une action pastorale qui
aide les fidèles, surtout les jeunes, à faire le choix d'une vie fondée sur le
Christ et totalement consacrée à l'Église.
70
Sachant que l'Esprit Saint est à l'œuvre aujourd'hui encore et que les signes
de sa présence ne manquent pas, il s'agit avant tout d
'insérer la pastorale des vocations dans tous les secteurs de la pastorale
ordinaire.
Pour ce faire, il est nécessaire de « raviver, surtout chez les jeunes, une
profonde nostalgie de Dieu, créant ainsi le contexte capable de faire surgir de
généreuses réponses de vocations »; « il est urgent qu'un grand mouvement de
prière traverse les communautés ecclésiales du continent européen », car « le
changement des conditions historiques et culturelles exige que la pastorale des
vocations soit perçue comme un des objectifs premiers de toute la communauté
chrétienne ».
71
Il est indispensable aussi que les prêtres eux-mêmes vivent et agissent
en parfaite harmonie avec leur identité sacramentelle véritable. En effet, si
l'image qu'ils donnent d'eux- mêmes est opaque ou terne, comment pourraient-ils
pousser les jeunes à les imiter?
La mission des laïcs
41. La participation des
fidèles laïcs
à la vie de l'Église est unique: le rôle qui leur revient dans l'annonce et
le service de l'Évangile de l'espérance est en effet irremplaçable, car, « par
eux, l'Église du Christ est présente dans les secteurs les plus variés du monde,
comme signe et source d'espérance et d'amour ».
72
Participant pleinement à la mission de l'Église dans le monde, ils
sont appelés à montrer que la foi chrétienne est la seule réponse exhaustive aux
interrogations que la vie pose à tout homme et à toute société, et ils peuvent
implanter dans le monde les valeurs du Royaume de Dieu, promesse et gage d'une
espérance qui ne déçoit pas.
L'Europe d'hier et d'aujourd'hui connaît
une présence significative et l'exemple lumineux
de telles figures de laïcs. Comme l'ont souligné les Pères du Synode, il
faut évoquer entre autres, avec gratitude, le souvenir d'hommes et de femmes qui
ont témoigné et qui témoignent du Christ et de son Évangile, par leur service de
la vie publique et les responsabilités que celle-ci comporte. Il est d'une
importance capitale « de susciter et de soutenir des vocations spécifiques au
service du bien commun: des personnes qui, à l'exemple et avec le style de ceux
qui ont été appelés les pères de l'Europe , sachent être les artisans de la
société européenne de l'avenir, en l'asseyant sur les bases solides de l'esprit
».
73
Il faut apprécier tout autant l'œuvre accomplie par des laïcs chrétiens,
hommes et femmes, souvent dans une vie ordinaire et cachée, à travers d'humbles
services qui leur permettent d'annoncer la miséricorde de Dieu à ceux qui sont
plongés dans la pauvreté; nous devons leur être reconnaissants pour l'audacieux
témoignage de charité et de pardon qu'ils donnent, évangélisant par ces valeurs
les vastes horizons de la politique, de la vie sociale, de l'économie, de la
culture, de l'écologie, de la vie internationale, de la famille, de l'éducation,
de la vie professionnelle, du travail et de la souffrance.
74
À cette fin,
il est utile d'avoir des itinéraires pédagogiques
qui rendent les fidèles laïcs capables d'un engagement de foi au sein des
réalités temporelles. De tels parcours, fondés sur un sérieux apprentissage de
la vie ecclésiale, en particulier sur l'étude de la doctrine sociale, doivent
être en mesure de leur apporter non seulement la doctrine et le dynamisme, mais
aussi les éléments spirituels adaptés qui soutiennent leur engagement vécu comme
un authentique chemin de sainteté.
Le rôle de la femme
42. L'Église est bien consciente de l'apport spécifique de la
femme
dans le service de l'Évangile de l'espérance. L'histoire de la communauté
chrétienne montre que les femmes ont toujours eu une place importante dans le
témoignage évangélique. Il faut se souvenir de tout ce qu'elles ont fait,
souvent dans le silence et de manière cachée, dans l'accueil et la transmission
du don de Dieu, aussi bien par la maternité physique ou spirituelle, les
activités éducatives, la catéchèse, l'accomplissement de grandes œuvres de
charité, que par la vie de prière et de contemplation, les expériences mystiques
et la rédaction d'écrits remplis de sagesse évangélique.
75
À la lumière des très riches témoignages du passé, l'Église manifeste sa
confiance dans ce que les femmes peuvent faire aujourd'hui pour la croissance de
l'espérance à tous les niveaux. Il y a des aspects de la société européenne
contemporaine qui constituent un défi pour la capacité qu'ont les femmes
d'accueillir, de partager et d'engendrer dans l'amour, avec ténacité et
générosité. Que l'on pense, par exemple, à la mentalité scientifique et
technique largement répandue, qui relègue dans l'ombre la dimension affective et
le rôle des sentiments, à l'absence du sens de la gratuité, à la crainte diffuse
de donner la vie à des êtres nouveaux, à la difficulté de se placer dans une
relation de réciprocité avec l'autre et d'accueillir celui qui est différent de
soi. C'est dans ce contexte que l'Église attend des femmes l'apport vivifiant
d'une nouvelle vague d'espérance.
43. Mais pour que cela puisse se vérifier, il est nécessaire que, avant tout
dans l'Église
, soit promue la dignité de la femme, car l'homme et la femme ont la même
dignité, ayant été créés tous deux à l'image et à la ressemblance de Dieu (cf.
Gn
1, 27), et comblés chacun de dons propres et particuliers.
Comme cela a été souligné durant le Synode, il est souhaitable que, pour
favoriser la pleine participation des femmes à la vie et à la mission de
l'Église, leurs talents soient davantage mis en valeur, y compris par
l'attribution de fonctions ecclésiales qui reviennent de droit aux laïcs. Il
faut aussi mettre convenablement en valeur la mission de la femme comme épouse
et mère, et son dévouement dans la vie familiale.
76
L'Église ne manque pas d'élever la voix pour dénoncer les injustices et les
violences perpétrées contre les femmes, en quelque lieu ou circonstance qu'elles
se produisent. Elle demande que soient véritablement appliquées les lois qui
protègent les femmes et que soient prises des mesures efficaces contre l'usage
humiliant d'images féminines dans la publicité commerciale et contre le fléau de
la prostitution; elle souhaite que le service rendu par les mères dans le cadre
de la vie familiale, au même titre que le service rendu par les pères, soit
considéré comme une contribution au bien commun, y compris à travers des formes
de reconnaissance économique.
CHAPITRE III
ANNONCER
L'ÉVANGILE DE L'ESPÉRANCE
« Va prendre le petit livre ouvert [...] et mange-le
»
(
Ap
10, 8. 9)
I. Proclamer le mystère du Christ
La révélation donne un sens à l'histoire
44. La vision de l'Apocalypse nous parle d'« un Livre en forme de rouleau,
écrit à l'intérieur et à l'extérieur, scellé de sept sceaux », tenu « dans la
main droite de Celui qui siège sur le Trône céleste » (
Ap
5, 1). Ce texte contient le plan créateur et sauveur de Dieu, son projet
détaillé sur toute la réalité, sur les personnes, sur les choses, sur les
événements. Aucun être créé, terrestre ou céleste, n'est en mesure d'« ouvrir le
livre et d'en regarder le texte » (
Ap
5, 3), ni d'en comprendre le contenu. Dans la confusion de l'histoire
humaine,
nul ne sait indiquer la direction et le sens ultime des choses
.
Seul Jésus Christ entre en possession du Livre scellé (cf.
Ap
5, 6-7); Lui seul est « digne de recevoir le Livre scellé et de l'ouvrir »
(
Ap
5, 9). En effet,
seul Jésus est en mesure de révéler et de réaliser le projet de Dieu qu'il
contient
. Laissé à lui-même, l'homme n'est pas en mesure de donner, par ses propres
efforts, un sens à l'histoire et aux événements: la vie demeure sans espérance.
Seul le Fils de Dieu est en mesure
de dissiper les ténèbres et de montrer la route
.
Le Livre ouvert est remis
à Jean et, à travers lui,
à l'Église
entière. Jean est invité à prendre le livre et à le manger: « Va prendre le
petit livre ouvert dans la main de l'ange qui se tient debout sur la mer et sur
la terre [...]. Prends et mange-le » (
Ap
10, 8-9). Ce n'est qu'après l'avoir assimilé en profondeur, qu'il
pourra le communiquer comme il convient aux autres, à qui il est envoyé avec
l'ordre de « parler sur un grand nombre de peuples, de nations, de langues et de
rois » (
Ap
10, 11).
Nécessité et urgence de l'annonce
45. L'Évangile de l'espérance, remis à l'Église et assimilé par elle, demande
que, chaque jour, on l'annonce et on en témoigne. Telle est la vocation propre
de l'Église en tout temps et en tout lieu. Telle est aussi la mission de
l'Église aujourd'hui en Europe. « Évangéliser est, en effet, la grâce et la
vocation propre de l'Église, son identité la plus profonde. Elle existe pour
évangéliser, c'est-à-dire pour prêcher et enseigner, être le canal du don de la
grâce, réconcilier les pécheurs avec Dieu, perpétuer le sacrifice du Christ dans
la sainte messe, qui est le mémorial de sa mort et de sa résurrection glorieuse
».
77
Église en Europe
, la « nouvelle évangélisation » est le devoir qui t'attend! Sache retrouver
l'enthousiasme de l'annonce. Entends la prière qui t'est adressée aujourd'hui,
en ce début du troisième millénaire, et qui avait déjà résonné à l'aube du
premier millénaire, alors qu'apparaissait à Paul la vision d'un Macédonien qui
le suppliait: « Traverse la mer pour venir en Macédoine à notre secours! » (
Ac
16, 9). Que la prière soit inexprimée ou même refoulée, c'est l'appel le
plus profond et le plus vrai qui jaillit du cœur des Européens d'aujourd'hui,
assoiffés d'une espérance qui ne déçoit pas. Cette espérance t'a été donnée en
partage pour que tu la redonnes toi-même avec joie à toute époque et sous toutes
les latitudes. Que
l'annonce de Jésus
, qui est l'Évangile de l'espérance,
soit donc ta fierté et ta raison d'être
! Avance avec une ardeur renouvelée, gardant le même esprit missionnaire
qui, tout au long de ces vingt siècles, en commençant par la prédication des
Apôtres Pierre et Paul, a animé tant de saints et de saintes, authentiques
évangélisateurs du continent européen.
Première annonce et annonce renouvelée
46. Dans différentes parties de l'Europe,
une première annonce de l'Évangile est nécessaire
: le nombre des personnes non baptisées grandit, soit en raison de la
présence notable de personnes immigrées appartenant à d'autres religions, soit
encore parce que les enfants de familles de tradition chrétienne n'ont pas reçu
le Baptême ou à cause de la domination communiste ou d'une indifférence
religieuse diffuse.
78
En réalité, l'Europe se situe désormais parmi les lieux
traditionnellement chrétiens dans lesquels, hormis une nouvelle évangélisation,
s'impose dans certains cas une première évangélisation.
L'Église ne peut se soustraire au devoir d'un diagnostic courageux qui ouvre
la voie à des thérapies appropriées. Même dans le « vieux » continent, il y a
des aires sociales et culturelles étendues où est rendue nécessaire une
véritable mission
ad gentes
.
79
47. Partout
se fait sentir le besoin d'une annonce renouvelée, même pour ceux qui sont
déjà baptisés
. Beaucoup d'Européens d'aujourd'hui pensent savoir ce qu'est le
christianisme mais ils ne le connaissent pas réellement. Souvent même, les
notions et les éléments les plus fondamentaux de la foi ne sont plus connus. De
nombreux baptisés vivent comme si le Christ n'existait pas: on répète les gestes
et les signes de la foi, spécialement à travers les pratiques du culte, mais, à
ces signes, ne correspondent ni un véritable accueil du contenu de la foi, ni
une adhésion à la personne de Jésus. Aux grandes certitudes de la foi s'est
substitué chez beaucoup un sentiment religieux vague et qui n'engage guère; des
formes variées d'agnosticisme et d'athéisme pratique se diffusent, contribuant à
aggraver l'écart entre la foi et la vie; certains se sont laissés influencer par
un esprit d'humanisme immanentiste qui a affaibli leur foi, les poussant
souvent, malheureusement, jusqu'à l'abandonner complètement; on assiste à une
sorte d'interprétation sécularisante de la foi chrétienne qui la ronge et à
laquelle s'ajoute une profonde crise de la conscience et de la pratique morale
chrétienne.
80
Les grandes valeurs qui ont amplement inspiré la culture européenne ont
été séparées de l'Évangile, perdant ainsi leur âme la plus profonde et laissant
le champ libre à de nombreuses déviations.
« Le Fils de l'homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur terre? » (
Lc
18, 8). La trouvera- t-il sur cette terre de notre Europe de vieille
tradition chrétienne? C'est une question ouverte qui indique avec lucidité la
profondeur et le caractère dramatique de l'un des défis les plus graves que nos
Églises sont
appelées
à affronter. On peut dire – comme le Synode l'a souligné – qu'un tel
défi consiste souvent non pas tant à baptiser les nouveaux convertis qu'à
conduire les baptisés à
se convertir au Christ et à son Évangile
:
81
dans nos communautés, il faut se préoccuper sérieusement d'apporter
l'Évangile de l'espérance à ceux qui sont loin de la foi ou qui se sont éloignés
de la pratique chrétienne.
Fidélité à l'unique message
48. Pour pouvoir annoncer l'Évangile de l'espérance, une solide
fidélité à l'Évangile lui-même
est nécessaire. La prédication de l'Église
doit
donc, sous toutes ses formes,
être toujours plus centrée sur la personne de Jésus
et elle doit toujours plus orienter vers lui. Il faut veiller à ce qu'
Il soit présenté dans son intégralité
: non seulement comme modèle éthique, mais avant tout comme le Fils de Dieu,
l'unique et nécessaire Sauveur de tous, qui vit et qui agit dans son Église.
Pour que l'espérance soit vraie et indestructible, « la prédication intègre,
claire et renouvelée de Jésus Christ ressuscité, de la Résurrection et de la Vie
éternelle »
82
devra constituer une priorité dans l'action pastorale des prochaines
années.
Si l'Évangile à annoncer est le même en tout temps,
les manières de réaliser cette annonce sont diverses
. Chacun est donc invité à « proclamer » Jésus et la foi en lui en toute
circonstance; à « attirer » les autres à la foi, en adoptant des modes de vie
personnelle, familiale, professionnelle et communautaire qui reflètent
l'Évangile; à « rayonner » autour de soi la joie, l'amour et l'espérance, en
sorte que beaucoup voient nos bonnes œuvres et en glorifient le Père qui est aux
cieux (cf.
Mt
5, 16), jusqu'à en être « imprégnés » et conquis; à devenir le « levain »
qui transforme et qui anime de l'intérieur toute expression culturelle.
83
Par le témoignage de la vie
49. L'Europe réclame
des évangélisateurs crédibles
,
dans la vie desquels resplendisse la beauté de l'Évangile
,
84
en communion avec la croix et la résurrection du Christ. Ces
évangélisateurs seront
formés comme il convient
.
85
Aujourd'hui, il est plus que jamais nécessaire que tout chrétien ait une
conscience missionnaire
, à commencer par les évêques, les prêtres, les diacres, les consacrés, les
catéchistes et les professeurs de religion: « Tout baptisé, en tant que témoin
du Christ, doit acquérir une formation appropriée à sa situation, non seulement
pour éviter que sa foi ne s'épuise par manque de vigilance dans un milieu
hostile comme l'est le milieu sécularisé, mais aussi pour soutenir son
témoignage évangélisateur et lui donner un nouvel élan ».
86
« L'homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maîtres ou,
s'il écoute les maîtres, c'est parce qu'ils sont des témoins ».
87
La présence et les signes de la sainteté sont donc décisifs:
la sainteté est un présupposé essentiel à une authentique évangélisation
, capable de redonner l'espérance. Il faut des témoignages forts de vie
nouvelle dans le Christ, sur le plan personnel et communautaire. Il ne suffit
pas en effet que la vérité et la grâce soient offertes à travers la proclamation
de la Parole et la célébration des Sacrements; il faut qu'elles soient
accueillies et vécues en toute circonstance concrète, dans la façon d'être des
chrétiens et des communautés ecclésiales. C'est là un des défis les plus
importants qui attendent l'Église en Europe au début du nouveau millénaire.
Former à une foi adulte
50. « L'actuelle situation culturelle et religieuse de l'Europe exige la
présence de catholiques adultes dans la foi et de communautés chrétiennes
missionnaires qui témoignent de la charité de Dieu devant tous les hommes ».
88
L'annonce de l'Évangile de l'espérance implique donc d'avoir à
promouvoir le passage
d'une foi qui s'appuie sur des habitudes sociales, pourtant appréciables,
à une foi plus personnelle et adulte
, éclairée et convaincue.
