Benoît XVI, "Sacramentum Caritatis" et
l’iconographie religieuse |
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Rome, le 20 novembre 2007 -
(E.S.M.) - Le pape a consacré le paragraphe 41
de son exhortation post-synodale "Sacramentum Caritatis" à
l’iconographie religieuse. Celle-ci – écrit Benoît XVI – "doit être
orientée vers la mystagogie sacramentelle", vers l’initiation au mystère
chrétien par la liturgie.
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Le
Christ pantocrator, bénissant de la main droite et tenant de la gauche un
Évangile ouvert
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Benoît XVI, "Sacramentum Caritatis" et l’iconographie religieuse
Comment illustrer une homélie avec le pinceau de
Luc, évangéliste et peintre
Un livre de Timothy Verdon commente les
lectures de la messe par des chefs-d'œuvre de l'art chrétien. C'est une
"prédication par l'image" qui a prospéré pendant des siècles dans l'Église.
Et à laquelle l'actuel pontificat veut redonner vie.
(L’auteur de l’œuvre est
l’historien de l’art que Benoît XVI a voulu à ses côtés lors du dernier
Synode des évêques)
par Sandro Magister
C’est dimanche prochain, fête du Christ-Roi,
que se terminera l’année liturgique. Le dimanche suivant, le premier de
l’Avent selon le rite romain, marquera le début de la nouvelle année, la
première du cycle triennal des lectures de l’Ancien et du Nouveau Testament,
qui met à l’honneur l’Évangile selon saint Mathieu.
Beaucoup de prêtres ont l’habitude de préparer leurs homélies à l’aide de
livres commentant les lectures de la messe du jour. On trouve beaucoup de
ces manuels dans le commerce, mais jadis, cela ne se passait pas comme cela.
Les évangéliaires et les épistolaires qui, à partir du VIe siècle,
rassemblaient les lectures de la messe n’avaient pas besoin d’un commentaire
supplémentaire, à part. Ils constituaient eux-mêmes des illustrations des
pages des Écritures Saintes, une aide visuelle permettant de mieux les
comprendre.
Ces lectionnaires expliquaient les Écritures par des images intercalées
entre les textes, comme par exemple les splendides miniatures qui figuraient
sur les manuscrits du Moyen Age. C’étaient les images qui servaient de guide
et de commentaire à un clergé et des fidèles déjà habitués à voir les
épisodes et les personnages des Écritures Saintes représentés sur les murs
des églises.
Et voilà qu’en Italie, à la veille de ce premier dimanche de l’Avent, sort
un livre qui renoue justement avec cette tradition. Il s’agit d’un
commentaire du lectionnaire des messes pour les fêtes de l’année A – les
volumes pour les années B et C suivront – à partir d’images de ce que l’art
chrétien a produit de plus beau. Des images plus
éloquentes que de longues explications.
Son auteur est Timothy Verdon, historien de l’art, prêtre, professeur à
l’université de Stanford et directeur du service diocésain pour la catéchèse
par l’art, à Florence. Il a aussi écrit des livres importants sur l’art
chrétien et sur le rôle de l’art dans la vie de l’Église.
Il a eu l’idée de ce livre à l’occasion du synode des évêques de 2005 sur
l’eucharistie, auquel il participait comme expert à la demande de Benoît
XVI.
Le pape a consacré le paragraphe 41 de son exhortation post-synodale
"Sacramentum Caritatis" à l’iconographie religieuse.
Celle-ci – écrit Benoît XVI – "doit être orientée vers la mystagogie
sacramentelle", vers l’initiation au mystère
chrétien par la liturgie.
Dans son livre, Verdon applique précisément cette consigne. Pour chaque
dimanche et chaque fête de l’année liturgique, il choisit un chef-d’œuvre de
l’art chrétien lié à l’Évangile du jour. C’est l’art qui aide à entrer dans
le mystère proclamé et célébré.
Pour présenter son livre au public – c’était à Florence, il y a quelques
jours – Verdon a fait appel à un prêtre qui est en harmonie totale avec
cette orientation : Massimo Naro, théologien, recteur du séminaire du
diocèse de Caltanissetta et frère cadet de Cataldo Naro, l’évêque de
Monreale, en Sicile, mort il y a un an à l’âge de 55 ans seulement.
La cathédrale de Monreale, dont l’intérieur est entièrement recouvert de
mosaïques du XIIe siècle, est un chef-d‘œuvre absolu de l’art chrétien. Le
Christ Pantocrator reproduit ci-dessus en domine l’abside.
Mais l’art chrétien vit dans et pour la liturgie. Et son langage est celui
du regard, de la contemplation. C’est ce qu’avait compris le théologien
italo-allemand Romano Guardini, qui a été un grand maître pour Benoît XVI,
lorsqu’il avait visité la cathédrale de Monreale au cours de la semaine
sainte de 1929.
Guardini a raconté sa visite. Ayant observé les hommes et les femmes qui
emplissaient la cathédrale de Monreale et qui participaient à la liturgie
pascale, il a écrit:
"Ils vivaient tous dans le regard [dans le texte original en allemand: Alle
lebten im Blick], ils étaient tous tendus vers la contemplation".
Mgr Cataldo Naro avait reproduit intégralement la page de Guardini dans sa
dernière lettre pastorale aux fidèles, pour les guider dans la contemplation
et l’amour de l’Église.
Son frère Massimo a lui aussi cité cette page dans sa présentation du livre
de Verdon au public. Et il a continué ainsi:
"On doit croire, confesser, professer, mais on doit aussi ‘regarder’ la
foi. Jésus est celui qui a ‘vu et entendu’ son Père. En lui s’unissent la
parole et l’image, il est le Logos et l’Eikon
(cf. Colossiens 1,15). Ce n’est
pas par hasard que s’est répandue dans l’Église antique, dès les IVe et Ve
siècles, la légende selon laquelle l’évangéliste Luc était aussi un peintre.
