Benoît XVI et Jean-Paul II présentent
ce point commun d'être des intellectuels racés |
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Le 28 septembre 2008 - (E.S.M.) -
L'auteur, Aidan Nichols, nous dit qu'il pense que, pour l'essentiel, la
pensée du futur Benoît XVI était déjà fixée à la fin des années 80.
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Le père
dominicain Aidan Nichols auteur du livre An Introduction to thé Theology
of Joseph Ratzinger
Benoît XVI et Jean-Paul II présentent ce point commun d'être des
intellectuels racés
Le 28 septembre 2008 - Eucharistie
Sacrement de la Miséricorde
- Le 13 de ce mois, nous avons publié un article de Mgr
Pascal Ide, membre de la Curie à Rome. Il répondait aux questions de Luc
Adrian au sujet de son livre
Le Christ donne tout
(éd. de l'Emmanuel). Aujourd'hui
nous donnons un extrait de la préface de Mgr Pascal Ide publié dans la
réédition de l'ouvrage du père Aidan Nichols o.p,
The Thought of Benedict XVI, An
Introduction to the Theology of Joseph Ratzinger,
(la pensée de Benoît XVI),
Londres, 2006,
(la première édition du livre arrêtait ses analyses,
grosso modo, au début de la prise de fonction comme préfet de la
Congrégation pour la doctrine de la foi; la seconde édition, sur laquelle
cette traduction est faite, ajoute un dernier chapitre qui couvre la période
de 1987 à 2005),
traduit de l'anglais par
le père Eric Iborre et Pierre Lane
et récemment édité aux éditions Ad Solem (www.ad-solem.com).
Quelques
extraits de la préface de Mgr Pascal Ide, chef du Service des universités
catholiques à la Congrégation pour l'Éducation Catholique.
Benoît XVI et Jean-Paul II présentent, entre autres, ce point commun d'être
des intellectuels racés - l'un plus théologien, l'autre plus philosophe -
qui ont dû interrompre leur carrière universitaire et une œuvre prometteuse,
en acceptant une fonction qui les a placés au cœur de l'Église locale puis
de l'Église universelle. Certes, archevêques, ils ont trouvé l'énergie de
continuer à étudier et produire une œuvre scientifique originale, mais sans
pouvoir bénéficier du loisir
(1) que permet la vie
académique. Assurément ces êtres d'exception ont accédé dans un esprit
d'obéissance à ces fonctions supérieures qui, dans l'Église, sont des
services désintéressés, de sorte que l'on est en droit de leur appliquer la
parabole évangélique relative à la fécondité pascale du grain de sénevé
(cf. Jn 12,24). Joseph Ratzinger
et même Benoît XVI - pour nous concentrer sur eux - ne font pas mystère de
ce renoncement.
(2)
Cette fructuosité mystérieuse se limite-t-elle, ainsi qu'on a souvent
tendance à le dire, à une diffusion plus large d'une parole sans cela
confinée dans les cercles universitaires ? L'extension plus grande doit-elle
se payer au prix de la profondeur qu'aurait permise le statut d'enseignant
chercheur en théologie ? Ne peut-on penser aussi que sa mission conjoint
plus étroitement les vocations de docteur et de pasteur et féconde la vie
contemplative se prolongeant dans la transmission, par une vie de soi active
qui ne va jamais, en amont, sans réflexion et, en aval, sans un apport
d'information - tant la temporalité de l'agir humain est autant prospective
que rétrospective, si elle est introspective ? Quoi qu'il en soit, le
pasteur (archevêque puis préfet puis pontife romain) n'eut pas, n'a pas le
loisir de construire dans la durée une œuvre intellectuelle, il ne peut que
jeter des semences, proposer des fulgurances. Les appels urgents venus du
dehors, la nécessaire dispersion des circonstances qui ne font sens que dans
l'unité supérieur de la sagesse divine, vouent les hommes de gouvernement à
cette dispersion qui attristait Marthe
(et saint Augustin avec elle 3),
laissant à d'autres le soin de recueillir précieusement et d'ordonner leurs
multiples prises de parole.
Comment, dès lors, ne pas remercier le père dominicain Aidan Nichols de nous
livrer en cet ouvrage une présentation approfondie de la pensée théologique
de Joseph Ratzinger ?
(4) La sympathie souvent
enthousiaste se conjugue avec une intelligence tout aussi contagieuse. Clair
et pédagogique, servi par l'élégante et fidèle traduction du père Eric
Iborra et Pierre Lane, ce livre est sans équivalent en français.
(5) Il présente au moins trois
intérêts pour le public francophone. Tout d'abord, il donne accès à un
nombre considérable d'œuvres du théologien allemand,
(6) dont une partie importante
n'est malheureusement pas encore accessible dans la langue de Pascal.
Ensuite, il en offre une présentation qui, beaucoup plus qu'introductive
(malgré ce qu'affirmé le sous-titre, trop modeste), en livre la substance.
Il s'y adjoint souvent une présentation du contexte, voire de la réception,
initiative d'autant plus heureuse que le public cultivé même en théologie
ignore souvent les débats de l'Allemagne de l'après-guerre. Enfin, Aidan
Nichols se risque à quelques synthèses. Certes, ayant adopté un ordre
chronologique et non pas thématique, après un premier chapitre de mise en
contexte, il privilégie l'analyse des oeuvres, les unes après les autres, et
les mises en perspective, éclairantes, concernent davantage les centres
d'intérêt ou les
sources dont la continuité est volontiers soulignée. Le souci de reconduire
la théologie de Ratzinger à quelques intuitions fontales
(7) (cf. chap.