Les chrétiens sont donc appelés à avoir une foi qui leur permette de se
confronter de manière critique à la culture actuelle, résistant à ses
séductions; d'influer avec efficacité sur les milieux culturels, économiques,
sociaux et politiques; de manifester que la communion entre les membres de
l'Église catholique et avec les autres chrétiens est plus forte que tout lien
ethnique; de transmettre avec joie la foi aux nouvelles générations; d'édifier
une culture chrétienne capable d'évangéliser la culture toujours plus vaste dans
laquelle nous vivons.
89
51. En plus de veiller à ce que le ministère de la Parole, la célébration de
la liturgie et l'exercice de la charité soient orientés vers l'édification et le
soutien d'une foi mûre et personnelle, il faut que les communautés chrétiennes
s'activent pour
proposer une catéchèse
adaptée aux différents itinéraires spirituels des fidèles, selon la
diversité de leur âge et de leurs conditions de vie, prévoyant également des
formes appropriées d'accompagnement spirituel et de redécouverte de leur
Baptême.
90
Dans ce programme, la référence fondamentale sera évidemment le
Catéchisme de l'Église catholique.
En particulier, reconnaissant qu'il s'agit là d'une indiscutable priorité
dans l'action pastorale, il faut
cultiver
et, si nécessaire, relancer
le ministère de la catéchèse
en tant qu'éducation et croissance de la foi chez toute personne, de sorte
que la semence, déposée par l'Esprit Saint et transmise par le Baptême, pousse
et parvienne à maturité. En référence constante à la Parole de Dieu, conservée
dans la Sainte Écriture, proclamée dans la liturgie et interprétée par la
Tradition de l'Église, une catéchèse organique et systématique constitue, sans
nul doute, un instrument essentiel et primordial pour former une foi adulte chez
les chrétiens.
91
52. Dans la même ligne, il faut également souligner
le rôle important de la théologie
. Il existe en effet un lien intrinsèque et inséparable entre
l'évangélisation et la réflexion théologique, car cette dernière, en tant que
science ayant un statut et une méthodologie propres, vit de la foi de l'Église
et est au service de sa mission.
92
Elle naît de la foi et elle est appelée à l'interpréter, en gardant
son lien imprescriptible avec la communauté chrétienne dans toutes ses
composantes; au service de la croissance spirituelle de tous les fidèles,
93
elle introduit ces derniers à la compréhension approfondie du message du
Christ.
En exerçant sa mission d'annoncer l'Évangile de l'espérance, l'Église qui est
en Europe apprécie avec gratitude
la vocation des théologiens
, elle reconnaît la valeur de leur travail et elle en assure la promotion.
94
Avec estime et affection, je les invite à persévérer dans le service
qu'ils accomplissent, en unissant toujours recherche scientifique et prière, en
entretenant un dialogue attentif avec la culture contemporaine, en adhérant
fidèlement au Magistère et en collaborant avec lui en esprit de communion, dans
la vérité et dans la charité, en s'imprégnant du
sensus fidei
du peuple de Dieu et en contribuant à le nourrir.
II. Témoigner dans l'unité
et dans le dialogue
La communion entre les Églises particulières
53. L'annonce de l'Évangile de l'espérance aura une force d'autant plus
efficace qu'elle sera liée au témoignage d'une unité et d'une communion
profondes au sein de l'Église. Les Églises particulières ne peuvent pas
affronter seules le défi qui les attend. Il faut une authentique
collaboration entre toutes les Églises particulières du continent, qui soit
l'expression de leur communion profonde
; collaboration d'ailleurs requise par la nouvelle réalité européenne.
95
Dans ce cadre prend place l'apport des organismes ecclésiaux européens, à
commencer par le
Conseil des Conférences épiscopales d'Europe
. C'est un instrument efficace pour rechercher ensemble des voies
appropriées pour évangéliser l'Europe.
96
Par l'« échange des dons » entre les différentes Églises particulières,
sont mises en commun les expériences et les réflexions de l'Europe de l'Ouest et
de l'Est, du Nord et du Sud, et sont partagées des orientations pastorales
communes; ainsi se manifeste de manière toujours plus significative le sentiment
collégial qui unit les évêques du continent, pour annoncer ensemble, avec audace
et fidélité, le nom de Jésus Christ, seule source d'espérance pour tous en
Europe.
Avec tous les chrétiens
54. Dans le même temps, apparaît comme un impératif imprescriptible le devoir
d'une
collaboration œcuménique
fraternelle et convaincue.
Le sort de l'évangélisation est étroitement lié au témoignage d'unité que
sauront donner tous les disciples du Christ: « Tous les chrétiens sont appelés à
accomplir cette mission selon leur vocation. La tâche de l'évangélisation
implique d'avancer l'un vers l'autre et d'avancer ensemble, en partant de
l'intérieur; évangélisation et unité, évangélisation et œcuménisme sont
étroitement liés entre eux ».
97
C'est pourquoi je fais miennes de nouveau les paroles écrites par Paul VI
au Patriarche œcuménique Athenagoras I
er
: « Puisse l'Esprit Saint nous guider dans la voie de la réconciliation,
afin que l'union de nos Églises devienne un signe toujours plus lumineux
d'espérance et de réconfort au sein de l'humanité entière ».
98
En dialogue avec les autres religions
55. Comme pour tout l'engagement de la « nouvelle évangélisation », il faut
également, en ce qui concerne l'annonce de l'Évangile de l'espérance, que soit
instauré un
dialogue interreligieux
profond et intelligent, en particulier avec le judaïsme et avec l'islam. «
Entendu comme méthode et comme moyen en vue d'une connaissance et d'un
enrichissement réciproques, il ne s'oppose pas à la mission
ad gentes
, au contraire il lui est spécialement lié et il en est une expression ».
99
Dans ce dialogue, il n'est pas question de se laisser prendre par une «
mentalité marquée par l'indifférentisme, malheureusement très répandue parmi les
chrétiens, souvent fondée sur des conceptions théologiques inexactes et
imprégnées d'un relativisme religieux qui porte à considérer que toutes les
religions se valent ».
100
56. Il s'agit plutôt de prendre une plus vive conscience du
rapport qui lie l'Église au peuple juif
et du rôle singulier d'Israël dans l'histoire du salut. Comme il était déjà
apparu lors de la première Assemblée spéciale pour l'Europe du Synode des
Évêques et comme l'a rappelé également le dernier Synode, il faut reconnaître
les racines communes qui existent entre le christianisme et le peuple juif,
appelé par Dieu à une alliance qui reste irrévocable (cf.
Rm
11, 29
),
101
puisqu'elle est parvenue à sa plénitude définitive dans le Christ.
Il est donc nécessaire de favoriser le dialogue avec le judaïsme, sachant
qu'il est d'une importance fondamentale pour la conscience chrétienne de soi et
pour le dépassement des divisions entre les Églises, et aussi d'œuvrer pour que
fleurisse un nouveau printemps dans les relations mutuelles. Cela implique que
chaque communauté ecclésiale ait à pratiquer, chaque fois que les circonstances
le permettront, le dialogue et la collaboration avec les croyants de la religion
juive. Un tel exercice suppose, entre autres, que « l'on se souvienne de la part
que les fils de l'Église ont pu avoir dans la naissance et dans la diffusion
d'une telle attitude antisémite au cours de l'histoire, et que l'on en demande
pardon à Dieu, favorisant de toutes les manières possibles les rencontres de
réconciliation et d'amitié avec les fils d'Israël ».
102
On devra par ailleurs, dans ce contexte, se souvenir aussi des nombreux
chrétiens qui, parfois au prix de leur vie, ont aidé et sauvé leurs « frères
aînés », surtout dans des périodes de persécution.
57. Il s'agit également de se laisser inciter à une meilleure connaissance
des autres religions, pour pouvoir instaurer un dialogue fraternel avec les
personnes de l'Europe d'aujourd'hui qui y adhèrent. En particulier, il est
important d'avoir un
juste rapport avec l'islam
. Comme cela s'est révélé plusieurs fois ces dernières années à la
conscience des évêques européens, ce rapport « doit être conduit avec prudence,
il faut en connaître clairement les possibilités et les limites, et garder
confiance dans le dessein de salut de Dieu, qui concerne tous ses fils ».
103
Il faut être conscient, entre autres, de la divergence notable entre la
culture européenne, qui a de profondes racines chrétiennes, et la pensée
musulmane.
104
À cet égard, il est nécessaire de préparer convenablement les chrétiens qui
vivent au contact quotidien des musulmans à connaître l'islam de manière
objective et à savoir s'y confronter; une telle préparation doit concerner en
particulier les séminaristes, les prêtres et tous les agents pastoraux. On
comprend par ailleurs que l'Église, alors qu'elle demande aux Institutions
européennes d'avoir à promouvoir la liberté religieuse en Europe, se fasse
également un devoir de rappeler que la réciprocité dans la garantie de la
liberté religieuse doit être observée aussi dans les pays de tradition
religieuse différente, où les chrétiens sont en minorité.
105
Dans ce domaine, on comprend « l'étonnement et le sentiment de frustration
des chrétiens qui accueillent, par exemple en Europe, des croyants d'autres
religions en leur donnant la possibilité d'exercer leur culte et qui se voient
interdire tout exercice du culte chrétien dans les pays où ces croyants
majoritaires »
106
ont fait de leur religion la seule qui soit autorisée et encouragée. La
personne humaine a droit à la liberté religieuse et, en tout point du monde,
tous « doivent être exempts de toute contrainte de la part soit d'individus,
soit de groupes sociaux, et de quelque pouvoir humain que ce soit ».
107
III. Évangéliser la vie sociale
Évangélisation de la culture et inculturation de l'Évangile
58. L'annonce de Jésus Christ doit rejoindre aussi la culture européenne
contemporaine.
L'évangélisation de la culture
doit montrer qu'aujourd'hui encore, dans cette Europe, il est possible de
vivre en plénitude l'Évangile comme chemin qui donne sens à l'existence. Dans
cette perspective, la pastorale doit assumer la tâche de façonner une mentalité
chrétienne dans la vie ordinaire: en famille, à l'école, dans les communications
sociales, dans le monde de la culture, du travail et de l'économie, dans la
politique, dans les loisirs, dans le temps de la santé et celui de la maladie.
Il faut se confronter de manière critique et sereine à l'actuelle situation
culturelle de l'Europe, évaluant les tendances qui se manifestent, les faits et
les situations d'importance de notre temps à la lumière du caractère central du
Christ et de l'anthropologie chrétienne.
Aujourd'hui encore, en se souvenant de la fécondité culturelle du
christianisme tout au long de l'histoire de l'Europe, il faut présenter
l'approche évangélique, théorique et pratique, de la réalité et de l'homme.
Considérant, en outre, la grande importance des sciences et des réalisations
technologiques dans la culture et dans la société de l'Europe, l'Église est
appelée, à travers ses moyens d'approfondissement théorique et d'initiative
pratique, à offrir des propositions en regard des connaissances scientifiques et
de leurs applications, montrant les insuffisances et le caractère inadéquat
d'une conception inspirée du scientisme qui ne reconnaît comme valeur objective
que le savoir expérimental, et indiquant les critères éthiques que l'homme
possède parce qu'ils sont inscrits dans sa nature.
108
59. Sur le chemin de l'évangélisation de la culture prend place l'important
service accompli par les
écoles catholiques
. Il faudra travailler à faire reconnaître une effective liberté d'éducation
et la parité juridique entre les écoles publiques et les écoles privées. Ces
dernières sont parfois l'unique moyen de proposer la tradition chrétienne à ceux
qui en sont loin. J'exhorte les fidèles engagés dans le
monde de l'éducation
à persévérer dans leur mission, en portant la lumière du Christ Sauveur dans
leurs propres activités éducatives, scientifiques et académiques.
109
En particulier, il faut donner toute son importance à la contribution des
chrétiens engagés dans la recherche et dans l'enseignement au sein des
universités
: par le « service de la pensée », ils transmettent aux jeunes générations
les valeurs d'un patrimoine culturel enrichi par deux millénaires d'expérience
humaniste et chrétienne. Convaincu de l'importance des institutions académiques,
je demande aussi que soit promue dans les différentes Églises particulières une
pastorale universitaire
adaptée, favorisant ainsi ce qui correspond aux nécessités culturelles
actuelles.
110
60. On ne peut oublier l'apport positif de la mise en valeur des
biens culturels
de l'Église. Ils peuvent en effet représenter un facteur particulier pour
susciter à nouveau un humanisme d'inspiration chrétienne. Grâce à une
conservation appropriée et à une utilisation intelligente des biens culturels,
ceux-ci, en tant que témoignage vivant de la foi professée au long des siècles,
peuvent constituer un instrument valable pour la nouvelle évangélisation et pour
la catéchèse, et inviter à redécouvrir le sens du mystère.
En même temps, il faut promouvoir de
nouvelles expressions artistiques de la foi
, au moyen d'un dialogue constant avec les spécialistes de l'art.
111
L'Église a en effet besoin de l'art, de la littérature, de la musique, de
la peinture, de la sculpture et de l'architecture, parce qu'elle doit « rendre
perceptible et même, autant que possible, fascinant le monde de l'esprit, de
l'invisible, de Dieu »
112
et que la beauté artistique, comme reflet de l'Esprit de Dieu, est une
marque du mystère, une invitation à rechercher le visage de Dieu, qui s'est
rendu visible en Jésus de Nazareth.
L'éducation des jeunes à la foi
61. Par ailleurs, j'encourage l'Église en Europe à porter une attention
croissante
à l'éducation des jeunes à la foi
. Fixant notre regard vers l'avenir, nous ne pouvons pas ne pas tourner nos
pensées vers eux: nous devons nous faire proches de l'esprit, du cœur, du
caractère des jeunes, pour leur offrir une solide formation humaine et
chrétienne.
Chaque fois que se rassemblent de nombreux jeunes, il n'est pas difficile de
distinguer chez eux la présence d'attitudes diversifiées. On constate leur désir
de vivre ensemble pour sortir de l'isolement, leur soif plus ou moins consciente
d'absolu; on découvre chez eux une foi cachée qui demande à être purifiée et qui
veut suivre le Seigneur; on perçoit la décision de poursuivre le chemin déjà
entrepris et l'exigence de partager la foi.
62. À cette fin, il convient de
renouveler la pastorale des jeunes
, organisée par tranches d'âge et attentive aux diverses conditions des
enfants, des adolescents et des jeunes. Il sera en outre nécessaire de lui
conférer une plus grande structure organique et une plus grande cohérence, avec
une écoute patiente des demandes des jeunes, pour les rendre acteurs de
l'évangélisation et de la construction de la société.
Dans cet esprit, il est important de promouvoir des occasions de rencontres
entre jeunes, de manière à favoriser un climat d'écoute mutuelle et de prière.
Il ne faut pas avoir peur d'être exigeant avec eux en ce qui concerne leur
croissance spirituelle. On leur montrera la route de la sainteté, les invitant à
faire des choix fermes à la suite du Christ, ce à quoi ils seront encouragés par
une vie sacramentelle intense. Ils pourront ainsi résister aux séductions d'une
culture qui souvent ne leur propose que des valeurs éphémères ou même contraires
à l'Évangile, et devenir eux-mêmes capables de faire preuve d'une mentalité
chrétienne dans tous les domaines de leur existence, y compris les
divertissements et les loisirs.
113
J'ai encore vivement présent devant les yeux
les joyeux visages de tant de jeunes
, véritable espérance de l'Église et du monde, signe éloquent de l'Esprit
qui ne se lasse pas de susciter des énergies nouvelles. Je les ai rencontrés
aussi bien au cours de mes voyages dans les différents pays que lors des
inoubliables Journées mondiales de la Jeunesse.
114
L'attention aux médias
63. Étant donné l'importance des moyens de communication sociale, l'Église en
Europe ne peut pas ne pas
réserver une attention particulière au monde multiforme des médias
. Cela implique entre autres la formation appropriée des chrétiens qui
œuvrent dans les médias et des usagers des médias, en vue d'une bonne maîtrise
des nouveaux langages. Un soin spécial sera apporté au choix de personnes
préparées pour la communication du message à travers les médias. Il sera très
utile aussi de procéder à un échange d'informations et de stratégies entre les
Églises sur les divers aspects et les initiatives concernant une telle
communication. Il ne faudra pas non plus négliger la création de moyens locaux
de communication sociale, y compris au niveau paroissial.
En même temps, il s'agit d'assurer une présence dans les processus de la
communication sociale, pour la rendre plus respectueuse de la vérité de
l'information et de la dignité de la personne humaine. À ce propos, j'invite les
catholiques à participer à l'élaboration d'un code de déontologie pour ceux qui
travaillent dans les milieux de la communication sociale, en se laissant
éclairer par les critères que les organismes compétents du Saint-Siège
115
ont récemment indiqués et que les Évêques réunis en Synode avaient
énumérés ainsi: « Respect de la dignité de la personne humaine, de ses droits, y
compris le droit à la vie privée; service de la vérité, de la justice et des
valeurs humaines, culturelles et spirituelles; estime des différentes cultures
pour éviter qu'elles ne se fondent dans la masse; protection des minorités et
des plus faibles; recherche du bien commun, au-delà des intérêts particuliers et
de la prédominance des critères purement économiques ».
