Benoît XVI : Marie devient l'arche de l'alliance
Le 06 mars 2023 -
(E.S.M.)
- Benoît XVI cite Bernard de Clairvaux,
qui dans une
homélie de l'Avent, a illustré de façon dramatique l'aspect émouvant
de ce moment. Après l'échec des ancêtres, le monde entier est
assombri, sous la domination de la mort. Maintenant Dieu cherche une
nouvelle entrée dans le monde. Il frappe à la porte de Marie. Il a
besoin de la liberté humaine. Il ne peut racheter l'homme, créé
libre, sans un libre « oui » à sa volonté.
Réjouis-toi, comblée de
grâce, le Seigneur est avec toi ! -
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Le sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une
ville de Galilée, du nom de Nazareth, à une vierge fiancée à un homme du nom
de Joseph, de la maison de David ; et le nom de la vierge était Marie » (Lc
1, 26 sq.~). L'annonce de la naissance de Jésus est liée à
l'histoire de Jean-Baptiste avant tout chronologiquement, par l'indication
du temps écoulé après le message de l'archange Gabriel à Zacharie,
c'est-à-dire « le sixième mois » de la grossesse d'Elisabeth. Toutefois,
dans ce passage, les deux événements et les deux missions sont aussi liés
par l'information selon laquelle Marie et Elisabeth - et donc aussi leurs
enfants - sont parentes.
La visite de Marie à Elisabeth, qui découle comme conséquence
de l'entretien entre Gabriel et Marie (cf. Lc 1, 36), conduit -
encore avant la naissance — à une rencontre, dans l'Esprit Saint, entre
Jésus et Jean, et, en même temps, dans cette rencontre est aussi rendue
évidente la corrélation de leurs missions : Jésus est le plus jeune,
celui qui vient après. Mais c'est sa proximité
qui fait tressaillir Jean dans le sein maternel et remplit Élisabeth
d'Esprit Saint (cf. Lc 1, 4l). Ainsi, déjà dans les récits de saint
Luc sur l'annonce et sur la naissance, apparaît objectivement ce que le
Baptiste dira dans l'Évangile de Jean : « C'est de lui que j'ai dit :
Derrière moi vient un homme qui est passé devant moi parce que avant moi il
était » (1, 30).
Avant toute chose, cependant, il
convient de considérer de façon plus détaillée le récit de l'annonce de la
naissance de Jésus à Marie. Regardons d'abord le message de l'ange et
ensuite la réponse de Marie.
Dans le salut de l'ange, il est frappant que celui-ci
n'adresse pas à Marie le salut juif habituel, shalom — « la paix soit
avec toi » —, mais la formule grecque chaire, qu'on peut simplement
traduire par « salut », comme cela se fait dans la prière mariale de
l'Église composée avec des paroles tirées du récit de l'Annonciation (cf.
Lc 1, 28, 42). Toutefois, il est légitime de comprendre, à ce point, la
vraie signification du mot chaire : réjouis-toi
! Avec ce souhait de l'ange — pouvons-nous dire — commence, au sens
propre, le Nouveau Testament.
La parole revient dans la Nuit sainte sur les lèvres de
l'ange, qui dit aux bergers : « Je vous annonce une grande joie » (2, 10).
Elle revient - chez Jean - à l'occasion de la rencontre avec le Ressuscité :
« Les disciples furent remplis de joie à la vue du Seigneur » (20, 20). Dans
les discours d'adieu chez Jean apparaît une théologie de la joie qui
éclaire, pour ainsi dire, les profondeurs de cette parole : « Je vous verrai
de nouveau et votre cœur sera dans la joie, et votre joie, nul ne vous
l'enlèvera » (16, 22).
Dans ces textes, la joie apparaît comme le don propre de
l'Esprit Saint, comme le vrai don du Rédempteur. Ainsi, avec le salut de
l'ange est évoqué l'accord qui continuera ensuite à résonner à travers tout
le temps de l'Église et qui, en ce qui concerne son contenu, peut être aussi
perçu dans la parole fondamentale par laquelle on qualifie l'annonce
chrétienne tout entière : l'Évangile — la Bonne Nouvelle.