6 : « Réflexions sur le Credo » ne cherche pas à en faire saillir
l'originalité, qui se concentre, notamment, dans la Note annexe, au nom si
trompeur. Pourtant, celle-ci est le « grand rouage qui engrène tous les
autres, et la pensée sur ce point est constante, de Joseph Ratzinger à
Benoît XVI) ou à relever son caractère
inédit à l'égard de tel ou tel autre théologien notamment germanophone avec
qui il dialogue transparaît moins. La contrepartie avantageuse de ce choix
est, assurément, une plus grande lisibilité du propos, une légèreté qui
n'exclut jamais la profondeur. Surtout, cette présentation précise et
précieuse à bien des égards met en relief trois fils rouges traversant toute
l'œuvre du théologien bavarois : concernant le contenu, la méthode et
l'écriture.
(à suivre
Cliquez)
Notes :
(1)
Au sens noble du terme que développe Joseph Pieper dans Le
loisir, fondement de la culture, traduit par Pierre Blanc, préface de
Bernard N. Schumacher, coll. « Josef Pieper », Ad Solem, 2007.
(2) Voici ce qu'il dit de sa réaction à la nomination
comme archevêque de Munich: « Je me sentais dès le début une vocation
d'enseignant et je croyais qu'à ce moment-là précisément - j'avais cinquante
ans - j'avais trouvé pour ainsi dire ma propre vision théologique et que je
pourrais à présent créer une œuvre, pour contribuer un peu à l'ensemble de
la théologie ». Ayant demandé conseil, il prend conscience que, dans l'état
actuel de l'Église, « il faut que des théologiens soient prêts à servir
comme évêques ». Il consent donc à renoncer à sa vocation d'enseignant. « Le
prix à payer fut de ne pas pouvoir faire entièrement ce que je m'étais
imaginé, c'est-à-dire participer par la pensée et la parole aux grandes
discussions spirituelles de notre époque, développer une œuvre propre. J'ai
dû me plonger dans les détails et la multiplicité des conflits et événements
factuels. Une grande partie de ce qui m'intéressait, j'ai dû le laisser de
côté, me consacrer simplement à mon service et l'accepter comme la tâche qui
m'était dévolue. Et j'ai dû me défaire de l'idée que je devrais absolument
lire ou écrire ceci ou cela, et reconnaître que ma mission était ici »
(cardinal Joseph RATZINGER, Le sel de la terre. Le christianisme et l'Église
catholique au seuil du troisième millénaire. Entretiens avec Peter Seewald,
traduit par Nicole Casanova, Flammarion/Le Cerf, Paris, 1997, p. 80-81 et
115). Sur le renoncement similaire que vécut Joseph Ratzinger lors de son
élection dans la chapelle Sixtine, cf. ce qu'il confie à ses compatriotes
quelques jours après son élection le 25 avril 2005.
(3) Cf. Saint AUGUSTIN, La cité de Dieu, XIX, 19,
traduit par G. Combes, coll. « Bibliothèque augustinienne », Desclée de
Brouwer, Paris, 2000, p. 878 ; Sermon 104, in Les plus beaux sermons de
saint Augustin, trad. Humeau, Éditions Augustiniennes, Paris, 1986, tome 2,
p. 147-152.
(4) La première édition du livre arrêtait ses
analyses, grosso modo, au début de la prise de fonction comme préfet de la
Congrégation pour la doctrine de la foi; la seconde édition, sur laquelle
cette traduction est faite, ajoute un dernier chapitre qui couvre la période
de 1987 à 2005, pour s'arrêter à l'élection de Joseph Ratzinger comme pape.
(5) Aidan Nichols dit n'avoir rencontré qu'une seule étude un peu
générale sur la théologie de Ratzinger (p. 42, note 57) : R. TURA, « La teologia di Joseph Ratzinger. Saggio introduttivo »,
in Studia Patavina, 21
(1974), p. 145-182.
(6) La bibliographie de Joseph Ratzinger rassemblée par Aidan Nichols
au terme de l'ouvrage et qui s'arrête en 2004 comporte plus de 500 titres.
Présentant les traductions éventuelles en français, elle constitue un
précieux instrument de travail.
(7) Ainsi la minutieuse présentation de l'unique œuvre
synthétique de Ratzinger rédigée qu'est La foi chrétienne hier et
aujourd'hui (cf. chap. 6 : « Réflexions sur le Credo ») ne cherche pas à en
faire saillir l'originalité, qui se concentre, notamment, dans la Note
annexe, au nom si trompeur. Pourtant, celle-ci est le « grand rouage qui
engrène tous les autres, et la pensée sur ce point est constante, de Joseph
Ratzinger à Benoît XVI » (François BOUSQUET, « Benoît XVI et La foi
chrétienne hier et aujourd'hui», Revue d'éthique et de théologie morale. Le
Supplément, n° 239 [juin 2006], p. 19-44, ici p. 38).
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Sources : Introduction à la théologie de Joseph Ratzinger
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M. sur Google actualité)
28.09.2008 -
T/Théologie |