116
La mission ad
gentes
64. Une annonce de Jésus Christ et de son Évangile qui se limiterait au seul
contexte européen serait le signe d'un manque préoccupant d'espérance. L'œuvre
d'évangélisation est animée par une véritable espérance chrétienne quand elle
s'ouvre aux horizons universels, qui incitent à offrir gratuitement à tous ce
qu'on a soi-même reçu en don. La
mission ad
gentes
devient ainsi
expression d'une Église modelée par l'Évangile de l'espérance
, qui continuellement se renouvelle et se rajeunit. Telle a été au long des
siècles la conscience de l'Église en Europe: d'innombrables générations de
missionnaires, hommes et femmes, allant à la rencontre d'autres peuples et
d'autres civilisations, ont annoncé l'Évangile de Jésus Christ aux populations
du monde entier.
La même ardeur missionnaire doit animer l'Église dans l'Europe d'aujourd'hui
. La diminution du nombre de prêtres et de personnes consacrées dans
certains pays ne doit empêcher aucune Église particulière de faire siennes les
exigences de l'Église universelle. Chacune saura favoriser la préparation à la
mission
ad
gentes
, de manière à répondre généreusement à l'appel qui provient encore de
beaucoup de nations et de peuples désireux de connaître l'Évangile. Les Églises
d'autres continents, particulièrement de l'Asie et de l'Afrique, se tournent
encore vers les Églises d'Europe et attendent qu'elles continuent à répondre à
leur vocation missionnaire. Les chrétiens en Europe ne peuvent être infidèles à
leur histoire.
117
L'Évangile: un livre pour l'Europe
d'aujourd'hui et de toujours
65. En franchissant la Porte sainte, au début du grand Jubilé de l'An 2000,
j'ai présenté à l'Église et au monde le livre de l'Évangile. Ce geste, accompli
par chaque évêque dans les diverses cathédrales du monde, indique l'engagement
qui attend aujourd'hui et toujours l'Église dans notre continent.
Église en Europe, entre dans le nouveau millénaire avec le Livre de
l'Évangile
! Que soit entendue par chaque fidèle l'exhortation conciliaire « à
acquérir, par une fréquente lecture des divines Écritures, la science éminente
de Jésus Christ (
Ph
3, 8). L'ignorance des Écritures est, en effet, l'ignorance du Christ ».
118
Que la sainte Bible continue d'être un trésor pour l'Église et pour tout
chrétien: nous trouverons dans l'étude attentive de la Parole la nourriture et
la force pour accomplir chaque jour notre mission.
Prenons
ce Livre dans nos mains!
Recevons-le
de la part du Seigneur qui nous l'offre continuellement à travers son
Église (cf.
Ap
10, 8).
Mangeons- le
(cf.
Ap
10, 9), pour qu'il devienne la vie de notre vie.
Goûtons-le
à fond: il nous réservera des difficultés, mais il nous donnera aussi la
joie car il est doux comme le miel (cf.
Ap
10, 9-10).
Nous serons
comblés d'espérance et
capables de communiquer cette espérance
à tout homme et à toute femme que nous rencontrons sur notre route.
CHAPITRE IV
CÉLÉBRER
L'ÉVANGILE DE L'ESPÉRANCE
« À Celui qui siège sur le trône, et à l'Agneau
,
bénédiction, honneur, gloire et domination,
dans les siècles des siècles! »
(
Ap
5, 13)
Une communauté priante
66.
L'Évangile de l'espérance
, annonce de la vérité qui libère (cf
Jn
, 8, 32), doit être célébré. Devant l'Agneau de l'Apocalypse commence une
liturgie solennelle de louange et d'adoration: « À Celui qui siège sur le trône,
et à l'Agneau, bénédiction, honneur, gloire et domination, dans les siècles des
siècles! » (
Ap
5, 13). La même vision, qui révèle Dieu et le sens de l'histoire, se
produit « le jour du Seigneur » (
Ap
1, 10), le jour de la résurrection revécu par l'assemblée dominicale.
L'Église
qui accueille cette révélation
est une communauté qui prie.
En priant,
elle écoute
son Seigneur et ce que l'Esprit lui dit: elle adore, elle loue, elle rend
grâce, et enfin elle invoque la venue du Seigneur, « Viens, Seigneur Jésus! »
(cf.
Ap
22, 16-20), affirmant ainsi qu'elle attend le salut de Lui seul.
À toi aussi, Église de Dieu qui
vis
en Europe, il est demandé d'être une communauté qui prie
, célébrant ton Seigneur par les Sacrements, par la liturgie et par toute ta
vie. Dans la prière, tu redécouvriras la présence vivifiante du Seigneur. Ainsi,
enracinant en lui chacune de tes actions, tu pourras proposer de nouveau aux
Européens la rencontre avec lui-même, véritable espérance qui seule peut
satisfaire pleinement le désir ardent de Dieu, lui qui est caché sous les
diverses formes de recherche religieuse qui se font jour dans l'Europe
contemporaine.
I. Redécouvrir la liturgie
Le sens religieux dans l'Europe d'aujourd'hui
67. Malgré les vastes zones de déchristianisation dans le continent européen,
un certain nombre de signes permettent d'esquisser le visage
d'une Église qui, en croyant, annonce, célèbre et sert son Seigneur
. En effet, il ne manque pas d'exemples de chrétiens authentiques qui vivent
des moments de silence contemplatif, qui participent fidèlement aux propositions
spirituelles qui leurs sont faites, qui vivent l'Évangile dans leur existence
quotidienne et qui en témoignent dans les divers milieux où ils sont engagés. On
peut aussi discerner des manifestations d'une « sainteté populaire », qui
attestent que même dans l'Europe actuelle il n'est pas impossible de vivre
l'Évangile, aussi bien à un niveau personnel que dans une authentique expérience
communautaire.
68. Parallèlement à de nombreux exemples de foi authentique, il existe aussi
en Europe
une religiosité vague et parfois déviante.
Ses indices revêtent souvent un caractère général et superficiel, quand ils
ne sont pas carrément en contradiction les uns avec les autres chez les
personnes mêmes dont ils proviennent. Ce sont des phénomènes manifestes de fuite
dans le spiritualisme, de syncrétisme religieux et ésotérique, de recherche à
tout prix de « l'extraordinaire », qui peuvent conduire à des choix déviants,
telle la participation à des sectes dangereuses ou à des expériences
pseudo-religieuses.
Le
désir diffus d'une nourriture spirituelle
doit être accueilli avec compréhension et purifié. À l'homme qui, même
confusément, prend conscience qu'il ne peut vivre seulement de pain, il est
nécessaire que l'Église puisse témoigner de manière convaincante de la réponse
que Jésus fit au tentateur: « Ce n'est pas seulement de pain que l'homme doit
vivre, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (
Mt
4,4).
Une Église qui célèbre
69. Dans le contexte de la société actuelle, souvent fermée à la
transcendance, étouffée par des comportements consuméristes, propice aux formes
anciennes et nouvelles d'idolâtrie, et en même temps assoiffée de quelque chose
qui aille au-delà de l'immédiat,
la mission qui attend l'Église en Europe
est tout à la fois exigeante et exaltante. Elle consiste à redécouvrir le
sens du « mystère »; à renouveler les célébrations liturgiques afin qu'elles
soient des signes toujours plus éloquents de la présence du Christ Seigneur; à
assurer de nouveaux espaces au silence, à la prière et à la contemplation; à
revenir aux Sacrements, surtout l'Eucharistie et la Pénitence, car ils sont
source de liberté et de nouvelle espérance.
C'est pourquoi, à toi,
Église qui vis en Europe,
j'adresse un appel pressant:
Sois une Église qui prie,
qui loue Dieu, qui en reconnaît la primauté absolue et qui l'exalte avec
une foi joyeuse.
Redécouvre le sens du mystère
: vis-le avec une humble gratitude; témoignes-en avec une joie convaincue et
contagieuse.
Célèbre le Salut du Christ
: accueille- le comme un don qui fait de toi son sacrement; fais de ta vie
le vrai culte spirituel qui plaît à Dieu (cf.
Rm
12, 1).
Le sens du mystère
70. Certains symptômes révèlent un affaiblissement du sens du mystère dans
les célébrations liturgiques elles-mêmes, qui devraient au con- traire y
introduire. Il est donc
urgent que dans l'Église soit ravivé le sens authentique de la liturgie.
Celle-ci, comme l'ont rappelé les Pères synodaux
,
119
est un instrument de sanctification; elle est une célébration de la foi
de l'Église; elle est un moyen de transmission de la foi. Avec l'Écriture sainte
et les enseignements des Pères de l'Église, elle est source vivante d'une
authentique et solide spiritualité. Comme le souligne bien aussi la tradition
des vénérables Églises d'Orient, par la liturgie, les fidèles entrent en
communion avec la Sainte Trinité, faisant l'expérience de leur participation à
la nature divine, en tant que don de la grâce. La liturgie devient ainsi
anticipation de la béatitude finale et participation à la gloire céleste.
71. Dans les célébrations, il faut redonner à Jésus
la place centrale
, afin de nous laisser éclairer et guider par lui. Nous pouvons trouver là
l'une des réponses les plus claires que nos communautés sont appelées à donner à
une religiosité vague et inconsistante. La liturgie de l'Église n'a pas pour but
d'apaiser les désirs et les peurs de l'homme, mais d'écouter et d'accueillir
Jésus le Vivant, qui honore et loue son Père, afin que nous puissions le louer
et l'honorer avec lui. Les célébrations ecclésiales proclament que notre
espérance nous vient de Dieu, par Jésus notre Seigneur.
Il s'agit de
vivre la liturgie comme œuvre de la Trinité
. C'est le Père qui agit pour nous dans les mystères célébrés; c'est lui qui
nous parle, qui nous pardonne, qui nous écoute et qui nous donne son Esprit;
c'est vers lui que nous nous tournons, lui que nous écoutons, que nous louons et
que nous invoquons. C'est Jésus qui agit pour notre sanctification, nous rendant
participants de son mystère. C'est l'Esprit Saint qui opère avec sa grâce et
fait de nous le Corps du Christ, l'Église.
La liturgie doit être vécue comme
annonce et anticipation de la gloire future
, terme ultime de notre espérance. Comme l'enseigne en effet le Concile:
« Dans la liturgie terrestre nous participons, en y goûtant par avance, à
cette liturgie céleste qui est célébrée dans la sainte cité de Jérusalem vers
laquelle nous tendons dans notre pèlerinage [...], jusqu'à ce que [le Christ],
qui est notre vie, se manifeste et que nous soyons manifestés nous-mêmes avec
lui dans la gloire ».
120
Formation liturgique
72. Si, après le Concile œcuménique Vatican II, une partie du chemin a été
accomplie pour vivre le sens authentique de la liturgie, il reste encore
beaucoup à faire. Il faut un renouveau régulier et une formation constante de
tous, ministres ordonnés, personnes consacrées et laïcs.
Le véritable
renouveau
, loin de provenir d'actes arbitraires, consiste à développer toujours mieux
la conscience du sens du mystère, de façon à faire des liturgies des moments de
communion avec le grand et saint mystère de la Trinité. En célébrant les actions
sacrées comme relation à Dieu et accueil de ses dons, expressions d'une
authentique vie spirituelle, l'Église en Europe pourra vraiment nourrir son
espérance et l'offrir à ceux qui l'ont perdue.
73. À cette fin, un grand effort de
formation
est nécessaire. Destinée à favoriser la compréhension du sens véritable des
célébrations de l'Église, elle requiert, en plus d'une formation appropriée sur
les rites, une spiritualité authentique et une éducation qui permette de la
vivre en plénitude.
121
On doit donc promouvoir plus intensément une véritable « mystagogie
liturgique », avec la
participation active de tous les fidèles
, chacun selon ses attributions, aux actions sacrées, en particulier à
l'Eucharistie.
II. Célébrer les Sacrements
74. Une place toute particulière doit être réservée à la
célébration des Sacrements
, en tant qu'actions du Christ et de l'Église ordonnées au culte à rendre à
Dieu, à la sanctification des hommes et à l'édification de la communauté
ecclésiale. Conscients qu'en eux c'est le Christ lui-même qui agit par l'action
du Saint-Esprit, nous devons célébrer les sacrements avec le plus grand soin, en
en créant les conditions favorables. Les Églises particulières du continent
auront à cœur d'intensifier leur pastorale sacramentelle pour en faire
reconnaître la profonde vérité. Les Pères synodaux ont mis en lumière cette
exigence pour répondre à deux dangers: d'une part, certains milieux ecclésiaux
semblent avoir perdu le sens authentique du sacrement et risqueraient donc de
banaliser les mystères célébrés; d'autre part, de nombreux baptisés, attachés
aux usages et aux traditions, continuent à recourir aux sacrements aux moments
significatifs de leur existence, sans pour autant vivre conformément aux
indications de l'Église.
122
L'Eucharistie
75. L'
Eucharistie,
don suprême du Christ à l'Église, rend mystérieusement présent le sacrifice
du Christ pour notre salut: « La très sainte Eucharistie contient en effet
l'ensemble des biens spirituels de l'Église, à savoir le Christ lui-même, notre
Pâque ».
123
C'est en elle, « source et sommet de toute la vie chrétienne »,
124
que l'Église puise au long de son pèlerinage, y trouvant la source
de toute espérance. En effet, l'Eucharistie « donne une impulsion à notre marche
dans l'histoire, faisant naître un germe de vive espérance dans le dévouement
quotidien de chacun à ses propres tâches ».
125
Nous sommes tous invités à
confesser la foi dans l'Eucharistie
, « gage de la gloire future », dans la certitude que la communion avec le
Christ, que nous vivons actuellement comme pèlerins dans notre existence
mortelle, anticipe la rencontre suprême le jour où « nous serons semblables à
lui, parce que nous le verrons tel qu'il est » (
1 Jn
3, 2). L'Eucharistie est un « avant-goût de l'éternité dans le temps
»; elle est présence divine et communion à cette présence; mémorial de la Pâque
du Christ, elle est par nature dispensatrice de la grâce dans l'histoire
humaine. Elle ouvre à l'avenir de Dieu; étant communion avec le Christ, en son
corps et son sang, elle est participation à la vie éternelle de Dieu.
126
La Réconciliation
76. Avec l'Eucharistie, le sacrement de la
Réconciliation
doit aussi jouer un
rôle fondamental pour retrouver l'espérance
: « L'expérience personnelle du pardon de Dieu pour chacun de nous est en
effet le fondement essentiel de toute espérance pour notre avenir ».
127
L'une des racines de la résignation qui assaille tant de personnes
aujourd'hui doit être cherchée dans l'incapacité de se reconnaître pécheur et de
se laisser pardonner, incapacité souvent due à la solitude de ceux qui, vivant
comme si Dieu n'existait pas, n'ont personne à qui demander pardon. En revanche,
celui qui se reconnaît pécheur et qui se confie à la miséricorde du Père céleste
fait l'expérience de la joie d'une vraie libération et il peut avancer dans
l'existence sans se replier sur sa propre misère.
128
Il reçoit ainsi la grâce d'un nouveau départ et il retrouve des raisons
d'espérer.
C'est pourquoi il est nécessaire que dans l'Église en Europe le sacrement de
la Réconciliation soit ravivé. Il faut cependant redire que la forme du
sacrement est la confession personnelle des péchés, suivie de l'absolution
individuelle. Cette rencontre entre le pénitent et le prêtre doit être
favorisée, quelles que soient les formes prévues du
rite du Sacrement.
Face à la perte largement répandue du sens du péché et à l'affirmation
d'une mentalité marquée par le relativisme et le subjectivisme dans le domaine
moral, il est nécessaire que, dans toute communauté ecclésiale, on pourvoie à
une sérieuse formation des consciences.
129
Les Pères du Synode ont insisté pour que l'on reconnaisse clairement la
vérité du péché personnel et la nécessité du pardon personnel de Dieu à travers
le ministère du prêtre.
Les absolutions collectives ne sont pas une modalité laissée à la libre
appréciation dans l'administration du sacrement de la Réconciliation.
130
77. Je m'adresse aux
prêtres
, les exhortant à être généreusement disponibles pour écouter les
confessions et à être eux-mêmes des exemples en s'approchant avec régularité du
sacrement de la Pénitence. Je les invite à mettre soigneusement à jour leurs
connaissances dans le domaine de la théologie morale, de manière à pouvoir
affronter avec compétence les problèmes apparus récemment dans le domaine de la
morale personnelle et sociale. Puissent-ils porter aussi une particulière
attention aux conditions concrètes de vie dans lesquelles se trouvent les
fidèles et savoir les conduire patiemment à reconnaître les exigences de la loi
morale chrétienne, les aidant à vivre le sacrement comme une joyeuse rencontre
avec la miséricorde du Père céleste!
