Benoît XVI et Pie XII
Cité du Vatican, le 12 novembre 2008 -
(E.S.M.)
- Discours du pape Benoît XVI aux participants au congrès sur «
L’héritage du magistère de Pie XII dans le Concile Vatican II »,
en la salle Clémentine, qui s'est déroulé le 8 novembre 2008.
Le pape Pie XII - Pour
agrandir l'image º
Cliquer
Benoît XVI et Pie XII
Le 12 novembre - Eucharistie Sacrement de la Miséricorde
- Discours du pape Benoît XVI aux participants au congrès sur «
L’héritage du magistère de Pie XII dans le Concile Vatican II », en la
salle Clémentine, le 8 novembre 2008.
Messieurs les Cardinaux,
Vénérés Frères dans l'Épiscopat et dans le Sacerdoce,
Chers frères et soeurs !
Je suis heureux de vous accueillir à l'occasion du congrès sur "L'héritage
du magistère de Pie XII et le Concile Vatican II", organisé par
l'université pontificale du Latran et l'université pontificale grégorienne.
C'est un congrès important du fait du sujet qu'il aborde et de la qualité
des personnes, provenant de plusieurs nations, qui y prennent part.
J'adresse à chacun mes salutations cordiales et je remercie en particulier
Mgr Rino Fisichella, recteur magnifique de l'université du Latran, et le
père Gianfranco Ghirlanda, recteur de l'université grégorienne, pour les
aimables paroles avec lesquelles ils se sont faits les interprètes de vos
sentiments communs.
J'ai apprécié l'importance du sujet sur lequel vous avez concentré votre
attention. Ces dernières années, quand on parlait de Pie XII, l'attention se
concentrait de manière excessive sur une seule problématique, traitée qui
plus est de manière généralement unilatérale. Toute autre considération mise
à part, cela a empêché une approche adaptée de cette haute figure historique
et théologique qu'est le Pape Pie XII. L'ensemble de l'activité imposante
réalisée par ce Pape et, de manière toute particulière, son magistère sur
lequel vous vous êtes penchés ces derniers jours, sont une preuve éloquente
de ce que je viens d'affirmer. Son magistère se caractérise en effet par sa
vaste et bénéfique étendue, ainsi que par sa qualité
exceptionnelle, si bien que l'on peut dire qu'il constitue un héritage
précieux dont l'Église a tiré un grand profit et continue de le faire.
J'ai parlé d'une "vaste et bénéfique étendue" de ce magistère. Qu'il suffise
de rappeler à cet égard les encycliques et les très nombreux discours et
radiomessages contenus dans les vingt volumes de ses "Insegnamenti".
Il a publié plus de quarante encycliques. Parmi lesquelles, en particulier,
"Mystici corporis", dans laquelle le Pape aborde le sujet de la
nature véritable et intime de l'Église. Par l'étendue de ses recherches, il
met en lumière notre profonde union ontologique avec le Christ et - en Lui,
pour Lui et par Lui - avec tous les autres fidèles animés par son Esprit,
qui se nourrissent de son Corps, et transformés en Lui, lui permettent de
continuer et d'étendre dans le monde son oeuvre de salut. Deux autres
encycliques sont intimement liée à
Mystici Corporis on trouve deux autres Encycliques :
Divino Afflante Spiritu
sur l’Écriture sainte, et
Mediator Dei
sur la sainte Liturgie, où sont présentées les deux sources auxquelles
doivent toujours retourner ceux qui appartiennent au Christ, chef du Corps
mystique qu’est l’Église.