« Réjouis-toi » est d'abord — comme nous l'avons vu — un salut en langue
grecque, et ainsi, dans cette parole de l'ange, la porte vers les peuples du
monde s'ouvre aussitôt ; il y a là une allusion à l'universalité du message
chrétien. C'est pourtant en même temps aussi une parole qui est tirée de
l'Ancien Testament et qui est donc pleinement dans la continuité de
l'histoire biblique du salut. Stanislas Lyonnet et René Laurentin surtout
ont montré que dans la salutation de Gabriel à Marie est reprise et
actualisée la prophétie de Sophonie 3, 14-17, qui s'exprime ainsi : «
Pousse des cris de joie, fille de Sion, une clameur d'allégresse, Israël !
[...] Le Seigneur ton Dieu est au milieu de toi. »
II n'est pas nécessaire d'entrer ici dans les détails d'une
comparaison textuelle entre le salut de l'ange à Marie et la parole de
promesse du prophète, souligne Benoît XVI. Le motif essentiel pour lequel la fille de Sion peut
exulter est exprimé dans l'affirmation : « Le Seigneur est au milieu de toi
» (So 3, 15, 17) — traduit littéralement : «
est dans ton sein ». Sophonie reprend là des paroles du Livre de
l'Exode qui décrivent le fait pour Dieu de demeurer dans l'arche d'alliance
comme le fait de demeurer « dans le sein d'Israël » (cf. Ex 33, 3 ;
34, 9 ; cf. Laurentin, Structure et théologie de Luc /-//, p. 64-71).
Cette parole revient dans le message de Gabriel à Marie : « Tu concevras
dans ton sein » (Lc 1, 31).
De toute façon, si les détails de ces parallélismes sont
évalués, une proximité interne des deux messages est évidente. Marie
apparaît comme la fille de Sion elle-même. Les promesses concernant Sion
s'accomplissent en elle de façon inattendue. Marie
devient l'arche de l'alliance, le lieu d'une vraie demeure du Seigneur.
« Réjouis-toi, comblée de grâce ! » Un autre aspect de ce
salut chaire est digne de réflexion : le lien entre joie et grâce. En
grec, les deux mots, joie et grâce (charà et châris), sont formés à
partir de la même racine. Joie et grâce vont de pair.
Venons-en maintenant au contenu de la promesse. Marie
concevra un enfant auquel l'ange attribue les titres de « Fils du Très-Haut
» et de « Fils de Dieu ». En outre il est
promis que Dieu, le Seigneur, lui donnera le trône de David son père. Il
régnera pour toujours sur la maison de Jacob et son règne (sa seigneurie)
n'aura pas de fin. Une série de promesses en référence au « comment » de la
conception est ensuite ajoutée. « L'Esprit Saint viendra sur toi, et la
puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c'est pourquoi l'être
saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu » (Lc
1, 35).
Commençons par cette dernière promesse. En ce qui regarde sa
formulation, elle appartient à la théologie du Temple et de la présence de
Dieu dans le sanctuaire. La nuée sacrée — la shekinà — est un signe
visible de la présence de Dieu. Elle cache et montre à la fois le fait qu'il
demeure dans sa maison. La nuée qui jette son ombre sur les hommes revient
ensuite dans le récit de la Transfiguration du Seigneur (cf. Lc 9, 34
; Mc 9, 7). De nouveau elle est un signe de la présence de Dieu, de
Dieu qui se montre tout en se cachant. Ainsi, par la parole exprimant
l'ombre qui descend avec l'Esprit Saint, est reprise la théologie qui se
rapporte à Sion, contenue dans la salutation. Encore une fois Marie apparaît
comme la tente vivante de Dieu, dans laquelle, de façon nouvelle, il veut
demeurer au milieu des hommes.
En même temps, dans l'ensemble de ces paroles de l'annonce,
une allusion au mystère du Dieu tri-nitaire est perceptible. Dieu le Père,
qui avait promis stabilité au trône de David, agit, et maintenant il
institue l'héritier dont le règne n'aura pas de fin, l'héritier définitif de
David prédit par le prophète Natân par les paroles : « Je serai pour lui un
père et il sera pour moi un fils » (2 S 7, 14). Le Psaume 2 le
répète : « Tu es mon fils, moi, aujourd'hui, je t'ai engendré » (v. 7).
Les paroles de l'ange demeurent totalement dans la conception
religieuse vétérotestamentaire et toutefois, elles la dépassent. À partir de
la nouvelle situation elles reçoivent un nouveau réalisme, une densité et
une force inimaginables auparavant. Le mystère trinitaire n'a pas encore été
un objet de réflexion, il ne s'est pas encore développé jusqu'à la doctrine
définitive. Il apparaît de lui-même, grâce à la façon d'agir de Dieu
préfigurée dans l'Ancien Testament ; il apparaît dans l'événement, sans
devenir doctrine. De même, le concept de l'être-Fils, propre à l'Enfant,
n'est pas approfondi et développé jusque dans sa dimension métaphysique. De
cette façon, tout demeure dans le cadre de la conception religieuse juive.