131
Prière et vie
78. En plus de la célébration eucharistique, il convient de promouvoir aussi
les autres formes de
prières communautaires
,
132
aidant à redécouvrir le lien qui existe entre ces dernières et la prière
liturgique. En particulier, tout en maintenant vivante la tradition de l'Église
latine, on doit développer les diverses expressions du
culte eucharistique en dehors de la Messe
: adoration personnelle, exposition et procession, qui sont à comprendre
comme des expressions de la foi en la permanence de la présence réelle du
Seigneur dans le Sacrement de l'autel.
133
À propos de la célébration personnelle ou communautaire
de la Liturgie des Heures
, dont le Concile a aussi rappelé la grande valeur pour les fidèles laïcs,
134
on s'attachera à faire voir le lien qui la relie au mystère
eucharistique. Les familles seront encouragées à réserver un temps pour la
prière en commun, de façon à interpréter à la lumière de l'Évangile toute leur
vie conjugale et familiale. Ainsi, à partir de là et dans l'écoute de la Parole
de Dieu, se développera cette
liturgie domestique
qui accompagnera tous les moments de la vie familiale.
135
Toute forme de prière communautaire présuppose la prière individuelle. Entre
la personne et Dieu naît ce colloque en vérité qui s'exprime dans la louange,
dans l'action de grâce, dans la supplication adressée au Père, par Jésus Christ
et dans l'Esprit Saint. Jamais ne sera délaissée la prière personnelle, qui est
comme la respiration du chrétien. À tous aussi, on apprendra à redécouvrir le
lien entre cette dernière et la prière liturgique.
79. On réservera aussi une attention particulière à la
piété populaire
.
136
Largement présente en diverses régions d'Europe grâce aux confréries, aux
pèlerinages et aux processions auprès de nombreux sanctuaires, elle enrichit le
cours de l'année liturgique, inspirant coutumes et usages familiaux et sociaux.
Toutes ces formes doivent être considérées avec attention, moyennant une
pastorale de promotion et de renouveau, qui les aide à développer ce qui est
expression authentique de la sagesse du peuple de Dieu. Tel est assurément le
saint Rosaire. En cette année qui lui est consacrée, il m'est cher d'en
recommander de nouveau la récitation, car, « s'il est redécouvert dans sa pleine
signification, le Rosaire conduit au cœur même de la vie chrétienne et offre une
occasion spirituelle et pédagogique ordinaire mais féconde pour la contemplation
personnelle, la formation du peuple de Dieu et la nouvelle évangélisation ».
137
En matière de piété populaire, il faut veiller constamment aux aspects
ambigus de certaines manifestations, les préservant des dérives séculières, du
consumérisme irréfléchi ou encore des risques de superstition, afin de les
maintenir dans le cadre de formes assurées et authentiques. On fera œuvre
d'éducation, expliquant que la piété populaire doit toujours être vécue en
harmonie avec la liturgie de l'Église et en relation avec les Sacrements.
80. Il ne faut pas oublier que le «
culte spirituel capable de plaire à Dieu
» (cf.
Rm
12, 1) se réalise avant tout dans
l'existence quotidienne
, vécue dans la charité à travers le don de soi libre et généreux, même dans
les moments d'apparente impuissance. Ainsi, la vie est animée par une espérance
indéfectible parce qu'elle s'appuie uniquement sur la certitude de la puissance
de Dieu et de la victoire du Christ: c'est une vie remplie des consolations de
Dieu, par lesquelles nous sommes appelés à consoler à notre tour ceux que nous
rencontrons sur notre route (cf.
2 Co
1, 4).
Le jour du Seigneur
81. Le
jour du Seigneur
est le moment par excellence et hautement évocateur en ce qui concerne la
célébration de l'Évangile de l'espérance.
Dans le contexte actuel, les circonstances rendent précaire pour les
chrétiens la possibilité de vivre pleinement le dimanche comme jour de la
rencontre avec le Seigneur. Il n'est pas rare qu'il se réduise à n'être qu'une «
fin de semaine », un simple temps d'évasion. C'est pourquoi il faut une action
pastorale organique au niveau éducatif, spirituel et social, qui aide à en vivre
le sens véritable.
82. Je renouvelle donc l'appel à
redécouvrir le sens profond du jour du Seigneur
:
138
qu'il soit sanctifié par la participation à l'Eucharistie et par un repos
rempli de joie chrétienne et de fraternité. Qu'il soit célébré comme le centre
de tout le culte, comme l'annonce incessante de la vie sans fin, qui ranime
l'espérance et redonne courage sur le chemin. Ne craignons pas alors
de le défendre contre toute attaque et de tout mettre en œuvre pour que,
dans l'organisation du travail,
il soit sauvegardé,
de manière à être un jour pour l'homme, au bénéfice de la société entière.
En effet, si le dimanche était privé de sa signification originelle et s'il
devenait impossible en ce jour de réserver un temps convenable à la prière, au
repos, à la communion et à la joie, il pourrait arriver « que l'homme reste
enfermé dans un horizon si réduit qu'il ne peut plus voir le ciel; alors, même
revêtu d'un habit de fête, il devient profondément incapable de faire la fête ».
139
Et sans la dimension de la fête, l'espérance ne trouverait pas de maison
où habiter.
CHAPITRE V
SERVIR
L'ÉVANGILE DE L'ESPÉRANCE
« Je connais ta conduite, ton amour, ta foi
,
ton sens du service, ta persévérance »
(
Ap
2, 19)
Le chemin de l'amour
83. La Parole que l'Esprit adresse aux Églises contient
un jugement sur leur vie
. Elle concerne les actes et les comportements: «
Je connais ta conduite
» est l'introduction qui, tel un refrain et avec peu de variantes, apparaît
dans les lettres écrites aux sept Églises. Quand les œuvres s'avèrent positives,
elles sont le fruit du labeur, de la persévérance, de l'acceptation des
épreuves, des tribulations, de la pauvreté, de la fidélité dans la persécution,
de la charité, de la foi, du service. En ce sens, elles peuvent être lues comme
la description d'une Église qui non seulement annonce et célèbre le salut venant
du Seigneur, mais qui en « vit » réellement.
Pour servir l'Évangile de l'espérance,
l'Église qui est en Europe est elle aussi appelée à suivre la route de
l'amour
. C'est une route qui passe par la charité évangélisatrice, l'engagement
multiforme dans le service, la détermination dans une générosité sans trêve ni
frontière.
I. Le service de la charité
Dans la communion et dans la solidarité
84. Pour toute personne, l'amour reçu et donné constitue
l'expérience
originaire
dans laquelle naît l'espérance
. « L'homme ne peut vivre sans amour. Il demeure pour lui-même un être
incompréhensible, sa vie est privée de sens s'il ne reçoit pas la révélation de
l'amour, s'il ne rencontre pas l'amour, s'il n'en fait pas l'expérience et s'il
ne le fait pas sien, s'il n'y participe pas fortement ».
140
Le défi pour l'Église dans l'Europe d'aujourd'hui consiste donc à aider
l'homme contemporain à faire l'expérience de l'amour de Dieu le Père et du
Christ dans l'Esprit Saint, à travers le
témoignage de l'amour, qui en lui-même possède une force évangélisatrice
intrinsèque.
En définitive
,«
l'Évangile », joyeuse annonce faite à tout homme, consiste en ceci: Dieu
nous a aimés le premier (cf.
Jn
4, 10.19); Jésus nous a aimés jusqu'au bout (cf.
Jn
13, 1). Grâce au don de l'Esprit, l'amour de Dieu est offert aux croyants,
les rendant participants de sa capacité d'aimer: il saisit le cœur de tout
disciple et de l'Église entière (cf.
2 Co
5, 14). Précisément parce qu'il est donné par Dieu, l'amour devient
commandement
pour l'homme (cf.
Jn
13, 34).
Vivre dans l'amour devient ainsi une
joyeuse nouvelle
pour tout homme, rendant visible l'amour de Dieu qui n'abandonne personne.
En fin de compte, cela signifie donner à l'homme égaré de véritables raisons
pour continuer à espérer.
85. C'est la vocation de l'Église, comme « signe tangible, bien que toujours
inadéquat, de l'amour vécu, de faire que les hommes et les femmes rencontrent
l'amour de Dieu et du Christ qui vient à leur recherche ».
141
« Signe et instrument de l'union intime avec Dieu et de l'unité de tout
le genre humain »,
142
l'Église en témoigne lorsque les personnes, les familles et les
communautés vivent intensément l'Évangile de la charité. En d'autres termes, nos
communautés ecclésiales
sont appelées à être de véritables
lieux privilégiés d'entraînement à la communion
.
De par sa nature même, le témoignage de la charité est appelé à s'étendre
au-delà des limites de la communauté ecclésiale, pour atteindre toute personne,
de sorte que
l'amour pour tous les hommes
devienne
incitation à une authentique solidarité pour l'ensemble de la vie sociale
. Quand l'Église sert la charité, elle fait en même temps croître la «
culture de la solidarité », contribuant ainsi à redonner vie aux valeurs
universelles de la convivialité humaine.
Dans cette perspective, il convient de
redécouvrir le sens authentique du bénévolat chrétien
. Naissant de la foi et étant continuellement nourri par elle, il doit
conjuguer les compétences professionnelles et l'amour authentique, poussant ceux
qui s'y livrent à « élever leurs sentiments de simple philanthropie à la hauteur
de la charité du Christ; à reconquérir chaque jour, dans le labeur et la
fatigue, la conscience de la dignité de tout homme; à aller à la découverte des
besoins des personnes en ouvrant, s'il le faut, de nouvelles voies là où le
besoin se fait le plus urgent, et là où l'attention et le soutien sont les plus
déficients ».
143
II. Servir l'homme dans la société
Redonner espérance aux pauvres
86. À toute l'Église il est demandé de
redonner espérance aux pauvres
. Les accueillir et les servir signifie pour elle accueillir et servir le
Christ (cf.
Mt
25, 40).
L'amour préférentiel pour les pauvres
est une dimension nécessaire de l'être chrétien et du service de
l'Évangile. Aimer les personnes et leur témoigner qu'elles sont particulièrement
aimées de Dieu veut dire reconnaître qu'elles ont une valeur en elles-mêmes,
quelles que soient les conditions économiques, culturelles et sociales dans
lesquelles elles vivent, les aidant à développer leurs potentialités.
87. Il faut par ailleurs
se laisser interpeller par le phénomène du chômage,
qui, dans beaucoup de pays d'Europe, constitue un grave fléau social. À
cela s'ajoutent aussi les problèmes liés à l'accroissement des flux migratoires.
Il est demandé à l'Église de rappeler que le travail est un bien que toute la
société doit prendre en charge.
Présentant à nouveau les critères éthiques qui doivent guider le marché et
l'économie, dans un respect scrupuleux de la place centrale que l'homme y
occupe, l'Église ne peut négliger la recherche du dialogue avec les personnes
engagées dans le domaine politique et syndical, et dans le monde de
l'entreprise.
144
Le dialogue doit tendre à l'édification d'une Europe entendue comme
communauté de peuples et de personnes, communauté solidaire dans l'espérance,
non soumise exclusivement aux lois du marché, mais fermement préoccupée de
sauvegarder la dignité de l'homme même dans ses rapports économiques et sociaux.
88. Qu'une attention particulière soit aussi portée à la
pastorale des malades
. Considérant que la maladie est une situation qui suscite des questions
essentielles sur le sens de la vie, « dans une société de la prospérité et de
l'efficacité, dans une culture caractérisée par l'idolâtrie du corps, par le
refus de la souffrance et de la douleur, et par le mythe de la jeunesse
éternelle »,
145
l'attention envers les malades doit être considérée comme une priorité. À
cette fin, il faut promouvoir, d'une part, une présence pastorale appropriée
dans les différents lieux de la souffrance, par exemple à travers l'engagement
d'aumôniers d'hôpitaux, de membres d'associations de bénévolat, d'institutions
sanitaires liées à l'Église, et, d'autre part, un soutien aux familles des
malades. De plus, il est nécessaire d'être proche du personnel médical et
paramédical, avec des moyens pastoraux adaptés, pour le soutenir dans son
exigeante vocation au service des malades. En effet, dans leur activité
professionnelle, les personnes qui travaillent dans le monde de la santé rendent
chaque jour un noble service à la vie. Il leur est demandé d'offrir aussi aux
patients le soutien spirituel particulier qui suppose la chaleur d'un contact
humain authentique.
89. Enfin, on ne saurait oublier qu'il est parfois fait un
usage indu des biens de la terre.
Manquant en effet à la mission de cultiver et de garder la terre avec
sagesse et amour (cf
Gn
2, 15), l'homme a, dans de nombreuses régions, dévasté plaines et forêts,
pollué les eaux, rendu l'air irrespirable, bouleversé les systèmes
hydrogéologiques et atmosphériques, et provoqué la désertification de vastes
zones.
Même dans ce cas, servir l'Évangile de l'espérance veut dire s'engager de
manière nouvelle pour un
usage correct des biens de la terre
,
146
développant l'attention qui, en plus de sauvegarder des
habitats
naturels, défend la qualité de vie des personnes, afin de préparer pour les
générations futures un monde plus conforme au projet du Créateur.
La vérité sur le mariage et la famille
90. L'Église en Europe, dans toutes ses composantes, doit proposer à nouveau,
avec fidélité,
la vérité sur le mariage et la famille
.
147
C'est une nécessité qu'elle ressent intensément en elle-même, car elle
sait qu'elle est qualifiée pour accomplir cette tâche, en vertu de la mission
évangélisatrice que lui a confiée son Époux et Seigneur, et que cette tâche
s'impose aujourd'hui de nouveau avec une insistance inégalée. De nombreux
facteurs culturels, sociaux et politiques contribuent en effet à provoquer une
crise, toujours plus évidente, de la famille. Ils compromettent, dans certaines
mesures, la vérité et la dignité de la personne humaine, et ils remettent en
cause, en la dénaturant, l'idée même de famille. La valeur de l'indissolubilité
du mariage est de plus en plus méconnue; on revendique des formes de
reconnaissance légale des unions de fait, les mettant sur le même plan que les
mariages légitimes; on observe même des tentatives visant à faire accepter des
modèles de couples où la différence sexuelle ne serait plus essentielle.
Dans ce contexte, il est demandé à l'Église
d'annoncer avec une vigueur renouvelée ce que dit l'Évangile sur le mariage
et la famille
, pour en saisir la signification et la valeur dans le dessein salvifique de
Dieu. Il est en particulier nécessaire de réaffirmer que ces institutions sont
des réalités qui proviennent de la volonté de Dieu. Il faut redécouvrir la
vérité de la famille, en tant que communauté intime de vie et d'amour,
148
ouverte à la génération de nouvelles vies; et aussi sa dignité « d'Église
domestique » et sa participation à la mission de l'Église et à la vie de la
société.
91. Selon les Pères du Synode, il faut reconnaître que de nombreuses
familles, dans le quotidien d'une existence vécue dans l'amour, sont des témoins
visibles de la présence de Jésus qui les accompagne et qui les soutient par le
don de son Esprit. Pour affermir leur marche, on devra approfondir la théologie
et la spiritualité du mariage et de la famille; proclamer avec fermeté et
intégrité, et montrer au moyen d'exemples efficaces la vérité et la beauté de la
famille fondée sur le mariage entendu comme union stable et féconde d'un homme
et d'une femme; promouvoir dans toute communauté ecclésiale une pastorale
familiale organique et adaptée. En même temps, il sera nécessaire d'offrir, avec
une sollicitude maternelle de la part de l'Église, une aide à ceux qui se
trouvent dans des situations difficiles, par exemple les mères célibataires, les
personnes séparées, les divorcés, les enfants abandonnés. Dans tous les cas, il
conviendra d'encourager, d'accompagner et de soutenir une juste participation
des familles, seules ou associées, dans l'Église et dans la société, et de
veiller à ce que les États et l'Union européenne elle-même mettent en place des
politiques familiales authentiques et adaptées.
149
92. Une attention particulière doit être réservée à
l'éducation des jeunes et des fiancés à l'amour
, grâce à des parcours spécifiques de préparation à la célébration du
sacrement de Mariage, qui les aident à arriver jusqu'à ce jour en vivant dans la
chasteté. Dans son œuvre éducative, l'Église se montrera prévenante,
accompagnant également les jeunes époux après la célébration de leur mariage.
93. Enfin, l'Église est aussi appelée à rencontrer, avec une bonté
maternelle, tous ceux qui sont dans des situations matrimoniales qui peuvent
facilement faire perdre l'espérance. En particulier, « face aux nombreuses
familles disloquées, l'Église se sent appelée, non pas à exprimer un jugement
sévère et distant, mais plutôt à
introduire dans les plaies de tant de drames humains la lumière de la Parole
de Dieu,
accompagnée du témoignage de sa miséricorde. Tel est l'esprit avec lequel la
pastorale familiale cherche à prendre en charge également les situations des
croyants qui sont divorcés et se sont remariés civilement
. Ils ne sont pas exclus de la communauté: ils sont même invités à
participer à sa vie, en accomplissant un chemin de croissance dans la ligne des
exigences évangéliques. Sans leur taire la vérité du désordre moral objectif
dans lequel ils se trouvent et des conséquences qui en découlent quant à la
pratique sacramentelle, l'Église entend leur montrer toute sa proximité
maternelle ».