Dans ce contexte de grande ampleur Pie XII a traité des différentes
catégories de personnes qui, par la volonté du Seigneur, font partie de
l'Église, même s'ils ont des vocations et des devoirs différents: les
prêtres, les religieux et les laïcs. Il a ainsi édicté de sages règles sur
la formation des prêtres, qui doivent se distinguer par leur amour personnel
du Christ, la simplicité et la sobriété de leur vie, leur loyauté envers
leurs évêques et leur disponibilité envers ceux qui sont confiés à leurs
soins pastoraux. Dans l'encyclique "Sacra Virginitas" et dans
d'autres documents sur la vie religieuse, Pie XII a par la suite mis
clairement en lumière l'excellence du "don" que Dieu accorde à certaines
personnes en les invitant à se consacrer totalement à son service et au
service de notre prochain dans l'Église. Dans cette perspective, le Pape
insiste fortement sur le retour à l'Évangile et au charisme authentique des
fondateurs et des fondatrices des divers ordres et congrégations
religieuses, prévoyant également la nécessité de certaines saines réformes.
Il fut ensuite donné à Pie XII à de nombreuses occasions d'aborder la
responsabilité des laïcs dans l'Église, en profitant en particulier des
grands congrès internationaux dédiés à ces sujets. Il abordait volontiers
les problèmes de chaque profession, en indiquant, par exemple, les devoirs
des juges, des avocats, des travailleurs sociaux, des médecins: à ces
derniers le Souverain Pontife dédia de nombreux discours en illustrant les
normes déontologiques qu'ils doivent respecter dans leur activité. Ensuite,
dans l'encyclique "Miranda Prorsus",
le Pape s'arrêta sur la grande importance des moyens modernes de
communication, qui, de manière toujours plus incisive, influençaient
toujours davantage l'opinion publique. C'est justement pour cela que le
Souverain Pontife, qui valorisa au maximum l'invention nouvelle de la radio,
soulignait le devoir des journalistes de donner des informations véridiques
et respectueuses des règles morales.
Pie XII porta son attention également sur les sciences et les
extraordinaires progrès qu'elles accomplissent. Même s'il admirait les
avancées réalisées dans ces domaines, le Pape ne manquait pas de mettre en
garde contre les risques qu'une recherche inattentive aux valeurs morales
pouvait comporter. Un seul exemple suffit: le discours qu'il prononça sur la
réussite de la fission des atomes est resté célèbre; cependant, avec une
clairvoyance extraordinaire, le Pape en appelait à la nécessité d'interdire
à tout prix que ces progrès scientifiques géniaux fussent utilisés pour la
construction d'armes meurtrières qui auraient pu provoquer des catastrophes
démesurées pouvant aller jusqu'à la destruction de l'humanité. Comment ne
pas ensuite rappeler les longs discours inspirés concernant la
réorganisation de la société civile, nationale et internationale, pour
laquelle il indiquait comme fondement indispensable la justice, véritable
présupposé à une coexistence pacifique entre les peuples: "opus iustitiae
pax!". L'enseignement mariologique de Pie XII mérite également une
mention spéciale: il atteint son sommet dans la proclamation du dogme de
l'Assomption de la Très Sainte Vierge Marie, par laquelle le Saint-Père
entendait souligner la dimension eschatologique de notre existence tout en
exaltant la dignité de la femme.
Que dire de la qualité de l'enseignement de Pie XII ? Il se refusait à
l'improvisation: il écrivait avec le plus grand soin tous ses discours,
soupesant chaque phrase et chaque mot avant de les prononcer en public. Il
étudiait attentivement les différentes questions et avait l'habitude de
demander conseil à d'éminents spécialistes quand il s'agissait de sujets qui
demandaient une compétence particulière. Par sa nature et son tempérament
Pie XII était un homme pondéré et réaliste, étranger à tout optimisme
facile, mais il se gardait également du danger de ce pessimisme qui ne
convient pas à un croyant. Il détestait les polémiques stériles et était
profondément méfiant envers le fanatisme et le sentimentalisme.