Toutefois, les paroles anciennes elles-mêmes, à cause de l'événement nouveau
qu'elles expriment et interprètent, sont de nouveau en marche et vont
au-delà d'elles-mêmes. Dans leur simplicité, elles reçoivent justement une
nouvelle grandeur, presque déconcertante, qui en revanche devra se
développer uniquement sur le chemin de Jésus et sur le chemin des croyants.
Le nom « Jésus », que l'ange attribue à l'enfant, aussi bien
chez Luc (1, 31) que chez Matthieu (1, 21), se situe aussi
dans ce contexte. Dans le nom de Jésus, le tétragramme, le nom mystérieux
depuis l'Horeb, est de façon cachée contenu et élargi jusqu'à l'affirmation
: Dieu sauve. Le nom, demeuré depuis le Sinaï —
pour ainsi dire — incomplet, est prononcé jusqu'au bout. Le Dieu qui est,
est le Dieu présent et sauveur. La révélation
du nom de Dieu, commencée dans le buisson ardent, est portée à son
accomplissement en Jésus (cf. Jn 17, 26).
Le salut, que porte l'enfant promis, se manifeste dans
l'instauration définitive du règne de David. En effet, une durée permanente
avait été promise au règne davidique : « Ta maison et ta royauté
subsisteront à jamais devant toi ; ton trône sera affermi à jamais » (2 S
7, 16), avait annoncé Natân, sur ordre de Dieu lui-même.
Dans le Psaume 89 se reflète, de façon bouleversante,
la contradiction entre le caractère définitif de la promesse et
l'écroulement de fait du règne davidique : « J'ai pour toujours établi sa
lignée, et son trône comme les jours des cieux. Si ses fils abandonnent ma
loi, ne marchent pas selon mes jugements [...] je punirai leur révolte avec
le fouet [...] mais sans lui retirer mon amour, sans faillir dans ma vérité
» (v. 30-34). C'est pourquoi le psalmiste, de façon émouvante et avec
insistance, répète la promesse devant Dieu, frappe à la porte de son cœur et
réclame sa fidélité. La réalité qu'il voit, en effet, est totalement
différente : « Mais toi, tu as rejeté et répudié, tu t'es emporté contre ton
oint ; tu as renié l'alliance de ton serviteur, tu as profané jusqu'à terre
son diadème [...] tous les passants du chemin l'ont pillé, ses voisins en
ont fait une insulte [...]. Souviens-toi, Seigneur, de l'insulte à ton
serviteur » (v. 39-51).
Cette plainte d'Israël se tenait devant Dieu aussi
au moment où Gabriel annonçait à la Vierge Marie le nouveau roi sur le trône
de David. Hérode était roi par la grâce de Rome. Il était iduméen
[ndlr : tribu sémitique], et non fils
de David. Mais, surtout, par sa cruauté inouïe, il était une caricature de
cette royauté qui avait été promise à David. L'ange annonce que Dieu n'a pas
oublié sa promesse ; maintenant, dans l'enfant que Marie concevra par
l'œuvre de l'Esprit Saint, elle se réalisera. « Son règne n'aura pas de fin
», dit Gabriel à Marie.
Au IVe
siècle, cette phrase a été insérée dans le Credo de
Nicée-Constantinople — au moment où le règne de Jésus de Nazareth embrassait
désormais le monde entier du bassin méditerranéen. Nous chrétiens, nous
savons et professons avec gratitude : oui, Dieu a réalisé sa promesse. Le
règne du Fils de David, Jésus, s'étend « d'une mer à l'autre », d'un
continent à l'autre, d'un siècle à l'autre.
Certes, la parole de Jésus à Pilate demeure aussi toujours
vraie : « Mon royaume n'est pas d'ici » (Jn 18, 36). Parfois, au
cours de l'histoire, les puissants de ce monde le tirent à eux ; mais il est
alors justement en danger : ils veulent associer leur pouvoir au pouvoir de
Jésus, et ainsi ils déforment son règne, le menacent. Ou bien il est soumis
à la persécution insistante de la part des dominateurs qui ne tolèrent aucun
autre règne et désirent éliminer le roi sans pouvoir, dont ils craignent
toutefois le pouvoir mystérieux.