150
94. S'il est nécessaire, pour servir l'Évangile de l'espérance, d'apporter
une attention particulière et prioritaire à la famille, il est tout aussi vrai
que
les familles elles-mêmes ont une tâche irremplaçable à accomplir
à l'égard de ce même Évangile de l'espérance. C'est pourquoi, en toute
confiance et affection, je renouvelle mon invitation à toutes les familles
chrétiennes qui vivent en Europe: « Familles, devenez ce que vous êtes ! » Vous
êtes une
représentation vivante de l'amour de Dieu
: Vous avez la « mission de garder, de révéler et de communiquer l'amour,
reflet vivant et participation réelle de l'amour de Dieu pour l'humanité et de
l'amour du Christ Seigneur pour l'Église son Épouse ».
151
Vous êtes le «
sanctuaire de la vie
[...]: le lieu où la vie, don de Dieu, peut être convenablement accueillie
et protégée contre les nombreuses attaques auxquelles elle est exposée, le lieu
où elle peut se développer suivant les exigences d'une croissance humaine
authentique ».
152
Vous êtes le
fondement de la société
, en tant que lieu premier de l'« humanisation » de la personne et du «
vivre ensemble »,
153
modèle pour l'instauration de rapports sociaux vécus dans l'amour et la
solidarité.
Soyez vous-mêmes
des témoins crédibles de l'Évangile de l'espérance! Car vous êtes «
Gaudium et spes
».
154
Servir l'Évangile de la vie
95. Le vieillissement et la diminution de la population auxquels on assiste
dans divers pays d'Europe ne peuvent pas ne pas être des motifs de
préoccupation; en effet,
la chute des naissances
est le symptôme d'un rapport perturbé avec l'avenir; c'est une
manifestation évidente d'un manque d'espérance, c'est le signe de la « culture
de mort » qui traverse la société contemporaine.
155
Avec la chute de la natalité, il faut rappeler d'autres signes qui concourent
à provoquer l'éclipse de la valeur de la vie et à déchaîner une sorte de
conjuration contre elle. Parmi eux, il faut tout d'abord mentionner avec
tristesse la diffusion de l'
avortement
, même en utilisant des préparations chimiques et pharmaceutiques qui le
rendent possible sans devoir recourir à un médecin, et en le soustrayant ainsi à
toute forme de responsabilité sociale; cela est favorisé par la présence, dans
les législations de nombreux États du continent, de lois permettant un geste qui
demeure un « crime abominable »
156
et qui constitue toujours un grave désordre moral. On ne peut pas oublier
non plus les attentats perpétrés à travers les interventions « sur les embryons
humains qui, bien que poursuivant des buts en soi légitimes, en comportent
inévitablement le meurtre », ou bien l'utilisation détournée des techniques de
diagnostic prénatal, qui sont mises non pas au service de thérapies précoces,
parfois envisageables, mais « d'une mentalité eugénique qui accepte l'avortement
sélectif ».
157
Il faut aussi mentionner la tendance, que l'on observe dans certaines parties
de l'Europe, à penser qu'il pourrait être permis de mettre fin sciemment à ses
jours ou à ceux d'autrui: d'où une diffusion de l'
euthanasie
, cachée ou effectuée au grand jour, en faveur de laquelle les demandes et
les tristes exemples de légalisation ne manquent pas.
96. Face à cet état de fait, il est nécessaire de «
servir l'Évangile de la vie
» également grâce « à
une mobilisation générale des consciences
et à
un effort commun d'ordre éthique,
pour mettre en œuvre
une grande stratégie pour le service de la vie. Nous devons construire tous
ensemble une nouvelle culture de la vie
».
158
C'est là un grand défi qu'il faut affronter avec responsabilité, dans la
certitude que « l'avenir de la civilisation européenne dépend en grande partie
d'une défense et d'une promotion résolues des valeurs de la vie, centre de son
patrimoine culturel »;
159
il s'agit en effet de rendre à l'Europe sa véritable dignité, qui est
d'être le lieu où toute personne est reconnue dans son incomparable dignité.
Je fais volontiers miennes ces paroles des Pères du synode: « Le synode des
évêques européens incite les communautés chrétiennes à se faire les
évangélisatrices de la vie. Il encourage les couples chrétiens et les familles
chrétiennes à se soutenir mutuellement pour demeurer fidèles à leur mission de
collaborer avec Dieu dans la génération et l'éducation de nouvelles créatures;
il apprécie toute généreuse tentative de réagir à l'égoïsme en matière de
transmission de la vie, égoïsme nourri par de faux modèles de sécurité et de
bonheur; il demande aux États et à l'Union européenne de mettre en œuvre des
politiques clairvoyantes qui promeuvent les conditions concrètes de logement, de
travail et d'aide sociale, en vue d'aider à la constitution de la famille et à
répondre à la vocation à la maternité et à la paternité, et qui en plus assurent
à l'Europe d'aujourd'hui la ressource la plus précieuse: les Européens de demain
».
160
Bâtir une cité digne de l'homme
97. La charité active nous engage à hâter la venue du Règne de Dieu. C'est
pourquoi elle apporte son concours à la promotion des valeurs authentiques qui
sont à la base d'une civilisation digne de l'homme. Comme le rappelle en effet
le Concile Vatican II, « dans leur marche vers la cité céleste, les chrétiens
doivent rechercher et goûter les choses d'en haut; mais, par là, la gravité du
devoir de travailler en collaboration avec tous les hommes à l'édification d'un
monde plus humain, loin d'être diminuée, est plutôt accrue ».
161
L'attente des cieux nouveaux et de la terre nouvelle, loin d'éloigner de
l'histoire, intensifie la sollicitude pour le monde présent où, jusqu'à
aujourd'hui, croît la nouveauté qui est germe et figure du monde à venir.
Animés par ces certitudes de foi,
engageons-nous à construire une cité digne de l'homme
! Même s'il n'est pas possible de réaliser dans l'histoire un ordre social
parfait, nous savons pourtant que tout effort sincère pour construire un monde
meilleur est accompagné de la bénédiction de Dieu et que toute semence de
justice et d'amour
plantée
dans le temps présent donnera son fruit dans l'éternité.
98. Dans la construction d'une cité digne de l'homme,
un rôle d'inspiration doit être reconnu à la doctrine sociale de l'Église
. À travers elle, en effet, l'Église pose au continent européen la question
de la valeur morale de sa civilisation. Cette doctrine tire son origine de la
rencontre entre, d'une part, le message biblique et la raison, et, d'autre part,
les problèmes et les situations concernant la vie de l'homme et de la société.
Par l'ensemble des principes qu'elle propose, cette doctrine contribue à poser
des bases solides pour une vie sociale à la mesure de l'homme, dans la justice,
la vérité, la liberté et la solidarité. Tournée vers la défense et la promotion
de la dignité de la personne, fondement non seulement de la vie économique et
politique, mais aussi de la justice sociale et de la paix, elle apparaît capable
d'assurer des bases solides aux piliers sur lesquels se bâtit l'avenir du
continent européen.
162
La doctrine sociale de l'Église comporte aussi les points de repères qui
permettent de défendre la structure morale de la liberté, de manière à
sauvegarder la culture et la société européennes aussi bien de l'utopie
totalitaire de la « justice sans liberté » que de celle d'une « liberté sans
vérité » qui s'accompagne d'une fausse conception de la « tolérance », toutes
deux porteuses d'erreurs et d'horreurs pour l'humanité, comme en témoigne
malheureusement l'histoire récente de l'Europe elle-même.
163
99. La doctrine sociale de l'Église, en raison de son lien intrinsèque avec
la dignité de la personne, est faite pour être comprise aussi par ceux qui
n'appartiennent pas à la communauté des croyants. Il est donc urgent d'en
répandre la connaissance et l'étude, dans le but de surmonter l'ignorance que
même les chrétiens ont à son endroit. C'est ce qu'exige l'Europe nouvelle en
voie de construction, elle qui a besoin de personnes éduquées selon ces valeurs
et disposées à travailler à la réalisation du bien commun. À cette fin s'avère
nécessaire la présence de laïcs chrétiens qui, dans les diverses responsabilités
de la vie civique, économique, culturelle, dans le monde de la santé, de
l'éducation et de la politique, agissent de manière à pouvoir y diffuser les
valeurs du Royaume.
164
Pour une culture de l'accueil
100. Parmi les défis qui se posent aujourd'hui pour le service de l'Évangile
de l'espérance apparaît celui du phénomène croissant de l'
immigration
, qui interroge l'Église sur sa capacité d'accueillir chaque personne, quel
que soit le peuple ou la nation auquel elle appartient. Il incite également
toute la société européenne et ses institutions à rechercher un ordre juste et
des modes de convivialité respectueux de tous, comme aussi de la législation, en
vue d'une éventuelle intégration.
Devant l'état de pauvreté, de sous-développement ou même d'insuffisance de
liberté qui, malheureusement, caractérise encore divers pays et qui pousse de
nombreuses personnes à abandonner leur terre, se fait sentir le besoin d'un
engagement courageux de tous pour
la réalisation d'un ordre économique international plus juste,
qui soit en mesure de promouvoir l'authentique développement de tous les
peuples et de tous les pays.
101. Face au phénomène migratoire, l'Europe est mise au défi de trouver des
formes nouvelles et intelligentes
d'accueil et d'hospitalité
. C'est la vision « universaliste » du bien commun qui l'exige: il faut
dilater son regard jusqu'à embrasser les exigences de toute la famille humaine.
Le phénomène même de la mondialisation demande ouverture et partage s'il veut
être non pas une source d'exclusion et de marginalisation, mais au contraire de
participation solidaire de tous à la production et à l'échange des biens.
Chacun doit s'employer à la croissance d'une
solide culture de l'accueil
qui, tenant compte de l'égale dignité de toute personne et du devoir de
solidarité à l'égard des plus faibles, demande que
soient reconnus les droits fondamentaux de tout migrant.
Il est de la responsabilité des autorités publiques d'exercer un contrôle
sur les flux migratoires en fonction des exigences du bien commun. L'accueil
doit toujours se réaliser dans le respect des lois et donc se conjuguer, si
nécessaire, avec une ferme
répression des abus
.
102. Il faut également s'employer à découvrir les formes possibles d'une
véritable intégration
des immigrés légitimement accueillis dans le tissu social et culturel des
diverses nations européennes. Cela exige que l'on ne cède pas à l'indifférence à
l'égard des valeurs humaines universelles et que l'on soit attentif à
sauvegarder le patrimoine culturel propre à chaque nation. Une convivialité
pacifique et un échange des richesses intérieures réciproques rendront possible
l'édification d'une Europe qui sache être la maison commune, où chacun puisse
être accueilli, où nul ne fasse l'objet de discrimination, où tous soient
traités et vivent de façon responsable comme membres d'une seule grande famille.
103. Pour sa part, l'Église est appelée à « continuer son action pour créer
et améliorer sans cesse
ses services d'accueil et ses attentions pastorales
à l'égard des immigrés et des réfugiés »,
165
pour faire en sorte que soient respectées leur dignité et leur
liberté, et que soit favorisée leur intégration.
On veillera en particulier à assurer
une assistance pastorale à l'intégration des immigrés catholiques,
en respectant leur culture et l'originalité de leurs traditions
religieuses. À cette fin, il est bon de favoriser les contacts entres les
Églises d'origine des immigrés et celles qui les accueillent, en vue d'étudier
des formes d'aide qui peuvent également prévoir la présence, parmi les immigrés,
de prêtres, de personnes consacrées et d'agents pastoraux, convenablement
formés, provenant de leur pays.
Le service de l'Évangile exige en outre que l'Église, défendant la cause des
opprimés et des exclus,
demande aux autorités politiques des divers États et aux responsables des
Institutions européennes
de reconnaître la condition de réfugié à ceux qui fuient leur pays
d'origine en raison de menaces pour leur vie, et aussi de faciliter leur retour
dans leur pays, ainsi que de créer les conditions pour que soit respectée la
dignité de tous les immigrés et que soient défendus leurs droits fondamentaux.
166
III. Optons pour la charité
104. L'appel à vivre une charité active, adressé par les Pères synodaux à
tous les chrétiens du continent européen
,
167
représente la synthèse heureuse d'un service authentique rendu à
l'Évangile de l'espérance. Aujourd'hui, je te propose à mon tour cet appel,
Église du Christ qui vis en Europe. Que les joies et les espérances, que les
tristesses et les angoisses des Européens d'aujourd'hui, surtout des pauvres et
de ceux qui souffrent, soient aussi tes joies et tes espérances, tes tristesses
et tes angoisses, et que rien de ce qui est authentiquement humain ne manque de
trouver un écho dans ton cœur! Regarde l'Europe et son cheminement, avec la
sympathie de celui qui apprécie tout élément positif, mais qui, en même temps,
ne ferme pas les yeux sur ce qui n'est pas en harmonie avec l'Évangile et qui le
dénonce avec force!
105. Église en Europe, accueille chaque jour avec une fraîcheur renouvelée le
don de la charité que le Seigneur t'offre et dont il te rend capable! Apprends
de lui le contenu et la mesure de l'amour! Et sois
l'Église des Béatitudes
, continuellement conformée au Christ (cf.
Mt
5, 1-12).
Libre de toute entrave et de toute dépendance, sois pauvre et amie des plus
pauvres, accueillante envers toute personne et attentive à toute forme de
pauvreté, qu'elle soit ancienne ou nouvelle!
Continuellement purifiée par la bonté du Père, reconnais dans l'attitude de
Jésus, qui a toujours défendu la vérité tout en se montrant miséricordieux
envers les pécheurs, la norme suprême de ton action.
En Jésus, à la naissance duquel la paix fut annoncée (cf.
Lc
2, 14), en lui qui dans sa mort a abattu toute inimitié (cf.
Ep
2, 14) et qui a donné la paix véritable (cf.
Jn
14, 27), sois un artisan de paix, invitant tes fils à laisser purifier leur
cœur de toute hostilité, égoïsme ou esprit partisan, favorisant en toute
circonstance le dialogue et le respect réciproques!
En Jésus, justice de Dieu, ne te lasse jamais de dénoncer toute forme
d'injustice! En vivant dans le monde avec les valeurs du Règne qui vient, tu
seras l'Église de la charité, tu apporteras ton indispensable contribution à
l'édification en Europe d'une civilisation toujours plus digne de l'homme.
CHAPITRE VI
L'ÉVANGILE DE L'ESPÉRANCE
POUR UNE EUROPE NOUVELLE
« J'ai vu descendre du ciel, d'auprès de Dieu
,
la cité sainte, la Jérusalem nouvelle »
(
Ap
21, 2)
La nouveauté de Dieu dans l'histoire
106. L'Évangile de l'espérance qui résonne dans l'Apocalypse ouvre le cœur à
la
contemplation de la nouveauté opérée par Dieu
: « Alors j'ai vu un ciel nouveau et une terre nouvelle, car le premier ciel
et la première terre avaient disparu, et il n'y avait plus de mer » (
Ap
21, 1). C'est Dieu lui-même qui proclame cette nouveauté avec des
mots expliquant la vision qui vient d'être décrite: « Voici que je fais toutes
choses nouvelles » (
Ap
21, 5).
La nouveauté de Dieu – pleinement compréhensible sur l'arrière-plan des
choses du passé, faites de larmes, de deuil, d'affliction et de mort (cf.
Ap
21, 4) – consiste à sortir de la condition du péché et de ses conséquences,
dans laquelle se trouve l'humanité; c'est le ciel nouveau et la nouvelle terre,
la Jérusalem nouvelle, par opposition à un ciel et à une terre anciens, à un
antique ordre des choses et à une Jérusalem vétuste, tourmentée par ses
rivalités.
Il n'est pas indifférent pour la construction de la cité de l'homme
d'utiliser l'image de la Jérusalem nouvelle qui descend « du ciel, d'auprès de
Dieu, toute prête, comme une fiancée parée pour son époux » (
Ap
21, 2) et qui se réfère directement au mystère de l'Église. C'est une image
qui parle d'une
réalité eschatologique
: elle va au-delà de tout ce que l'homme peut faire; elle est un don de Dieu
qui s'accomplira dans les derniers temps. Mais elle n'est pas une utopie: elle
est une
réalité déjà présente
. C'est ce qu'indique le verbe au présent utilisé par Dieu
–
« Voici que je
fais
toutes choses nouvelles » (
Ap
21, 5) – avec la précision qui suit: « Tout est réalisé désormais » (
Ap
21, 6). Car Dieu est déjà en train d'agir pour renouveler le monde; la
Pâque de Jésus est déjà la nouveauté de Dieu. Elle fait naître l'Église, elle en
anime l'existence, elle renouvelle et transforme l'histoire.
