La formidable machine nommée Sant’Egidio, qui plaît tant au Pape
François
Le 07.05.2024 -
E.S.M.
- Le Pape François n’est pas tendre avec les
mouvements catholiques nés au XXe siècle qui étaient
pour Jean-Paul II une refloraison de l’Église dans le
monde : Opus Dei, Focolari, Communion et Libération,
Légionnaires du Christ, charismatiques, Chemin
néocatéchuménal, et bien d’autres encore. Plutôt que de
les soutenir, il les punit. Mais il une trouve grâce à
ses yeux : la Communauté de Sant’Egidio.
S.M
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La formidable machine nommée Sant’Egidio, qui plaît tant au Pape François
Le 07 mai 2024 -
E.S.M. -
Le Pape François n’est pas tendre avec les mouvements catholiques
nés au XXe siècle qui étaient pour Jean-Paul II une « refloraison de
l’Église dans le monde » : Opus Dei, Focolari, Communion et
Libération, Légionnaires du Christ, charismatiques, Chemin
néocatéchuménal, et bien d’autres encore. Plutôt que de les
soutenir, il les punit.
Mais il en est pourtant un qui trouve grâce à ses yeux : la Communauté de
Sant’Egidio.
François semble la privilégier de manière démesurée. Et la Communauté le
lui rend bien en occupant de plus en plus de place dans les hautes sphères
de l’Église.
Les deux dernières conférences de presse organisée par la salle de presse
du Vatican, dirigée depuis 2019 par Matteo Bruni, un membre de Sant-Egidio,
en sont la preuve.
Au cours de la conférence de presse du 8 avril, à l’occasion de la
première sortie publique du controversé préfet du Dicastère pour la Doctrine
de la foi, le cardinal argentin Victor Manuel Fernández, siégeait à ses
côtés Paola Scarcella, professeur d’université et responsable de la
Communauté de Sant’Egidio pour la catéchèse des personnes handicapées, qui
était chargé de donner du crédit à la dernière déclaration doctrinale émise
par le cardinal.
Tandis qu’à la conférence de presse du 22 avril, convoquée pour annoncer
la rencontre de François « avec les grands-parents et les petits-enfants »
programmée quelques jours plus tard, deux piliers historiques de la
communauté trônaient, Vincenzo Paglia et Mario Marazziti, flanqués de
l’acteur comique Lino Banfi, invité fréquent du Pape à Sainte-Marthe qui l’a
affublé du titre de « papy d’Italie ».
Cette rencontre du Pape avec les grands-parents, qui s’est tenue le 27
avril, était organisée par la Fondation « Età Grande », elle aussi créée par Sant’Egidio, présidée par Paglia et dont le secrétaire général est le P.
Riccardo Mensuali, un autre membre de la Communauté. Cette fondation a été
élevée au rang de « papale » et a ses bureaux dans les bâtiments du Vatican
situés dans le quartier romain du Trastevere, à quelques encablures du siège
historique de Sant’Egidio.
Mgr Paglia, qui a été évêque de Terni mais qui a été rappelé au Vatican
en 2012 pour y occuper des fonctions prestigieuses, est également engagé
dans la politique italienne, où il préside depuis 2020 la Commission pour
l’aide sociale et sanitaire aux seniors, en lien avec le ministère de la
santé.
Au Vatican, ses principales fonctions sont celles de président de
l’Académie pontificale pour la vie et de Grand chancelier du l’Institut
pontifical Jean-Paul II pour les sciences du mariage et de la famille.
Deux autres membres historiques de Sant’Egidio sont d’ailleurs
vice-présidents de cet institut : Agostino Giovagnoli, professeur d’histoire
contemporaine à l’Université catholique de Milan, et son épouse Milena
Santerini, pédagogue dans la même université.
Mais Giovagnoli est mieux connu comme étant le grand commentateur des
questions entre le Vatican et la Chine pour « Avvenire », le quotidien de la
Conférence épiscopale italienne, où il
défend bec et ongles – en cheville avec le Pape – le bien-fondé de
l’accord secret entre Rome et Pékin sur la nomination des évêques, malgré
que cet accord n’ait jusqu’ici produit que des résultats controversés et
d’ailleurs critiqués par plusieurs parties.
La compétence sur la Chine que l’on attribue à Giovagnoli est notamment
liée au fait qu’il est membre du comité scientifique de l’Institut Confucius
de l’Université catholique de Milan, l’un des nombreux instituts du même nom
que le régime de Pékin a essaimé dans le monde entier.
Cet institut est dirigé par la Chinoise Liang Qing et l’Italienne Elisa
Giunipero, professeur d’histoire de la Chine contemporaine à l’Université
catholique de Milan et elle aussi très proche de la Communauté de
Sant’Egidio, on lui doit un livre qu’elle a publié avec Giovagnoli consacré
précisément à « L’accord entre le Saint-Siège et la Chine », édité par
l’Urbaniana University Press.
La Communauté est active au niveau international depuis des années. L’un
de ses membres les plus éminents, Mario Giro, a été vice-ministre des
Affaires étrangères en Italie dans deux gouvernements par le passé et est
président de Demos, Democrazia Solidale, une petite formation dont le
secrétaire est Paolo Ciani, lui aussi de Sant’Egidio, qui siège au parlement
dans les rangs du Parti démocrate et qui soutient la guerre en Ukraine avec
des positions alignées sur la ligne pacifiste du Pape François, votant
contre les livraisons d’armes à Kiev.