Mais « son règne n'aura pas de fin » : ce règne différent
n'est pas construit sur un pouvoir mondain, mais il se fonde uniquement sur
la foi et sur l'amour. Il est la grande force de l'espérance dans un monde
qui semble si souvent être abandonné de Dieu. Le règne du Fils de David,
Jésus, ne connaît pas de fin, parce qu'en lui règne Dieu lui-même, parce
qu'en lui le règne de Dieu entre en ce monde. La promesse que Gabriel a
transmise à la Vierge Marie est vraie. Elle s'accomplit toujours de nouveau.
La réponse de Marie, à laquelle maintenant nous parvenons, se
développe en trois temps. La première réaction au salut de l'ange est faite
de trouble et de réflexion. Sa réaction est différente de celle de Zacharie.
De lui, on rapporte qu'il se troubla et que « la crainte fondit sur lui » (Lc
1, 12). Dans le cas de Marie, au début la même parole est utilisée (elle
fut troublée), toutefois ensuite il n'y a pas de crainte, mais une réflexion
intérieure sur la salutation de l'ange. Marie réfléchit (entre en dialogue
avec elle-même) sur ce que signifie le salut du messager de Dieu. Déjà ici
émerge ainsi un trait caractéristique de l'image de la Mère de Jésus, un
trait que nous rencontrons dans l'Evangile à deux autres reprises dans des
situations analogues : l'intérieur se confronte à la parole (cf. Lc 2,
19, 51).
Elle ne s'arrête pas au premier trouble devant la proximité
de Dieu par son ange, mais elle cherche à comprendre. Marie apparaît donc
comme une femme courageuse qui, même face à l'inouï, maintient sa maîtrise
d'elle-même. En même temps, elle est présentée comme une femme de grande
intériorité, qui tient ensemble le cœur et la raison et cherche à comprendre
le contexte, l'ensemble du message de Dieu. De cette
façon, elle devient image de l'Église qui réfléchit sur la parole de Dieu,
qui cherche à la comprendre dans son ensemble et en conserve le don dans sa
mémoire.
La deuxième réaction de Marie est énigmatique pour nous. À la
suite de l'incertitude songeuse avec laquelle elle avait accueilli le salut
du messager de Dieu, l'ange lui avait en effet communiqué son élection à
devenir la Mère du Messie. Alors Marie pose une question brève et incisive :
« Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d'homme ? » (Lc 1,
34).
Considérons de nouveau la différence par rapport à la réponse
de Zacharie, qui avait réagi par un doute en ce qui concernait la
possibilité de la tâche qui lui était confiée. Comme Elisabeth, il était
d'un âge avancé ; il ne pouvait plus espérer avoir un fils. En revanche,
Marie ne doute pas. Elle ne pose pas de question sur le « quoi », mais sur
le « comment » peut se réaliser la promesse, cela n'étant pas concevable
pour elle : « Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d'homme ? »
Cette question paraît incompréhensible, parce que Marie était fiancée et,
selon le droit judaïque, elle était considérée désormais comme assimilée à
une épouse, même si elle n'habitait pas encore avec son mari et que la
communion matrimoniale n'était pas encore commencée.
À partir d'Augustin, la question a été expliquée dans le sens
que Marie aurait fait un vœu de virginité et aurait mis en application les
fiançailles seulement pour avoir un protecteur de sa virginité. Mais cette
reconstitution sort totalement du monde du judaïsme du temps de Jésus et
semble impensable dans ce contexte. Que signifie alors cette parole ? Aucune
réponse convaincante n'a été trouvée par l'exégèse moderne. On dit que
Marie, qui n'était pas encore introduite à la maison, n'aurait pas encore eu
de contact à ce moment avec un homme et aurait considéré la tâche comme
immédiatement urgente. Cependant, cela ne convainc pas, parce que le temps
de la cohabitation ne pouvait plus être très lointain. D'autres exégètes
tendent à considérer la phrase comme une construction purement littéraire,
pour développer le dialogue entre Marie et l'ange. Cependant cela n'est pas
une véritable explication de la phrase. On pourrait aussi rappeler que,
selon l'usage judaïque, les fiançailles étaient exprimées unilatéralement
par l'homme, et on ne demandait pas son consentement à la femme. Mais cette
indication ne résout pas non plus le problème.