107. Cette nouveauté commence à prendre forme avant tout
dans la communauté chrétienne
, qui est déjà aujourd'hui « la demeure de Dieu avec les hommes » (cf.
Ap
21, 3), au sein de laquelle Dieu est déjà à l'œuvre, renouvelant la vie de
ceux qui se soumettent au souffle de l'Esprit. L'Église est pour le monde signe
et instrument du Royaume qui se réalise avant tout dans les cœurs. Un reflet de
cette même nouveauté se manifeste aussi dans
toute forme de convivialité humaine animée par l'Évangile.
Il s'agit d'une nouveauté qui interroge la société à tout moment de
l'histoire et en tout point de la terre, particulièrement la société européenne
qui, depuis de nombreux siècles, écoute l'Évangile du Règne inauguré par Jésus.
I. La vocation spirituelle de l'Europe
L'Europe promotrice des valeurs universelles
108. L'histoire du continent européen est marquée par l'influence vivifiante
de l'Évangile. « Si nous tournons notre regard vers les siècles passés, nous ne
pouvons pas manquer de rendre grâce au Seigneur pour le fait que le
christianisme a été pour notre continent un facteur primordial d'unité entre
les peuples et les cultures
et de promotion intégrale de l'homme et de ses droits ».
168
On ne peut certes pas douter que la foi chrétienne fait partie, de façon
radicale et déterminante, des fondements de la culture européenne. Le
christianisme a en effet donné sa forme à l'Europe, y faisant pénétrer certaines
valeurs fondamentales. La modernité européenne elle- même, qui a donné au monde
l'idéal démocratique et les droits humains, puise ses valeurs dans son héritage
chrétien. Plus qu'un espace géographique, cet héritage peut être qualifié de «
concept majoritairement culturel et historique
, caractérisant une réalité née comme continent grâce, entre autres, à la
force unificatrice du christianisme; celui-ci a su fondre entre eux des peuples
différents et des cultures diverses, et il est intimement lié à la culture
européenne tout entière ».
169
Cependant, au moment même où l'Europe d'aujourd'hui renforce et élargit son
union économique et politique, elle semble aussi souffrir d'une profonde crise
de valeurs. Bien qu'elle dispose de moyens accrus, elle donne l'impression de
manquer d'élan pour nourrir un projet commun et pour redonner à ses citoyens des
raisons d'espérer.
Le nouveau visage de l'Europe
109. Dans le processus de transformation qu'elle vit actuellement,
l'Europe est appelée avant tout à retrouver sa véritable identité
. En effet, bien qu'elle soit parvenue à constituer une réalité fortement
diversifiée, elle doit édifier un nouveau modèle d'unité dans la diversité, une
communauté de nations réconciliées, ouverte aux autres continents et engagée
dans le processus actuel de mondialisation.
Pour donner un nouvel élan à son histoire, elle doit « reconnaître et
retrouver, dans une fidélité créatrice, les valeurs fondamentales à
l'acquisition desquelles le christianisme a apporté une contribution
déterminante, et qui peuvent se résumer dans l'affirmation de la dignité
transcendante de la personne, de la valeur de la raison, de la liberté, de la
démocratie, de l'état de droit et de la distinction entre politique et religion
».
170
110. L'Union européenne continue à s'élargir. Tous les peuples qui partagent
le même héritage fondamental ont pour vocation d'en faire partie à plus ou moins
longue échéance. Il faut souhaiter que, en plus d'assurer une mise en œuvre plus
affermie des principes de subsidiarité et de solidarité, une telle expansion se
réalise dans le respect de tous, valorisant les particularités historiques et
culturelles, les identités nationales et la richesse des apports que pourront
fournir les nouveaux membres.
171
Dans le processus d'intégration du continent, il est capital de prendre
en compte le fait que l'Union n'aurait pas de consistance si elle était réduite
à ses seules composantes géographiques et économiques, mais qu'elle doit avant
tout consister en une harmonisation des valeurs appelées à s'exprimer dans le
droit et dans la vie.
Promouvoir la solidarité et la paix dans le monde
111. Dire « Europe » doit vouloir dire « ouverture ». Malgré les expériences
et les signes contraires qui d'ailleurs n'ont pas manqué, c'est son histoire
même qui l'exige: « L'Europe n'est pas vraiment un territoire clos ou isolé;
elle s'est construite en allant, au-delà des mers, à la rencontre d'autres
peuples, d'autres cultures, d'autres civilisations ».
172
C'est pourquoi l'Europe doit être un
continent ouvert et accueillant
qui continue à pratiquer, dans l'actuelle mondialisation, des formes de
coopération non seulement économique, mais également sociale et culturelle.
Il y a une exigence à laquelle le continent doit répondre de manière positive
pour que son visage soit véritablement nouveau: « L'Europe ne saurait se replier
sur elle-même. Elle ne peut ni ne doit se désintéresser du reste du monde; elle
doit au contraire garder pleine conscience que d'autres pays, d'autres
continents, attendent d'elle des initiatives audacieuses, pour offrir aux
peuples les plus pauvres les moyens de leur développement et de leur
organisation sociale, et pour édifier un monde plus juste et plus fraternel ».
173
Pour réaliser une telle mission de manière appropriée, il sera nécessaire
« de
repenser la coopération internationale en termes de nouvelle culture de
solidarité
. Considérée comme ferment de paix, la coopération ne peut pas se réduire à
l'aide et à l'assistance, surtout quand on envisage en retour de tirer profit
des ressources mises à disposition. Au contraire, elle doit exprimer un
engagement concret et tangible de solidarité qui vise à faire des pauvres les
acteurs de leur développement et qui permette au plus grand nombre possible de
personnes d'exercer, dans les circonstances économiques et politiques concrètes
dans lesquelles elles vivent, la créativité propre à la personne humaine, d'où
dépend aussi la richesse des nations ».
174
112. De plus, l'Europe doit prendre
une part active dans la promotion et dans la mise en pratique d'une
mondialisation « dans la » solidarité
. Comme condition de cette dernière, il faut ajouter une sorte de
mondialisation « de la » solidarité
et des valeurs connexes d'équité, de justice et de liberté, dans la ferme
conviction que le marché requiert d'être « dûment contrôlé par les forces
sociales et par l'État, de manière à garantir la satisfaction des besoins
fondamentaux de toute la société ».
175
L'Europe qui nous est léguée par l'histoire a vu, surtout au siècle dernier,
s'affirmer des idéologies totalitaires et des nationalismes exacerbés qui,
faisant perdre l'espérance aux hommes et aux peuples du continent, ont nourri
des conflits au sein des Nations et entre les Nations elles- mêmes, jusqu'à
l'effroyable tragédie des deux guerres mondiales.
176
Les luttes ethniques plus récentes, qui ont à nouveau ensanglanté le
continent européen, ont montré elles aussi à tous que la paix est fragile,
qu'elle a besoin d'un engagement actif de tous et qu'elle ne peut être garantie
qu'en ouvrant de nouvelles perspectives d'échange, de pardon et de
réconciliation entre les personnes, entre les peuples et entre les Nations.
Face à cet état de fait, l'Europe, avec tous ses habitants, doit
s'employer inlassablement à construire la paix
à l'intérieur de ses frontières et dans le monde entier. À ce propos, il
convient de rappeler « d'une part que les différences nationales doivent être
maintenues et cultivées comme le fondement de la solidarité européenne; et,
d'autre part, que l'identité nationale elle-même ne se réalise que dans
l'ouverture aux autres peuples et à travers la solidarité envers eux ».
177
II. La construction européenne
Le rôle des Institutions européennes
113. Si l'on veut dessiner le nouveau visage du continent,
c'est
, sous de nombreux aspects déterminants,
par leur rôle que les Institutions internationales
qui sont principalement liées au territoire européen
,
et qui y agissent, ont contribué à marquer le cours historique des
événements sans s'engager dans des opérations à caractère militaire. À ce sujet,
je voudrais mentionner avant tout l'Organisation pour la Sécurité et la
Coopération en Europe, qui travaille au maintien de la paix et à la stabilité, y
compris par la protection et la promotion des droits humains et des libertés
fondamentales, comme aussi à la coopération économique et environnementale.
Il y a aussi le Conseil de l'Europe, dont font partie les États qui ont signé
la Convention européenne pour la sauvegarde des droits humains fondamentaux de
1950 et la Charte sociale de 1961. La Cour européenne des droits de l'homme lui
est rattachée. Ces deux institutions visent, à travers la coopération politique,
sociale, juridique et culturelle, comme aussi à travers la promotion des droits
humains et de la démocratie, à la réalisation de l'Europe de la liberté et de la
solidarité. Enfin, l'Union européenne, avec son Parlement, avec le Conseil des
Ministres et avec la Commission, propose un modèle d'intégration qui se
perfectionne progressivement, dans la perspective d'adopter un jour une charte
fondamentale commune. Cet organisme a pour but de réaliser une plus grande unité
politique, économique et monétaire entre les États membres, aussi bien les
membres actuels que ceux qui en feront partie à l'avenir. Dans leur diversité et
à partir de l'identité propre à chacune d'elles, les Institutions mentionnées
ci-dessus ont pour but de promouvoir l'unité du continent, et plus profondément
sont au service de l'homme.
178
114. Aux Institutions européennes elles-mêmes et aux divers États d'Europe,
je demande avec les Pères synodaux
179
de reconnaître qu'
un bon ordonnancement de la société doit s'enraciner dans d'authentiques
valeurs éthiques et civiques
, partagées le plus possible par les citoyens, en notant que de telles
valeurs constituent avant tout le patrimoine des divers corps sociaux. Il est
important que les Institutions et les États reconnaissent que, parmi ces corps
sociaux, il y a aussi les Églises et Communautés ecclésiales, ainsi que les
autres organisations religieuses. À plus forte raison, quand elles existent déjà
avant la fondation des nations européennes, elles ne sont pas réductibles à de
simples entités privées, mais elles agissent avec un poids institutionnel
spécifique, qui mérite d'être sérieusement pris en considération. Dans le
déroulement de leurs activités, les différentes Institutions étatiques ou
européennes doivent agir en sachant que leurs systèmes juridiques ne seront
pleinement respectueux de la démocratie que s'ils prévoient des
formes de « saine collaboration »
180
avec les Églises et les Organisations religieuses
.
À la lumière de ce qui vient d'être souligné, je voudrais m'adresser encore
une fois aux rédacteurs du futur traité constitutionnel de l'Europe, pour que,
dans ce dernier, figure une référence au patrimoine religieux et spécialement
chrétien de l'Europe. Dans le plein respect de la laïcité des Institutions, je
souhaite par-dessus tout que soient reconnus trois aspects complémentaires: le
droit des Églises et des communautés religieuses de s'organiser librement, en
conformité avec leurs propres statuts et leurs propres convictions; le respect
de l'identité spécifique des Confessions religieuses et le fait de prévoir un
dialogue structuré entre l'Union européenne et ces mêmes Confessions; le respect
du statut juridique dont les Églises et les institutions religieuses jouissent
déjà en vertu des législations des États membres de l'Union.
181
115. Les Institutions européennes
ont
pour but déclaré la défense des droits de la personne humaine. Par cet
engagement, elles contribuent à construire l'Europe des valeurs et du droit. Les
Pères synodaux ont fait appel aux responsables européens, leur disant: « Élevez
la voix quand sont violés les
droits humains
des individus, des minorités et des peuples, à commencer par le droit à la
liberté religieuse; réservez la plus grande attention à tout ce qui regarde la
vie humaine
de sa conception jusqu'à sa mort naturelle, et la
famille
fondée sur le
mariage
: telles sont les bases sur lesquelles repose la maison commune européenne;
[...] affrontez, en toute justice et équité, et avec un grand sens de la
solidarité, le phénomène croissant des
migrations
, faisant en sorte qu'elles soient une nouvelle ressource pour l'avenir
européen; faites tous vos efforts pour qu'aux jeunes soit garanti un avenir
vraiment humain, par le
travail
, la
culture
, l'
éducation
aux valeurs morales et spirituelles ».
182
L'Église pour la nouvelle Europe
116. L'Europe a besoin d'
une dimension religieuse
. Pour être « nouvelle », à la manière de ce qui est dit de la « cité
nouvelle » de l'Apocalypse (cf. 21, 2), elle doit se laisser rejoindre par
l'action de Dieu. L'espérance de construire un monde plus juste et plus digne de
l'homme ne peut en effet faire abstraction de la prise de conscience que les
efforts humains ne conduiraient à rien s'ils n'étaient pas accompagnés par le
soutien divin, car, « si le Seigneur ne bâtit la maison, les bâtisseurs
travaillent en vain » (
Ps
127 [126], 1). Pour que l'Europe puisse être édifiée sur des bases solides,
il est nécessaire de s'appuyer sur les valeurs authentiques, qui ont leur
fondement dans la loi morale universelle, inscrite dans le cœur de tout homme. «
Non seulement les chrétiens peuvent s'unir à tous les hommes de bonne volonté
pour travailler à la construction de ce grand projet, mais plus encore ils sont
invités à en être en quelque sorte l'âme, en montrant le véritable sens de
l'organisation de la cité terrestre ».
183
Une et universelle, tout en étant présente dans la multiplicité des Églises
particulières, l'Église catholique peut offrir une contribution unique à
l'édification d'une Europe ouverte au monde. De l'Église en effet se dégage un
modèle d'unité essentielle dans la diversité des expressions culturelles, la
conscience d'appartenir à une communauté universelle qui s'enracine dans les
communautés locales mais ne s'épuise pas en elles, le sens de ce qui unit
au-delà de ce qui distingue.
184
117. Dans ses relations avec les pouvoirs publics, l'Église ne demande pas un
retour à des formes d'État confessionnel. Mais en même temps, elle déplore tout
type de laïcisme idéologique ou de séparation hostile entre les institutions
civiles et les confessions religieuses.
Pour sa part,
dans la logique d'une saine collaboration entre communauté ecclésiale et
société politique, l'Église catholique est convaincue de pouvoir apporter une
contribution spécifique
à la perspective de l'unification, offrant aux institutions européennes, en
continuité avec sa tradition et en harmonie avec les directives de sa doctrine
sociale, la présence de communautés de croyants qui cherchent à réaliser
l'humanisation de la société à partir de l'Évangile vécu sous le signe de
l'espérance. Dans cette optique, il est nécessaire que
des chrétiens
, convenablement formés et compétents,
soient présents
dans les diverses instances et Institutions européennes, pour concourir,
dans le respect des justes dynamismes démocratiques et à travers une
confrontation des propositions, à définir une convivialité européenne toujours
plus respectueuse de tout homme et de toute femme, et donc conforme au bien
commun.
118. L'Europe qui est en train de se construire comme « union » pousse aussi
les chrétiens vers l'unité
pour qu'ils soient de vrais témoins d'espérance. Dans ce cadre, il faut
poursuivre et développer cet
échange de dons
, qui a revêtu ces dernières années des expressions significatives. Réalisé
entre communautés ayant des histoires et des traditions diverses, il incite à
nouer des liens plus durables entre les Églises des divers pays et il conduit à
leur enrichissement mutuel, à travers rencontres, confrontations et aides
réciproques. Il faut en particulier mettre en valeur la contribution de la
tradition culturelle et spirituelle offerte par les Églises catholiques
orientales.
185
Un rôle important pour la croissance de cette unité peut être joué par les
organismes continentaux de communion ecclésiale
, qui attendent d'être ultérieurement encouragés.
186
Parmi ceux-ci, il convient d'attribuer un rôle particulier au
Conseil des Conférences épiscopales d'Europe
dont la mission est, au niveau de tout le continent, d'« assurer la
promotion d'une communion toujours plus intense entre les diocèses et les
Conférences épiscopales nationales, l'accroissement de la collaboration
œcuménique entre les chrétiens, l'élimination des obstacles qui menacent
l'avenir de la paix et le progrès des peuples, le renforcement de la
collégialité affective et effective et de la
communio
hiérarchique ».
187
De même, il faut reconnaître le service de la
Commission des Épiscopats de la Communauté européenne
qui, suivant le processus de consolidation et d'élargissement de l'Union
européenne, favorise l'information mutuelle et coordonne les initiatives
pastorales des Églises d'Europe concernées.
119. Le renforcement de l'Union au sein du continent européen incite les
chrétiens à coopérer au processus d'intégration et de réconciliation à travers
un dialogue théologique, spirituel, éthique et social.
188
En effet, « dans l'Europe en marche vers l'unité politique, pouvons-nous
admettre que ce soit précisément l'Église du Christ qui soit un facteur de
désunion et de discorde? Ne serait-ce pas là un des plus grands scandales de
notre temps? ».
189
À partir de l'Évangile, un nouvel élan pour l'Europe
120. L'Europe a besoin d'un saut qualitatif dans la
prise de conscience de son héritage spirituel
. Un tel élan ne peut lui venir que d'une écoute renouvelée de l'Évangile du
Christ. Il appartient à tous les chrétiens de s'employer à satisfaire cette faim
et cette soif de vie.