Ces attitudes intérieures donnent toute leur force à la valeur et à la
profondeur, ainsi qu'à la fiabilité de son enseignement; elles expliquent
l'adhésion confiante à celui-ci non seulement de la part des fidèles, mais
également de nombreuses personnes n'appartenant pas à l'Église. En observant
la grande étendue et la qualité élevée du magistère de Pie XII, on en vient
à se demander comment il a pu en faire autant, alors même qu'il devait se
consacrer à tous les nombreux autres devoirs liés à son service de Souverain
Pontife: le gouvernement quotidien de l'Église, les nominations et les
visites des évêques, les visites des chefs d'État et des diplomates, les
innombrables audiences accordées à des personnes privées et à des groupes
très différents.
Tous reconnaissent à Pie XII une intelligence hors du commun, une mémoire
infaillible, une grande facilité pour les langues étrangères et une
remarquable sensibilité. On a dit de lui qu'il était un diplomate accompli,
un éminent juriste, un excellent théologien. Tout cela est vrai, mais cela
n'explique pas tout. Il y avait aussi en lui l'effort continu et la ferme
volonté de se donner à Dieu sans s'épargner et sans considération pour sa
santé fragile. Cela fut le vrai moteur de son comportement: tout naissait de
l'amour pour le Seigneur Jésus Christ, et de l'amour pour l'Église et pour
l'humanité. En effet, il était avant tout le prêtre en union intime et
permanente avec Dieu, le prêtre qui trouvait la force d'accomplir son
immense travail dans de longs moments de prière devant le Très Saint
Sacrement, en dialogue silencieux avec son Créateur et Rédempteur. C'est de
là que son magistère, comme toutes ses autres activités, tirait son origine
et son élan.
Aussi ne doit-on pas s'étonner que son enseignement continue encore
aujourd'hui à diffuser sa lumière dans l'Église. Cinquante ans se sont
écoulés depuis sa mort, mais son magistère fécond et éclectique reste
toujours pour les chrétiens d'aujourd'hui d'une valeur inestimable.
L'Église, Corps Mystique du Christ, est certainement un organisme vivant et
vital, qui n'est pas figé sur ce qu'elle était il y a cinquante ans. Mais
son développement se fait dans la cohérence. Aussi l'héritage du magistère
de Pie XII a-t-il été recueilli par le Concile Vatican II et proposé à
nouveau aux générations chrétiennes successives. On sait que, dans les
interventions orales et écrites présentés par les Pères du Concile Vatican
II, on trouve plus de mille références au magistère de Pie XII. Tous les
documents du Concile n'ont pas un système de notes indiquant les références,
mais dans les documents qui en ont, le nom de Pie XII revient plus de deux
cents fois. Cela veut dire que, exception faite de la Sainte Écriture, ce
Pape est la source qui fait autorité la plus fréquemment citée. De plus, on
sait que les notes apposées à ces documents ne sont pas, en général, de
simples renvois explicatifs, mais font souvent partie intégrante des textes
conciliaires; elles ne fournissent pas seulement des justifications à ce qui
est affirmé dans le texte, mais en offre une clef d'interprétation.
Nous pouvons donc dire que, dans la personne du Souverain Pontife Pie XII,
le Seigneur a fait à son Église un don exceptionnel, pour lequel nous devons
tous Lui être reconnaissants. Je renouvelle donc l'expression de mon estime
pour l'importance des travaux que vous avez réalisés en préparation et
pendant le déroulement de ce congrès international sur le magistère de Pie
XII et je souhaite que l'on continue à réfléchir sur l'héritage précieux
laissé à l'Église par l'immortel Souverain Pontife, pour en tirer des
applications fructueuses aux problématiques qui apparaissent aujourd'hui.
Avec ce souhait, et tandis que j'invoque sur votre travail l'aide du
Seigneur, je donne de tout coeur à chacun ma Bénédiction.
Texte original du
discours du Saint Père
º
Italien
Regarder
la vidéo en
Italien ou en
Français
Sources : ©L'Osservatore Romano - 18 novembre 2008
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 12.11.2008 -
T/Benoît XVI