On peut rattacher à cette légende l’anathème du second concile de Nicée,
selon lequel ‘si quelqu’un n’admet pas les récits des Évangiles faits à la
manière d’un peintre, qu’il soit excommunié’. Peindre le visage du Christ,
de Marie et des saints est une autre façon d’écrire l’Évangile, et par
conséquent de le transmettre, de le proclamer, d‘en permettre la lecture et
donc la méditation et la connaissance de la part des fidèles. A Nicée, en
787, le dogme incorpore la légende et lui donne sa dignité doctrinale. Il
inclut dans le dépôt de la tradition non seulement la tradition écrite et
orale, mais aussi la tradition illustrée, non seulement les écrits de l’Ancien
et du Nouveau Testament et les livres des Pères de l’Église mais aussi les
images qui traduisent en couleurs l’encre des auteurs sacrés".
Les œuvres d’art que Verdon a choisies pour illustrer les lectures de la
messe pour l’année A sont présentes dans des églises et des musées du monde
entier. Une bonne partie se trouve en Italie, dont certaines à Florence. Un
curé florentin pourra donc très facilement utiliser ce commentaire. Le pape
Benoît XVI et lui sont sur la même longueur d’onde au regard de l’art
chrétien. Tous les deux veulent le proposer aux fidèles autant qu’aux hommes
et aux femmes de notre temps.
Mais l’important, c’est la méthode, qui vaut pour tous. Le livre de Verdon
forme à la lecture "artistique" des textes bibliques de la liturgie. Il
restitue aux prêtres et aux fidèles les fruits d’une "prédication par les
images" qui s’est développée dans l’Église pendant un millénaire et demi et
qui risque aujourd’hui de dépérir.
L’art chrétien, la théologie et la liturgie sont en effet indissociables. De
même que la résurrection et la croix sont à l’origine de la composition des
Évangiles et du Nouveau Testament et que Pâques est à l’origine de toute
l’année liturgique, de même Jésus ressuscité et crucifié est à l’origine de
l’art chrétien.
Lors de sa présentation du livre de Verdon, Massimo Naro a affirmé que c’est
en observant les mosaïques de la cathédrale de Monreale dont son frère a été
l’évêque qu’il avait compris "que la résurrection constituait le point de
départ de l’art chrétien". Il s’est expliqué en ces termes:
"J’en suis convaincu depuis que j’ai vu, au sommet de l’arc qui fait face
à la grande demi-coupole de l’abside où l’on peut admirer le Christ
Pantocrator, la représentation en mosaïque du Mandylion, placée en symétrie
avec le visage du Pantocrator. On dirait que le splendide et glorieux Christ
Pantocrator est le développement d’un ‘négatif’ du visage du Crucifié.
"Le Mandylion, selon d’anciennes légendes qui remontent aux VIIIe et IXe
siècles, est un linge sur lequel s’est imprimé le visage de Jésus,
ensanglanté par les coups qui lui étaient infligés pendant sa passion.
"Pour certains, le Mandylion est le linge que Véronique a passé sur le
visage de Jésus alors qu’il marchait vers le Calvaire
(cf. Luc 23, 27-28).
"Pour d’autres, il s’agit du suaire remarqué par Pierre au matin de Pâques
dans le tombeau désormais vide (cf. Jean
20,7).
"Dans ce cas, il s’agirait d’une image de Jésus ‘non peinte de main d’homme’
mais due à l’intervention divine: l’empreinte, sur le suaire, du visage du
Crucifié qui, dans la lumière pascale, se relève en tant que Ressuscité.
"Cette image de lumière est donc, selon la légende du Mandylion, la
véritable icône du Christ, l’archétype de toute image et de toute production
artistique chrétienne.
"Dans cette perspective, c’est la lumière de la résurrection qui permet de
représenter le Crucifié du Golgotha et, en Lui, Dieu Lui-même. C’est
seulement à la lumière de la résurrection que Celui qui a été violemment
privé de toute apparence humaine reste pour toujours la vraie et unique
image de Dieu.
"En ce sens, la résurrection est à l’origine de l’iconographie et de l’art
chrétiens. Toute production iconographique spécifiquement chrétienne ne peut
donc être dissociée de l’événement capital qui a transformé la création et
racheté l’histoire".
Le livre présenté dans cette
page, dont des traductions dans d’autres langues sont prévues :
Timothy Verdon, "La bellezza nella parola. L'arte a commento delle letture
festive. Anno A", Editions San Paolo, Cinisello Balsamo, 2007, pp. 378, 43
euros.
Repères :
A propos des images contenues dans le Catéchisme de l’Église Catholique à la
demande de Joseph Ratzinger, en tant que cardinal puis en tant que pape :
Ce n’est pas par hasard si Benoît XVI a voulu faire
accompagner le Compendium du Catéchisme de l’Église catholique, publié au
début de son pontificat, par des images d’art sacré qu’il a lui-même
choisies : ►
Le Catéchisme en images sur les indications de
Benoît XVI
Le
livre intitulé "Beauté et identité, l'Europe et ses cathédrales", de Mgr.
Timothy Verdon qui est un hommage au pape Benoît XVI à l'occasion de son
quatre-vingtième anniversaire :
►
Benoît XVI
Traduction française par
Charles de Pechpeyrou, Paris, France
Sources: La chiesa.it
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas
un document officiel
Eucharistie, sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 20.11.2007 - BENOÎT XVI
- T/Liturgie - Sacramentum Caritatis |