C'est pourquoi « l'Église éprouve le devoir de renouveler avec vigueur le
message d'espérance qui lui a été confié par Dieu » et elle répète à l'Europe: «
Le Seigneur ton Dieu est en toi, c'est lui, le héros qui apporte le salut
(
So
3, 17). Son invitation à l'espérance ne se fonde pas sur une idéologie
utopiste. [...] C'est, au contraire, le message éternel du salut proclamé par le
Christ (cf.
Mc
1, 15). Avec l'autorité qui lui vient de son Seigneur, l'Église répète à
l'Europe d'aujourd'hui:
Europe du troisième millénaire,
que tes mains ne défaillent pas!
(
So
3, 16); ne cède pas au découragement, ne te résigne pas à des modes de
penser et de vivre qui n'ont pas d'avenir, car ils ne sont pas fondés sur la
ferme certitude de la Parole de Dieu! ».
190
Reprenant cette invitation à l'espérance, je te le répète encore aujourd'hui,
Europe
qui es au début du troisième millénaire: «
Retrouve-toi toi- même. Sois toi-même. Découvre tes origines. Avive tes
racines
».
191
Au cours des siècles, tu as reçu le trésor de la foi chrétienne. Il fonde
ta vie sociale sur les principes tirés de l'Évangile et on en voit les traces
dans l'art, la littérature, la pensée et la culture de tes nations. Mais cet
héritage n'appartient pas seulement au passé; c'est un projet pour l'avenir, à
transmettre aux générations futures, car il est la matrice de la vie des
personnes et des peuples qui ont forgé ensemble le continent européen.
121.
Ne crains pas! L'Évangile n'est pas contre toi, il est en ta faveur
. Cela est confirmé par la constatation que l'inspiration chrétienne peut
transformer l'ensemble des composantes politiques, culturelles et économiques en
une convivialité où tous les Européens se sentent chez eux et forment une
famille de nations dont d'autres régions du monde
peuvent
s'inspirer de manière fructueuse.
Aie confiance! Dans l'Évangile, qui est Jésus, tu trouveras l'espérance forte
et durable à laquelle tu aspires
. C'est une espérance fondée sur la victoire du Christ sur le péché et sur
la mort. Cette victoire, il a voulu qu'elle soit tienne, pour ton salut et pour
ta joie.
Sois-en sûre! L'Évangile de l'espérance ne déçoit pas
. Dans les vicissitudes de ton histoire d'hier et d'aujourd'hui, c'est une
lumière qui éclaire et oriente ton chemin; c'est une force qui te soutient dans
l'épreuve; c'est une prophétie d'un monde nouveau; c'est le signe d'un nouveau
départ; c'est une invitation à tous, croyants ou non, à tracer des chemins
toujours nouveaux qui ouvrent sur l'« Europe de l'Esprit », pour en faire une
véritable « maison commune » où l'on trouve la joie de vivre.
CONCLUSION
Consécration à Marie
«
Un signe grandiose apparut dans le ciel:
une Femme, ayant le soleil pour manteau
»
(
Ap
12, 1)
La femme, le dragon et l'enfant
122. L'histoire de l'Église s'accompagne de « signes » qui sont sous les yeux
de tous, mais qui demandent à être interprétés. Parmi eux, l'Apocalypse présente
le « signe grandiose » apparu dans le ciel, qui parle d'une
lutte entre la femme et le dragon
.
La femme
ayant le soleil pour manteau
,
qui est en train d'accoucher dans la souffrance (cf.
Ap
12, 1-2), peut désigner l'Israël des prophètes qui enfante le Messie, «
celui qui sera le berger de toutes les nations, les menant avec un sceptre de
fer » (
Ap
12, 5; cf.
Ps
2, 9). Mais elle représente aussi l'Église, peuple de la nouvelle Alliance,
en proie à la persécution, mais protégée par Dieu. Le
dragon
est « le serpent des origines, celui qu'on nomme Démon ou Satan, celui qui
égarait le monde entier » (
Ap
12, 9). Le
combat
est inégal: le dragon semble avoir l'avantage, tant est grande son
outrecuidance face à la femme sans défense et souffrante. En réalité, le
vainqueur, c'est
le fils que la femme vient de mettre au monde
. Dans ce combat, une chose est certaine: le grand dragon a déjà été vaincu,
« il fut jeté sur la terre, et ses anges avec lui » (
Ap
12, 9). Ceux qui l'ont vaincu, ce sont le Christ, Dieu fait homme, par sa
mort et sa résurrection, et les martyrs, « par le sang de l'Agneau et le
témoignage de leur parole » (
Ap
12, 11). Et même si le dragon persiste dans son opposition, il n'y a rien à
craindre, car sa défaite est déjà consommée.
123. Telle est la certitude qui anime l'Église au long de son chemin, tandis
qu'elle relit son histoire de toujours à partir de la femme et du dragon. La
femme qui met au monde un enfant mâle nous rappelle aussi la
Vierge Marie
, surtout au moment où, transpercée par la souffrance au pied de la Croix,
elle engendre de nouveau le Fils, comme vainqueur du prince de ce monde. Elle
est confiée à Jean qui, à son tour, lui est confié (cf.
Jn
19, 26-27), et elle devient ainsi la Mère de l'Église. Grâce au lien qui
unit Marie à l'Église, et l'Église à Marie, le mystère de la femme prend une
clarté nouvelle: « En effet, Marie, présente dans l'Église comme Mère du
Rédempteur, participe maternellement au dur combat contre les puissances des
ténèbres qui se déroule à travers toute l'histoire des hommes. Et par cette
identification ecclésiale avec la femme enveloppée de soleil (
Ap
12, 1), on peut dire que l'Église, en la personne de la bienheureuse Vierge,
atteint déjà la perfection qui la fait sans tache ni ride ».
192
124. L'Église entière
regarde
donc
Marie
. Grâce aux multiples sanctuaires mariaux disséminés dans toutes les nations
du continent, la dévotion à Marie est très vivante et fort répandue parmi les
peuples européens.
Église en Europe, continue à contempler Marie
, et reconnais qu'elle apporte « sa présence et son assistance maternelles
dans les problèmes multiples et complexes qui accompagnent
aujourd'hui
la vie des personnes, des familles et des nations » et qu'elle vient au
secours « du peuple chrétien dans la lutte incessante entre le bien et le mal,
afin qu'il ne tombe pas ou, s'il est tombé, qu'il se relève ».
193
Prière à Marie, Mère de l'espérance
125. Dans cette contemplation, animée par un amour authentique, Marie nous
apparaît comme la figure de l'Église qui, nourrie par l'espérance, reconnaît
l'action salvifique et miséricordieuse de Dieu, à la lumière duquel elle lit son
propre chemin et toute l'histoire. Elle nous aide à interpréter, aujourd'hui
encore, nos itinéraires en référence à son Fils Jésus. Créature nouvelle modelée
par l'Esprit Saint,
Marie fait croître en nous la vertu de l'espérance
.
À Elle
, Mère de l'espérance et de la consolation,
nous adressons avec confiance notre prière
: nous lui confions l'avenir de l'Église en Europe et l'avenir de toutes les
femmes et tous les hommes de ce continent:
Marie, Mère de l'espérance
,
marche avec nous!
Apprends-nous à proclamer le Dieu vivant
;
Aide-nous à témoigner de Jésus,
l'unique Sauveur;
rends-nous serviables envers notre prochain,
accueillants envers ceux
qui sont dans le besoin, artisans de justice,
bâtisseurs passionnés d'un monde plus juste;
intercède pour nous
qui œuvrons dans l'histoire,
avec la certitude
que le dessein du Père s'accomplira.
Aurore d'un monde nouveau
,
montre-toi la Mère de l'espérance
et
veille sur nous!
Veille sur l'Église en Europe:
qu'elle soit transparente à l'Évangile
;
qu'elle soit un authentique lieu
de communion;
qu'elle vive sa mission
d'annoncer, de célébrer et de servir
l'Évangile de l'espérance
pour la paix et la joie de tous.
Reine de la paix
,
protège l'humanité du troisième millénaire!
Veille sur tous les chrétiens:
qu'ils avancent dans la confiance
sur le chemin de l'unité
,
comme un ferment pour la concorde
sur le continent.
Veille sur les jeunes
,
espérance de l'avenir,
qu'ils répondent généreusement
à l'appel de Jésus;
veille sur les responsables des nations:
qu'ils s'emploient à édifier
une maison commune,
dans laquelle soient respectés la dignité
et les droits de chacun.
Marie,
donne-nous Jésus!
Fais que nous le suivions
et que nous l'aimions!
C'est lui l'espérance de l'Église
,
de l'Europe et de l'humanité.
C'est lui qui vit avec nous, au milieu de nous
,
dans son Église.
Avec toi, nous disons
« Viens, Seigneur Jésus! » (
Ap
22, 20):
Que l'espérance de la gloire
déposée par Lui en nos cœurs
porte des fruits de justice et de paix!
Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 28 juin 2003, vigile de la solennité
des saints Apôtres Pierre et Paul, en la vingt-cinquième année de mon
pontificat.
JEAN-PAUL II
1
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 1:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 957-958.
2
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, nn. 90-91:
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999 - Suppl., pp. 17-18;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 802-803.
3
Jean-Paul II, Bulle
Incarnationis mysterium
(29 novembre 1998), nn. 3-4:
AAS
91 (1999), pp. 132. 133;
La Documentation catholique
95 (1998), pp. 1052. 1053.
4
Cf. Jean-Paul II, Lettre apost.
Tertio millennio adveniente
(10 novembre 1994), n. 38:
AAS
87 (1995), p. 30;
La Documentation catholique
91 (1994), pp. 1027-1028.
5
Cf.
Angélus
, n. 2:
Insegnamenti
XIX/1 (1996), pp. 1599- 1600;
La Documentation catholique
93 (1996), p. 673.
6
Synode des Évêques - Première Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Déclaration finale
(13 décembre 1991), n. 2:
Enchiridion Vaticanum
13, n. 619;
La Documentation catholique
89 (1992), p. 124.
7
Ibid.
n. 3:
Ench. Vat.
,
l.c.
,
n. 621;
La Documentation catholique
,
l.c.
, p. 125.
8
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 3:
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999 - Suppl., p. 3;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 751.
9
Cf. Jean-Paul II,
Homélie durant la concélébration de conclusion de la Deuxième Assemblée
spéciale pour l'Europe du Synode des Évêques
(23 octobre 1999), n. 1:
AAS
92 (2000), p. 177;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 959-960.
10
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 2:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 955-956.
11
Cf. Jean-Paul II,
Homélie durant la concélébration de conclusion de la Deuxième Assemblée
spéciale pour l'Europe du Synode des Évêques
(23 octobre 1999), n. 4:
AAS
92 (2000), p. 179;
L'Oss. Rom.
, éd. hebd. en langue française, 26 octobre 1999, p. 5.
12
Ibid.
13
Cf.
Proposition
1.
14
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 2:
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999 - Suppl. pp. 2-3;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 763.
15
Cf.
ibid.
, nn. 12-13. 16-19:
L'Oss. Rom.
,
l.c.
,
pp. 4-6;
La Documentation catholique
,
l.c.
, pp. 768-769; Idem,
Rapport avant la discussion
, I:
L'Oss. Rom.
, 3 octobre 1999, pp. 6-7;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 935-938; Idem,
Rapport après la discussion
, II, A:
L'Oss. Rom.
, 11-12 octobre 1999, p. 10.
16
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Rapport avant la discussion
, I, 1. 2:
L'Oss. Rom.
, 3 octobre 1999, p. 6;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 935. 936.
17
Cf.
Proposition
5a.
18
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 1:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 955.
19
Cf.
Proposition
5a; Conseil pontifical pour la Culture et Conseil pontifical pour le
Dialogue interreligieux,
Jésus le porteur d'eau vive. Une réflexion chrétienne sur le « New Age »
, Cité du Vatican, 2003;
La Documentation catholique
100 (2003), pp. 272-310.
20
Cf.
Proposition
5a.
21
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 6:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 958.
22
Jean-Paul II,
Angélus
(25 août 1996), n. 2:
Insegnamenti
XIX/2 (1996), p. 237; cf.
Proposition
9.
23
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 88:
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999 - Suppl., p. 17;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 801.
24
Jean-Paul II,
Homélie durant la concélébration de conclusion de la Deuxième Assemblée
spéciale pour l'Europe du Synode des Évêques
(23 octobre 1999), n. 4:
AAS
92 (2000), p. 179;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 960.
25
Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale
Christifideles laici
(30 décembre 1988), n. 26:
AAS
81 (1989), p. 439;
La Documentation catholique
86 (1989), pp. 166-167.
26
Cf.
Proposition
21.
27
Ibid.
28
Proposition
9.
29
Ibid.
30
Cf.
Proposition
4, 1.
31
Jean-Paul II,
Homélie durant la concélébration de conclusion de la Deuxième Assemblée
spéciale pour l'Europe du Synode des Évêques
(23 octobre 1999), n. 2:
AAS
92 (2000), p. 178;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 960.
32
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 2:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 955-956.
33
Cf.
Proposition
4, 2.
34
Jean-Paul II, Encycl.
Centesimus annus
(1
er
mai 1991), n. 47:
AAS
83 (1991), p. 852;
La Documentation catholique
88 (1991), p. 542.
35
Cf.
Proposition
4, 1.
36
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 30:
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999 - Suppl., p. 8;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 777.
37
Cf.
Homélie durant la concélébration de conclusion de la Deuxième Assemblée
spéciale pour l'Europe du Synode des Évêques
(23 octobre 1999), n. 3:
AAS
92 (2000), p. 178;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 960; Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Déclaration
Dominus Iesus
(6 août 2000), n. 13:
AAS
92 (2000), p. 754;
La Documentation catholique
97 (2000), p. 817.
38
Cf.
Proposition
5.
39
Cf. Jean-Paul II, Encycl.
Dominum et vivificantem
(18 mai 1986), n. 7:
AAS
78 (1986), p. 816;
La Documentation catholique
83 (1986), p. 585; Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Déclaration
Dominus Iesus
(6 août 2000), n. 16:
AAS
92 (2000), pp. 756-757;
La Documentation catholique
97 (2000), p. 818.
40
Paul VI, Encycl.
Mysterium fidei
(3 septembre 1965):
AAS
57 (1965), pp. 762-763;
La Documentation catholique
62 (1965), col. 1643. Cf. S. Congrégation des Rites, Instr.
Eucharisticum mysterium
(25 mai 1967), n. 9:
AAS
59 (1967), p. 547;
La Documentation catholique
64 (1967), col. 1098-1099;
Catéchisme de l'Église catholique
, n. 1374.
41
Concile œcum. de Trente, Décr.
De ss. Eucharistia,
can. 1:
DS
1651;
La Foi catholique
, n. 745; cf. chap. 3:
DS
1641;
La Foi catholique
, n. 738.
42
Jean-Paul II, Encycl.
Ecclesia de Eucharistia
(17 avril 2003), n. 15:
L'Oss. Rom.
, 18 avril 2003, p. 2;
La Documentation catholique
100 (2003), p. 373.
43
Cf. S. Augustin,
Sur l'Évangile de Jean
, Traité VI, chap. I, n. 7:
PL
35, 1428; S. Jean Chrysostome,
Sur la trahison de Judas
, 1, 6:
PG
49, 380C.
44
Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. sur la sainte Liturgie
Sacrosanctum Concilium
, n. 7; Const. dogm. sur l'Église
Lumen gentium,
n. 50; Paul VI, Encycl.
Mysterium fidei,
nn. 35-38 (3 septembre 1965):
AAS
57 (1965), pp. 762-763;
La Documentation catholique
62 (1965), col. 1641-1643; S. Congrégation des Rites, Instr.
Eucharisticum mysterium
(25 mai 1967), n. 9:
AAS
59 (1967), p. 547;
La Documentation catholique
64 (1967), col. 1098-1099;
Catéchisme de l'Église catholique
, nn. 1373-1374.
45
Jean-Paul II, Motu proprio
Spes ædificandi
(1
er
octobre 1999), n. 1:
AAS
92 (2000), p. 220;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 917.
46
Cf Jean-Paul II,
Discours au siège du Parlement polonais, à Varsovie
(11 juin 1999), n. 6:
Insegnamenti
, XXII/1, p. 1276;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 673.
47
Cf. Jean-Paul II,
Discours à la cérémonie de congé à l'aéroport de Cracovie
(10 juin 1997), n. 4:
Insegnamenti
, XX/1, pp. 1496-1497;
L'Oss. Rom. éd. hebd. en langue française
, 15 juillet 1997, p. 6.
48
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 4:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 957.
49
Cf.
Proposition
15, 1;
Catéchisme de l'Église catholique
, n. 773; Jean-Paul II, Lettre apost.
Mulieris dignitatem
(15 août 1988), n. 27:
AAS
80 (1988), p. 1718;
La Documentation catholique
85 (1988), pp. 1084-1085.
50
Cf.