Subsiste donc l'énigme - ou disons peut-être mieux : le
mystère de cette phrase. Marie, pour des motifs qui ne nous sont pas
accessibles, ne voit aucun chemin qui lui permette de devenir mère du Messie
selon le mode du rapport conjugal. L'ange lui confirme qu'elle ne sera pas
mère par la manière normale après avoir été accueillie dans la maison de
Joseph, mais par « l'ombre de la puissance du
Très-Haut », grâce à l'arrivée de l'Esprit Saint, et il atteste avec
force : « Rien n'est impossible à Dieu » (Lc
1, 37).
À cela succède la troisième réaction, la réponse essentielle
de Marie : son simple « oui ». Elle se déclare servante du Seigneur. « Qu'il
m'advienne selon ta parole » (Lc 1, 38).
Bernard de Clairvaux, dans une homélie
de l'Avent, a illustré de façon dramatique l'aspect émouvant de ce moment.
Après l'échec des ancêtres, le monde entier est assombri, sous la domination
de la mort. Maintenant Dieu cherche une nouvelle entrée dans le monde. Il
frappe à la porte de Marie. Il a besoin de la liberté humaine. Il ne peut
racheter l'homme, créé libre, sans un libre « oui » à sa volonté. En
créant la liberté, Dieu, d'une certaine manière, s'est rendu dépendant de
l'homme. Son pouvoir est lié au « oui » non forcé d'une personne humaine.
Ainsi Bernard montre comment, au moment de la demande à Marie, le ciel et la
terre, pour ainsi dire, retiennent leur souffle. Dira-t-elle « oui » ? Elle
tergiverse... Peut-être son humilité lui sera-t-elle un obstacle ? Pour
cette unique occasion - lui dit Bernard — ne sois pas humble, mais magnanime
! Donne-nous ton « oui » ! C'est là le moment décisif où de ses lèvres, de
son cœur, vient la réponse : « Qu'il m'advienne selon
ta parole. » C'est le moment de l'obéissance libre, humble et en même
temps magnanime, où se réalise la décision la plus haute de la liberté
humaine.
Marie devient mère par son « oui ». Les Pères de l'Église ont
parfois exprimé tout cela en disant que Marie aurait conçu par l'oreille -
c'est-à-dire : par son écoute. À travers son obéissance, la Parole est
entrée en elle et, en elle, elle est devenue féconde. Dans ce contexte, les
Pères ont développé l'idée de la naissance de Dieu en nous à travers la foi
et le Baptême, par lesquels le Logos vient toujours à nous de
nouveau, en nous rendant enfants de Dieu. Pensons, par exemple, aux paroles
de saint Irénée : « Comment l'homme ira-t-il à Dieu, si Dieu n'est pas venu
à l'homme ? Comment les hommes déposeront-ils la naissance de mort, s'ils ne
sont pas régénérés, par le moyen de la foi, dans la naissance nouvelle qui
fut donnée de façon merveilleuse et inattendue par Dieu en signe de salut,
celle qui eut lieu du sein de la Vierge » (Adv. haer. IV 33, 4 ; cf.
H. Rahner, p. 23).
Je pense qu'il est important d'écouter également la dernière
phrase du récit lucanien de l'Annonciation : « Et l'ange la quitta » (Lc
1, 38). La grande heure de la rencontre avec le messager de Dieu, dans
laquelle toute la vie change, passe, et Marie reste seule avec la tâche qui,
en vérité, dépasse toute capacité humaine. Il n'y a pas d'anges autour
d'elle. Elle doit continuer le chemin qui passera à travers de nombreuses
obscurités - à commencer par le désarroi de Joseph face à sa grossesse
jusqu'au moment où Jésus sera déclaré « hors de sens » (Mc 3, 21 ;
cf. Jn 10, 20), et même, jusqu'à la nuit de la Croix.
De nombreuses fois dans ces situations, Marie se sera
intérieurement reportée au moment où l'ange de Dieu lui avait parlé, elle
aura entendu de nouveau et médité le salut, « Réjouis-toi, comblée de grâce
! », et la parole de réconfort : « Sois sans crainte ! » L'ange s'en va, la
mission demeure et avec elle mûrit la proximité intérieure avec Dieu, la
vision intime et la perception de sa proximité.
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Sources :Texte original des écrits du Saint Père Benoit XVI -
E.S.M.
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Eucharistie sacrement de la miséricorde -
(E.S.M.) 06.03.2023