Ce qui explique notamment le froid glacial entre la Communauté de
Sant’Egidio et la Secrétairerie d’État du Vatican, qui a un point de vue
bien différent sur la guerre en Ukraine, comme Settimo Cielo l’a mis en
évidence dans un
précédent article. Un froid glacial qui trouve entre autres ses origines
dans les
initiatives internationales précédentes prises par la Communauté, depuis
cet accord au Mozambique de 1992 qu’elle met toujours en avant comme un de
ses succès alors qu’il n’a jamais été considéré comme tel par les diplomates
du Vatican.
Á l’époque, le principal artisan de cet accord était Matteo Zuppi, qui
n’était alors qu’un simple prêtre, et qui est aujourd’hui cardinal
archevêque de Bologne et président de la Conférence épiscopale italienne.
Membre éminent de Sant’Egidio des premières heures, Zuppi est l’homme que
le Pape François utilise comme son émissaire sur le front de la guerre en
Ukraine. Jusqu’à présent sans résultat, pas même sur le terrain humanitaire
du retour espéré de milliers d’enfants
déportés en Russie. Et ce malgré les rapports amicaux entretenus depuis
des années avec le patriarche orthodoxe de Moscou,
cultivés surtout par le vice-président de la Communauté, Adriano
Roccucci, professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Rome Trois
et spécialiste de la Russie.
Ce qui relie l’activisme géopolitique de Sant’Egidio à celui du Pape
François, c’est une vision commune, soutenue par Mario Giro dans les
articles qu’il rédige dans le quotidien « Domani », qui voit dans le
« Global South » d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine l’alternative à
cette domination des États-Unis et de l’Europe que l’Argentin Jorge Mario
Bergoglio a toujours eu en horreur au fond de lui.
Mais cela n’empêche pas la Communauté de flatter et d’encenser les plus
hautes autorités politiques d’Occident, de la Secrétaire d’État de la
présidence Clinton Madeleine Albright, qui les qualifiait de « wonderful
people » à Angela Merkel, en passant par Emmanuel Macron, ni de rassembler
autour des grandioses rencontres interreligieuses qu’elle orchestre (chaque
année organisées dans ce soi-disant « esprit d’Assise ») aussi bien les
leaders musulmans les plus en vue que des rabbins juifs, et même, de temps à
autre, le Pape en personne.
La prédilection que François manifeste pour Sant’Egidio s’affiche
également dans le nombre croissant de nominations épiscopales dans ses
rangs. À Mgr Zuppi, Mgr Paglia et à l’évêque de Frosinone, Veroli et
Ferentino, Mgr Ambrogio Spreafico, ordonnés par Benoît XVI, se sont ajoutés
en 2021 Mgr Giuseppe Mazzafaro, évêque des diocèses de Cerreto Sannita,
Telese et Sant’Agata de’Goti, et en 2023 Mgr Giorgio Ferretti, archevêque de
Foggia et de Bovino.
Et puis, il y a cette proximité entre les hommes de Sant’Egidio et les
saints les plus chers au Pape François. Mgr Paglia – avec la collaboration
de l’historien Roberto Morozzo Della Rocca, lui aussi de la Communauté – est
promoteur de la cause en béatification d’Oscar Romero, l’archevêque de San
Salvador assassiné en 1980 sur l’autel et de Rutilio Grande, le jésuite
salvadorien abattu par les escadrons de la mort en 1977.
Un autre membre de San’Egidio, le prêtre Angelo Romano, est rapporteur
général au Dicastère pour les causes des Saints et recteur de la basilique
romaine de Saint-Barthélemy-en-l’Île, dédiée aux martyrs de notre temps, y
compris ceux de confession non catholique.
En juillet dernier, François a confié en bloc à la Communauté les clés de
la toute nouvelle Commission pour les nouveaux martyrs, dont Andrea
Riccardi, le fondateur de Sant’Egidio est le président, et dont le
secrétaire est Marco Gnavi, curé de la basilique romaine
Sainte-Marie-du-Trastevere avec comme membres Angelo Romano et Gianni La
Bella, un autre professeur d’université d’histoire contemporaine, la
profession typique des membres de haut rang de la Communauté.
Il n’est donc pas étonnant que François, qui a fixé la règle qu’aucun
président d’un mouvement catholique ne peut rester en fonction plus de dix
ans, tolère benoîtement que Marco Impagliazzo, professeur d’histoire
contemporaine à l’Université de Rome Trois, continue à présider la
Communauté de Sant’Egidio sans interruption depuis 2003.
Mais ce n’est pas lui le véritable numéro un de la Communauté, pas plus
que le cardinal Zuppi, bien que beaucoup le considèrent comme étant le
premier de la liste des
candidats à la papauté, notamment grâce à sa manière de dire sans dire,
d’entrebâiller les portes sans jamais les ouvrir en grand et de toujours
esquiver les questions les plus clivantes.
Le cardinal George Pell, avec la compétence qu’on lui connaît en la
matière, aimait à dire : « Attention, parce que si Zuppi est élu au
conclave, le vrai pape sera Andrea Riccardi ». C’est-à-dire l’omnipotent
fondateur de la Communauté (sur la photo en haut avec le Pape François au
Mozambique en 2019), célèbre spécialiste de l’histoire de l’Église, ancien
ministre pour la coopération internationale, récompensé en 2009 par le prix
Charlemagne et qui était en lice en 2022 pour la présidence de la République
italienne, le seul qui a le pouvoir de tirer toutes les ficelles de cette
formidable machine nommée Sant’Egidio.
Sandro Magister est le vaticaniste émérite de l’hebdomadaire
L’Espresso.
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Sources
: diakonos.be-
E.S.M.
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constitue pas un document officiel
Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 07.05.2024