Proposition
15, 1.
51
Cf.
Proposition
21.
52
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final,
n. 4:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 957.
53
Proposition
9.
54
Ibid.
55
Ibid.
56
Cf.
Proposition
22.
57
Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale
Pastores dabo vobis
(25 mars 1992), n. 15:
AAS
84 (1992), pp. 679- 680;
La Documentation catholique
89 (1992), p. 459.
58
Cf.
ibid.
, n. 29:
AAS
,
l.c.
,
pp. 703-705;
La Documentation catholique
,
l.c.
, pp. 467-468;
Proposition
18.
59
Cf.
Code des Canons des Églises orientales
, can. 373.
60
Cf.
Code de Droit canonique
, can. 277, 1.
61
Cf. Paul VI, Encycl.
Sacerdotalis cælibatus
(24 juin 1967), n. 40:
AAS
59 (1967), p. 673;
La Documentation catholique
64 (1967), col. 1262.
62
Cf.
Proposition
18.
63
Cf.
ibid.
64
Cf Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 4:
L'Oss. Rom.
, 23
octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 957.
65
Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm. sur l'Église
Lumen gentium
, n. 29.
66
Cf.
Proposition
19.
67
Cf.
ibid.
68
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Rapport avant la discussion
, III:
L'Oss. Rom.
, 3 octobre 1999, p. 9;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 947.
69
Cf.
Proposition
17.
70
Cf.
ibid.
71
Jean-Paul II,
Discours aux participants au Congrès sur les vocations en Europe
(9 mai 1997), nn. 1-3:
Insegnamenti
XX/1, pp. 917-918;
La Documentation catholique
94 (1997), pp. 605-606.
72
Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale
Christifideles laici
(30 décembre 1988), n. 7:
AAS
81 (1989), p. 404;
La Documentation catholique
86 (1989), p. 156.
73
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 82:
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999, p. 16;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 799.
74
Cf.
Proposition
29.
75
Cf.
Proposition
30.
76
Cf.
ibid.
77
Paul VI, Exhort. apost.
Evangelii nuntiandi
(8 décembre 1975), n. 14:
AAS
68 (1976), p. 13;
La Documentation catholique
73 (1976), p. 3.
78
Cf.
Proposition
3b.
79
Cf. Jean-Paul II, Encycl.
Redemptoris missio
(7 décembre 1990), n. 37:
AAS
83 (1991), pp. 282-286;
La Documentation catholique
88 (1991), pp. 166-167.
80
Cf. Synode des Évêques - Deuxième assemblée spéciale pour
l'Europe,
Rapport avant la discussion
, I, 2:
L'Oss. Rom
., 3 octobre 1999, p. 7;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 936-938.
81
Cf.
Proposition
3a.
82
Synode des Évêques - Deuxième assemblée spéciale pour
l'Europe,
Rapport avant la discussion
, III, 1:
L'Oss. Rom
., 3 octobre 1999, p. 8;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 944.
83
Cf. Synode des Évêques - Deuxième assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 53:
L'Oss. Rom
., 6 août 1999 - Suppl., p. 12;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 788.
84
Cf.
Proposition
4,1.
85
Cf
. Proposition
26,1.
86
Synode des Évêques - Deuxième assemblée spéciale pour
l'Europe,
Rapport avant la discussion
, III
,1
:
L'Oss
.
Rom
., 3 octobre 1999, p. 9;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 944.
87
Paul VI, Exhort. apost.
Evangelii nuntiandi
(8 décembre 1975), n. 41:
AAS
68 (1976), p. 31;
La Documentation catholique
73 (1976), p. 8.
88
Proposition
8, 1.
89
Cf.
Proposition
8, 2.
90
Cf.
Propositions
8, 1a-b; 6.
91
Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost.
Catechesi tradendæ
(16 octobre 1979), n. 21:
AAS
71 (1979), pp. 1294-1295;
La Documentation catholique
76 (1979), p. 906.
92
Cf.
Proposition
24.
93
Cf.
Proposition
8, 1c.
94
Cf.
Proposition
24.
95
Cf.
Proposition
22.
96
Cf. Jean-Paul II,
Discours aux Présidents des Conférences épiscopales européennes
(16 avril 1993), n. 1:
AAS
86 (1994), p. 227 ;
La Documentation catholique
90 (1993), p. 501.
97
Jean-Paul II,
Discours pendant la célébration œcuménique de la Parole à la cathédrale de
Paderborn
(22 juin 1996), n. 5:
Insegnamenti
XIX/I, p. 1571;
La Documentation catholique
93 (1996), p. 662.
98
Paul VI, Lettre du 13 janvier 1970:
Tomos agapis
, Rome-Istanbul (1971), pp. 610-611; cf. Jean-Paul II, Encycl.
Ut unum sint
(25 mai 1995), n. 99:
AAS
87 (1995), p. 980;
La Documentation catholique
92 (1995), p. 158.
99
Jean-Paul II, Encycl.
Redemptoris missio
(7 décembre 1990), n. 55:
AAS
83 (1991), p. 302;
La Documentation catholique
88 (1991), p 173.
100
Ibid
.,
n. 36:
AAS
,
l.c.
, p. 281;
La Documentation catholique
,
l.c.
, p. 166.
101
Cf. Synode des Évêques - Première Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Déclaration finale
(13 décembre 1991), n. 8:
Ench. Vat.
, 13, nn. 653-655;
La Documentation catholique
89 (1992), p. 129; Deuxième Assemblée spéciale pour l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 62:
L'Oss. Rom
., 6 août 1999 - Suppl., p. 13;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 791-792;
Proposition
10.
102
Proposition
10; cf. Commission pour les Rapports religieux avec le Judaïsme,
Nous nous souvenons: une réflexion sur la Shoah
(16 mars 1998):
Ench. Vat.
17, nn. 520-550;
La Documentation catholique
95 (1998), pp. 336-340.
103
Synode des Évêques - Première Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Déclaration finale
(13 décembre 1991), n. 9:
Ench. Vat
., 13, n. 656;
La Documentation catholique
89 (1992), p. 129.
104
Cf.
Proposition
11.
105
Cf.
ibid
.
106
Jean-Paul II,
Discours au Corps diplomatique
(12 janvier 1985), n. 3:
AAS
77 (1985), p. 650;
La Documentation catholique
83 (1985), p. 219.
107
Conc. œcum. Vat. II, Déclaration sur la liberté religieuse
Dignitatis humanæ
, n. 2.
108
Cf.
Proposition
23.
109
Cf.
Propositions
25; 26, 2.
110
Cf.
Proposition
26, 3.
111
Cf.
Proposition
27.
112
Jean-Paul II,
Lettre aux artistes
(4 avril 1999), n. 12:
AAS
91(1999), p. 1168;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 12.
113
Cf.
Proposition
7b-c.
114
Cf. Jean-Paul II,
Discours durant la veillée de prière à Tor Vergata lors des XV
es
Journées mondiales de la Jeunesse
(19 août 2000), n. 6:
Insegnamenti
XXIII/2, p. 212 ;
La Documentation catholique
97 (2000), pp. 776-778.
115
Cf. Conseil pontifical pour les Communications sociales,
Éthique dans les communications sociales
, Cité du Vatican, 4 juin 2000:
La Documentation catholique
97 (2000), pp. 623-633.
116
Proposition
13.
117
Cf.
Proposition
12.
118
Conc. œcum. Vat. II, Const. dogm.
Dei Verbum
, n. 25.
119
Cf.
Proposition
14.
120
Const.
Sacrosanctum Concilium,
n. 8.
121
Cf.
Proposition
14; Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour l'Europe,
Rapport avant la discussion,
III, 2:
L'Oss. Rom.,
3 octobre 1999, p. 9;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 945-946.
122
Cf.
Proposition
15, 2a.
123
Conc. œcum. Vat. II, Décr. sur le ministère et la vie des
prêtres
Presbyterorum Ordinis,
n. 5.
124
Conc. œcum. Vat. II, Const.
dogm.
Lumen gentium,
n. 11.
125
Jean-Paul II, Encycl.
Ecclesia de Eucharistia
(17 avril 2003), n. 20:
L'Oss. Rom.
, 18 avril 2003, p. 3;
La Documentation catholique
100 (2003), p. 374.
126
Cf. Jean-Paul II, Discours à l'audience générale (25
octobre 2002), n. 2:
Insegnamenti
XXIII/2 (2000), p. 697.
127
Cf.
Proposition
16.
128
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Rapport avant la discussion,
III, 2:
L'Oss. Rom.,
3 octobre 1999, p. 9
; La Documentation catholique
96 (1999), pp. 945-946.
129
Cf.
Proposition
16.
130
Cf. Jean-Paul II, Motu proprio
Misericordia Dei
(7 avril 2002), n. 4:
AAS
94 (2002), pp. 456-457;
La Documentation catholique
99 (2002), pp. 453-454.
131
Cf.
Proposition
16; Jean-Paul II,
Lettre aux prêtres pour le Jeudi saint 2002
(17 mars 2002), n. 4:
AAS
94 (2002), pp. 435-436;
La Documentation catholique
99 (2002), p. 304.
132
Cf.
Proposition
14c.
133
Cf.
ibid.
134
Cf.
Const.
Sacrosanctum Concilium,
n. 100.
135
Cf.
Proposition
14c; 20.
136
Cf.
Proposition
20.
137
Jean-Paul II, Lettre apost.
Rosarium Virginis Mariæ
(16 octobre 2002), n. 3:
AAS
95 (2003), p. 7;
La Documentation catholique
99 (2002), p. 952-953.
138
Cf.
Proposition
14.
139
Jean-Paul II, Lettre apost.
Dies Domini
(31 mai 1998), n. 4:
AAS
90 (1998), p. 716;
La Documentation catholique
95 (1998), p. 659.
140
Jean-Paul II, Encycl.
Redemptor hominis
(4 mars 1979), n. 10:
AAS
71 (1979), p. 274;
La Documentation catholique
76 (1979), p. 306.
141
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 72,
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999, Suppl., p. 15;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 795.
142
Conc. œcum. Vat. II, Const.
dogm.
Lumen gentium,
n. 1.
143
Cf. Jean-Paul II, Encycl.
Evangelium vitæ
(25 mars 1995), n. 90:
AAS
87 (1995), p. 503;
La Documentation catholique
92 (1995), p. 396.
144
Cf.
Proposition
33.
145
Proposition
35.
146
Cf.
Proposition
36.
147
Cf.
Proposition
31.
148
Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past. sur l'Église dans le
monde de ce temps
Gaudium et spes
, n. 48.
149
Cf.
Proposition
31.
150
Jean-Paul II,
Discours pour la troisième Rencontre mondiale des Familles à l'occasion de
leur jubilé
(14 octobre 2000), n. 6:
Insegnamenti
XXIII/2, p. 603;
La Documentation catholique
97 (2000), p. 973.
151
Jean-Paul II, Exhort. apost.
Familiaris consortio
(22 novembre 1981), n. 17:
AAS
74 (1982), pp. 99-100;
La Documentation catholique
79 (1982), p. 6.
152
Jean-Paul II, Encycl.
Centesimus annus
(1
er
mai 1991), n. 39:
AAS
83 (1991), p. 842;
La Documentation catholique
88 (1991), p. 538.
153
Cf. Jean-Paul II, Exhort. apost. post-synodale
Christifideles laici
(30 décembre 1988), n. 40:
AAS
81 (1989), p. 469;
La Documentation catholique
86 (1989), p. 176.
154
Cf. Jean-Paul II,
Discours à la première Rencontre mondiale des Familles
(8 octobre 1994), n. 7:
AAS
87 (1995), p. 587;
La Documentation catholique
91 (1994), p. 969.
155
Cf.
Proposition
32.
156
Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past.
Gaudium et spes
, n. 51.
157
Jean-Paul II, Encycl.
Evangelium vitæ
(25 mars 1995), n. 63:
AAS
87 (1995), p. 473;
La Documentation catholique
92 (1995), p. 383.
158
Ibid.
,
n. 95:
AAS
,
l.c.
, p. 509;
La Documentation catholique
,
l.c.
, p. 398.
159
Jean-Paul II,
Discours au nouvel Ambassadeur de Norvège près le Saint-Siège
(25 mars 1995):
Insegnamenti
XVIII/1, p. 857.
160
Proposition
32.
161
Const. past.
Gaudium et spes
, n. 57.
162
Cf.
Proposition
28; Synode des Évêques - Première Assemblée spéciale pour l'Europe,
Déclaration finale
(13 décembre 1991), n. 10:
Ench. Vat.
13, nn. 659-669;
La Documentation catholique,
89 (1992), p. 130.
163
Cf.
Proposition
23.
164
Cf.
Proposition
28.
165
Proposition
34.
166
Cf. Congrégation pour les Évêques, Instr.
Nemo est
(22 août 1969), n. 16:
AAS
61 (1969), pp. 621-622;
La Documentation catholique
67 (1970), p. 62;
CIC,
can. 294 et 518;
CCEO
, can. 280 § 1.
167
Cf. Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 5:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 6;
La Documentation catholique
96 (1999), pp. 957-958.
168
Jean-Paul II,
Homélie durant la concélébration de conclusion de la deuxième
Assemblée spéciale pour l'Europe du Synode des
Évêques
(23 octobre 1999), n. 5:
AAS
92 (2000), p. 179;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 960.
169
Proposition
39.
170
Ibid.
171
Cf.
ibid.;
cf. aussi
Proposition
28.
172
Jean-Paul II,
Lettre au Cardinal Miloslav Vlk, Président du Conseil des Conférences
épiscopales d'Europe
(16 octobre 2000), n. 7:
Insegnamenti
XXIII/2, p. 628;
La Documentation catholique
97 (2000), p. 960.
173
Ibid
.
174
Jean-Paul II,
Message pour la Journée mondiale de la Paix 2000
, n. 17:
AAS
92 (2000), pp. 367-368;
La Documentation catholique
97 (2000), pp. 5-6.
175
Jean-Paul II, Encycl.
Centesimus annus
(1
er
mai 1991), n. 35:
AAS
83 (1991), p. 837;
La Documentation catholique
88 (1991), p. 535.
176
Cf.
Proposition
39.
177
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Instrumentum laboris
, n. 85:
L'Oss. Rom.
, 6 août 1999 - Suppl., p. 17;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 800; cf.
Proposition
39.
178
Cf. Jean-Paul II,
Allocution à la Présidence du Parlement européen
(5 avril 1979):
Insegnamenti
, II/I, pp. 796-799;
La Documentation catholique
76 (1979), pp. 432-433.
179
Cf.
Proposition
37.
180
Cf. Conc. œcum. Vat. II, Const. past.
Gaudium et spes
, n. 76.
181
Cf. Jean-Paul II,
Discours au Corps diplomatique
(13 janvier 2003), n. 5:
L'Oss. Rom.
, 13-14 janvier 2003, p. 6:
La Documentation catholique
100 (2003), p. 120.
182
Synode des Évêques - Deuxième Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Message final
, n. 6:
L'Oss. Rom.
, 23 octobre 1999, p. 5;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 958.
183
Jean-Paul II,
Lettre au Cardinal Miloslav Vlk, Président du Conseil des Conférences
épiscopales d'Europe
(16 octobre 2000), n. 4:
Insegnamenti
XXIII/2, p. 626;
La Documentation catholique
97 (2000), p. 960.
184
Cf. Synode des Évêques - Première Assemblée spéciale pour
l'Europe,
Déclaration finale
(13 décembre 1991), n. 10:
Ench. Vat.
13, n. 669;
La Documentation catholique
89 (1992), pp. 130-131.
185
Cf.
Proposition
22.
186
Cf.
ibid
.
187
Jean-Paul II,
Discours au Conseil des Conférences épiscopales d'Europe
(16 avril 1993), n. 5:
AAS
86 (1994), p. 229;
La Documentation catholique
90 (1993), p. 502.
188
Cf.
Proposition
39d.
189
Jean-Paul II,
Homélie durant la célébration œcuménique à l'occasion de l'Assemblée
spéciale pour l'Europe du Synode des Évêques
(7 décembre 1991), n. 6:
Insegnamenti
XIV/2, p. 1330.
L'Oss. Rom.
, éd. hebdom. en langue française, 17 décembre 1991, p. 14.
190
Jean-Paul II,
Homélie pour l'ouverture de la deuxième Assemblée spéciale pour l'Europe du
Synode des Évêques
(1
er
octobre 1999), n. 3:
AAS
92 (2000), pp. 174-175;
La Documentation catholique
96 (1999), p. 932.
191
Discours à différentes Autorités européennes (9 novembre
1982), n. 4:
AAS
75 (1983), p. 330;
La Documentation catholique
79 (1982), p. 1129.
192
Jean-Paul II, Encycl.
Redemptoris Mater
(25 mars 1987), n. 47:
AAS
79 (1987), p. 426;
La Documentation catholique
84 (1987), p. 404.
193
Ibid
.,
n. 52:
AAS
,
l.c.
, p. 432;
La Documentation catholique
,
l.c.
, p. 406; cf.
Proposition
40.
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